Il s’agit d’une série de cas qui vise à évaluer les résultats à 10 ans de la première série de kératoplastie lamellaire endothélio-déscemétique (DMEK) et à évaluer l'influence de la courbe d'apprentissage de la technique chirurgicale sur les résultats finaux.
Name
Suivi à long terme de la kératoplastie endothéliale de la membrane de Descemet (DMEK)
Introduction
Matériels et Méthodes
Au total, 41 yeux opérés de DMEK ayant été suivis jusqu’à 10 ans ont été inclus. Le nombre préopératoire de cellules endothéliales du donneur, la durée de préparation et de déploiement du greffon ont été recueillis. La meilleure acuité visuelle corrigée postopératoire [MAVC], la densité cellulaire endothéliales centrale [DCE] et la pachymétrie centrale [CCT] ont été évaluées et les complications postopératoires ont été documentées. Les patients ont été répartis en 2 groupes selon le temps opératoire (> ou < 30 minutes).
Résultats
Au dernier suivi, 50 % des patients avaient une MAVC de 20/25 ou plus. La CCT moyenne a diminué de 674mm en préopératoire à 515mm à 6 mois et 540mm au dernier suivi. La DCE préopératoire du donneur a diminué de 59 % à 6 mois et de 67 % à 10 ans après l'opération. Les patients dont l'intervention a duré plus de 30 minutes n'ont pas présentés une différence significative de la pachymétrie moyenne ni de l’acuité visuelle par rapport aux patients dont l'intervention a duré moins de 30 minutes. Le rebullage postopératoire a augmenté la perte endothéliale au cours des 6 premiers mois, mais n'a pas affecté la DCE à long terme. En 10 ans, un seul échec primaire a été noté et 8 yeux (19%),dont 6 ayant une atteinte sévère du segment antérieur, ont développé un échec secondaire.
Discussion
Des études antérieures ont montré que sur 5 ans, l'acuité visuelle et les valeurs de la DCE étaient stables et que le taux de survie du greffon était de 95 % [1]. Melles et al. ont constaté que l'acuité visuelle s'améliorait jusqu'à 36 mois puis plafonnait[2]. Ils ont décrit une perte endothéliale d'environ 7% par an après la première année, atteignant 68% à 10 ans, similaire à notre cohorte. Weller et al. ont trouvé une perte cellulaire annuelle de 3 % entre la 1ère et la 10ème année après la chirurgie[1]. Néanmoins, même si une DCE critique d'environ 500 cellules/mm2 est atteint, la physiologie cornéenne peut compenser l'hydratation stromale et maintenir la transparence cornéenne [3]. Notre cohorte confirme cette hypothèse puisque la pachymétrie, fortement corrélée à la transparence cornéenne [4], n'était pas significativement différente entre 6 mois et 10 ans (p=0,15), malgré que 38 % des patients avaient une DCE de 500-550 cellules/mm2 au moment du dernier suivi. À notre connaissance, il s'agit de la première étude qui évalue l'impact à long terme de la courbe d'apprentissage de la DMEK sur le pronostic. Dans notre cohorte, la courbe d'apprentissage chirurgicale n'a pas affecté la récupération visuelle ni anatomique durant les 10 ans de suivi (p>0,05) : les patients dont la chirurgie a duré plus ou moins de 30 minutes avaient une acuité visuelle et une pachymétrie similaires à tous les temps de suivi. L'échec secondaire du greffon était surtout lié aux comorbidités oculaires telles qu'un traumatisme du segment antérieur, un glaucome secondaire et des multi-opération préalables.
Conclusion
La DMEK est un traitement efficace à long terme des maladies endothéliales cornéennes. A priori, la courbe d'apprentissage ne retarde pas la récupération et n'affecte pas le pronostic à long terme. Le taux de complications postopératoires et l'échec du greffon sont principalement liés à la présence de comorbidités oculaires.