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Chapitre 6
Toxicologie

6.1. Toxicité oculaire des médicaments administrés par voie systémique

A. DaruichA. TorrigliaF. Behar-CohenF. Chast

L'essentiel
  • En dehors de grandes classes de médicaments connues historiquement pour induire des toxicités oculaires, il existe de nombreux médicaments prescrits par d'autres spécialistes, capables d'induire des effets indésirables oculaires.
  • Ces effets sont souvent ignorés avant que le médicament ne soit commercialisé et parfois encore des années plus tard.
  • L'ophtalmologiste porte la responsabilité d'attirer l'attention et de rapporter des effets oculaires, potentiellement en lien avec une prise médicamenteuse. Les déclarations de pharmacovigilance sont essentielles pour identifier ces effets et les imputer de façon certaine au médicament.
  • Le nouvelles classes de médicaments et en particulier les biothérapies peuvent induire des effets indésirables oculaires insoupçonnés.
  • Interroger les patients, connaître les effets décrits et participer à la description de nouveaux effets incombe à l'ophtalmologiste.
Introduction
Un effet indésirable est une réaction nocive et non voulue, suspectée d'être due à un médicament, survenant dans les conditions d'utilisation, conforme ou non conforme, aux termes de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) ou en cas d'usage hors AMM, de surdosage, de mésusage, d'abus, d'erreur médicamenteuse, d'interaction, lors d'une prise pendant la grossesse, l'allaitement et lors d'une exposition professionnelle.
Bien que ces effets soient parfois identifiés dès le stade des essais cliniques, le médicament doit être commercialisé et utilisé à grande échelle pour que le profil complet des effets indésirables soit mis en lumière. Quand un effet indésirable est rare, la pharmacovigilance devient une discipline délicate et un praticien éclairé doit être en alerte quand il observe un signe clinique inhabituel dans le cadre du développement d'une maladie.
Les médicaments administrés de manière systémique (par voie orale, intraveineuse, intramusculaire, sous-cutanée, percutanée, etc.) peuvent provoquer une toxicité oculaire directe. Les médicaments lipophiles pénètrent plus facilement les structures oculaires car ils traversent les barrières hématorétiniennes. Une fois dans l'œil, les substances chimiques peuvent s'accumuler dans les tissus oculaires [1], en particulier dans les pigments, où les substances peuvent interagir avec d'autres molécules ou avec la lumière, en potentialisant leur toxicité. Des cellules métaboliquement très actives comme l'épithélium pigmentaire agissent sur la biotransformation des médicaments via le système des cytochromes P-450, système hautement « patient-dépendant». Cette variabilité interindividuelle peut accroître la variabilité des effets toxiques des médicaments, malgré la mise en œuvre de schémas posologiques adaptés [ 2].
En raison de leur compétence particulière, les ophtalmologistes sont souvent les premiers à constater des effets indésirables oculaires (EIO). Ils sont encouragés à signaler tout EIO suspecté à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), au centre régional de pharmacovigilance (CRPV) dont ils dépendent, et au fabricant du médicament suspecté. Selon le Code de la santé publique, « tout médecin, […] quel que soit son mode ou son secteur d'exercice, doit déclarer tout effet indésirable, dont il a connaissance, au CRPV dont il dépend géographiquement. […] Tout établissement de santé, y compris les établissements médico-sociaux, doit mettre en œuvre les moyens nécessaires pour que les professionnels de santé déclarent les effets indésirables des médicaments dont ils ont connaissance auprès d'un CRPV».
Les efforts des cliniciens, en phase post-AMM, sont essentiels pour identifier les risques avérés ou supposés qui auraient pu passer à travers le filet de la pharmacovigilance lors des essais cliniques pré-AMM [3]. Pour tenter de remédier à l'insuffisance des données, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a développé une classification utile à la mise en œuvre des actions de pharmacovigilance (tableau 6-1
Tableau 6-1
Évaluation de la causalité des effets indésirables suspectés d'un médicament – définitions de l'OMS (d'après [4]).
Évaluation des événements des effets indésirablesDéfinition
CertainÉvénement clinique lié à l'administration d'un médicament qui ne peut pas s'expliquer autrement par une maladie concomitante ou d'autres médicaments ou substances chimiques
Probable/vraisemblableÉvénement clinique survenant dans un délai compatible avec l'introduction du médicament, événement peu susceptible d'être attribué à une maladie concomitante ou à d'autres médicaments ou substances chimiques
PossibleÉvénement clinique survenant dans un délai compatible avec l'initiation du médicament, mais qui pourrait également s'expliquer par une maladie concomitante ou d'autres médicaments ou substances chimiques
Peu probableÉvénement clinique qui n'est pas nécessairement lié à l'initiation du médicament, de sorte qu'une relation causale semble improbable et pour laquelle d'autres médicaments, substances chimiques ou maladies sous-jacentes peuvent constituer des explications plausibles
Conditionnel/non classéÉvénement clinique signalé comme un effet indésirable, pour lequel davantage de données sont nécessaires pour une évaluation appropriée ou si les données supplémentaires sont en cours de traitement
Impossible d'évaluerNotification invérifiable suggérant un effet indésirable mais avec l'impossibilité matérielle ou fonctionnelle de le classer comme « en rapport avec un médicament ou une substance chimique»
). Cette classification permet d'identifier une association provisoire d'EIO avec l'utilisation d'un médicament, une relation dose-réponse, à la fois un « déchallenge» positif (arrêt du médicament conduisant à la diminution de l'effet indésirable) et un « rechallenge» positif (réexposition au médicament conduisant à la réapparition de cet effet). Pour des raisons éthiques, la réintroduction est rarement envisagée, de telle sorte que l'imputabilité d'un effet indésirable est difficilement établie de manière absolue.
Déterminants des effets indésirables des médicaments
Quantité de médicament administrée
Tous les médicaments peuvent provoquer des effets toxiques lorsqu'ils sont administrés en quantité excessive. Mais des concentrations de médicaments peuvent être toxiques même lorsque les doses quotidiennes se situent dans les limites thérapeutiques acceptables en cas d'administration prolongée ou lorsque d'autres médicaments sont susceptibles de potentialiser les effets toxiques, ou lorsque la détoxification médicamenteuse est ralentie, par exemple en cas d'interaction médicamenteuse ou d'insuffisance rénale. L'exemple le plus classique est celui de la chloroquine. Lorsque celle-ci était utilisée comme antipaludéen, les complications oculaires étaient rares car la posologie était faible; en revanche, dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde ou du lupus érythémateux disséminé, des doses plus importantes de chloroquine ont été administrées et des atteintes rétiniennes irréversibles ont été observées.
Nature du médicament
La facilité avec laquelle un médicament passe dans la circulation systémique et sa capacité de pénétrer dans le cerveau, ou de traverser les barrières rétiniennes déterminent sa propension à affecter les tissus et fonctions oculaires [ 5]. Certains médicaments se liant à la mélanine peuvent entraîner une toxicité oculaire, comme les agents psychotropes tels que la chlorpromazine (voir chapitre 1.6 ) [6]. Mais certains médicaments peuvent se lier à des structures oculaires par d'autres mécanismes; c'est le cas de la digitaline qui s'accumule dans la rétine et le corps ciliaire. D'autres médicaments peuvent produire des EIO par leur pharmacologie systémique. Par exemple, des hémorragies sous-conjonctivales ou rétiniennes peuvent être causées par l'utilisation d'agents modificateurs de l'hémostase tels que l'héparine ou l'aspirine, ou d'un traitement hormonal substitutif ou de contraceptifs oraux [7].
Voie d'administration
Toutes les voies d'administration des médicaments peuvent affecter les structures et fonctions oculaires, même si une majorité d'EIO sont associés à des administrations ophtalmiques ou péri-oculaires [ 8]. L'administration systémique de médicaments par voie orale est, compte tenu de sa fréquence, souvent impliquée dans le développement d'EIO, bien que les voies parentérale, pulmonaire et cutanée puissent également exposer à des EIO [9].
Variables physiopathologiques
Une maladie systémique peut modifier la façon dont un patient métabolise et élimine un médicament toxique. Une insuffisance hépatique ou une insuffisance rénale, en particulier, peuvent influencer de façon marquée l'impact toxique d'un médicament en raison du risque d'accumulation associé. La vitesse d'excrétion de la digoxine, par exemple, est considérablement réduite chez l'insuffisant rénal, entraînant ainsi un risque accru d'altérations de la vision des couleurs.
Âge et sexe
Les effets indésirables étant davantage susceptibles de se produire aux âges extrêmes, une posologie bien adaptée est indiquée chez l'enfant comme chez le sujet âgé. La mise en perspective des diagnostics et des traitements en cours est importante pour minimiser le nombre de médicaments administrés. Il faut également veiller à déterminer si des compléments alimentaires et des produits à base de plantes font partie des habitudes des patients [10]. On rapporte davantage de réactions systémiques indésirables aux médicaments chez les femmes par rapport aux hommes, bien qu'il ne soit pas évident que cette observation s'applique également aux EIO. Parmi les facteurs qui peuvent expliquer cette disparité, le volume de distribution en lien avec le volume corporel, l'impact de changements hormonaux au cours du cycle et l'utilisation de contraceptifs oraux et d'autres médicaments utilisés sélectivement ou principalement par les femmes peuvent constituer autant de facteurs de risque [11].
Traitements médicamenteux multiples, drogues récréatives, compléments alimentaires et phytothérapie
En général, l'incidence des effets indésirables augmente avec le nombre de médicaments administrés. L'impact des compléments alimentaires est probablement sous-estimé, comme la consommation de plantes, voire d'autres substances récréatives. Avec l'augmentation du nombre de xénobiotiques consommés par les patients, les effets indésirables sont présumés être à la fois plus nombreux et plus difficiles à isoler [ 12]. Les « habitudes sociales», y compris l'alcool, l'usage de drogues et le tabagisme, devraient également être prises en considération. Ces agents peuvent altérer l'absorption, la distribution, la biotransformation ou l'excrétion des médicaments.
Antécédents d'allergie aux médicaments
Les réactions allergiques ne sont généralement pas dose-dépendantes. Elles sont fréquentes et souvent imprévisibles. Les structures oculaires les plus touchées sont les paupières et les conjonctives. De nombreux médicaments, y compris les pénicillines et les sulfamides, peuvent provoquer un gonflement des paupières et de la conjonctive dans le cadre d'une urticaire généralisée ou d'un œdème de Quincke. D'autres médicaments sont impliqués dans les réactions allergiques oculaires comme les antidépresseurs, les antipsychotiques, les antihypertenseurs, les antirhumatismaux, les sédatifs et les hypnotiques.
Diagnostic et prise en charge des effets indésirables oculaires dus aux médicaments systémiques
Une relation chronologique entre l'administration du médicament et les signes ou symptômes oculaires est l'un des premiers pas en direction du diagnostic. Le « déchallenge » fait référence à l'élimination du médicament incriminé dans le régime thérapeutique avec l'observation d'une disparition concomitante de l'EIO. Quant au « rechallenge », il fait référence au retour de l'effet indésirable lors de la réintroduction du médicament. Le praticien doit se familiariser avec les effets oculaires possibles de tous les médicaments que les patients peuvent prendre en dehors de l'« ordonnance ophtalmologique», et être prêt à rechercher dans la littérature scientifique les effets déjà décrits et les stratégies mises en place pour leur bonne prise en charge [13].
Médicaments affectant la cornée et le cristallin
Les médicaments administrés par voie systémique peuvent atteindre la cornée et le cristallin via le film lacrymal, le système vasculaire limbique et l'humeur aqueuse. De nombreux médicaments ont été associés à des opacités du cristallin [ 14] et à une kératopathie épithéliale, tandis que le stroma cornéen est beaucoup moins fréquemment atteint. Les médicaments responsables de ces effets indésirables sont répertoriés dans le tableau 6-2
Tableau 6-2
Principaux médicaments pouvant affecter la cornée et le cristallin (d'après [15]).
MédicamentEffet indésirable
Effets indésirables sur la cornée
CorticoïdesDiminution de la cicatrisation épithéliale, risque accru d'infection
Chloroquine et hydroxychloroquineOpacités épithéliales en forme de verticille (également appelées kératopathies en vortex)
AmiodaroneOpacités en forme de verticille ou cornea verticillata
AtovaquoneOpacités en forme de verticille ou cornea verticillata
TamoxifèneOpacités en forme de verticille (rares) ou cornea verticillata
ChlorpromazinePigmentation de l'endothélium et de la membrane de Descemet
IndométacineOpacités stromales ou cornea verticillata
IsotrétinoïneOpacités cornéennes, kératite ponctuée superficielle, néovascularisation (rare)
Cocaïne, crackUlcération, défauts épithéliaux, perte de sensibilité cornéenne
Effets indésirables sur le cristallin
AmiodaroneOpacités sous-capsulaires antérieures
ChlorpromazineCataracte sous-capsulaire antérieure en forme d'étoile
CorticoïdesCataracte sous-capsulaire postérieure
Psoralène (8-méthoxypsoralène)Cataracte induite par les ultraviolets
.
Les kératopathies en vortex ou cornea verticillata sont généralement associées à une accumulation intralysosomale de lipides. Ce mécanisme est similaire à celui de la maladie de Fabry, maladie génétique du métabolisme des sphingolipides.
Corticoïdes
Les effets indésirables oculaires des corticoïdes les plus courants sont l'augmentation de la pression intraoculaire (PIO) et le développement d'une cataracte, mais le retard à la cicatrisation épithéliale cornéenne et un risque accru d'infection cornéenne en raison de l'immunodépression iatrogène et la diminution du lysozyme lacrymal doivent également être pris en compte [16].
La cataracte est sous-capsulaire postérieure (SCP) ou nucléaire, peut être diffuse, granuleuse, striée ou annulaire. L'utilisation de glucocorticoïdes topiques, ophtalmiques, dermatologiques ou systémiques, ou des aérosols nasaux ou par inhalation peuvent favoriser l'apparition d'opacités sous-capsulaires. La formation d'une cataracte SCP est irréversible et dépend de la dose administrée. Le délai habituel d'apparition est de 12 mois avec une dose de 10 mg/jour de prednisone, bien qu'elle ait pu être observée après l'utilisation de plus faibles doses (5 mg/jour pendant 2 mois). L'incidence des cataractes liées aux corticoïdes administrés par voie orale varie de 6,4 % à 38,7 % des cas. Il est possible que la formation d'une cataracte SCP puisse être davantage liée à des facteurs de susceptibilité individuelle qu'aux seuls facteurs pharmaco-toxicologiques [17-18-19].
Les « cures courtes» de glucocorticoïdes systémiques réduisent le risque de cataracte.
Chloroquine et hydroxychloroquine
La chloroquine et l'hydroxychloroquine sont des médicaments utilisés pour la prise en charge chronique des rhumatismes comme la polyarthrite rhumatoïde, le lupus érythémateux discoïde ou disséminé, et d'autres maladies du collagène [ 20].
La kératopathie à l'hydroxychloroquine et à la chloroquine évolue sur trois stades de sévérité croissante. Aux premiers stades, de fins dépôts diffus apparaissent dans l'épithélium cornéen. Plus tard, les dépôts s'agrègent en lignes convergentes et fusionnent juste en dessous de la cornée centrale. Enfin, des taches pigmentaires vert-jaune apparaissent comme des lignes concentriques dans une opacité « spiroïdale». Les dépôts cornéens peuvent être observés dès 2 à 6 semaines après le début du traitement, sans lien avec la survenue d'une rétinopathie. La kératopathie est assez peu fréquente chez les patients sous traitement par hydroxychloroquine (1 % à 28 % selon les études) contre jusqu'à 95 % de ceux qui sont sous chloroquine. Des doses inférieures à 400 mg/jour d'hydroxychloroquine ne présentent généralement pas de risque de kératopathie. À des doses plus élevées (800 mg/jour), 6 % des patients ont développé une kératopathie dans les 6 mois qui ont suivi le début du traitement, 32 % pendant le semestre suivant, et tous les patients avaient une kératopathie après 4 ans. En réduisant la dose ou en arrêtant le médicament, les opacités cornéennes diminuent ou disparaissent, en moyenne au bout de 8 mois. Moins de la moitié des patients porteurs d'atteintes cornéennes ont des symptômes visuels, tels que des halos lumineux, des éblouissements et de la photophobie, alors que l'acuité visuelle reste généralement inchangée. Les symptômes disparaissent avec l'arrêt du médicament [21].
La kératopathie à la chloroquine est relativement bénigne et ne contre-indique pas la poursuite du médicament.
Chlorpromazine
Les phénothiazines, et particulièrement la chlorpromazine, sont des médicaments psychotropes (antipsychotiques) qui peuvent provoquer des dépôts pigmentaires au niveau du cristallin et de la cornée [ 22 , 23]. Ces modifications peuvent devenir permanentes si le médicament n'est pas arrêté rapidement.
Une cataracte nucléaire ou sous-capsulaire antérieure et des dépôts pigmentaires cornéens sont observés. Cette pigmentation est blanche, jaune-blanc, brune ou noire et se produit au niveau de l'endothélium et de la membrane de Descemet (rarement au niveau du stroma). L'acuité visuelle est rarement réduite.
Les dépôts pigmentaires commencent comme de fines ponctuations au niveau du cristallin et progressent en cinq étapes évoluant vers une masse centrale, nacrée et opaque entourée par de plus petits amas de pigments (tableau 6-3
Tableau 6-3
Classement et/ou progression des opacités lenticulaires liées à la chlorpromazine.
GradeCaractéristiques
Grade I Opacités fines en forme de points sur la surface antérieure du cristallin. À ce stade, les dépôts pigmentaires sont petits et tendent à assumer une distribution disciforme au sein de l'aire pupillaire
Grade II Opacités en forme de points qui sont plus opaques et plus denses qu'au grade I. Les granules pigmentaires peuvent commencer à réaliser un motif étoilé
Grade III Les plus gros granules de pigment vont du blanc au jaune en passant par le brun avec une étoile sous-capsulaire antérieure, motif facilement reconnaissable. Le motif étoilé a une zone centrale dense avec des branches rayonnantes
Grade IVLe motif étoilé est facilement visible avec trois à neuf branches d'étoile. Il peut être observé avec une lampe-stylo, et le diagnostic ne nécessite pas nécessairement un examen à la lampe à fente
Grade VOn observe une masse centrale, légèrement pigmentée, ressemblant à une perle, opaque entourée de petits amas de pigment
).
Habituellement, les modifications pigmentaires cornéennes et lenticulaires sont liées à la durée du traitement et à la dose totale reçue, et une réduction ou l'arrêt du traitement n'inverse pas le phénomène.
Une toxicité cornéenne a été signalée dans les 6 mois suivant le traitement chez :
  • 90 % des patients lorsque la dose totale dépasse 2500 g;
  • 12 % des patients recevant 2000 mg de chlorpromazine par jour;
  • 1 % des patients ne recevant que 300 mg par jour.
Parce que certaines situations psychiatriques peuvent nécessiter des doses quotidiennes dépassant 800 mg, une pigmentation lenticulaire peut apparaître après 14 à 20 mois de traitement.
Les patients recevant un traitement par chlorpromazine doivent être surveillés chaque année. Si des modifications de la cornée et du cristallin se produisent mais que l'acuité visuelle n'est pas affectée et que le patient reste asymptomatique, la posologie du médicament peut être poursuivie sans modification.
Amiodarone
L'amiodarone est une molécule iodée hautement liposoluble, utilisée pour traiter divers troubles du rythme cardiaque [24]. Sa biodisponibilité est très variable et, surtout, sa demi-vie biologique est très longue. Il a été noté que l'amiodarone provoquait des dépôts cornéens lamellaires, mais aussi des dépôts dans le cristallin, la rétine et le nerf optique [ 25]. Le symptôme le plus courant, observé chez 1,4 % à 40 % des patients traités, est la vision d'anneaux colorés autour des sources lumineuses, attribuée à une kératopathie. Son apparition peut être très précoce, dès le 6 e jour après le début du traitement, mais le plus fréquemment après 1 à 4 mois. Les dépôts cornéens sont bilatéraux mais souvent asymétriques, et on les observe facilement à la lampe à fente. Le développement de la kératoplastie peut être divisé en quatre grades (tableau 6-4
Tableau 6-4
Classification et/ou progression de la kératopathie liée à l'amiodarone.
GradeCaractéristiques de qualité
Grade I (posologie généralement comprise entre 200 et 400 mg/jour) Une ligne horizontale, semblable à une ligne de Hudson-Stähli, apparaît dans la fissure interpalpébrale à la jonction du tiers moyen inférieur de la cornée. Il s'agit de microdépôts grisâtres ou brun-doré dans l'épithélium, devant la membrane de Bowman
Grade II (posologie généralement plus élevée) La transition vers le grade II se produit au bout de 6 mois, période pendant laquelle les dépôts s'alignent selon un schéma plus linéaire ou arborescent et s'étendent vers le limbe
Grade III (posologie ≥ 400 mg et durée > 1 an) Les dépôts augmentent en nombre et en densité, et les lignes s'étendent vers le haut pour produire une forme de spirale dans l'axe visuel
Grade IV Des amas irréguliers et ronds de dépôts se forment
et fig. 6-1
Fig. 6-1
Kératopathies toxiques.
a. Neurokératopathie au valproate. On note l'hypertrophie du réseau nerveux intracornéen (flèches blanches). b. Kératopathie cornea verticillate à l'hydroxychloroquine. On note l'aspect en tourbillon blanc-gris, réversible en partie ou en totalité à l'arrêt de l'intoxication. c. Kératopathie cornea verticillata à l'amiodarone LAF. On note les dépôts linéaires arborescents brunâtres superficiels (flèche rouge). d. Autre vue biomicroscopique du patient. e. OCT de cornée d'une cornea verticillata à l'amiodarone. On note l'accumulation au niveau de la couche de Bowman (hyper-réflectivité; flèche rouge).
Remerciements au Pr J.-L. Bourges.
).
La sévérité de la kératopathie apparaît très corrélée à la dose totale et à la durée du traitement. En général, les patients prenant de faibles doses de médicaments (100 à 200 mg par jour) conservent des cornées claires ou ne montrent qu'une kératopathie légère quelle que soit la durée du traitement ou le dosage cumulé. Les patients prenant des doses plus élevés (400 à 1400 mg par jour) présentent une kératopathie plus avancée en fonction de la durée du traitement. Une fois la kératopathie développée, elle reste relativement stationnaire jusqu'à ce que la dose de médicament soit réduite ou que le médicament soit arrêté. La kératopathie disparaît alors progressivement en 3 à 20 mois après l'arrêt du traitement médicamenteux. Des opacités du cristallin induites par l'amiodarone ont également été signalées chez environ 50 % des patients prenant de l'amiodarone à la dose de 600 à 800 mg par jour, après 6 à 18 mois de traitement. Les changements cornéens et lenticulaires associés à l'amiodarone étant bénins, un suivi particulier des patients affectés n'est pas nécessaire à moins que les opacités n'aient un impact sur la fonction visuelle. Si les symptômes visuels sont significatifs, une réduction de posologie ou l'arrêt du médicament permettent de résoudre les lésions cornéennes. L'utilisation de verres filtrants les ultraviolets peut constituer une mesure préventive.
Atovaquone
L'atovaquone est un médicament antiparasitaire utilisé pour traiter certaines infections pulmonaires chez les patients intolérants au triméthoprime-sulfaméthoxazole. Elle peut provoquer une kératopathie verticillée chez les patients sensibles. Les manifestations cliniques sont similaires à d'autres kératopathies en vortex. L'examen à la lampe à fente révèle des motifs bilatéraux en forme de verticille impliquant l'épithélium cornéen central et inférieur, avec un stroma et un endothélium normaux. Cette kératopathie disparaît une fois le traitement interrompu, le risque de déficience visuelle à long terme restant minimal.
Indométacine
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont couramment utilisés pour leurs propriétés analgésiques, anti-inflammatoires et antipyrétiques. Bien que ces médicaments soient largement utilisés et souvent pendant de longues périodes, les effets indésirables oculaires sont rares. Cependant, l'indométacine a été associée à des anomalies conjonctivales, des opacités cornéennes et une vision floue, une névrite optique, des modifications rétiniennes telles que des hémorragies et une hypertension intracrânienne [ 26].
La prévalence de la toxicité cornéenne de l'indométacine (dont le mécanisme est inconnu) est de l'ordre de 11 % à 16 % lors de traitements de plus d'une semaine. Elle est plus fréquente lors de traitements au long cours, en forme de verticille. Des opacités cornéennes ont été notées chez les patients prenant de l'indométacine pendant 12 à 18 mois, à une posologie quotidienne allant de 75 à 200 mg et une dose totale allant de 20 à 70 g. Ces modifications cornéennes peuvent diminuer ou disparaître dans les 6 mois suivant l'arrêt du traitement. En général, les seuls EIO liés à ce médicament pouvant justifier son arrêt sont la névrite optique et l'hypertension intracrânienne.
Isotrétinoïne
Analogue de la vitamine A, l'isotrétinoïne, ou acide 13-cis-rétinoïque, est utilisée pour traiter l'acné sévère et d'autres dermatoses kératinisantes [27]. Ses effets indésirables comprennent des troubles de la sécrétion des glandes de Meibomius, voire une atrophie des glandes, une augmentation de l'osmolarité du film lacrymal, une blépharoconjonctivite et une kératite avec des opacités cornéennes et une baisse de l'acuité visuelle. La suppression de l'activité des glandes de Meibomius réduit la couche lipidique normale du film lacrymal et favorise ainsi l'évaporation de la couche aqueuse. Des signes de sécheresse oculaire, suivis de lésions épithéliales et sous-épithéliales sont fréquents. Les symptômes d'inconfort, la gêne oculaire, la photophobie et la diminution de la tolérance au port de lentilles de contact sont liés à la sécheresse oculaire. Des complications oculaires se manifestent, en général, dans les 4 semaines suivant l'initiation du traitement et diminuent environ 4 semaines après son arrêt. Les symptômes sont dose-dépendants, et observés chez 20 % des patients prenant 1 mg/kg/jour et chez 43 % des patients prenant 2 mg/kg/jour. Une kératite épithéliale est fréquente au-delà de 2 mg/kg. Des opacités cornéennes sous-épithéliales peuvent survenir, et si l'axe visuel est impliqué, la vision peut être altérée.
La diminution de la dose ou l'arrêt du traitement atténuent généralement les EIO chez la plupart des patients. Des larmes artificielles peuvent être utilisées pour améliorer la sécheresse oculaire. Bien que la plupart des symptômes soient résolutifs à l'arrêt du traitement, les glandes de Meibomius peuvent, dans de rares cas, présenter une atrophie irréversible et les symptômes peuvent donc se prolonger dans le temps.
Médicaments photosensibilisants
Les médicaments photosensibilisants sont des composés qui absorbent les rayonnements lumineux (UV et visible) et subissent une réaction photochimique, ce qui entraîne des modifications moléculaires dans les tissus voisins [ 28]. Communément appelé PUVA-thérapie , ce traitement associe l'administration de 8-méthoxypsoralène ou de composés apparentés, suivie d'une exposition aux rayons UV (320 à 400 nm) pendant de courtes périodes. Les réactions photosensibilisantes les plus fréquentes impliquent la peau et les yeux. La formation d'une cataracte est également bien documentée chez les patients bénéficiant de PUVA-thérapie, mais l'acuité visuelle n'est généralement pas affectée.
Les yeux et la peau peuvent être lésés par l'emploi de rayonnement de longueurs d'onde de 280 à 1400 nm. Le cristallin peut absorber des quantités variables de rayonnement UV et « lier» des médicaments photosensibilisants. Comme le cristallin adulte filtre efficacement la plupart des rayons UV, le risque pour qu'un phénomène analogue de « photo-liaison» intervienne dans la rétine est minime.
Ainsi, pour prévenir le risque de « photo-liaison» permanente de ce médicament, les dermatologues peuvent fournir des lentilles filtrant les UV, d'intérieur et d'extérieur, à utiliser pendant au moins 12 heures avant et après l'administration du médicament. Pour les enfants, ou chez les patients atteints de cataracte préexistante et ceux présentant une augmentation du risque de développer une cataracte, comme les patients ayant une dermatite atopique, une protection de 24 heures est recommandée.
Crack et cocaïne
La cocaïne et le crack sont impliqués dans la formation de lésions cornéennes épithéliales associées aux frottements intempestifs des yeux [ 29]. L'effet anesthésique local qu'ils génèrent conduit souvent à la surinfection de ces lésions. Bien que la cocaïne prise par voie intranasale n'ait pas été détectée dans les larmes, la diminution observée de la sensibilité cornéenne pourrait suggérer qu'elle puisse passer dans les tissus oculaires par transport rétrograde à travers le canal nasolacrymal.
Anticancéreux
Le mirvétuximab soravtansine (anticorps conjugué ciblant le récepteur alpha des folates) est un traitement immunoconjugué utilisé dans le traitement des cancers ovariens résistants aux sels de platine. On a enregistré une toxicité cornéenne avec les symptômes suivants : flou visuel, douleurs ou sensation de corps étranger, larmoiement et photophobie [30]. L'atteinte cornéenne est bien connue lors de l'utilisation des différents anticorps conjugués à disposition dans l'arsenal thérapeutique des oncologues. Ce type de lésion cornéenne avait déjà été décrit notamment avec l'utilisation du bélantamab mafodotin [ 31]. Les lésions sont réversibles et facilement gérables par une réduction de dose ou un décalage de l'injection de l'anticorps conjugué en association avec un traitement topique par collyre corticoïde et agents lubrifiants.
Les inhibiteurs des tyrosines kinases (ITK) peuvent induire des anomalies des cils, des paupières, des troubles de la surface oculaire avec sécheresse oculaire voire érosions cornéennes pouvant aller jusqu'à la perforation. Un cas a été décrit avec le régorafénib : ulcères cornéens bilatéraux compliqués de perforation cornéenne non régressive à l'arrêt du traitement [ 32].
Allopurinol
L'utilisation à long terme de l'allopurinol a également été lié à la formation de cataracte [33].
Médicaments affectant la conjonctive et les paupières (tableau 6-5 )
Isotrétinoïne
La blépharoconjonctivite est considérée comme un risque d'EIO « certain» [ 34 , 35]. Une posologie d'isotrétinoïne de 2 mg/kg par jour entraîne une blépharoconjonctivite chez 43 % des patients dans les 4 semaines suivant le début du traitement, alors qu'une dose de 1 mg/kg réduit son incidence à 20 %. C'est aussi l'EIO le plus fréquent, survenant chez 20 à 50 % des patients. Les symptômes peuvent varier de la simple irritation associée à l'œil sec à un véritable inconfort douloureux. Les symptômes disparaissent dans le mois qui suit l'arrêt du traitement, mais les glandes de Meibomius peuvent présenter des signes irréversibles d'atrophie.
Chlorpromazine
Une décoloration bleu ardoise de la conjonctive et de la sclère peut se produire avec l'administration de dérivés de la phénothiazine. La peau du visage et des paupières peut également être pigmentée, alors que les plis palpébraux peuvent contenir une zone de peau non pigmentée. Les patients exposés à des doses de chlorpromazine allant de 500 à 3000 mg par jour pendant 1 à 6 ans peuvent développer une décoloration de la peau, des paupières et de la conjonctive.
Sulfamides
Les complications oculaires sont rares. On a décrit la formation d'un œdème palpébral, d'un chémosis, d'une uvéite antérieure et de réactions sclérales après l'administration de doses élevées.
Tétracyclines
La tétracycline et son dérivé, la minocycline, sont utilisés pour le traitement de l'acné ou de la rosacée. Les doses varient de 250 à 1500 mg par jour de tétracycline et au moins 100 mg par jour pour la minocycline [36]. Des dépôts conjonctivaux apparaissent sous forme de granules brun foncé à noir dans la conjonctive palpébrale. En plus du pigment, du calcium est également présent dans les kystes. On a émis l'hypothèse que la tétracycline ou ses métabolites formeraient un chélate insoluble (fig. 6-2
Fig. 6-2
Coloration bleuâtre de la sclère (a) et son atténuation 2 mois après l'arrêt du traitement (b).
Source : [37], Al Hussein Al Awamlh S, Taubenslag KJ, Gangaputra S. Minocycline-induced scleral pigmentation. Am J Ophthalmol Case 2022; Rep 26, 101386.
).
Divers autres médicaments affectant la conjonctive et les paupières
Une grande variété d'autres médicaments systémiques peuvent causer des irritations ou des réactions allergiques au niveau de la conjonctive ou des paupières.
  • Les bisphosphonates, utilisés dans le traitement de l'ostéoporose, peuvent provoquer une inflammation oculaire : conjonctivite, épisclérite, sclérite, kératite et uvéite. Le mécanisme exact de cette inflammation oculaire n'est pas connu [38]. Les symptômes cessent à l'arrêt du médicament mais peuvent nécessiter un traitement anti-inflammatoire.
  • Les glucocorticoïdes peuvent provoquer une hémorragie sous-conjonctivale, un œdème des paupières et un ptosis.
  • Les patients prenant de la niacine (traitement d'une hyperlipidémie) montrent une incidence élevée d'œdème des paupières.
  • Les salicylés (aspirine) peuvent provoquer une conjonctivite allergique, qui peut être associée à une urticaire des paupières. Une hémorragie sous-conjonctivale a été rapportée en association avec une utilisation à forte dose d'aspirine et de warfarine.
  • La chloroquine peut être à l'origine d'une ptose.
  • La phénytoïne peut provoquer une conjonctivite chronique.
  • Le cannabis peut entraîner des rougeurs conjonctivales, parfois avec œdème des paupières.
  • L'abus de cocaïne a été associé à un œdème des paupières.
  • Certains médicaments anticancéreux, administrés à forte dose, comme l'aracytine, le cyclophosphamide, le méthotrexate et le 5-fluorouracile, ont été impliqués dans le développement de conjonctivites [ 39]. L'administration de tamoxifène à faible dose est parfois associée à une toxicité sur le segment antérieur. La vincristine, utilisée dans le traitement de leucémies aiguës, peut provoquer un ptosis (le plus souvent bilatéral). La vincristine est également à l'origine de déficits oculomoteurs [40].
Médicaments affectant le système lacrymal
Les médicaments qui affectent directement ou indirectement le système nerveux autonome peuvent provoquer une hypersécrétion ou, plus fréquemment, une hyposécrétion, pouvant conduire à une kératoconjonctivite sèche ou « œil sec» [ 41] (tableau 6-6
Tableau 6-6
Médicaments diminuant la sécrétion aqueuse de larmes.
Classe de médicamentsAgents
Agents antimuscariniquesAtropine, scopolamine
StimulantsMéthylphénidate, dextroamphétamine
Antihistaminiques H 1Chlorphéniramine, bromphéniramine, diphénhydramine
Analogues de la vitamine A Isotrétinoïne, étrétinate
VitaminesNiacine
β-bloquantsAténolol, practolol, propranolol, timolol
PhénothiazinesChlorpromazine, thioridazine
DiurétiquesHydrochlorothiazide
AnxiolytiquesChlordiazépoxide, diazépam
AntidépresseursAmitriptyline, nortriptyline, doxépine, imipramine, fluoxétine et autres inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine
Traitements hormonauxContraceptifs oraux, traitement hormonal substitutif
Agents chimiothérapeutiquesMéthotrexate, carmustine
).
Le nombre de médicaments connus pour diminuer la sécrétion des larmes et provoquer des signes de sécheresse oculaire et/ou la maladie de la surface oculaire peut être regroupé par familles pharmacothérapeutiques.
Agents antimuscariniques
La sécheresse des muqueuses est un effet indésirable courant de l'utilisation des anticholinergiques. Elle est due à une inhibition de la sécrétion de lacrymale. L'administration orale d'atropine ou de scopolamine fait chuter la sécrétion lacrymale.
Antihistaminiques H1
Les agents bloquant les types de récepteurs H 1 de l'histamine sont couramment utilisés pour traiter les symptômes associés au rhume, à certaines allergies et pour prévenir le mal des transports. Une réduction significative du temps de rupture du film lacrymal a été observée lors de l'administration quotidienne de 4 mg de maléate de chlorphéniramine. La sécheresse oculaire est moins problématique avec les antihistaminiques non sédatifs de nouvelle génération, tels que cétirizine, loratadine ou fexofénadine.
Isotrétinoïne
Un syndrome sec survient fréquemment chez les patients prenant de l'isotrétinoïne. Les symptômes peuvent être accompagnés d'une blépharoconjonctivite. La présence d'isotrétinoïne dans le liquide lacrymal en diminue la stabilité (et le temps de rupture du film lacrymal), mais peut également entraîner une diminution de la production aqueuse, conduisant à la sécheresse de la surface oculaire [34 , 35]. L'utilisation de larmes artificielles peut atténuer l'inconfort associé.
Bêta-bloquants
Les agents bloquant les récepteurs β-adrénergiques sont un des piliers du traitement de l'hypertension artérielle, des cardiopathies ischémiques, d'arythmies cardiaques, etc. La réduction de la sécrétion des larmes est un effet indésirable fréquent des β-bloquants. Tous les β-bloquants, y compris le propranolol et le timolol, peuvent contribuer au syndrome de l'œil sec [42].
Contraceptifs oraux et hormones
Un déséquilibre du rapport œstrogènes/androgènes semble aggraver les symptômes chez les femmes ménopausées, et l'incidence de la sécheresse oculaire augmente avec la durée de la période de ménopause et l'utilisation d'un traitement hormonal substitutif [43 , 44].
Les contraceptifs oraux peuvent réduire la production des larmes. Une étude de la sécrétion de diverses hormones sexuelles chez des patients atteints de syndrome de Gougerot-Sjögren a mis en évidence un lien avec un déficit androgénique [45]. Les patientes sous contraceptifs oraux de façon régulière ont un risque accru de développer un syndrome sec ( odds ratio [OR] = 2,7) par rapport à celles qui en font un usage irrégulier. Le syndrome sec serait d'autant plus fréquent que l'utilisation est importante, créant un argument sur le lien de causalité [ 46 , 47].
Médicaments divers provoquant une diminution de la production des larmes
D'autres médicaments ayant des effets anticholinergiques, tels que les phénothiazines, les anxiolytiques, les antidépresseurs tricycliques et la niacine, ont été associés à une sécheresse oculaire. Des diurétiques tels que l'hydrochlorothiazide et les agents chimiothérapeutiques tels que la carmustine et la mitomycine peuvent également entraîner des problèmes lacrymaux, tant qualitatifs que quantitatifs. De nombreux autres médicaments peuvent avoir des effets desséchants sur la surface oculaire, y compris les psychostimulants utilisés dans le traitement des déficits de l'attention et d'hyperactivité ainsi que la plupart des antidépresseurs.
Médicaments qui stimulent la production des larmes
Plusieurs études montrent que l'administration systémique de certains médicaments cholinergiques, adrénergiques et certains agents antihypertenseurs peuvent stimuler le larmoiement (tableau 6-7
Tableau 6-7
Agents augmentant le volume des larmes.
Classe de médicamentsAgents
Agonistes adrénergiquesÉphédrine
Agonistes cholinergiquesPilocarpine, néostigmine
AntihypertenseursClonidine, réserpine, hydralazine
Agents antinéoplasiques5-fluorouracile
).
Le 5-fluorouracile, analogue de la pyrimidine, est couramment utilisé en cancérologie et son emploi au long cours peut conduire à des lésions des canaux lacrymaux provoquant une inflammation, des cicatrices et une sténose des voies lacrymales, conduisant à un épiphora permanent, heureusement le plus souvent résolutif [ 48].
Médicaments affectant l'épisclère, la sclère et l'uvée
Au cours des 30 dernières années, le nombre de cas d'uvéites médicamenteuses , principalement dues à des médicaments administrés par voie systémique, s'est considérablement accru [49]. Contrairement à certains médicaments oculaires topiques tels que les β-bloquants, le latanoprost et les corticoïdes, considérés comme pouvant être associés à la constitution d'uvéites, peu d'études ont impliqué des médicaments administrés par voie systémique, dans des effets indésirables au niveau de l'épisclère, de la sclère et de l'uvée [50]. Si certains médicaments sont « probablement», impliqués dans des uvéites, comme le cidofovir, l'acide pamidronique et les sulfamides, d'autres, comme la diéthylcarbamazépine, certaines cytokines, les contraceptifs oraux, la quinidine et la streptokinase, ne sont que « possiblement» responsables [ 51]. Une uvéite d'origine médicamenteuse est presque toujours réversible dans les semaines suivant l'arrêt du médicament et avec le traitement de l'inflammation.
Ces effets indésirables sont répertoriés dans le tableau 6-8
Tableau 6-8
Médicaments pouvant affecter l'épisclère, la sclère et l'uvée.
MédicamentsEffet indésirable du médicament
Bisphosphonates (pamidronate et alendronate)Épisclérite « probable», sclérite, uvéite (voire aussi conjonctivite, vision floue, douleur oculaire, photophobie)
RifabutineUvéite (« certaine»)
CidofovirUvéite (versus uvéite de récupération immunitaire) (« probable»)
Anti-TNF-α (étanercept)Uvéite (« possible»)
SulfamidesUvéite (« probable»)
CorticoïdesSclère bleue, uvéite (« possible»)
Rétinoïdes (isotrétinoïne)Uvéite antérieure (« inclassable»)
Antagonistes-α1 des récepteurs adrénergiques (tamsulosine) Syndrome de l'iris hypotonique peropératoire
Tétracyclines (tétracycline, minocycline)Kystes pigmentés d'inclusion conjonctivale avec tétracycline; sclère bleuâtre et décoloration de la sclère par la doxycycline et la minocycline
.
Bisphosphonates
Les bisphosphonates répondent à tous les critères d'imputabilité de toxicité oculaire produite par un médicament [52]. Ils peuvent provoquer une uvéite antérieure en quelques heures ou quelques jours après l'initiation du traitement [53]. Les principaux dérivés impliqués sont le pamidronate, l'acide alendronique, le risédronate, l'étidronate, le clodronate et le zolédronate [ 54]. La sclérite est l'effet indésirable le plus sévère; il survient dans les 48 heures après le début du traitement chez 82 % des patients présentant cet effet secondaire rare [ 55].
Rifabutine
La rifabutine est une rifamycine semi-synthétique utilisée pour traiter des infections opportunistes par Mycobacterium avium chez des patients par ailleurs infectés par le VIH [56]. Les complexes antigène-anticorps induisent une réaction inflammatoire [ 57]. L'uvéite associée à la rifabutine a été rapportée chez des patients qui prenaient également du fluconazole et des macrolides.
L'arrêt de la rifabutine et une corticothérapie topique permettent d'obtenir une amélioration clinique.
Tamsulosine, silodosine, alfuzosine, térazosine
Les antagonistes sélectifs des récepteurs adrénergiques α, l'alfuzosine, la doxazosine, la silodosine, la térazosine et la tamsulosine, utilisés pour traiter les troubles vésicaux et prostatiques en améliorant le flux urinaire, généralement perturbé par l'hypertrophie bénigne de la prostate [ 58], peuvent avoir un impact à médiation sympathique sur la relaxation de l'iris. L'étiologie du myosis pupillaire est liée au blocage du muscle dilatateur de l'iris par la tamsulosine [59].
Le syndrome de l'iris hypotonique peropératoire (IFIS ou intra-operative floppy iris syndrome ) a été le premier effet formellement documenté [ 60]. Il se caractérise par une triade de signes durant la chirurgie :
  • flaccidité du stroma de l'iris qui « flotte» pendant l'irrigation;
  • tendance de l'iris au prolapsus vers les incisions latérales et l'embout de phacoémulsification;
  • myosis peropératoire progressif malgré les mesures pharmacologiques conventionnelles pour maintenir la dilatation pupillaire (tropicamide et phényléphrine).
L'« iris souple», phénomène appelé par les Anglo-Saxons « floppy iris syndrome» , semble lié au blocage des récepteurs α 1a -adrénergiques du muscle dilatateur de l'iris. Il a d'abord été documenté et associé à l'administration systémique de la tamsulosine. D'autres antagonistes de ces récepteurs peuvent également entraîner la mobilité de l'iris pendant la chirurgie de la cataracte, en particulier la silodosine [61]. Il n'est toutefois pas nécessaire d'arrêter le médicament, car cela ne modifie pas l'occurrence du syndrome. En revanche, le chirurgien doit en être informé afin de prendre les précautions appropriées lors de la chirurgie.
Étanercept
L'étanercept est un récepteur soluble qui neutralise le TNF-α ( tumor necrosis factor alpha ), une protéine de fusion chimérique associant la fraction P75 du récepteur soluble du TNF-α avec un fragment Fc d'une immunoglobuline G (IgG) [ 62 , 63]. Certains patients sous étanercept développent une sclérite, une uvéite et/ou une névrite optique [47]. Mais cet effet paradoxal n'est pas observé après traitement par d'autres anti-TNF comme l'adalimumab, qui est un anticorps humanisé neutralisant le TNF-α.
Cidofovir
Le cidofovir en association avec le sulfaméthoxazole-triméthoprime (Bactrim®) peut induire une uvéite antérieure bilatérale parfois associée à des manifestations allergiques systémiques [64 , 65] Jusqu'à 40 % des patients « immuno-récupérés» peuvent présenter une uvéite ainsi qu'un œdème maculaire ou la formation d'une membrane épirétinienne, en moyenne 3 mois après l'arrêt du traitement anti-cytomégalovirus (CMV).
Anticancéreux
Sur une cohorte australienne de 2750 cas d'uvéite, 17 % des cas étaient dus à la prise de médicaments anticancéreux dont des inhibiteurs de checkpoint immunitaires, des inhibiteurs de BRAF et des inhibiteurs d'EGFR protéine kinase [66]. Le BCG intravésical destiné au traitement du carcinome urothélial a également provoqué la survenue d'une uvéite antérieure granulomateuse bilatérale, ou panuvéite [67].
Médicaments affectant la pupille
Médicaments provoquant une mydriase
Anticholinergiques, stimulants et dépresseurs du système nerveux central, antihistaminiques et phénothiazines peuvent tous provoquer une mydriase.
Anticholinergiques
Les médicaments ayant des effets anticholinergiques, tels que l'atropine , la paroxétine et la duloxétine, antidépresseur inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine, ont induit des glaucomes par fermeture de l'angle [ 68 , 69]. La scopolamine, un dérivé de l'atropine, commercialisée sous forme de système transdermique pour la prévention du mal des transports, peut être à l'origine d'une mydriase.
Stimulants du système nerveux central
Les stimulants du système nerveux central comprennent les amphétamines et le méthylphénidate, utilisés pour améliorer l'humeur et contrôler les troubles hyperkinétiques chez les enfants et les adolescents. Des drogues comme la méthamphétamine et la cocaïne entrent également dans cette catégorie. Le mécanisme d'action de ces substances repose sur l'augmentation du tonus du système nerveux adrénergique. L'usage à long terme d'amphétamines provoque une mydriase et une diminution de la réponse à l'exposition pupillaire à la lumière. Chez les patients avec un angle étroit, cette mydriase peut précipiter une crise aiguë ou subaiguë de glaucome à angle fermé, qui peut également être associé à l'usage de la cocaïne par voie nasale.
Dépresseurs du système nerveux
Les dépresseurs du système nerveux central comme le phénobarbital (en cas d'intoxication aiguë ou chronique) et les anxiolytiques, dont les benzodiazépines, provoquent parfois une mydriase, vraisemblablement en raison de leurs effets anticholinergiques indésirables.
Médicaments divers
Parmi les autres médicaments susceptibles de provoquer une mydriase, on compte les antihistaminiques H 1 et les agents antipsychotiques.
Médicaments provoquant un myosis
Opiacés
L'héroïne, la morphine et la codéine contractent la pupille. De plus, la réponse pupillaire à la lumière est améliorée, en lien avec une action sur le système nerveux central.
Agents anticholinestérasiques
L'absorption systémique d'agents qui inhibent les cholinestérases peut entraîner un myosis. Ces substances sont présentes dans de nombreux insecticides et divers neurotoxiques. Des modifications du diamètre pupillaire ont été signalées chez des agriculteurs soumis à un épandage d'insecticides. Le myosis peut se prolonger 30 à 45 jours après exposition à l'agent toxique.
Médicaments affectant les mouvements extraoculaires des muscles et des yeux
Diverses classes de médicaments ont été impliquées dans l'apparition d'un nystagmus, y compris les salicylés, la phénytoïne et les antihistaminiques. La carbamazépine, un anticonvulsivant, a été associée à la survenue d'un nystagmus dose-dépendant. Les médicaments qui affectent l'activité du système nerveux central peuvent entraîner une diplopie. Sont inclus les phénothiazines, les anxiolytiques et les antidépresseurs (tableau 6-9
Tableau 6-9
Médicaments pouvant provoquer des mouvements oculaires anormaux.
Effet indésirableMédicament
NystagmusSalicylés, phénytoïne, antihistaminiques, barbituriques, lithium, carbamazépine
DiplopiePhénothiazines, anxiolytiques, antidépresseurs
Crise oculogyreCétirizine
Troubles des mouvements oculaires [70] Alcohol
).
Lithium
L'utilisation du lithium dans les troubles bipolaires est associée à divers symptômes neurologiques, y compris une exophtalmie, des mouvements oculaires anormaux dont un nystagmus et une myasthénie oculaire [71]. Le patient se plaint généralement d'une vision floue. Un sevrage médicamenteux prolongé, jusqu'à 6 mois, ou même plusieurs années, peut être nécessaire pour observer une amélioration.
Cétirizine
La cétirizine, antihistaminique de deuxième génération, est un puissant antagoniste du récepteur H 1 , efficace dans le traitement des allergies, de la rhinite, de l'urticaire chronique et de certaines formes d'asthme. L'élévation des paupières avec hyperextension du cou caractérisant la crise oculogyre a été signalée, dont une majorité chez des enfants. Le dosage impliqué varie de 5 à 10 mg par voie orale, et le délai d'apparition des symptômes varie de 3 à 184 jours [72]. L'arrêt du médicament entraîne une résolution rapide de la crise.
Médicaments inducteurs de myopie – modificateurs de l'accommodation
De nombreuses observations de myopie « aiguë» après le début de l'utilisation de divers médicaments [73] permettent de souligner que le niveau de myopie induite par ces médicaments est léger, mais dans certains cas, la myopie peut dépasser 5,00 D. Les médicaments courants en cause dans ce phénomène sont les sulfamides (dont les inhibiteurs de l'anhydrase carbonique) et les diurétiques. L'utilisation d'isotrétinoïne a également été associée à des myopies. L'acuité visuelle est rétablie à l'arrêt du médicament, mais récidive lors d'une nouvelle administration. Dans la plupart des cas, la myopie est d'apparition immédiate et disparaît en quelques jours ou semaines après son retrait.
Sulfamides et diurétiques
Les diurétiques, parmi lesquels les inhibiteurs d'anhydrase carbonique, peuvent provoquer une myopie, le plus souvent transitoire, associée à un œdème périmaculaire (c'est le cas pour l'hydrochlorothiazide, 100 mg/jour) avec induction de 3,00 D de myopie, résolutive 3 jours après l'arrêt du médicament.
Topiramate
Le topiramate est un médicament antiépileptique. La myopie aiguë lors de son utilisation se produit en raison des modifications de la morphologie de la chambre antérieure en lien avec un épanchement choroïdien, entraînant une myopie aiguë (jusqu'à 8,75 D) et un glaucome par fermeture de l'angle [ 74 , 75]. La prise en charge consiste à arrêter le médicament, avec une utilisation « agressive» de corticoïdes et d'agents permettant d'abaisser la PIO.
Médicaments à effet anticholinergique
Les médicaments dont l'association avec une cycloplégie est la mieux documentée sont les phénothiazines [76]. Des troubles transitoires de l'accommodation se produisent souvent chez des patients prenant de la chlorpromazine et d'autres phénothiazines utilisées en psychiatrie.
Médicaments modifiant la pression intraoculaire
Anticholinergiques
Certains médicaments possèdent des propriétés anticholinergiques suffisantes pour produire une mydriase et un faible effet cycloplégique [ 77]. Ces médicaments comprennent les médicaments anticholinergiques muscariniques, les antihistaminiques, les phénothiazines et les antidépresseurs tricycliques (tableau 6-10
Tableau 6-10
Médicaments modificateurs de la pression intraoculaire.
Augmentation de la pression intraoculaireDiminution de la pression intraoculaire
Médicaments anticholinergiques muscariniquesβ-bloquants
AntihistaminiquesCannabinoïdes
PhénothiazinesHétérosides cardiotoniques (digitaliques)
Antidépresseurs tricycliquesAlcool éthylique
Corticoïdes
). Parmi les psychotropes dont l'impact sur la fermeture de l'angle a été récemment décrit figure l'olanzapine [ 78]. Les agents antimuscariniques, y compris l'atropine et la scopolamine, peuvent être administrés à des doses pouvant produire une légère dilatation de la pupille et une parésie de l'accommodation. D'autres médicaments à activité antimuscarinique, tels que les antihistaminiques H 1 , comme la diphénhydramine, peuvent être à l'origine des mêmes effets. De plus, les agents antipsychotiques, en particulier les phénothiazines comme la thioridazine, ont des propriétés anticholinergiques bien documentées. Aux doses thérapeutiques, les antidépresseurs tricycliques, l'amitriptyline et l'imipramine produisent des effets anticholinergiques importants avec un impact oculaire.
Ces médicaments peuvent entraîner une mydriase suffisante pour produire un bloc pupillaire et précipiter un glaucome aigu ou subaigu à angle fermé chez des patients avec des angles déjà étroits.
Corticoïdes
L'induction d'une hypertension oculaire après corticothérapie par voie générale dépend du médicament, de sa dose, de sa voie, de la fréquence d'administration et de la réactivité du patient à la corticothérapie [ 79 , 80]. L'apparition se produit après 2 semaines à plusieurs mois, et une normalisation est en général observée les 2 à 4 semaines après la réduction progressive ou l'arrêt des stéroïdes [81].
Topiramate
Le topiramate est un médicament antiépileptique assez fréquemment à l'origine d'un glaucome aigu à angle fermé, survenant dans les 15 jours qui suivent le début du traitement. Un mécanisme inflammatoire en est probablement à l'origine. L'iridectomie périphérique est inefficace en raison du caractère secondaire des épanchements choroïdiens et de l'inflammation. Une résolution rapide de la crise est obtenue avec l'administration de méthylprednisolone associée au mannitol intraveineux.
Bêta-bloquants
Les β-bloquants administrés par voie systémique sont utilisés pour le traitement de l'hypertension artérielle et de divers troubles cardiovasculaires. Parmi les β-bloquants oraux disponibles, l'aténolol, le métoprolol, le nadolol, le pindolol, le propranolol et le timolol ont été mis en cause dans la réduction dose-dépendante de la PIO [82].
Cannabinoïdes
Divers cannabinoïdes ont été administrés par voie orale, topique et par inhalation pour réduire la PIO. La réponse hypotensive se produit 60 à 90 minutes après l'inhalation et dure environ 4 heures [ 83].
Digitaliques
Un traitement systémique par la digoxine a montré une réduction de la PIO de 14 % en cas de glaucome, et une réduction de la formation d'humeur aqueuse de 45 % après plusieurs jours de traitement [ 84].
Médicaments affectant la rétine
La toxicité rétinienne est la complication oculaire la plus sévère. Les médicaments toxiques pour la rétine peuvent affecter l'épithélium pigmentaire rétinien (EP), ou le complexe EP-photorécepteur, le réseau vasculaire rétinien, les cellules ganglionnaires et le nerf optique. Ils peuvent également induire des modifications de l'électrorétinogramme ou un œdème rétinien, notamment un œdème maculaire cystoïde. L'EP est une cible « sensible» car il a de nombreuses fonctions assurant le maintien de l'intégrité des photorécepteurs. De plus, la choroïde sous-jacente est très vascularisée, générant un afflux massif des médicaments administrés par voie systémique [85].
De nombreux médicaments ont été associés à une toxicité rétinienne (tableau 6-11
Tableau 6-11
Médicaments pouvant affecter la rétine (liste non exhaustive).
MédicamentEffet indésirable
Chloroquine et hydroxychloroquineModifications pigmentaires rétiniennes, anomalies du champ visuel, perte de la vision des couleurs
ThioridazineAltérations pigmentaires rétiniennes, troubles de l'adaptation à l'obscurité, perte de vision des couleurs, défauts du champ visuel
QuinineAltération de l'adaptation à l'obscurité, défauts du champ visuel, atténuation vasculaire
Glycosides cardiaquesTroubles de la vision des couleurs, phénomènes entoptiques
SildénafilTroubles de la vision des couleurs
Contraceptifs oraux, hormonothérapie substitutiveMaladies vasculaires rétiniennes, telles que les occlusions vasculaires, les hémorragies, thérapie thrombose veineuse rétinienne
Anti-inflammatoires non stéroïdiens, salicylésHémorragie rétinienne
IndométacineModifications pigmentaires, perte de la vision des couleurs, défauts du champ visuel
ClomifèneTroubles visuels, phénomènes entoptiques
Agents antinéoplasiques (tamoxifène)Opacités réfractaires du pôle postérieur, œdème maculaire
Carmustine (intraveineuse)Maladie vasculaire rétinienne
VigabatrineConstriction du champ visuel, altération de l'adaptation à l'obscurité (cécité nocturne ou nyctalopie)
NiacineŒdème maculaire cystoïde
Pentosan polysulfateAtteinte de l'épithélium pigmentaire et de la rétine externe du pôle postérieur-rétinopathie dégénérative
), ce qui souligne l'importance d'une anamnèse médicamenteuse minutieuse. Plusieurs mécanismes peuvent conduire à une rétinotoxicité. Selon le médicament, sa posologie et la durée du traitement, ces effets rétinotoxiques sont souvent réversibles s'ils sont reconnus précocement. Certains médicaments sont rétinotoxiques via un mécanisme de stress oxydatif oculaire : l'indométacine, le tamoxifène, la thioridazine [86], la chloroquine et le pentosan polysulfate, par exemple, produisent des rétinopathies.
Chloroquine et hydroxychloroquine
La toxicité rétinienne due à l'utilisation à long terme de la chloroquine dans le paludisme a été signalée dès sa commercialisation [ 87]. Son dérivé, le sulfate d'hydroxychloroquine, est un médicament de choix pour le traitement de maladies auto-immunes avec une incidence plus faible des effets indésirables. Pour l'hydroxychloroquine, la toxicité rétinienne apparaît chez 1 % des patients après 5 à 7 ans ou pour une dose cumulée de 1000 g [88], et 7,5 % des patients ayant utilisé l'hydroxychloroquine pendant plus de 5 ans ont présenté une rétinopathie [ 89]. Dans la plupart des cas, ces effets sont observés après 5 ans de traitement [90]. Le risque de toxicité augmente avec des doses plus élevées, une durée de traitement plus longue, une insuffisance rénale ou hépatique, ou l'utilisation concomitante de tamoxifène. Le risque de toxicité rétinienne semble être minime si la dose quotidienne d'hydroxychloroquine est inférieure à 6,5 mg/kg de poids corporel, si la durée du traitement est inférieure à 5 ans et si la fonction rénale est normale.
La chloroquine et l'hydroxychloroquine peuvent entraîner une diminution de l'acuité visuelle, des scotomes paracentraux et une maculopathie en « œil de bœuf» [91]. Mais il existe des différences ethniques de localisation des premiers signes de toxicité rétinienne à la chloroquine et à l'hydroxychloroquine entre les sujets caucasiens et asiatiques. Les premiers sont atteints principalement dans la région parafovéolaire inférieure avec un retentissement au niveau du champ visuel des 10° centraux supérieurs. Les seconds peuvent présenter des atteintes plus périphériques, échappant le plus souvent à l'examen du champ visuel des 10° centraux [92].
Les pratiques de dépistage doivent être adaptées. Bien qu'il ait été démontré que l'hydroxychloroquine traverse le placenta, aucun effet délétère sur le nouveau-né n'a été détecté [93].
D'autres antipaludéens peuvent provoquer une maculopathie : une toxicité à la fluméquine a été décrite avec des symptômes précoces, dès le troisième jour du traitement, conduisant à un décollement séreux du neuroépithélium maculaire bilatéral d'aspect jaunâtre [94].
Un dépistage oculaire avant le début du traitement et pendant le traitement doit inclure un champ visuel et une tomographie par cohérence optique (SD-OCT). L'électrorétinogramme multifocal peut être utile en complément ainsi que l'imagerie par autofluorescence du fond de l'œil. Le rythme et les examens de suivi sont adaptés aux facteurs de risque (tableau 6-12
Tableau 6-12
Médicaments entraînant des effets secondaires classés par type d'atteintes oculaires.
Lésions de la rétine et de l'épithélium pigmentaireLésions vasculairesŒdème maculaire cystoïdeRétinopathie crystallineUvéiteAutres
Chloroquine et dérivés
Phénothiazines
Pentosane polysulfate sodique
Inhibiteurs de MEK
Inhibiteurs du FGF
Quinine sulfate
Clofazimine
Déféroxamine
Ritonavir
Agents alkylants
Corticoïdes
Iodate de sodium ou de potassium
Agents alkylants
Contraceptifs oraux
Interféron
Tacrolimus
Gemcitabine
Méthamphétamine et cocaïne
Alcaloïdes de l'ergot de seigle
Phénylpropanolamine
Acide nicotinique
Inhibiteurs de la polymérisation des microtubules
(paclitaxel)
Fingolimod
Imatinib
Glitazones
Trastuzumab
Niacine
Talc
Ritonavir
Tamoxifène
Cathaxanthine
Méthoxyflurane
Nitrofurantoïne
Fludarabine
Indométacine
Inhibiteurs de point de contrôle (PD-1, CTLA-4)
Inhibiteur de BRAF
Rifabutine
Cidofovir
Glycosides cardiaques
Méthanol
Inhibiteurs de 5-phosphodiestérase
Alkyl nitrites
) du patient. La rétinopathie précoce est réversible si la posologie du médicament est réduite ou interrompue; cependant, d'autres observations montrent une progression continue malgré l'arrêt du médicament [ 95 , 96]. L'arrêt du médicament est la seule option si une toxicité est suspectée et doit être envisagée en accord avec le médecin, interniste ou rhumatologue (fig. 6-3, 6-4 fig. 6-3,
Fig. 6-3
Toxicité induite par l'hydroxychloroquine.
Mme N., 41 ans, a débuté le plaquénil à l'âge de 15 ans à la dose de 400 mg/j pendant 23 ans. Aspect de maculopathie en œil de bœuf. a, d. Clichés couleur. b, e. Hypoautofluorescence périfovéolaire entourée d'une zone hyperautofluorescente. c, f. La tomographie par cohérence optique (OCT) montre une altération des couches rétiniennes externes périfovéolaire avec maintien de la zone ellipsoïde uniquement au niveau de la fovéa (signe de la soucoupe volante).
Remerciements au Dr M. Anjou et au Dr E. Bousquet, OphtalmoPôle, Paris.
fig. 6-4
Fig. 6-4
Toxicité induite par l'hydroxychloroquine.
Patient de 43 ans traité depuis 25 ans par plaquénil à la dose 400 mg/j pour un lupus, découvert lors d'un bilan pour insuffisance rénale et oligoarthropathie; la dose cumulée est estimée à 5400 g. L'atteinte est péripapillaire et sous-maculaire bilatérale. Le patient est asymptomatique. a, b. Hypoautofluorescence périfovéolaire entourée d'une zone hyperautofluorescente des deux yeux péripapillaire et sous-maculaire. c, d. L'OCT montre une altération et un amincissement des couches rétiniennes externes périfovéolaires plus importants en région inférofovéolaire.
Remerciements au Pr Behar-Cohen, OphtalmoPôle, Paris.
et tableau 6-13
Tableau 6-13
Recommandations pour le dépistage de la rétinopathie à l'hydroxychloroquine (d'après [100]).
Risque faibleRisque élevé
Posologie< 6,5 mg/kg hydroxychloroquine (habituellement 400 mg/jour ou moins) > 6,5 mg/kg hydroxychloroquine (habituellement > 400 mg/jour)
Durée d'utilisation< 5 ans > 5 ans
HabitusMaigre ou IMC moyenSurpoids, obésité, IMC élevé
Maladie rénale/hépatiqueAucunePrésente
Maladie rétinienne concomitanteAucunePrésente
Âge< 60 ans > 60 ans
Calendrier de suivi en l'absence de signes cliniques ou symptômes20-29 ans : au moins une fois/an
À partir de 30 ans : au moins 2 fois/an
Une fois/an
).
Thioridazine
La thioridazine est un antipsychotique dérivé de la phénothiazine. Un examen oculaire de routine avec évaluation du fond d'œil dilaté est nécessaire chez les patients recevant 600 mg/jour de thioridazine ou plus. Des symptômes de toxicité aiguë peuvent survenir suite à l'utilisation des doses très élevées généralement 3 à 8 semaines après le début du traitement. Ils comprennent une vision floue, une dyschromatopsie et une nyctalopie. L'acuité visuelle peut être normale ou réduite et la vision des couleurs est souvent anormale. Le champ visuel peut présenter des scotomes paracentraux ou annulaires irréguliers. En quelques semaines, une rétinopathie pigmentaire de type « poivre et sel» peut se développer de manière rapide. L'ERG montre un dysfonctionnement diffus des bâtonnets (et des cônes), qui peut revenir à la normale après l'arrêt du médicament, mais les anomalies pigmentaires de la rétine peuvent être irréversibles et peuvent suivre une progression après l'arrêt du traitement. Par conséquent, la reconnaissance précoce de ce tableau de toxicité rétinienne est très importante.
Des études histopathologiques ont montré que les phénothiazines comme la thioridazine se lient aux granules de mélanine de l'uvée et de l'EP pendant des mois. La toxicité primaire de l'uvée et de l'EP peut entraîner une perte secondaire de la choriocapillaire car une atrophie de l'EP a été notée dans les zones de perfusion choriocapillaire normale. D'autres études ont suggéré des mécanismes de stress oxydant [98].
Digitaliques
La digitoxine et la digoxine ont été largement utilisées dans le traitement de l'insuffisance cardiaque congestive et certaines arythmies. Les symptômes visuels associés à l'intoxication digitalique peuvent inclure une baisse d'acuité visuelle, une vision floue, des scotomes scintillants ou clignotants et des troubles importants de la vision des couleurs. La digoxine peut provoquer un « jaunissement» de la vision. Ces changements sont probablement dus à une toxicité directe des photorécepteurs. Les symptômes visuels sont réversibles lorsque la digoxine est arrêtée.
L'incidence et la gravité des symptômes semblent corrélées aux concentrations plasmatiques des médicaments. En cas d'intoxication digitalique, les troubles de la vision des couleurs sont fréquents et peuvent se produire avant, simultanément ou après le début de la symptomatologie cardiaque. Une fois la posologie diminuée ou le traitement digitalique interrompu, les symptômes visuels s'atténuent rapidement, généralement en plusieurs semaines.
Contraceptifs oraux
Bien que des études aient mis en évidence un risque potentiel d'occlusion veineuse et d'hémorragie rétinienne secondaires à la prise d'œstroprogestatifs, une étude récente de grande envergure incluant 205304 femmes sous contraceptifs oraux et 755462 personnes témoins n'a montré aucune augmentation du risque de survenue d'occlusion veineuse ou artérielle rétinienne [ 99].
Agents anti-inflammatoires non stéroïdiens
La toxicité rétinienne des AINS est rare [ 100], particulièrement décrite avec l'indométacine. Les lésions consistent en une diffusion pigmentaire de l'EP périfovéolaire, ainsi que de fines zones de dépigmentation autour de la macula. L'acuité visuelle, l'adaptation à l'obscurité et le champ visuel peuvent être altérés. Les symptômes régressent à l'arrêt du traitement, bien que les altérations pigmentaires de la rétine persistent. Une méta-analyse récente montre que le risque d'une potentielle aggravation de la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) avec de l'aspirine à dose cardioprotectrice est très inférieur au bénéfice évident de la prise d'aspirine sur les risques d'accidents cardiovasculaires [101].
Clomifène
Le citrate de clomifène est un médicament utilisé pour le traitement de l'infertilité. Ses effets indésirables comprennent un trouble de la vision, non spécifique, et divers troubles entoptiques, y compris des éclairs lumineux, des scintillements, etc. Ces symptômes peuvent survenir quelques jours seulement après le début du traitement et disparaissent généralement en quelques jours après l'arrêt du traitement.
Agents antinéoplasiques
Tamoxifène
Le citrate de tamoxifène est un anti-œstrogène utilisé dans le traitement palliatif du carcinome du sein métastatique. La fréquence des EIO est comprise en 5 et 10 %; mais à faibles doses (20 mg/j), la rétinopathie est rare (< 1 %) [ 102]. Les risques augmentent a des doses plus élevées avec une dose cumulée de 90 g. La régression des symptômes est d'autant plus lente et incomplète que la dose reçue aura été élevée. La rétinopathie est reconnue par la présence de dépôts jaunâtres réfringents et cristallins dans la région maculaire et périmaculaire, qui peuvent également s'étendre en périphérie. Sur le plan structural, on observe une cavitation des couches rétiniennes externes avec une perte focale de la lamination sans véritable œdème maculaire, qui présente des similarités avec les aspects tomographiques observés dans les télangiectasies maculaires de type 2 [103-104-105] (fig. 6-5
Fig. 6-5
a-l. Caractéristiques oculaires d'une patiente typique souffrant de rétinopathie due au tamoxifène.
Elle avait terminé 5 ans de traitement par tamoxifène à faible dose, n'avait pas de symptômes visuels, avait un indice de masse corporelle (IMC) de 26,0 kg/m2 et présentait une hyperlipidémie sous-jacente. Sa meilleure acuité visuelle corrigée initiale était de 20/30 dans les deux yeux. La photographie du fond d'œil montre des dépôts cristallins, œil droit (flèche) (a) et œil gauche (flèche) (b). L'OCT montre des cavitations fovéales avec des perturbations de la couche des photorécepteurs, œil droit (c) et œil gauche (d). Deux ans plus tard, les dépôts cristallins ne sont plus détectables sur les photographies du fond d'œil (e, f), mais les cavitations fovéales et les perturbations de la couche des photorécepteurs persistent sur les scans OCT, bien que la taille des cavitations ait légèrement diminué (g, h).
Source : Hyun-Ah K., Suhwan L., Kyu Sang E., Young HY. Prevalence and risk factors of tamoxifen retinopathy. Ophthalmology 2020; 127(4) : 555-7.
). La patiente peut être asymptomatique ou constater une réduction de l'acuité visuelle. Un examen annuel semble suffisant. Si la rétinopathie est détectée chez des patientes asymptomatiques, le traitement peut être poursuivi. Son interruption doit être discutée en cas de baisse d'acuité visuelle.
Carmustine
La carmustine (BCNU) peut présenter une toxicité oculaire chez certains patients. La toxicité rétinienne commence généralement dans les 2 à 14 semaines après le début des perfusions intra-artérielles de BCNU. Environ 65 % des patients développent des complications rétiniennes qui s'accompagnent d'une perte de vision. La toxicité rétinienne résultant de la perfusion carotidienne de BCNU est probablement liée à l'augmentation de la concentration du cytotoxique dans l'artère ophtalmique. Le mécanisme d'action toxique n'est pas identifié, mais pourrait être lié à une vascularite rétinienne avec ou sans obstruction vasculaire. Les effets rétinotoxiques des injections intracarotidiennes de BCNU peuvent être minimisés si on place le cathéter de perfusion au-delà de l'origine de l'artère ophtalmique [106].
Inhibiteurs de MEK
Le binimétinib est un inhibiteur non compétitif réversible de l'activation du signal régulé par MEK1 ( mitogen-activated extracellular signal regulated kinase 1 ) et MEK2. Dans une population traitée par binimétinib (inhibiteur de MEK) et encorafénib (inhibiteur de BRAF), on obtient une inhibition de la voie MAP-K qui conduit à une activité antitumorale, en particulier contre le mélanome. Malheureusement, les atteintes rétiniennes sont fréquentes [84]. Les manifestations cliniques surviennent dans les jours suivant le début du traitement. Un effet dose-dépendant sur l'épaisseur centrale de la rétine a été observé à l'OCT. Jusqu'à 65 % des patients recevant des inhibiteurs de MEK par voie orale présentent des décollements séreux rétiniens (DSR) bilatéraux transitoires (fig. 6-6,
Fig. 6-6
a-c. Rétinopathie induite par les inhibiteurs de MEK.
Remerciements au Dr E. Bousquet.
fig. 6-7
Fig. 6-7
a-d. Rétinopathie induite par les inhibiteurs de MEK.
Remerciements au Dr E. Bousquet.
). Dans la majorité des cas, les DSR sont multifocaux (77 %) avec au moins un DRS impliquant la fovéa (83 %). À la différence des DSR associés à la choriorétinopathie séreuse centrale, l'EP est intact et l'épaisseur de la choroïde ne montre pas des variations liées à la réabsorption du liquide. Parfois, il existe une baisse de l'acuité visuelle associée, mais elle est généralement modérée. Un DSR asymptomatique ne relève pas d'indication d'interruption du traitement. En revanche, en cas de baisse de l'acuité visuelle, ou de retentissement de la qualité de vie (par exemple patient monophtalme), l'arrêt transitoire du traitement sera proposé jusqu'à résolution des symptômes. La fonction visuelle est rétablie à l'arrêt du traitement, mais des altérations peuvent persister dans certains cas [107]. Certains patients présentent simultanément une uvéite antérieure suggérant que le décollement est associé à un processus inflammatoire. Aucune anomalie n'est retrouvée à l'angiographie à la fluorescéine ou au vert d'indocyanine. Par ailleurs, des occlusions de la veine centrale de la rétine ont été décrites avec l'utilisation des inhibiteurs de MEK, nécessitant dans ces cas un arrêt transitoire ou définitif du traitement (tableau 6-14
Tableau 6-14
Atteintes oculaires des inhibiteurs de MEK et conduite à tenir.
Atteintes oculairesConduite à tenir
Décollement du neuroépithélium symptomatique (grade 2 ou 3) Le binimétinib doit être interrompu jusqu'à 2 semaines et le contrôle ophtalmologique doit être répété, y compris l'acuité visuelle
– En cas de retour à un grade 0 ou 1, le binimétinib doit être repris à la même dose
– En cas de retour à un grade 2, le binimétinib doit être repris à une dose inférieure
– En l'absence de retour à un grade 2, le binimétinib doit être définitivement arrêté
Décollement du neuroépithélium (grade 4) associé à une réduction de l'acuité visuelle (grade 4) Le binimétinib doit être définitivement arrêté
Occlusion de la veine centrale de la rétine (OVCR)Le binimétinib doit être définitivement arrêté
).
Taxanes
Les taxanes sont des anticancéreux qui agissent en bloquant la division cellulaire par désorganisation du fuseau mitotique et inhibition de la polymérisation des microtubules. Leurs effets sur le cytosquelette des cellules gliales de Müller, en particulier sur les cellules de Müller en Z de la macula, induisent un œdème maculaire par réduction des mécanismes de drainage. L'œdème maculaire est kystique, mais silencieux sur le plan angiographique avec absence totale de fuite du colorant (fig. 6-8
Fig. 6-8
SD-OCT montrant un œdème maculaire cystoïde (a) sans diffusion du colorant en angiographie à la fluorescéine (b).
Remerciements au Pr F. Behar-Cohen.
). L'œdème est symptomatique et entraîne une baisse d'acuité visuelle. Il régresse spontanément à l'arrêt du traitement [ 108].
Autres anticancéreux
  • L'interféron α entraîne divers effets rétiniens, une rétinopathie ischémique, y compris la formation de taches cotonneuses, un œdème maculaire, une occlusion artériolaire et une hémorragie intrarétinienne. Les complications sont peu fréquentes et de pronostic variable. Rarement, une neuropathie optique ischémique antérieure aiguë complique le tableau, avec un risque accru lorsque l'interféron α est utilisé dans le cadre du traitement d'une hépatite C en association avec la ribavirine [ 109]. Aujourd'hui, les antiviraux spécifiques utilisés en cas d'hépatite C limitent ce risque.
  • Le cisplatine et l'étoposide ont induit une toxicité rétinienne chez les adultes comme chez les enfants.
  • Le trastuzumab expose au risque d'une ischémie rétinienne.
  • Les inhibiteurs de la tyrosine kinase exposent au risque d'œdème maculaire.
  • Les nitroso-urées et la cytosine-arabinoside peuvent induire des occlusions vasculaires rétiniennes.
Les inhibiteurs de point de contrôle immunitaire (appelés aussi inhibiteurs de checkpoint ) sont une forme d'immunothérapie utilisé dans le traitement de certains cancers. Les EIO secondaires sont rares, signalés chez environ 1 % des patients, et sont liés à une régulation positive du système immunitaire. Les effets secondaires les plus fréquemment signalés comprennent la sécheresse oculaire (1 à 24 %), l'uvéite (1 %) et la myasthénie avec atteinte oculaire. Ils surviennent généralement dans les semaines suivant le début du traitement et souvent en conjonction avec d'autres effets indésirables systémiques à médiation immunitaire. Une toxicité rétinienne a été décrite avec des signes cliniques d'uvéite ou de syndrome de type Vogt-Koyanagi-Harada (VKH).
Vigabatrine
La vigabatrine est un anticonvulsivant qui augmente sélectivement l'acide gamma-aminobutyrique cérébral et rétinien [ 110]. Elle peut conduire à un rétrécissement du champ visuel dû à une toxicité au niveau des photorécepteurs et des cellules ganglionnaires, comme le montre l'amincissement de la RNFL ( retinal nerve fiber layer ), utilisée comme méthode de dépistage de la toxicité rétinienne [ 111 , 112]. Le rétrécissement du champ visuel est bilatéral, souvent asymptomatique, mais on note une perte de champ périphérique avec épargne temporale et maculaire. La perte de champ se produit chez 30 % à 50 % des patients et semble être irréversible dans la plupart des cas. L'acuité visuelle et la vision des couleurs peuvent également être affectées. Les symptômes peuvent se développer en plusieurs mois ou plusieurs années après le début du traitement. Un examen, au moins annuel, du champ visuel pendant 5 ans est justifié.
Fingolimod
Le fingolimod est un agoniste du récepteur de la sphingosine-1-phosphate utilisé dans la sclérose en plaques. Il a des effets indésirables sur la fonction de la barrière vasculaire-endothéliale, compromettant ainsi potentiellement la barrière hématorétinienne. L'œdème maculaire associé au fingolimod peut provoquer une vision floue, une distorsion et une altération de la vision proche, rapportée chez 4 % des patients [113]. Une évaluation ophtalmologique avec OCT doit être effectuée avant l'introduction du médicament et 3 à 4 mois après son introduction. Par la suite, un dépistage annuel des patients asymptomatiques est recommandé. Les patients présentant un œdème maculaire associé au fingolimod ne doivent pas systématiquement arrêter leur traitement en raison du risque de poussée de la sclérose en plaques.
Isotrétinoïne
L'isotrétinoïne, ou acide 13-cis-rétinoïque, est largement utilisée pour traiter l'acné. Elle peut induire une nyctalopie avec diminution réversible de la vision des couleurs, une altération de l'adaptation à l'obscurité, avec ou sans excès de sensibilité à l'éblouissement. Une fois le traitement médicamenteux interrompu, l'amélioration de la fonction rétinienne doit être surveillée. Les études n'ont cependant pas montré de toxicité du médicament sur la rétine [114].
Corticoïdes
Les corticoïdes systémiques ont été associés à la survenue, la prolongation, l'exacerbation et aux récidives de choriorétinopathie séreuse centrale (CRSC) (tableau 6-15
Tableau 6-15
Posologies recommandées des différents types de corticoïdes.
Voie d'administrationType de corticoïdeDose
OralePrednisolone5-60 mg/jour
Prednisone10-80 mg/jour
IntraveineuseBétaméthasone10 mg/jour
Méthylprednisolone16-1000 mg/jour
IntravitréenneTriamcinolone acétonide4 mg/0,1 ml
ÉpiduraleTriamcinolone acétonide
Méthylprednisolone acétate
2 ml
40-120 mg
Péri-oculaireTriamcinolone acétonide1,0 ml (40 mg/ml)
CutanéeMométasone furoate 0,1 %
Bétaméthasone + calcitriol
0,1 % (mométasone furoate pommade)
NA
Intra-articulaireTriamcinolone acétonide1-2 ml (40-80 mg)
IntranasaleFluticasone propionate
Béclométasone
NA
) [115]. La CRSC a également été décrite suite à l'administration nasale, péridurale, intra-articulaire, cutanée et péri-oculaire de corticoïdes. En revanche, l'implication des stéroïdes intraoculaires dans la survenue de la CRSC reste à démontrer.
La CRSC induit par les stéroïdes a moins de prédilection masculine que la CRSC idiopathique et a fréquemment une présentation bilatérale et atypique.
Déféroxamine et autres chélateurs du fer
Le mésylate de déféroxamine (DFO), chélateur du fer, est utilisé pour traiter l'hémosidérose. La DFO a une forte affinité pour le fer ferrique. Sa toxicité oculaire se manifeste par une perte visuelle et des défauts de la vision des couleurs. L'examen par autofluorescence du fond d'œil met en évidence une incidence de 9 % d'anomalies rétiniennes, qui ont été classées, en fonction de leur gravité, comme étant minimes, focales, en plaques et mouchetées, associées à une détérioration de l'acuité visuelle. Des lésions à type de dystrophie pseudovitelliforme ou de pattern dystrophy ont été rapportées.
La rétinopathie semble être un effet secondaire de classe médicamenteuse puisqu'elle a aussi été rapportée avec le déférasirox. Des examens ERG répétés avec un ERG multifocal ont été utilisés pour le suivi des patients souffrant de maculopathie afin d'enregistrer les changements fonctionnels. L'arrêt du traitement permet une stabilisation lente des lésions qui peut prendre plusieurs mois.
Thiazolidinediones
Les thiazolidinediones, telles que la pioglitazone, ont été associées à une aggravation de l'œdème maculaire diabétique, en particulier chez les patients atteints de rétinopathie diabétique préexistante. Toutefois, ces médicaments ne sont pas commercialisés en France.
Polysulfate de pentosan sodique
Le polysulfate de pentosan sodique (PPS) a été initialement approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) en 1998 pour le traitement symptomatique de la cystite interstitielle. Le PPS a récemment été associé à une maculopathie toxique, rapportée pour la première fois en 2018 par Pearce et al. Elle est décrite comme une hyperpigmentation paracentrale dans la couche de l'EP avec des dépôts vitelliformes environnants, des dépôts sous-rétiniens jaunes et une atrophie parafovéale parcellaire de l'EP.
Une étude rétrospective de cohorte appariée réalisée par Jain et al. a recherché une association dans une grande cohorte nationale et a trouvé que l'exposition aux PPS était associée à un diagnostic de maculopathie atypique et de DMLA lors du suivi de 7 ans [116]. Les symptômes visuels et la progression semblent se poursuivre après l'arrêt du traitement. Les mécanismes sont peu compris; il pourrait s'agir d'une accumulation du médicament dans les cellules de l'EP. Les auteurs émettent l'hypothèse que la toxicité du médicament endommage principalement la choriocapillaire, ce qui entraîne ensuite les changements et l'atrophie de l'EP observés. Compte tenu de l'association possible entre le PPS et la maculopathie toxique, il est recommandé de peser les risques et les avantages de l'utilisation du PPS, ainsi que d'effectuer des examens ophtalmologiques de dépistage réguliers [ 117 , 118] (fig. 6-9
Fig. 6-9
Rétinopathie induite par le pentosane polysulfate sodique (PPS).
Images du fond d'œil de la maculopathie de PPS. Images du fond d'œil de l'œil gauche de trois sujets triés par gravité de la maladie : un sujet présentant une maladie de grade 1 à gauche (a, d), un sujet présentant une maladie de grade 2 au milieu (b, e) et un sujet présentant une maladie de grade 3 à droite (c, f). a-c. Photographies du fond d'œil en couleur montrant que tous les yeux présentent des modifications pigmentaires maculaires, notamment des amas de pigments au milieu d'un fond de dépôts sous-rétiniens jaunâtres dans les yeux les plus légers et une atrophie de l'épithélium pigmentaire menaçant le centre dans les cas graves (c). d-f. Images d'autofluorescence du fond d'œil montrant des zones assez bien délimitées d'hyper- et d'hypoautofluorescence irrégulières impliquant le pôle postérieur. Une atrophie de l'épithélium pigmentaire rétinien menaçant le centre peut être notée dans les cas graves (f).
Source : Lyons RJ, Brower J, Jain N. Visual function in pentosan polysulfate sodium maculopathy. Invest Ophthalmol Vis Sci 2020; 61(13) : 33. Reproduit avec l'aimable autorisation du Dr Nieraj Jain.
).
Médicaments affectant le nerf optique
Certains médicaments peuvent induire une neuropathie optique avec une diminution bilatérale de l'acuité visuelle et de la sensibilité aux couleurs. On observe ce type de pathologie avec l'utilisation d'agents antimicrobiens, comme le linézolide et l'éthambutol, des médicaments antiarythmiques, comme l'amiodarone, ou ceux utilisés pour traiter les troubles de l'érection (sildénafil). Dans la plupart des cas, la gravité des effets est liée à la durée du traitement, à la dose utilisée et à la susceptibilité individuelle. L'arrêt du médicament peut conduire à la résolution des symptômes, mais le risque rend obligatoire un suivi étroit des patients (tableau 6-16
Tableau 6-16
Médicaments pouvant affecter le nerf optique.
MédicamentEffet indésirable
ÉthambutolNévrite optique (chloramphénicol et AINS peuvent induire une papillite)
Linézolide
Isoniazide (rare)
Chloramphénicol
Tamoxifène
AINS
Contraceptifs oraux (rare)
AmiodaroneNeuropathie optique/atrophie optique
Méthotrexate
Vigabatrine
CorticoïdesHypertension intracrânienne
Tétracyclines (dont minocycline, doxycycline)
Nitrofurantoïne
Vitamine A (rétinoïdes, y compris l'isotrétinoïne)
Contraceptifs oraux
Inhibiteurs de la PDE-5 (sildénafil)Neuropathie optique ischémique non artéritique
Sumatriptan
Amiodarone
).
Éthambutol
Ce traitement de la tuberculose peut provoquer une neuropathie optique [119]. Les facteurs de risque comprennent des doses plus élevées, une utilisation prolongée, une fonction rénale altérée et un traitement anti-VIH concomitant. L'incidence globale de la neuropathie optique induite par l'éthambutol est d'environ 1 %, en corrélation avec la posologie. Parmi les patients recevant une dose élevée (15 à 25 mg/kg/jour), l'incidence rapportée est de 5 % à 6 % en cas de traitement de plus de 2 mois. Le déficit de la vision des couleurs est probablement l'indicateur le plus sensible de la neuropathie optique à l'éthambutol et peut se produire avant même que l'acuité visuelle et les champs visuels ne soient affectés.
Si la toxicité oculaire n'est pas reconnue précocement, le médicament peut causer une perte définitive de la vision, en particulier chez les patients âgés quand la posologie est élevée. Cependant, en général, il y a récupération après plusieurs mois ou années suivant l'arrêt du médicament. La toxicité oculaire de l'éthambutol doit être surveillée de près pendant tout traitement et après son arrêt [ 120]. Dans de rares cas, l'éthambutol peut provoquer des lésions rétiniennes : hémorragies et œdème maculaire. L'isoniazide a également provoqué des névrites optiques [121].
Amiodarone
L'incidence de la neuropathie optique induite par l'amiodarone est d'environ 2 % [122]. L'apparence du nerf optique est caractérisée par un gonflement du disque avec ou sans hémorragies péripapillaires. L'amiodarone accroît le risque de neuropathie optique ischémique antérieure non artéritique (NAION). Les facteurs de risque sont l'âge (> 50 ans), l'hypertension artérielle, le diabète, l'hypercholestérolémie, le tabagisme. Cette neuropathie est caractérisée par un début insidieux, d'évolution lente; elle est bilatérale avec une perte de vision qui tend à se stabiliser. Une fois le traitement médicamenteux arrêté, les défauts d'acuité visuelle et de champ visuel peuvent s'améliorer. Les patients doivent subir un examen ophtalmologique de base avant de commencer le traitement par amiodarone, puis tous les 6 mois.
Syndrome de pseudotumor cerebri
Un syndrome de pseudotumeur cérébrale ou pseudotumor cerebri (PTC) peut survenir après traitement à des posologies usuelles de divers médicaments [123], comme la minocycline. Les symptômes apparaissent quelques semaines ou mois après le début du traitement. Ils associent des céphalées, des obscurcissements visuels transitoires et de la diplopie à un œdème papillaire qui peut persister jusqu'à un an après l'arrêt du traitement. Des altérations campimétriques définitives ont été décrites. Il semble que la minocycline soit davantage un facteur précipitant qu'une cause dans le syndrome de PTC [36].
D'autres agents thérapeutiques comme les corticoïdes, les contraceptifs, le carbonate de lithium, la ciclosporine, la quiétapine, l'isotrétinoïne, la lévofloxacine, le méthotrexate ou la lévothyroxine ont fait l'objet de rapports sur leur risque de déclencher un PTC.
6.2. Toxicité oculaire des médicaments ophtalmologiques

F. Chast

L'essentiel
  • Tout médicament, même appliqué localement sur la surface oculaire ou injecté dans ou autour de l'œil, peut induire des effets toxiques et allergiques.
  • Alors que certains effets aigus sont bruyants, des effets indésirables au long cours peuvent réduire l'observance des traitements ou passer inaperçus pendant des années avant qu'une complication sévère ne survienne.
  • La toxicité des conservateurs n'est pas la seule en cause.
  • L'arrêt de tout traitement permet parfois de sortir de situations complexes dans lesquelles des effets toxiques d'un ou de plusieurs médicaments interfèrent avec la pathologie sous-jacente.
Introduction
Des effets indésirables locaux traduisent une hypersensibilité ou une toxicité locale des médicaments administrés au niveau des tissus oculaires. La prescription de ces médicaments doit être précédée d'un interrogatoire des patients afin de documenter d'éventuels antécédents d'intolérance. Si un profil allergique est identifié par l'anamnèse ou l'examen, des schémas thérapeutiques alternatifs doivent être retenus et les patients doivent être informés des risques d'effets indésirables locaux, en grande majorité bénins, des médicaments qui leur sont prescrits.
À la suite de l'administration d'un collyre, les patients peuvent identifier, à tort, une douleur (picotements, brûlure, démangeaison, etc.) comme une réponse toxique ou allergique. Les symptômes sont, très majoritairement, transitoires (quelques minutes) et n'apparaissent plus au bout de quelques administrations. Néanmoins, dans la mesure où de nombreuses préparations ophtalmiques commerciales contiennent du chlorure de benzalkonium, la prudence doit être de mise. On sait que ce conservateur peut entraîner une toxicité locale qui se manifeste progressivement par la constitution d'une kératite ponctuée superficielle, accompagnée d'irritations, de brûlures ou de picotements (voir chapitre 6.3). C'est la raison pour laquelle depuis 1990, le développement de collyres sans conservateurs est un devenu un objectif, pour ne pas dire un impératif.
De nombreuses classes thérapeutiques sont « à risque», notamment celles qui justifient un traitement au long cours, par exemple les collyres hypotonisants. Certaines circonstances comme l'automédication peuvent conduire à des situations dangereuses. Ainsi, certaines kératites peuvent survenir à la suite de l'utilisation prolongée d'un collyre anesthésique pour soulager une douleur associée à une lésion cornéenne. Des cataractes sous-capsulaires postérieures peuvent se développer après l'administration topique au long cours de corticoïde.
Les gels et pommades ophtalmiques (lubrifiants, gels antimicrobiens ou antiglaucomateux, etc.) peuvent entraîner, en raison de la nature de l'excipient, des difficultés transitoires en matière d'acuité visuelle. Même si la réduction de l'acuité visuelle n'est que temporaire, cet effet peut être gênant et peut entraîner un déficit d'observance du traitement. Quant aux réactions d'hypersensibilité (conjonctivite ou kératite), les médicaments en cause sont le plus souvent des antibiotiques (allergie) ou des conservateurs.
Les effets toxiques sont nombreux et divers. Ils peuvent toucher tous les tissus de l'œil.
  • Cornée . Les atteintes cornéennes sont fréquentes lors de traitements par les fluoroquinolones. La ciprofloxacine, l'ofloxacine, la gatifloxacine et la moxifloxacine sont fréquemment prescrites en première ligne de traitement de kératite bactérienne et peuvent précipiter pour former de fins dépôts sur la cornée [ 124 , 125]. Les processus infectieux peuvent impliquer des irrégularités épithéliales de la cornée et un moindre balayage des larmes, à l'origine de changements du pH du film lacrymal et conduisant à la précipitation de cristaux de l'antibiotique [ 126]. Aux stades précoces, l'arrêt du traitement par l'agent en cause est souvent suffisant, mais il est parfois nécessaire de recourir à un grattage cornéen, à une photokératectomie thérapeutique au laser Excimer, voire à une greffe de cornée. On note aussi des cas analogues après traitement par la cyclosporine [127] ou la dexaméthasone [128].
  • Conjonctivite . Les conjonctivites toxiques peuvent, parfois, se superposer à l'infection ou à la réaction allergique, et la toxicité d'un médicament peut alors compliquer le diagnostic. Les patients affectés se plaignent fréquemment d'une sensation désagréable, mais les démangeaisons ne sont pas le symptôme le plus courant, sauf si l'allergie fait partie du tableau clinique global. Les patients ont souvent des antécédents. Les conservateurs (notamment le chlorure de benzalkonium) sont une cause fréquente de conjonctivite toxique, comme certains antibiotiques tels que la gentamicine et la tobramycine. C'est également le cas des antiviraux. Lorsqu'un agent spécifique ne peut pas être identifié, l'investigation de l'environnement du patient est déterminante pour identifier une étiologie (notamment les agents chimiques de l'environnement). L'éviction (abandon du collyre en cause) est le seul moyen permettant de réduire l'atteinte de la conjonctivite.
  • Choroïde . Elle joue un rôle important dans diverses pathologies oculaires et la qualité de la vascularisation rétinienne. Une revue récente a permis d'évaluer l'impact de diverses classes de médicaments topiques sur la choroïde. Les mydriatiques/cycloplégiques, les hypotonisants oculaires, etc. sont associés à une augmentation significative de l'épaisseur de la choroïde qui peut être liée à l'augmentation du flux de l'humeur aqueuse vers la choroïde, favorisant ainsi le flux sanguin [ 129].
Anesthésiques locaux
Lorsqu'ils sont utilisés aux doses recommandées, les anesthésiques locaux topiques ne provoquent que rarement des réactions locales sévères.
L'utilisation oculaire topique d'anesthésiques locaux peut conduire à des réactions locales allergiques ou toxiques de la cornée, de la conjonctive ou des paupières. Il n'est pas rare que les anesthésiques topiques comme le bénoxinate (Cébésine®, Oxybuprocaïne®) et la tétracaïne (Tétracaïne®) provoquent de légers picotements ou brûlures après instillation, mais cela ne dure pas et ne nécessite pas de traitement spécifique autre que le réconfort du patient.
Dans certains cas, en particulier chez les patients âgés de plus de 50 ans, une desquamation localisée ou diffuse de l'épithélium cornéen peut néanmoins survenir. Cette réaction épithéliale consiste en une kératite ponctuée superficielle et résulte de l'exposition et de l'instabilité du film lacrymal, des clignements moins fréquents, et d'une augmentation de l'évaporation des larmes. La kératite ponctuée peut apparaître dans les 5 à 30 minutes après l'instillation. Bien qu'elle soit généralement bénigne, une kératite diffuse, nécrosante, avec un œdème stromal de la cornée a été décrite [130]. Les épithéliopathies sévères pouvant être médiées par une hypersensibilité allergique; il est évident qu'un anesthésique alternatif doit être utilisé lors des consultations ultérieures.
Les anesthésiques locaux sont « à risque» lorsqu'ils sont pris en automédication. Dans de trop nombreux cas, on peut observer des kératites infiltrantes sévères et même une dégradation fonctionnelle totale en raison du mésusage de l'anesthésique [131]. L'utilisation prolongée d'anesthésiques, même pendant quelques jours, peut conduire à la perte de l'épithélium cornéen et freiner voire inhiber la cicatrisation épithéliale. La perte des microvillosités épithéliales entraîne une instabilité du film lacrymal et accroît la vitesse de rupture du film, ce qui aggrave l'effet desséchant de la diminution du clignement induite par l'anesthésie ou l'hypoesthésie. Au fur et à mesure de la progression de la maladie, des manifestations plus profondes peuvent inclure un œdème stromal avec déformation de la membrane de Descemet, des infiltrations disciformes dans le stroma cornéen, des dépôts cornéens, une uvéite antérieure, un hypopyon et un hyphéma. On peut également retrouver un œdème des paupières, une hyperhémie conjonctivale, une hypertrophie papillaire, un écoulement mucopurulent et une néovascularisation cornéenne [ 132].
Bien que le syndrome puisse être aisément traité une fois la cause connue, sa reconnaissance peut être retardée. Outre l'arrêt de l'anesthésique topique, clé de la prise en charge, le traitement consiste à prescrire un cycloplégique. La douleur doit être contrôlée par l'emploi d'un antalgique per os.
Cycloplégiques
Atropine, homatropine, scopolamine
Les effets toxiques oculaires des cycloplégique comprennent les phénomènes d'irritation directe par le collyre lui-même, les dermatites de contact et le risque de glaucome à angle fermé. La réaction allergique à l'atropine implique généralement les paupières et se manifeste comme un érythème avec prurit et œdème. Des conjonctivites papillaires et une kératite allergique ont également été signalées. En général, l'atropine topique (Atropine® 0,3, 0,5, 1 %) ainsi que d'autres anticholinergiques augmentent le risque de fermeture d'angle des patients atteints de glaucome. Cependant, le risque d'induire une fermeture d'angle dans des yeux sans antécédent d'épisode aigu est faible. Les patients atteints de glaucome à angle ouvert peuvent présenter une élévation variable de la pression intraoculaire (PIO), liée non au degré de mydriase mais plutôt à une diminution de l'écoulement de l'humeur aqueuse.
Cyclopentolate (Skiacol®)
Comme avec les autres anticholinergiques, l'effet secondaire le plus fréquent est un picotement transitoire lors de l'instillation initiale. Les réactions allergiques au cyclopentolate sont assez rares et peuvent ne pas être reconnues par le praticien. Cependant, plusieurs cas de rougeur et d'inconfort ont été rapportés et parfois, même, une éruption faciale peut se développer en quelques minutes à quelques heures. Le cyclopentolate appliqué localement peut également augmenter la PIO chez les patients atteints de glaucome primitif à angle ouvert, et peut précipiter une crise de glaucome aigu chez les patients à angles étroits.
Tropicamide (Mydriaticum®)
Le tropicamide peut produire des picotements transitoires lors de l'instillation. Comme les autres mydriatiques-cycloplégiques, il peut provoquer une augmentation de la PIO, qu'il convient de surveiller.
Hypotenseurs oculaires
Il s'agit d'une classe thérapeutique hétérogène, mais certains effets indésirables sont communs. Une enquête européenne multicentrique a révélé que les patients atteints de glaucome ressentent, lors de l'administration de leur traitement, des picotements et des brûlures pour 47,5 %, une sensation de corps étranger pour 41,9 % et une sensation de sécheresse oculaire pour 34,9 %. C'est souvent la présence d'un conservateur qui est la cause de ces effets, puisque le passage à des collyres sans conservateur réduit les symptômes chez près de la moitié des patients [133].
Chaque famille de médicaments a des effets indésirables potentiels spécifiques sur la cornée et la surface oculaire. Les analogues de prostaglandines sont associés à la fois à une prévalence et à une gravité plus élevée du dysfonctionnement obstructif des glandes de Meibomius [134]. Les bêta-bloquants agissent sur les récepteurs bêta-adrénergiques de la glande lacrymale et réduisent le renouvellement basal des larmes [ 135 , 136]. Le timolol modifie la composition du mucus du film lacrymal et provoque également une coloration accrue de la cornée et de la conjonctive au bout de 1 mois de traitement [137]. Le tartrate de brimonidine, un agoniste alpha-adrénergique couramment utilisé, présente un risque significativement plus élevé d'allergie oculaire par rapport à d'autres médicaments topiques et peut prédisposer les patients à une allergie oculaire en lien avec d'autres collyres antiglaucomateux [138]. Le dorzolamide, inhibiteur de l'anhydrase carbonique, peut induire une augmentation de l'épaisseur de la cornée [139].
Analogues de prostaglandines
Au cours des 25 dernières années, les analogues des prostaglandines sont devenus une option thérapeutique de première ligne dans la prise en charge du glaucome et de l'hypertension oculaire. Bien que leur balance bénéfice/risque ait été largement étudiée à court terme, on en sait moins sur leur innocuité à très long terme [ 140].
Latanoprost (Xalatan®)
Parmi les effets secondaires du latanoprost, le plus remarquable d'entre eux est l'assombrissement de la couleur de l'iris, qui se produit chez environ 5 % à 20 % des patients et peut se développer dès la 4 e semaine de traitement, mais généralement plusieurs mois après le début du traitement. Seuls les iris de couleur hétérogène ont tendance à manifester une pigmentation accrue, au cours de laquelle l'iris devient uniformément plus foncé. Ces iris sont généralement vert-brun ou bleu/gris-brun. Au fil du temps, la pigmentation brune s'étend vers la périphérie, donnant à l'iris une coloration uniformément foncée. Les iris colorés de manière uniforme en bleu, gris, vert ou brun semblent moins susceptibles de subir cette modification de coloration. En revanche, le changement de couleur des yeux est permanent même après l'arrêt du traitement. L'évolution de la pigmentation est liée à une augmentation de la concentration de mélanine dans les mélanocytes et non à une augmentation du nombre de mélanocytes. Une augmentation de la pigmentation de la peau des paupières est également possible, plusieurs mois après le début du traitement par latanoprost, mais régresse habituellement lors de l'interruption du traitement. Par ailleurs, l'administration de latanoprost peut provoquer des anomalies de croissance des follicules pileux se traduisant par une hypertrichose. On note une augmentation du nombre, de la longueur, de l'épaisseur, de la courbure et de l'assombrissement des cils, d'autant plus visible en cas de traitement d'un seul côté. On note également une croissance de poils en forme de cils dans les zones adjacentes à la répartition normale de l'implantation des cils. Bien que l'hypertrichose soit bénigne, elle peut représenter un souci esthétique. Par ailleurs, le latanoprost peut produire une légère hyperhémie conjonctivale, généralement sans signification clinique, mais qui peut représenter une gêne pour certains patients, entraînant ainsi une non-observance du traitement. Plus rarement, certains patients développent une réaction allergique ou une irritation au latanoprost, nécessitant l'arrêt du médicament. Le traitement par latanoprost peut aussi être associé au développement d'un œdème maculaire cystoïde.
Travoprost (Travatan®)
Les évaluations relatives à l'innocuité du travoprost ont porté sur l'acuité visuelle, le diamètre de la pupille, la couleur de l'iris, la PIO et l'hyperhémie conjonctivale [141]. Les événements indésirables observés sont généralement légers à modérés et disparaissent à l'arrêt du traitement. Les effets indésirables observés avec le latanoprost peuvent survenir avec un traitement par travoprost. L'hyperhémie conjonctivale induite par le travoprost est cliniquement peu significative, mais généralement supérieure à celle observée avec le latanoprost.
Bimatoprost (Lumigan®)
Les effets indésirables locaux induits par le bimatoprost sont voisins de ceux du latanoprost et du travoprost, notamment pour ce qui concerne les modifications pigmentaires (permanentes) de l'iris et des tissus péri-orbitaires (paupières) [142]. L'hyperhémie conjonctivale est l'effet le plus fréquemment associé au traitement par le bimatoprost, dans les 6 semaines qui suivent le début du traitement, mais des cas très précoces ont été observés. On note également un fréquent prurit oculaire.
Bêta-bloquants
Timolol (Timoptol®)
Le timolol peut provoquer une réaction allergique locale qui se manifeste par une blépharoconjonctivite, avec érythème et œdème des paupières. La réaction peut survenir dès le premier mois de traitement. La gestion peut inclure le passage à un autre β-bloquant ou à une autre classe d'hypotonisant. L'administration des β-bloquants par voie topique peut induire une diminution significative de la sensibilité cornéenne, mais le timolol n'est pas le plus « anesthésique» des β-bloquants. Chez certains patients, le timolol peut induire une kératite ponctuée superficielle. En cas de chronicisation, celle-ci peut se transformer en épithéliopathie et être aggravée par des érosions épithéliales cornéennes. Le timolol peut réduire le flux lacrymal, le temps de rupture du film lacrymal et donc provoquer une sécheresse oculaire. Toutefois, aucun des β-bloquants couramment utilisés, y compris le timolol, ne semble perturber la cicatrisation des plaies épithéliales cornéennes.
Lévobunolol (Bétagan®)
Le lévobunolol a sensiblement les mêmes effets indésirables oculaires que le timolol. L'anesthésie cornéenne n'est pas un problème important avec le lévobunolol, et il ne semble pas non plus provoquer de sécheresse oculaire ou de mydriase. Bien qu'une blépharoconjonctivite allergique puisse survenir, le lévobunolol est habituellement mieux être toléré que le timolol.
Bétaxolol (Bétoptic®)
Le principal effet local associé à une suspension de bétaxolol est l'inconfort voire la douleur oculaire au moment de l'instillation.
Cartéolol (Cartéolol®)
Le cartéolol à 1 % semble moins irritant que le timolol à 0,5 %. Cependant, contrairement à d'autres β-bloquants topiques, l'utilisation de cartéolol à 1 % peut provoquer une anesthésie cornéenne modérée.
Agonistes alpha-adrénergiques
Apraclonidine (Iopidine®)
Les effets secondaires locaux le plus souvent associés à l'apraclonidine comprennent le blanchiment conjonctival, une rétraction des paupières et une mydriase. Ces effets sont médiés via une stimulation des récepteurs α 1 -adrénergiques. Le blanchiment conjonctival est l'effet indésirable le plus courant, survenant chez environ 85 % des malades. Une dilatation pupillaire inférieure à 1 mm se produit dans environ 45 % des yeux traités par l'apraclonidine à 0,5 %. L'impact clinique de la mydriase est modéré. Les patients peuvent parfois signaler une gêne, des brûlures, des démangeaisons, une sécheresse oculaire et une vision floue. La prévalence des démangeaisons et de l'inflammation conjonctivale peut atteindre en moyenne 20 %, et augmenter jusqu'à 50 % en cas d'utilisation à long terme. Diminuer la concentration de 1 % à 0,5 % et baisser la fréquence d'administration permet de réduire l'incidence des effets indésirables [ 143]. Les symptômes disparaissent généralement dans les 3 à 5 jours suivant l'interruption du médicament. Le mécanisme allergique sous-jacent à l'apraclonidine pourrait être l'oxydation du médicament et sa conjugaison avec des fonctions thiols portées par des protéines pour former un complexe (apraclonidine-haptène protéique) déclencheur de la réponse immunitaire.
Brimonidine (Alphagan®)
Les événements indésirables oculaires les plus fréquents avec la brimonidine sont l'hyperhémie, les brûlures, les picotements, la vision floue et la sensation de corps étranger. Un léger effet myotique a également été observé, qui ne semble pas être accompagné de changements de la réfraction. On note des réactions allergiques oculaires, y compris blépharite et blépharoconjonctivite. L'incidence de l'allergie à la brimonidine à 0,2 % varie de 4,8 % au cours de 3 mois de traitement à 9 % lorsque le traitement se prolonge sur un an, ce qui reste très inférieur aux événements allergiques enregistrés pour l'apraclonidine 0,5 % ou 1,0 % pour des durées de traitement similaires (20 et 50 %, respectivement). La brimonidine, contrairement à l'apraclonidine, est dépourvue de fonction hydroquinone et ne subit pas de conjugaison thiol permettant de transformer le médicament en haptène favorable au déclenchement de la réaction allergique.
Inhibiteurs de l'anhydrase carbonique
Acétazolamide (Diamox®)
Une myopie transitoire a été rapportée avec plusieurs sulfamides [144], dont l'acétazolamide. Cette myopie résulte probablement d'un œdème du corps ciliaire qui produit un déplacement vers l'avant du diaphragme lentille-iris. La myopie s'atténue lors de la réduction ou l'arrêt du traitement.
Dorzolamide (Trusopt®)
Le dorzolamide est généralement bien toléré. On peut, toutefois, noter une irritation locale, éventuellement liée au pH et à la tonicité de la préparation se traduisant par des picotements (7 %), une sensation de brûlure ou de corps étranger (12 %) et une vision floue (9 %). D'autres signes de toxicité peuvent inclure une kératite ponctuée superficielle. Le développement d'une conjonctivite purulente stérile sévère a été décrit, mais cet événement indésirable a été résolu à l'arrêt du traitement.
Médicaments cholinergiques
Pilocarpine
La pilocarpine et d'autres myotiques sont utilisés beaucoup moins fréquemment que les autres classes d'hypotenseurs oculaires, notamment en raison des effets indésirables oculaires. Parmi ces effets, un des plus sévères est un trouble de l'accommodation qui peut durer 2 à 3 heures après l'instillation du collyre. Pour cette raison, les patients âgés de moins de 40 ans supportent mal l'instillation de pilocarpine. Ces troubles visuels sont moins fréquents et moins prononcés chez les patients plus âgés en raison de la moindre réponse du muscle ciliaire à la pilocarpine. En plus du spasme accommodatif, un des effets locaux de la pilocarpine est le myosis qui conduit à une baisse d'acuité visuelle, surtout en cas de faible luminosité et d'opacité cristallinienne. La relation entre le traitement myotique et les troubles associés à la traction vitréorétinienne reste un sujet de controverse. Bien qu'aucune preuve absolue ne permette de conclure sur le risque rétinien, il existe des indices de causalité entre l'utilisation de pilocarpine et le risque accru de décollement de rétine [145]. Le mécanisme proposé est le déplacement vers l'avant du diaphragme lentille-iris, conduisant à la traction vitréorétinienne, avec ou sans décollement du vitré. Il semble que le risque de décollement soit accru en cas de myopie, d'aphakie ou de pseudophakie. Parmi les autres effets secondaires oculaires, on note une hyperhémie de la région ciliaire et conjonctivale, une myokymie des paupières, des céphalées frontales et des douleurs oculaires ou péri-orbitaires. La plupart de ces symptômes ont tendance à s'estomper au fur et à mesure que le traitement se poursuit.
Conservateurs
Le chlorure de benzalkonium est un conservateur largement utilisé en raison de ses excellentes propriétés antimicrobiennes qui couvrent un spectre large quel que soit le pH de la solution. Malheureusement, ses effets indésirables sont fréquents, même à faible concentration (par exemple 0,0001 %), probablement par un mécanisme de détersion à l'égard des lipides membranaires. Les lésions observées sont essentiellement réversibles à l'arrêt du traitement, mais en cas d'utilisation prolongée, les dégâts causés à la surface cornéenne peuvent justifier des interventions thérapeutiques lourdes, y compris une kératoplastie. Le chlorure de benzalkonium peut détruire les microvillosités épithéliales de la cornée et compromettre la qualité d'adhérence du film lacrymal. Cette détersion peut favoriser la pénétration intrastromale de certains médicaments et, dans certains cas, l'efficacité thérapeutique, mais, dans d'autres, contribuer à la toxicité médicamenteuse, d'autant que l'inflammation et la fibrose qui en résultent minimisent les chances de succès d'un traitement antiglaucomateux [146]. Il n'est pas impossible que cette action délétère sur la cornée elle-même soit accompagnée d'une action sur les neurones trigéminaux cornéens sous l'effet des médiateurs libérés par les cellules épithéliales cornéennes « stressées» par le chlorure de benzalkonium [147]. Il faut également noter que le chlorure de benzalkonium peut se lier aux lentilles de contact souples et contribuer à la fonte épithéliale. Une toxicité sur les cellules de l'endothélium cornéen a également été décrite.
La toxicité sur la surface oculaire du chlorure de benzalkonium est corrélée à sa concentration dans les médicaments antiglaucomateux, et une concentration plus faible conduit à une moindre incidence des lésions de la surface oculaire [ 148]. Une étude a révélé qu'une concentration plus faible de chlorure de benzalkonium dans un collyre de tafluprost (0,001 %-0,003 % par rapport à la concentration de la forme commerciale de 0,005 %–0,01 %) entraînait une cytotoxicité des cellules épithéliales cornéennes comparable au tafluprost sans conservateur [149]. De même, l'abaissement de la concentration de benzalkonium dans les solutions ophtalmiques de latanoprost et de bimatoprost permet une réduction significative de la fréquence de kératite ponctuée superficielle à 12 semaines.
Antibiotiques
Les collyres antibiotiques peuvent présenter une toxicité locale superficielle, réversible à l'arrêt du traitement. Ils peuvent tous induire une allergie de surface, en particulier les aminosides. La sensibilisation à certains antibiotiques peut ensuite déclencher des accidents immunoallergiques lors d'une administration ultérieure par voie locale ou générale [150].
Polymyxine B
Les effets indésirables de l'application topique de polymyxine B comprennent une irritation et des réactions allergiques des paupières et de la conjonctive. Mais celles-ci sont peu fréquentes et généralement bénignes. Cependant, en administration sous-conjonctivale, la polymyxine B peut provoquer des douleurs, un chémosis et une nécrose tissulaire.
Bacitracine
Des réactions d'hypersensibilité, se présentant généralement comme une dermatite de contact, sont rares mais peuvent survenir avec une application topique de bacitracine.
Chlortétracycline (Auréomycine®)
Une irritation transitoire à type de sensation de brûlure conjonctivale est possible. Il existe un risque de réaction d'hypersensibilité et d'eczéma de contact en cas d'emploi prolongé.
Azithromycine (Azyter®)
On note, très fréquemment, une gêne oculaire (prurit, brûlures, picotements) à l'instillation. On peut également observer une vision floue, une sensation d'œil collé et de corps étranger à l'instillation. Plus rarement, on observe : conjonctivite, kératite, eczéma et/ou érythème et/ou œdème des paupières, hyperhémie conjonctivale, augmentation des larmoiements.
Fluoroquinolones
La fréquence des effets indésirables après administration topique de fluoroquinolones est faible. Le plus fréquemment, on signale, après l'instillation d'un collyre de ciprofloxacine, une sensation de brûlure ou d'inconfort, et parfois une sensation de corps étranger, des démangeaisons et une hyperhémie conjonctivale, un chémosis, rarement une photophobie. L'instillation fréquente de ciprofloxacine pour le traitement d'ulcérations de la cornée peut entraîner la formation de dépôts à la surface de l'œil, mais ceux-ci ne nécessitent généralement pas l'arrêt du traitement. La cytotoxicité épithéliale cornéenne des fluoroquinolones a été évaluée chez l'animal, et chaque médicament s'avère faiblement toxique aux concentrations thérapeutiques.
Norfloxacine (Chibroxine®)
Les effets indésirables le plus fréquemment rencontrés sont une sensation de brûlure ou de picotement local. Plus rarement, on observe une hyperhémie conjonctivale, un chémosis, une photophobie, un goût amer après l'instillation. Très rarement, des dépôts cornéens ont été observés. En raison de la présence de chlorure de benzalkonium, le risque d'irritation et d'eczéma de contact doit être connu.
Ciprofloxacine (Ciloxan®)
On observe assez fréquemment des dépôts cornéens, avec gêne et hyperhémie oculaires. Moins fréquemment, une kératopathie, une kératite ponctuée, des infiltrats cornéens, une coloration cornéenne, avec photophobie, baisse de l'acuité visuelle, œdème de la paupière, vision floue, etc.
Ofloxacine (Exocine®, Monoox®, Quinofree®)
On observe assez fréquemment une irritation oculaire, de l'inconfort et une sensation de brûlure ou de picotement. D'autres effets indésirables ont été signalés : kératite, conjonctivite, vision trouble, photophobie, œdème oculaire, douleur oculaire, hyperhémie oculaire, œdème palpébral. Exceptionnellement, on a signalé un syndrome de Stevens-Johnson, voire une nécrolyse épidermique toxique.
Acide fusidique (Fucithalmic®)
On observe assez fréquemment une vision floue (transitoire). Moins fréquemment, un œdème des paupières, avec augmentation du larmoiement.
Rifamycine (Rifamycine®)
On peut noter une irritation transitoire et un risque de réaction d'hypersensibilité. En raison de la présence de disulfite de potassium dans le collyre, il existe un risque de réactions allergiques, y compris des réactions anaphylactiques, et de bronchospasmes. Ce collyre contient également un conservateur organomercuriel, le thiomersal, ce qui peut entraîner des réactions d'hypersensibilité.
Aminosides
D'une manière générale, les effets indésirables produits par la gentamicine ou la tobramycine topiques sont rares, mais peuvent inclure une toxicité conjonctivale. On observe des érosions épithéliales ponctuées, la ré-épithélialisation peut être retardée et une ulcération cornéenne peut être observée. La toxicité conjonctivale se traduit par un chémosis, une hyperhémie, et rarement une nécrose. Les réactions allergiques à la gentamicine topique se produisent rarement, mais environ 50 % des patients allergiques à la néomycine le sont également à la gentamicine.
Tobramycine (Tobrex®, Tobrabact®)
On observe assez fréquemment une gêne oculaire et une hyperhémie. Peu fréquemment, on observe une kératite, une abrasion cornéenne, un déficit visuelle, un érythème des paupières, etc. Des phénomènes allergiques sont possibles.
Antiseptiques
Polyvidone iodée (Bétadine®)
On note en particulier le risque d'une hyperhémie conjonctivale, une kératite ponctuée superficielle et une coloration jaune résiduelle de la conjonctive. Plus rarement, des cas de calcification cornéenne ont été signalés.
Céthexonium (Biocidan®, Monosept®), chlorure de cétylpyridinium (Novosept®)
L'utilisation prolongée des collyres contenant un ammonium quaternaire peut être à l'origine d'altérations de l'épithélium conjonctival et/ou cornéen. La prudence s'impose, notamment en cas d'anomalies épithéliales préexistantes.
Hexamidine (Désomédine®), picloxydine (Vitabact®)
On a décrit des réactions d'hypersensibilité et des réactions locales (irritation ou sensibilisation) possibles.
Antiviraux
Aciclovir (Zovirax®)
Une kératite ponctuée superficielle a été fréquemment décrite, mais ne nécessite pas l'arrêt du traitement et les symptômes disparaissent spontanément sans laisser de séquelles. On a également décrit des sensations de brûlure ou de légers picotements passagers survenant immédiatement après l'application.
Ganciclovir (Virgan®)
On observe fréquemment une sensation de brûlure, des picotements de durée brève, une irritation oculaire et une vision trouble. Des kératites ponctuées superficielles et une hyperhémie conjonctivale sont moins fréquentes. Le gel de ganciclovir serait mieux toléré que la pommade d'aciclovir, avec moins de picotements, de brûlures et de vision floue. Des constatations similaires ont été rapportées lors d'un essai randomisé multicentrique comparant le gel de ganciclovir à 0,15 % et la pommade d'aciclovir à 3 %.
Trifluridine (Virophta®)
La trifluridine est relativement peu toxique [ 151]. Les effets secondaires comprennent des brûlures transitoires et des picotements, une dermatite de contact, une kératopathie ponctuée avec œdème, une hyperhémie conjonctivale et un chémosis, une altération de la cicatrisation stromale, une kératite sèche, et parfois une augmentation de la PIO. Les effets indésirables peuvent présenter les mêmes signes que l'infection elle-même et peuvent être interprétés comme une aggravation de l'infection oculaire.
Anti-inflammatoires corticoïdes
Bien que l'efficacité des corticoïdes dans le traitement de l'inflammation oculaire ait résisté à l'épreuve du temps, leur utilisation peut être associée à des effets indésirables parfois sévères. L'incidence de ces effets augmente de manière significative avec l'augmentation des doses et la durée de la prescription, et il semble bien qu'il soit préférable, pour limiter la toxicité des corticoïdes, de prescrire une forte dose pendant un temps limité plutôt qu'une dose plus faible pendant une durée prolongée.
Parmi les complications oculaires pouvant se développer après une corticothérapie locale, figurent tant des lésions tissulaires (cataracte et glaucome iatrogènes) que l'interférence avec la cicatrisation ou les mécanismes de défense immunitaires.
Cataracte iatrogène
Des cataractes sous-capsulaires postérieures peuvent survenir avec toutes les voies d'administration.
Hypertension oculaire ou glaucome
Dès l'introduction de corticoïdes pour le traitement d'une maladie inflammatoire oculaire, des rapports ont commencé à apparaître impliquant la corticothérapie topique comme cause de la PIO élevée. Dès 1962, il est devenu généralement admis que la corticothérapie topique puisse être à l'origine d'un glaucome à angle ouvert. La démonstration de la capacité des stéroïdes d'augmenter la PIO provient d'études contrôlées dans lesquelles les patients ont montré des élévations de pression réversibles lors de l'utilisation chronique de stéroïdes topiques. L'augmentation de la PIO peut se produire tant chez les patients déjà atteints de glaucome (chez lesquels l'élévation est plus marquée, surtout en cas de glaucome à angle ouvert) que chez ceux dont les yeux étaient sains avant le traitement. Cette hypertension oculaire se développe généralement en 2 à 8 semaines. Ces effets sont généralement réversibles et disparaissent en 1 à 3 semaines lors de l'arrêt du traitement.
Il est admis qu'une « sensibilité individuelle» puisse jouer. Ainsi, des volontaires sains recevant une goutte de collyre de dexaméthasone à 0,1 % 3 fois par jour connaissent une élévation moyenne de leur PIO de 1,6 mmHg après 4 semaines. Mais des sous-groupes plus ou moins affectés semblent indiquer qu'un déterminant génétique puisse être un des facteurs de risque. Les patients avec un glaucome primitif à angle ouvert et leurs proches présentent une prévalence remarquablement élevée d'élévations de la PIO lors de l'emploi de stéroïdes topiques. Environ 70 % des descendants au premier degré de personnes atteintes de glaucome ont des élévations de la PIO d'au moins 5 mmHg. Une anamnèse concernant le patient ou des antécédents familiaux de glaucome devient donc une étape importante préalablement à la prescription de stéroïdes [ 152]. En plus des facteurs de risques génétiques, d'autres facteurs peuvent contribuer à l'élévation de la PIO : l'âge du patient, une myopie de 5 D ou plus, et la présence de fuseaux de Krukenberg à l'origine d'une dispersion pigmentaire.
La question d'une toxicité spécifique de tel ou tel stéroïde reste posée. D'une manière générale, la dexaméthasone 0,1 % (Chibrocadron®, Dexafree®, Dexocol®, Maxidrol®), la bétaméthasone 0,1 % (pas de collyre commercialisé en France) et l'acétate de prednisolone (pas de collyre commercialisé en France) sont davantage susceptibles d'induire des élévations significatives de la PIO que la fluorométholone (Flucon®), ou que la rimexolone et la médrysone (non commercialisées en France). Une étude visant à évaluer l'élévation de la PIO avec le phosphate de dexaméthasone 0,1 %, la fluorométholone 0,1 % et la médrysone, appliquées 4 fois par jour pendant 6 semaines, montre qu'au bout de 6 semaines, la pression moyenne augmente de 63,1 %, pour la dexaméthasone, de 33,8 % pour la fluorométholone, et de 8,3 % pour la médrysone [153].
D'autres études comparant les effets de la fluorométholone à 0,25 % avec la dexaméthasone à 0,1 % ont montré que la PIO dans les yeux traités par la fluorométholone était significativement inférieure pendant toute la durée de l'étude à celle qui est mesurée sur les yeux traités par la dexaméthasone.
Parmi les facteurs contributifs à ces différences entre stéroïdes pour augmenter la PIO, pourraient figurer leur biodisponibilité intraoculaire, leur demi-vie pharmacocinétique (plus courte pour les stéroïdes les mieux tolérés) et leurs caractéristiques « métaboliques». Le mécanisme moléculaire par lequel les corticoïdes augmentent la résistance à l'écoulement de l'humeur aqueuse n'est pas complètement élucidé. Les récepteurs aux stéroïdes bordant les cellules trabéculaires pourraient participer à ce mécanisme. Une action directe sur le maillage cellulaire pourrait médier les altérations du dispositif d'efflux, comme l'accumulation de macromolécules telles que des glycosaminoglycanes dans le réseau trabéculaire. Des études expérimentales indiquent également que les corticoïdes peuvent provoquer des modifications dans les protéoglycanes de la matrice extracellulaire, altérer la synthèse des protéines, stabiliser le réseau de microfilaments d'actine et diminuer la phagocytose.
Infection
Les corticoïdes réduisent les défenses immunitaires, donc la résistance à de nombreux types d'infections, virales, fongiques et bactériennes. De plus, inhibant l'inflammation, l'administration de corticoïdes peut masquer les symptômes d'une maladie infectieuse. L'utilisation de stéroïdes dans les infections oculaires nécessite donc une certaine prudence. Si l'antibiotique approprié est sélectionné et si la durée du traitement est relativement courte, les stéroïdes peuvent aider à réduire l'inflammation et prévenir d'éventuels troubles de la cicatrisation. Cependant, les stéroïdes doivent, en général, être évités en cas de blépharite et de conjonctive bactérienne, car les stéroïdes offrent peu d'avantages dans le processus de guérison. Les stéroïdes peuvent prolonger l'évolution clinique de la kératite dendritique causée par le virus de l'herpès. Il est, de plus, généralement admis que l'utilisation topique de stéroïdes améliore la sensibilité oculaire aux infections fongiques. Il est indispensable de maintenir un bon équilibre entre le stéroïde utilisé et l'agent anti-infectieux associé.
Retard de la cicatrisation épithéliale cornéenne
La corticothérapie, qu'elle soit systémique ou topique, peut retarder la cicatrisation cornéenne. La formation de taches ponctuées persistantes de la cornée trahit des dommages épithéliaux iatrogènes si la maladie originelle a bien été éliminée. Les effets de la corticothérapie sur la synthèse du collagène et l'activité des fibroblastes en sont probablement la cause.
Uvéite cortico-induite
Il semble paradoxal que l'utilisation topique de différents corticoïdes (dexaméthasone, prednisolone, etc.) puisse entraîner une inflammation aiguë du segment antérieur. L'incidence de cette toxicité est plus élevée en cas de mélanodermie (5,4 %) par rapport à la population caucasienne (0,5 %). Les symptômes comprennent la douleur, la photophobie, une vision floue et une hyperhémie périlimbique. Les excipients semblent être hors de cause. Le traitement comprend l'arrêt ou la réduction de la posologie du médicament au profit d'alternatives susceptibles d'épargner l'utilisation des corticoïdes; dans ce cas, on peut faire appel aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ou aux agents immunosuppresseurs.
Mydriase et ptosis
Une dilatation de la pupille et une ptose peuvent survenir après l'administration de stéroïdes. L'instillation de dexaméthasone à 0,1 % à des volontaires sains produit une mydriase dès la première semaine d'utilisation du médicament. L'augmentation moyenne du diamètre pupillaire est d'environ 1 mm. L'effet disparaît à l'arrêt du traitement. L'effet mydriatique des corticoïdes topiques a été étudié chez le singe. L'instillation de dexaméthasone 0,1 % produit, outre l'élévation de la PIO, une dilatation pupillaire et un ptosis. Lorsque les stéroïdes sont administrés sans leur excipient mais en solution saline, les effets sur la PIO, la taille de la pupille et la ptose palpébrale n'ont pas lieu.
Autres effets secondaires
Une gêne oculaire transitoire peut survenir après application oculaire topique de stéroïdes. Le rôle mécanique des particules en suspension dans la préparation, l'excipient lui-même et la gravité de l'état inflammatoire peuvent tous être des facteurs étiologiques. La formation de dépôts cornéens de calcium induits par les stéroïdes a été signalée. Les patients présentant des telles lésions épithéliales (inflammation postopératoire, kératoplastie transfixiante, kératite herpétique et œil sec) peuvent développer une kératopathie calcifiante en bandelettes.
Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)
Brûlures et picotements sont les effets indésirables les plus fréquents lors de l'administration de collyres d'AINS. Alors que l'indication de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) du collyre de kétorolac (Acular®) est la modulation de la douleur et de l'inflammation postopératoire en chirurgie réfractive, le résumé des caractéristiques du produit (RCP) du médicament indique une liste impressionnante d'événements de pharmacovigilance :
  • très fréquemment : irritation oculaire (y compris sensation de brûlure), douleur oculaire (y compris picotement);
  • fréquemment : kératite superficielle (punctiforme), œdème oculaire et/ou palpébral, prurit oculaire, hyperhémie conjonctivale, infection oculaire, inflammation oculaire, iritis, précipités kératiques, hémorragies rétiniennes, œdème maculaire cystoïde, traumatisme oculaire, augmentation de la PIO, vision floue et/ou diminuée.
Même si on risque un retard potentiel de cicatrisation de plaies, l'administration topique de kétorolac à des patients présentant de petites lésions cornéennes semble néanmoins bénéfique. Le collyre à 0,4 % semble mieux toléré que la préparation à 0,5 % (mais seule cette dernière est commercialisée en France) [154].
Kératolyse
Un effet secondaire beaucoup plus sévère a été rapporté avec diverses solutions ophtalmiques d'AINS : une véritable fonte de la cornée ou kératolyse, rare et chez des patients à risque, mais de nature à compromettre le pronostic fonctionnel. Cette fonte cornéenne est une affection au cours de laquelle l'épithélium cornéen disparaît avec un amincissement progressif du stroma cornéen pouvant entraîner une perforation cornéenne avec perte de vision. Cet événement indésirable grave avait été, dans un premier temps, mis en doute par les fabricants qui avaient avancé le rôle de l'excipient d'une spécialité générique. Mais sa réalité est aujourd'hui démontrée [155]. La kératolyse peut être induite par divers AINS oculaires, notamment par le diclofénac. Elle survient généralement chez les patients dont la cornée a déjà été opérée, ou qui sont diabétiques ou atteints d'une maladie auto-immune. Sa véritable incidence, probablement faible, reste inconnue. La dose d'AINS (3 à 6 gouttes par jour), les médicaments associés (stéroïdes, anesthésiques locaux, etc.) et la durée du traitement (de 5 jours à 10 mois dans la littérature) sont probablement des facteurs déterminants.
Le stade épithélial – marqué par une perte progressive de l'épithélium cornéen, une baisse de la concentration tissulaire en prostaglandines, une infiltration leucocytaire et une desquamation facilitée par les métalloprotéinases matricielles – est suivi du stade stromal, caractérisé par la dégradation du collagène stromal. Une élucidation des explications pharmacodynamiques possibles des lésions cornéennes induites par les AINS comprend le rôle de l'hypoxie épithéliale qui, non seulement semble provoquer la production de prostaglandines, mais peut également jouer un rôle clé dans l'orchestration d'une nouvelle réponse inflammatoire sans rapport avec la formation de ces médiateurs pro-inflammatoires. L'utilisation d'AINS dans des conditions d'hypoxie cornéenne peut donc non seulement entraîner une réponse thérapeutique décevante, mais aussi une exacerbation inflammatoire paradoxale. D'autres mécanismes potentiels incluent la relation entre les AINS et les métalloprotéinases de la matrice cornéenne et la toxicité directe d'excipients cytotoxiques : tensioactifs, additifs et conservateurs présents dans les préparations ophtalmiques d'AINS.
Depuis la fin des années 1990, la prise de conscience de cette toxicité inquiétante, de ses facteurs de risque et de la nécessité d'une prise en charge rapide une fois le diagnostic réalisé, y compris l'arrêt des AINS, devrait en atténuer le risque [156].
Ciclosporine
Toutes les études portant sur la tolérance locale de la ciclosporine administrée en collyres de concentrations allant de 0,1 à 2 % ont démontré que le médicament était bien toléré. L'effet indésirable le plus fréquent est la sensation de brûlure et les picotements ressentis (environ 17 % des patients).
Quelques cas de néoplasies conjonctivales ont été observés chez des patients traités par ciclosporine, un cas avec une administration combinée, systémique et locale, et un seul autre cas avec une administration locale seule. Aucun lien direct avec l'administration de ciclosporine topique oculaire n'a pu être déterminé. Parmi les nombreuses études prospectives évaluant l'innocuité et l'efficacité de la ciclosporine ainsi que les études cas-témoins évaluant les facteurs de risque de développer une néoplasie conjonctivale, aucune relation avec l'utilisation de la ciclosporine oculaire topique n'a été établie. Malgré des mécanismes physiopathologiques plausibles, il n'existe à ce jour aucune preuve d'un risque accru de néoplasie de la surface oculaire avec l'utilisation de ciclosporine en collyre [ 157].
Antihistaminiques H 1
Les collyres antihistaminiques sont généralement bien tolérés, même si brûlures, picotements et inconfort à l'instillation ne sont pas rares. Des réactions allergiques paradoxales aux antihistaminiques H 1 peuvent survenir lors d'une administration orale, mais elles sont plus fréquentes après instillation de collyre, ce qui évidemment rend difficile l'identification de l'effet iatrogène du collyre par rapport à la cause initiale de l'allergie. En raison de la diversité des structures moléculaires des antihistaminiques H 1 , il est possible de proposer une alternative thérapeutique et de poursuivre un traitement antihistaminique avec une bonne tolérance pour le nouveau médicament prescrit.
Médicaments de l'œil sec et de la surface oculaire
L'hyaluronate de sodium à la concentration de 0,1 % semble être exempt d'effets indésirables oculaires (ou systémiques) en cas d'utilisation topique.
Médicaments anti-VEGF
De nombreux effets indésirables, parfois redoutables, peuvent survenir au cours des injections intravitréennes. Il n'est pas toujours évident de définir la responsabilité de l'injection elle-même (opérateur-dépendant) et celle du médicament injecté dans le vitré. De nombreux effets ont été décrits : augmentation de la PIO, cataracte, glaucome néovasculaire, hémorragie conjonctivale, hémorragie du vitré, irritation et douleur oculaires, hémorragie rétinienne, décollement de rétine, néovascularisation de l'iris, endophtalmie, ischémie rétinienne, rubéose de l'iris [158].
Toxicité vitréorétinienne
Globalement, les événements oculaires indésirables après l'injection intravitréenne d'agents anti-VEGF, y compris l'endophtalmie, le décollement de la rétine et l'augmentation de la PIO, sont rares dans toutes les études [ 159]. Le taux d'endophtalmie au cours de la première année de l'essai VISION (évaluation du pegaptanib) était de 0,16 % par injection, et le protocole de préparation des injections avait été violé dans 9 des 12 cas observés [ 160]. La fréquence des endophtalmies dans l'étude CATT (évaluation comparative du bévacizumab et du ranibizumab) était de 0,06 % (1 cas pour 1700 injections) [ 161]. Pendant la première année de l'essai VISION, la fréquence de décollement de rétine était de 0,08 % par injection et le taux de la cataracte traumatique était de 0,07 % par injection.
Une augmentation de la PIO a été rapportée chez 6,4 % des patients dans l'étude sur l'innocuité à long terme du ranibizumab 0,5 mg dans la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) néovasculaire [ 162], et les mêmes effets indésirables ont été signalés chez 7,0 % des patients lors de la mise en place d'un traitement par un schéma posologique flexible de ranibizumab dans l'étude SUSTAIN (modalités de traitement par ranibizumab) sur la DMLA néovasculaire [ 163]. Dans les études MARINA [ 164] et ANCHOR [165] (évaluation du ranibizumab en phase III), davantage d'yeux traités par le ranibizumab qu'avec la photothérapie dynamique connaissent au moins un épisode d'augmentation de la PIO de 6 à 8 mmHg ou plus par rapport à la ligne de base, ou 8 mmHg ou plus, avec des PIO les plus élevées simultanées de 21 mmHg ou plus et 25 mmHg ou plus, respectivement [166].
D'autres études ont rapporté l'incidence de l'élévation significative de la PIO chez les patients atteints de DMLA néovasculaire pouvant aller de 3,45 % à 11,6 %, mais peu de patients nécessitent une prise en charge chirurgicale [167]. À court terme, la PIO augmente au cours des premières 30 minutes après l'injection, et disparaît généralement spontanément sans geste chirurgical [168], et une intervention telle que le taraudage de la chambre antérieure est rarement nécessaire.
Au total, dans les études GEFAL [ 169], CATT à 2 ans [ 170 , 171] (évaluation comparative bévacizumab et ranibizumab), et VIEW [ 172] (évaluation comparative aflibercept et ranibizumab), la proportion de patients atteints de troubles systémiques ou oculaires graves était similaire pour les patients traités au moyen de bévacizumab (Avastin®), ranibizumab (Lucentis®), ou aflibercept (Eylea®).
Hypertonie intraoculaire
L'hypertonie intraoculaire liée aux injections intravitréennes (IVT) a été largement décrite. On peut distinguer plusieurs situations. L'hypertonie intraoculaire liée aux IVT de corticoïdes peut être provoquée par la substance pharmacologique elle-même (remaniements tissulaires et cellulaires entraînant une augmentation de la résistance trabéculaire à l'évacuation de l'humeur aqueuse). L'hypertonie intraoculaire immédiate et transitoire après chaque IVT peut également être expliquée par l'augmentation mécanique du volume vitréen (en raison de l'adjonction effectuée par l'injection). Le cumul des injections semble davantage propice au premier mécanisme. L'hypertonie intraoculaire prolongée et soutenue concernerait 3 à 12 % des patients, mais pourrait être sous-estimée. Dans certains cas, une chirurgie filtrante peut s'avérer nécessaire [ 173].
Toxine botulique
La toxine botulique, neurotoxine bloquant la libération d'acétylcholine au niveau des récepteurs nicotiniques, possède diverses indications en ophtalmologie, parmi lesquelles le traitement des troubles faciaux dystoniques. Dans ce cadre, la toxine botulique peut à la fois traiter ou déclencher une sécheresse oculaire. L'effet pourrait se fonder sur la diminution de l'élimination des larmes induite par les clignements et en allongeant ainsi le temps durant lequel la lubrification de la surface oculaire est assurée [ 174]. Par ailleurs, un des éléments déclencheurs pourrait être la diminution du tonus du nerf orbiculaire, ce qui altère la production des glandes de Meibomius.
6.3. Toxicité des conservateurs

F. Brignole-BaudouinC. Baudouin

Introduction
Les excipients contenus dans les formulations des collyres, en particulier les conservateurs sont susceptibles d'induire des effets iatrogènes, notamment une sécheresse oculaire, ou syndrome sec oculaire (SSO), ou des réactions toxiques ou allergiques. Ces effets interfèrent avec l'évaluation de l'effet d'un traitement contre le SSO. Il devient alors difficile de faire la distinction entre trois situations : l'évolution de la maladie, l'absence d'effet du traitement ou d'éventuels effets secondaires iatrogènes. En effet, lorsque des médicaments provoquant une sécheresse oculaire sont nécessaires par voie topique, ils interagissent avec la surface oculaire et rendent les mécanismes de la maladie et leur relation avec le traitement difficiles à comprendre. C'est notamment le cas lorsque des collyres contenant des conservateurs de la famille des ammoniums quaternaires sont utilisés sur le long terme, comme dans la sécheresse oculaire, l'allergie chronique ou le glaucome. Le glaucome est un bon exemple de SSO iatrogène, car la prévalence des symptômes de SSO a été trouvée beaucoup plus élevée chez les patients glaucomateux que dans la population générale, démontrant ainsi le rôle des médicaments antiglaucomateux dans la survenue de SSO [175-176-177-178-179]. En outre, l'utilisation de médicaments contenant des composés perturbant le film lacrymal et pouvant provoquer des effets pro-inflammatoires, pour le traitement du SSO, est illogique, et peut contribuer à entretenir et à accentuer le cercle vicieux de la sécheresse oculaire [180]. De nombreux médicaments ont été suspectés de provoquer ou d'aggraver la sécheresse oculaire [ 181], mais la plupart d'entre eux n'ont pas été testés purs, à savoir sans conservateur, et le rôle respectif du principe actif et de l'excipient reste sujet à débat.
Mécanismes
Plusieurs mécanismes peuvent participer au développement d'un SSO iatrogène ( toxicity-induced dry eye [TIDE]), et chaque composé peut agir à des niveaux différents. Dans ce cadre, de nouvelles approches intégrées de tests permettant une évaluation fine du profil de sécurité doivent être encouragées [ 182].
Les médicaments peuvent agir au niveau de la surface oculaire par divers mécanismes, exerçant des effets allergiques, toxiques et/ou immuno-inflammatoires, ou par interactions chimiques avec les différents composants de la surface oculaire. Les cibles possibles des traitements topiques ayant des effets délétères peuvent être, d'une part, le film lacrymal, en perturbant la couche lipidique par des effets tensioactifs détergents, en réduisant la sécrétion aqueuse ou en détruisant les cellules caliciformes, d'autre part, les épithéliums conjonctival et cornéen, les nerfs cornéens par effets neurotoxiques, ou encore les paupières au niveau de la peau ou des glandes de Meibomius.
Les composés détergents les plus étudiés sont les ammoniums quaternaires , composés amphiphiles hautement hydrosolubles et possédant des propriétés tensioactives. Ils agissent principalement via leurs propriétés détergentes, qui dissolvent les lipides, et détruisent les parois bactériennes et les membranes cellulaires [ 177]. Une relation claire entre les quantités cumulées de chlorure de benzalkonium (BAC) et l'instabilité du film lacrymal mesurée par le temps de rupture du film lacrymal et l'osmolarité a ainsi été démontrée [183]. Des effets indirects peuvent également se produire si l'inflammation chronique induite par le médicament stimule la kératinisation [184], provoquant le piégeage du contenu des cellules caliciformes et une métaplasie squameuse. La kératinisation du bord de la paupière peut en outre entraîner un dysfonctionnement des glandes de Meibomius. De plus, la destruction ou le dysfonctionnement des cellules caliciformes entraînent une perte des propriétés immunosuppressives induites par les cellules sécrétant des mucines, ce qui peut encore augmenter l'inflammation chronique par la perte de leur rétroaction négative vers les cellules dendritiques [185].
Cliniquement, il reste difficile de discriminer entre l'évolution spontanée d'une maladie de la surface oculaire et les effets iatrogènes. Les symptômes et le calendrier de l'allergie conjonctivale induite par l'instillation de collyres peuvent être évocateurs, mais une simple rougeur conjonctivale ou une conjonctivite papillaire peuvent être observées avec ou sans eczéma. Des réactions allergiques retardées peuvent également survenir, imitant souvent une blépharite avec inflammation de bas grade. De même, il peut être très difficile de distinguer une prise de fluorescéine par l'épithélium cornéen due au SSO, qu'il soit préexistant ou iatrogène, d'une épithéliopathie toxique ou d'une fonte cornéenne, comme celles induites par l'abus d'anesthésiques ou d'anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Dans de telles conditions confusionnelles, les relations entre les collyres et l'inflammation oculaire, l'instabilité des larmes ou la prise de fluorescéine sont souvent difficiles à évaluer, en particulier lorsque le traitement est obligatoire pour une affection grave menaçant la vue, comme c'est le cas dans le glaucome où des traitements à long terme sont nécessaires, le plus souvent tout au long de la vie.
Traitements antiglaucomateux
Le traitement médical du glaucome est administré sur le long terme et la plupart des patients le reçoivent pendant plusieurs décennies, voire pendant la majeure partie de leur vie. Les essais cliniques randomisés (ECR) montrent une bonne tolérance globale des traitements du glaucome, avec seulement quelques patients retirés en raison d'une intolérance locale, d'une sécheresse oculaire ou d'une allergie. Cependant, il existe plusieurs différences majeures entre les essais cliniques et l'utilisation réelle : les essais cliniques sont généralement de courte durée, la plupart des patients ne reçoivent qu'un seul médicament et les interactions possibles ou les effets toxiques additifs de divers composés ne sont pas abordés. De plus, pour des raisons éthiques, les patients présentant une hypersensibilité connue à la molécule active ou au conservateur, et ceux présentant des maladies concomitantes actives, en particulier une sécheresse oculaire active ou sévère, une blépharite ou une allergie, ne sont pas inclus dans ces essais.
En revanche, toutes les études d'observation fondées sur des évaluations en situation de vraie vie ont systématiquement montré une proportion beaucoup plus importante de patients souffrant de symptômes et de signes de maladie de la surface oculaire. Certaines d'entre elles comprenaient un nombre si élevé de patients, par exemple plus de 20000 dans la plus grande enquête réalisée en Allemagne [186], que leur valeur clinique ne pouvait pas être niée [ 175 , 187-188-189]. À l'échelle mondiale, environ 50 % des patients atteints de glaucome souffrent de symptômes et de signes de SSO, dont 20 à 30 % sont considérés comme graves, ce qui est beaucoup plus que la prévalence prévue du SSO dans la même population d'âge. Dans une vaste enquête épidémiologique menée auprès de 4107 patients atteints de glaucome [187], la fréquence des signes et des symptômes augmentait avec le nombre de collyres conservés utilisés et était significativement plus faible pour tous les critères dans un groupe de patients traités avec des bêta-bloquants sans conservateur. Plus récemment, une enquête observationnelle a confirmé la forte prévalence du SSO chez les patients glaucomateux, en relation claire avec le nombre de collyres : 39 % et 43 % de SSO avec deux et trois médicaments, respectivement, alors que le SSO n'était présent que chez 11 % des patients recevant un collyre. Sur la base d'un score de symptômes de la surface oculaire, un SSO sévère a été trouvé chez 8,7 % et 15 % des patients avec deux et trois collyres, respectivement [190]. Une autre étude a également montré une relation claire avec le nombre de médicaments, quelle que soit leur famille. Cela laisse suggérer la présence d'un composé commun conduisant à de tels effets secondaires, à savoir le conservateur, seul composant commun à tous les collyres [189].
Il est intéressant de noter qu'une enquête a montré que près de 38 % des patients atteints de glaucome utilisaient des substituts lacrymaux, plus de la moitié d'entre eux contenant un conservateur. Cela illustre le manque de connaissances sur la cause iatrogène du SSO dans le glaucome. La stratégie qui consiste à ajouter un nouveau traitement pour soulager les symptômes de SSO, plutôt que d'en considérer la cause, conduit finalement à l'utilisation totalement illogique d'un collyre contenant un conservateur pour traiter un SSO iatrogène [176].
Rôle des conservateurs et des excipients
La pharmacopée recommande que les collyres contiennent un conservateur pour éviter la prolifération microbienne après ouverture du flacon. Les conservateurs utilisés dans les préparations ophtalmiques appartiennent à une variété de familles chimiques, y compris les dérivés du mercure, les alcools, les parabènes, l'EDTA et la chlorhexidine, mais les composés d'ammonium quaternaire, en raison de leurs faibles effets allergènes et de leurs profils de sécurité apparemment bons, sont progressivement devenus les principaux conservateurs utilisés aujourd'hui.
Le BAC est un mélange de chlorure d'alkylbenzyldiméthylammonium composé de chaînes C12 et C14, couramment utilisé à des concentrations allant de 0,004 à 0,02 %. Un grand nombre d'études cliniques et expérimentales utilisant des modèles in vitro ou in vivo ont montré des effets cytotoxiques du BAC sur plusieurs structures oculaires [191-192-193]. Le BAC est un irritant bien connu en dermatologie et allergologie, mais il est rarement reconnu comme le principal allergène responsable des dermatites de contact [ 194]. Ainsi, il est recommandé de privilégier les formulations sans conservateur pour traiter les allergies oculaires comme les saisonnières [ 195].
Effets du chlorure de benzalkonium (BAC) sur le film lacrymal
En raison de ses effets toxiques et pro-inflammatoires, ainsi que de ses propriétés détergentes, le BAC peut provoquer ou aggraver le SSO par divers mécanismes bien démontrés dans de vastes séries d'enquêtes expérimentales et cliniques [179 , 191 , 192]. Les cellules caliciformes produisent des mucines solubles et participent à la stabilité du film lacrymal et aux défenses immunitaires. Ces cellules sont extrêmement sensibles aux stress toxiques et inflammatoires. Il a été démontré chez l'homme une diminution de la densité après exposition au BAC ou à des formulations de timolol contenant du BAC [ 193 , 196]. L'exposition à long terme à des médicaments antiglaucomateux conservés a également entraîné une diminution de la densité des cellules caliciformes [ 197]. MUC1 et MUC16 ont été trouvés réduits après exposition au BAC dans les cellules épithéliales cornéennes et limbiques humaines. La microscopie électronique à transmission a révélé une altération de la couche de mucus après une exposition à 0,01 % de BAC pendant 5 ou 15 minutes, alors qu'une exposition plus prolongée (60 minutes) à 0,01 % de BAC a détruit la couche de mucus [198]. Ces effets toxiques sur les cellules caliciformes ont également été confirmés expérimentalement par Kahook et Noecker qui ont trouvé des densités de cellules caliciformes significativement plus faibles chez les animaux recevant du latanoprost contenant du BAC par rapport aux larmes artificielles sans conservateur [199].
De plus, en tant qu'agent tensioactif, le BAC est également un détergent pour la couche lipidique du film lacrymal, entraînant ainsi une diminution du temps de rupture du film lacrymal en cas de traitement bêta-bloquant avec conservateur par rapport à un traitement sans conservateur qui, lui, n'a pas eu d'impact sur la stabilité des larmes [200] ainsi qu'une augmentation de l'osmolarité lacrymale [183]. Par les deux mécanismes que sont les altérations du mucus et de la couche lipidique, le film lacrymal est donc globalement altéré avec une instabilité accrue et une évaporation excessive, deux caractéristiques principales du SSO. Il est intéressant de noter qu'à la suite de la perte de ses propriétés protectrices, le film lacrymal ainsi altéré non seulement déclenche des symptômes de SSO et des lésions cornéennes, mais il peut également véhiculer des médiateurs inflammatoires cytotoxiques à travers la surface oculaire. Par conséquent, une augmentation de la perméabilité épithéliale cornéenne a été montrée dans le SSO avec une altération supplémentaire en cas d'utilisation de larmes artificielles contenant du BAC par rapport aux collyres sans conservateur [201].
Les altérations du film lacrymal peuvent donc stimuler une série de changements biologiques au niveau de la surface oculaire conduisant à une inflammation neurogène et à une détérioration supplémentaire du film lacrymal, créant en fait un cercle vicieux [180].
Effets cytotoxiques du BAC
Il a été démontré que le BAC induit une diminution significative et dépendante de la concentration de la viabilité cellulaire, avec une augmentation de l'apoptose et du stress oxydant. Les effets pro-apoptotiques ont été observés à de très faibles concentrations de BAC avec un seuil de toxicité trouvé à environ 0,005 %, c'est-à-dire inférieur à la concentration habituelle utilisée dans la plupart des collyres. Il a également été démontré à plusieurs reprises que le BAC provoque une altération des jonctions serrées de l'épithélium cornéen, un effet qui a permis de considérer le BAC comme un activateur de la pénétration du médicament dans la chambre antérieure [ 191]. Une étude in vitro sur des cellules cornéennes a montré que le BAC induit une perturbation de l'homéostasie lipidique cellulaire, en favorisant des formes lipidiques impliquées dans l'inflammation ou dans des processus de mort cellulaire comme les céramides [202].
Il est aussi intéressant de noter que les effets cytotoxiques du BAC se sont révélés être augmentés expérimentalement lorsque les cellules étaient préalablement soumises à un stress hyperosmolaire imitant in vitro les conditions du SSO. Par conséquent, le BAC peut provoquer un certain niveau de toxicité dans des yeux normaux, comme dans le glaucome, qui peut être compensé par les défenses tissulaires, mais peut provoquer une toxicité plus importante dans des yeux secs, ce qui est cohérent avec les résultats cliniques.
Cependant, comme le BAC peut progressivement provoquer une instabilité lacrymale et donc une hyperosmolarité, ce composé est susceptible de modifier les conditions de sa propre tolérance et d'entraîner une augmentation des niveaux de toxicité [ 203 , 204]. En outre, il a été démontré que le BAC induit des effets neurotoxiques sur les terminaisons nerveuses du trijumeau, affectant également les cellules du ganglion trigéminé [ 205 , 206]. Ces résultats sont conformes à une vaste étude comparant les effets des médicaments antiglaucomateux avec et sans conservateur sur les nerfs cornéens en utilisant la microscopie confocale in vivo (IVCM) [207]. La densité des cellules épithéliales superficielles et le nombre de nerfs dans le plan sous-basal ont été réduits dans les groupes contenant des conservateurs; l'activation des kératocytes du stroma ainsi que des nerfs formant des billes était plus élevée dans les groupes de traitement avec conservateur que dans les groupes témoins sans conservateur. De plus, cette étude a mis en évidence une diminution de la sensibilité cornéenne, fondée sur l'esthésiométrie, dans tous les groupes avec conservateurs par rapport aux prostaglandines et bêta-bloquants contrôles ou non conservés. Cette propriété neurotoxique du BAC pourrait ainsi participer au confort apparemment bon des patients recevant des collyres contenant du BAC.
Effets pro-inflammatoires du BAC
Des données expérimentales ont également mis en évidence des effets pro-inflammatoires directs du BAC avec libération de cytokines inflammatoires ou augmentation de l'expression de récepteurs de chimiokines et de cytokines [ 204 , 208 , 209]. Chez l'homme, à l'aide de méthodes immunocytologiques et de cytométrie en flux, il a également été possible de révéler une augmentation de l'expression de l'antigène de classe II du complexe majeur d'histocompatibilité humain (CMH), HLA-DR, à la surface des cellules épithéliales de la conjonctive prélevées par la technique de l'empreinte, un marqueur d'inflammation de la surface oculaire, en présence de collyres conservés [197]. D'autres marqueurs liés à l'inflammation, comme ICAM-1, les interleukines 6 (IL-6), IL-8 et IL-10, les récepteurs de chimiokines CCR4 ou CCR5, ont également été trouvés surexprimés chez les patients atteints de glaucome, d'autant plus en cas de polythérapie et en présence de collyres conservés [210]. Au niveau clinique, Zhyvov et al. ont montré avec l'IVCM une infiltration significative de la cornée centrale avec des cellules inflammatoires dendritiques chez des volontaires sains recevant des collyres contenant du BAC par rapport à une solution sans conservateur [ 211].
Études de switch
Plusieurs études ont montré que le passage d'une formulation avec conservateur à une formulation sans conservateur améliorait significativement la surface oculaire et réduisait les symptômes. Cela a été observé pour les bêta-bloquants avec une réduction de 50 % des signes et des symptômes, à des niveaux inférieurs à ceux de la population générale [188]. Ces résultats sont importants car ils indiquent que les bêta-bloquants en formulation sans conservateur ne semblent pas induire d'aggravation du SSO et que leur utilisation n'est apparemment pas associée à une augmentation du taux de SSO. Des résultats similaires ont également été trouvés lors du passage d'une prostaglandine conservée, le latanoprost, à une formulation non conservée d'un autre analogue de prostaglandine [ 212 , 213].
Fait intéressant dans ces études, la réversibilité des lésions inflammatoires peut être obtenue rapidement, comme le montre le retour à la normale du taux de cellules dendritiques en moins de 1 mois [ 211]. Dans une enquête australienne menée auprès de 375 patients, le passage aux collyres antiglaucomateux sans conservateur a montré une diminution de l'utilisation par les patients de substituts lacrymaux, une amélioration du questionnaire de qualité de vie et une diminution du nombre de patients présentant une instabilité lacrymale anormale sans effet sur le contrôle de la pression intraoculaire [ 214].
Conservateurs alternatifs
De nouveaux conservateurs récemment développés comme alternatives au BAC tels que les Polyquad®, Purite® ou sofZia® ont entraîné des effets cytotoxiques significativement plus faibles [191 , 209]. Cependant, leurs effets possibles sur le film lacrymal et la tolérance chez les patients atteints de SSO n'ont pas été suffisamment étudiés.
Autres traitements topiques pouvant provoquer une sécheresse oculaire
De nombreux médicaments topiques et excipients ont été considérés comme provoquant un SSO [181], mais des données spécifiques sur les principes actifs font pour la plupart défaut, car les préparations ophtalmiques sont le plus souvent testées en formulations conservées, ce qui peut gêner l'interprétation sur le rôle respectif du principe actif, des conservateurs et des excipients. Certaines informations peuvent aider à interpréter les résultats, mais une réponse définitive ne sera pas obtenue tant que les médicaments suspects ne seront pas disponibles dans des formulations sans conservateur.
Bêta-bloquants
Les bêta-bloquants sont des exemples de médicaments généralement considérés comme réduisant la sécrétion lacrymale et provoquant des symptômes de SSO en utilisation clinique. Cependant, lorsqu'ils ont été testés sans conservateur, les bêta-bloquants topiques se sont avérés systématiquement beaucoup moins délétères pour la surface oculaire (voir ci-dessus). Chez des volontaires sains, Ishibashi et al. ont démontré que le timolol conservé provoquait une instabilité du film lacrymal et une perturbation de la fonction de barrière de la cornée significativement plus élevées que le timolol sans conservateur [ 215]. Des résultats similaires ont été trouvés chez des volontaires sains lors de la comparaison du cartéolol avec ou sans BAC, sans effet visible du bêta-bloquant sans conservateur [200]. Cependant, Kuppens et al. ont constaté que le renouvellement lacrymal restait inférieur à la normale avec le timolol sans conservateur, même si les valeurs étaient meilleures qu'avec le timolol conservé [216].
Anti-allergiques
Les antihistaminiques sont connus pour réduire la sécrétion lacrymale au moins lorsqu'ils sont administrés par voie orale. Sur le plan topique, peu de données sont disponibles, d'autant plus que la plupart des préparations sont testées dans des formulations conservées. Dans un modèle expérimental, des différences entre l'épinastine et l'olopatadine ont été trouvées qui ne pouvaient pas être attribuées à BAC, en faveur de l'épinastine qui ne réduisait pas le volume lacrymal [217]. Une étude comparant du kétotifène à 0,025 % non conservé avec du kétotifène 0,05 % conservé a montré une meilleure efficacité et une meilleure tolérance avec la formulation non conservée [195 , 218].
Anesthésiques topiques et composés épithéliotoxiques
L'anesthésie topique provoque un SSO en altérant l'arc sensoriel conduisant à la sécrétion lacrymale et également en réduisant la fréquence des clignements. L'utilisation chronique d'anesthésiques topiques peut provoquer une kératite neurotrophique et conduire dans le pire des cas à une fonte cornéenne. Une toxicité cornéenne similaire a été décrite avec l'utilisation de collyres AINS et d'antimétabolites utilisés pour la chirurgie du glaucome ou le needling postopératoire. Cependant, un effet toxique direct est plus probable que l'induction d'un SSO.
Autres excipients présents dans les formulations topiques
D'autres excipients courants dans les formulations ophtalmiques (solutions, pommades, suspensions et émulsions) pourraient également contribuer aux symptômes de SSO. De nombreux tensioactifs, solubilisants et agents de conservation courants dans les produits topiques ophtalmiques pourraient également avoir un impact sur la stabilité du film lacrymal. Bien qu'il n'existe peut-être pas d'études spécifiques sur les effets de chacun de ces ingrédients, il y a de bonnes raisons de penser qu'ils pourraient avoir un impact sur la stabilité ou sur l'épaisseur du film lacrymal. Les effets de ceux-ci pourraient être mieux compris dans les prochaines années à mesure que le marché continuera d'évoluer contre l'utilisation du BAC vers des produits sans conservateur (c'est-à-dire de nouveaux contenants multidoses), ou un conservateur moins délétère (sofZia®, Polyquad®, Purite®, etc.). De plus, les propriétés chimiques de la formulation telles que l'iso-/hypotonie ou le pH peuvent aussi avoir un impact sur le film lacrymal et la tolérance locale lors de l'instillation. Même si on sait peu de choses sur un tel impact, leurs effets sur les yeux secs et les cornées endommagées pourraient être non négligeables.
Prise en charge thérapeutique : recommandations
Suppression ou réduction des conservateurs
La stratégie de soustraction est toujours préférable lorsque l'on considère les effets iatrogènes. La première étape est l'identification du rôle d'un médicament, ce qui peut être très difficile lorsque des effets secondaires surviennent tardivement après l'introduction du traitement, lorsque plusieurs médicaments et molécules sont utilisés, lorsque la surface oculaire est altérée de façon concomitante ou lorsque le traitement ne peut pas être interrompu sans mettre en danger la fonction visuelle. L'utilisation de collyres pour soulager les symptômes de SSO peut être nécessaire, mais l'ajout de collyres conservés sur un œil sec induit par d'autres collyres, et probablement le conservateur, est au moins inefficace et au pire une cause d'aggravation supplémentaire. Chaque fois que le médicament est identifié, des efforts doivent être faits pour arrêter le traitement avec conservateur si possible. Comme la toxicité du BAC est dose-dépendante, la réduction du nombre de collyres conservés peut être utile et peut réduire le fardeau des effets secondaires à des niveaux acceptables [ 188 , 214]. Pour traiter le glaucome, des collyres sans conservateur ont été développés dans différentes classes de médicaments; la trabéculoplastie au laser ou la chirurgie peuvent être des options à envisager lorsque la surface oculaire est gravement altérée et la qualité de vie trop diminuée.
Utilisation de conservateurs alternatifs
Des conservateurs à faible toxicité ont été développés et ont montré peu ou pas d'effets sur la surface oculaire [ 199 , 209]. Ils peuvent être proposés de manière à soustraire ou réduire les composés les plus toxiques. En cas de SSO, ils peuvent offrir des options plus sûres que celles obtenues avec le BAC.
Futures directions
L'utilisation de composés sans conservateur avec un bon profil de sécurité vis-à-vis du risque de prolifération des micro-organismes est la meilleure option et la plupart des entreprises développent actuellement de tels traitements. Cependant, l'utilisation d'unités unidoses peut être coûteuse, inappropriée pour les patients handicapés et peut soulever des problèmes environnementaux lorsqu'on envisage de jeter ou de recycler des tonnes de plastiques. Les flacons multidoses sans conservateur ont commencé à se développer et pourraient devenir à l'avenir la référence pour un parfait compromis entre simplicité de manipulation, rentabilité et sécurité.
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Les références peuvent être consultées en ligne à l'adresse suivante : http://www.em-consulte.com/e-complement/477020 .
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