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Chapitre 7
Mise sur le marché du médicament en ophtalmologie

C. Bardin

L'essentiel
  • La recherche clinique est encadrée par des lois précises, dont il convient de connaître les contenus et de suivre les évolutions.
  • Alors que de très nombreux médicaments rentrent en essais cliniques ophtalmologiques, un nombre très restreint atteint le stade d'autorisation de mise sur le marché.
  • Seuls les médicaments qui ont rempli toutes les exigences réglementaires et démontré un bénéfice rendu suffisant pourront en effet devenir accessibles aux patients.
  • En ophtalmologie, peu de critères d'efficacité sont reconnus par les autorités de santé, car ceux-ci exigent des critères d'évaluation fonctionnels. Plus récemment, des critères anatomiques de substitution ont été acceptés et pourraient faciliter le développement de nouveaux médicaments.
Phases de développement d'un médicament et aspects réglementaires
Les étapes du développement d'un médicament
Parmi les étapes clés du développement d'un médicament, la phase préclinique permet d'évaluer une molécule sur des cellules en culture (in vitro) et chez l'animal (in vivo). La phase clinique permet ensuite de passer chez l'homme, pour tester la molécule chez des personnes saines, puis évaluer sa sécurité et son intérêt chez des malades.
L'évaluation clinique repose sur trois phases.
  • La phase I est menée sur un nombre limité de volontaires, sains ou malades en fonction de la molécule évaluée. Il s'agit de la tester pour la première fois chez l'homme afin d'observer son évolution dans l'organisme en fonction du temps (pharmacocinétique) et d'évaluer sa sécurité. Ces essais permettent de déterminer la dose maximale tolérée (DMT, ou maximal tolerated dose [MTD]) avec des ascensions de doses par paliers et suivant des méthodologies bien standardisées. Ces essais sont réalisés dans des centres d'investigations clinique (CIC).
  • La phase II se déroule chez des volontaires malades. L'objectif est de déterminer la tolérance et l'efficacité de la molécule. Une première étape permet de déterminer la dose minimale efficace, pour laquelle les effets indésirables sont inobservables ou minimes. La deuxième étape est réalisée avec des petits effectifs homogènes et des administrations répétées du médicament, limitées dans le temps.
  • La phase III a comme objectif la démonstration et la confirmation d'efficacité du médicament. Elle permet d'évaluer l'efficacité du médicament sur une cohorte de patients plus importante : de quelques centaines en cas de cancer, à des milliers pour des maladies cardiovasculaires. Il s'agit d'études multicentriques, en double insu, contrôlées avec un groupe placebo ou comparateur actif. C'est à l'issue de la phase III que les résultats peuvent être soumis aux autorités européennes de santé (European Medicines Evaluation Agency [EMEA]) pour l'obtention de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) .
Sur le plan méthodologique, et dans le cas spécifique des essais en ophtalmologie, la question de l'évaluation sur un seul œil dans certaines pathologies n'a pas montré de supériorité. De manière générale, l'évaluation sur les deux yeux montre une supériorité statistique [1].
Après l'AMM, une évaluation par la Haute autorité de santé (HAS) est réalisée en vue du remboursement et de la fixation du prix. L'évaluation du service médical rendu (SMR) et de l'amélioration du service médical rendu (ASMR) est réalisée par la commission de la transparence de la HAS en vue du remboursement. Pour les médicaments se revendiquant innovants et pouvant avoir un impact significatif sur les dépenses de l'Assurance maladie, une évaluation de l'efficience par la commission évaluation économique et santé publique (CEESP) de la HAS est effectuée.
Bonnes pratiques cliniques (BPC)
Les BPC constituent l'ensemble des exigences de qualité dans les domaines éthique et scientifique, reconnues au plan international, qui doivent être respectées lors :
  • de la planification, la mise en œuvre;
  • de la conduite, du suivi;
  • du contrôle qualité, de l'audit;
  • du recueil des données, de l'analyse;
  • de l'expression des résultats des recherches biomédicales.
Les BPC assurent ainsi :
  • la protection des droits, de la sécurité et du bien-être des patients participant à un essai clinique;
  • la crédibilité des données recueillies dans le cadre de l'étude.
Le processus de recherche clinique fait intervenir un grand nombre de professionnels assurant la promotion, l'investigation, le support méthodologique et la valorisation des essais cliniques. Les missions et responsabilités de chacun sont clairement identifiées.
  • Le promoteur : c'est la personne physique ou morale qui prend l'initiative d'une recherche, assure la gestion et vérifie que son financement est prévu. Le promoteur peut être :
    • institutionnel : délégations inter-régionales de recherche clinique (DIRC), Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS), société savante, etc. (recherche académique);
    • industriel : laboratoires pharmaceutiques parfois représentés par des contract research organizations (CRO).
  • L' investigateur : c'est une personne physique, un médecin (obligatoirement pour une RIPH1) qui dirige et surveille la réalisation de la recherche sur un lieu. Il inclut les patients dans l'étude et veille à la sécurité des personnes. Il est responsable de l'information et du recueil du consentement du participant à la recherche. L'investigateur principal établit la liste des personnes à qui il délègue les activités importantes de l'essai qui relèvent de sa responsabilité (co-investigateurs).
Deux textes de référence sont à connaître dans le cadre des BPC :
  • Guideline for Good Clinical Practice E6(R2), ICH (International Conference on Harmonization ) harmonised guideline : c'est le standard mondialement accepté pour la conduite des essais cliniques élaboré par la Conférence internationale d'harmonisation des bonnes pratiques cliniques : réunion des autorités réglementaires d'Europe, des États-Unis et du Japon pour le développement d'un standard BPC-ICH adopté dans ces trois régions. La première version des ICH E6 Good Clinical Practice Guideline (GCP) a été finalisée en 1996. Le document a été amendé en 2016 [2];
  • bonnes pratiques cliniques (France) : règles de bonnes pratiques cliniques pour les recherches biomédicales portant sur des médicaments à usage humain, décision du 24 novembre 2006 [3].
Aspects éthiques et économiques
Principes fondateurs de l'éthique de la recherche
« La recherche d'aujourd'hui, ce sont les soins de santé de demain.» Cette simple affirmation résume la raison pour laquelle la recherche biomédicale est si importante. Qu'elle implique des interventions sur des patients ou sur des volontaires sains, ou qu'elle consiste en l'utilisation de tissus humains ou de cellules conservés, ou encore de données, la recherche biomédicale devrait, dans tous les cas, avoir pour objectif de réduire les incertitudes actuelles et d'améliorer nos connaissances en matière de santé et concernant les maladies.
En découlent des règles (consentement préalable, confidentialité, équilibre bénéfices/risques, équité, publication des résultats, etc.) reprises dans des textes de loi et dans des normes de bonnes pratiques cliniques appliquées par les acteurs de la recherche (promoteurs, comités d'éthique, investigateurs, etc.).
La dimension internationale, universelle, a été un levier majeur dans l'établissement des principes de l'éthique de la recherche. C'est au XX e siècle qu'ont été élaborés les textes fondateurs des principes essentiels de l'éthique internationale de la recherche médicale avec participation d'êtres humains.
Après la Seconde Guerre mondiale, une prise de conscience internationale s'opère en matière d'éthique des expérimentations humaines pour la protection des individus. Le Code de Nuremberg reconnaît que l'expérimentation sur l'homme « pour le bien de la société» est admissible et qu'il est absolument nécessaire d'obtenir le consentement volontaire et préalable du malade [4].
Adoptée par l'Association médicale mondiale en 1964, la Déclaration d'Helsinki définit les bases de l'éthique dans la recherche biomédicale et constitue un guide pour les médecins qui y participent. Elle a été révisée à de nombreuses reprises depuis lors, la dernière version datant d'octobre 2013 [5].
Parmi les points fondamentaux, on peut retenir :
  • l'être humain a la primauté sur l'intérêt de la science et de la société;
  • la responsabilité de l'étude repose sur la personne médicalement qualifiée qui la conduit;
  • le recueil du consentement éclairé du sujet pour participer à l'étude est primordial;
  • un comité d'éthique indépendant du promoteur et de l'investigateur doit être mis en place afin de revoir les protocoles d'études pour évaluation et avis. Le comité doit suivre les lois et réglementations du pays où est conduite la recherche;
  • pour les populations vulnérables (handicap physique ou mental) et les personnes mineures, le consentement doit être obtenu auprès du représentant légal;
  • l'utilisation du placebo est possible dans certaines études, seulement s'il n'existe pas d'autre méthode diagnostique ou thérapeutique éprouvée;
  • aucune exigence réglementaire, juridique ou éthique nationale ne peut éliminer ou réduire le niveau de protection des sujets humains, tel que cela est défini dans la déclaration.
Les grands principes éthiques de la recherche sont reflétés dans diverses lignes directrices relatives à l'éthique biomédicale, ainsi que dans des instruments juridiquement contraignants, concernant la protection des participants à la recherche biomédicale, comme la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine [ 6]. Un point central est que les intérêts et le bien-être de l'être humain qui participe à une recherche doivent toujours prévaloir sur le seul intérêt de la science et de la société.
Trois grands principes pour les participants à la recherche sont retenus :
  • autonomie : elle est mise en œuvre en particulier à travers le processus de consentement libre et éclairé, préalable à toute implication dans une activité de recherche et sans contrainte ou pression. Les informations doivent être compréhensibles par tous; la manière dont elles sont fournies et leur forme sont particulièrement importantes. C'est le principe de la note d'informations évaluée par les comités de protection des patients (CPP) en France. Une attention particulière doit être portée aux personnes dépendantes et vulnérables dont la participation à un projet de recherche doit toujours être justifiée de façon spécifique;
  • bienfaisance et non-malfaisance. Le rapport entre les risques et les bénéfices est un point crucial. Une recherche ne devrait démarrer que si les risques et les contraintes prévisibles ne sont pas disproportionnés par rapport aux bénéfices potentiels. Le risque peut être non seulement de nature physique, mais aussi psychologique. Le risque pour la vie privée doit également être pris en compte (protection des données). Cette évaluation du rapport bénéfice/risque fait l'objet d'un paragraphe spécifique dans les documents du projet de recherche soumis au CPP et l'ANSM;
  • justice. Cette notion recouvre le principe d'équité et celui d'impartialité : qui doit recevoir les bénéfices de la recherche, qui en supporte les risques et contraintes? À l'échelle internationale, le principe de justice distributive revêt une pertinence particulière, en pratique, lorsque la recherche se déroule dans des pays à ressources limitées.
Par ailleurs, toute recherche doit être scientifiquement justifiée sur la base d'une connaissance approfondie de l'état de l'art en la matière et par une expérimentation préclinique préalable appropriée. Elle doit répondre aux critères de qualité scientifiques reconnus.
Textes en appui de l'éthique
On distingue des textes non contraignants d'un point de vue juridique (Déclaration d'Helsinki, BPC, etc.), et des textes juridiquement contraignants : textes de la communauté européenne, Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine [6], seul instrument juridique contraignant international pour la protection des droits de l'homme dans le domaine biomédical, et les textes en vigueur dans chaque État (loi Huriet-Sérusclat et désormais loi Jardé pour la France [7 , 8]).
Si les grands principes éthiques sont à peu près les mêmes dans tous les pays, l'encadrement juridique est très variable d'un pays à l'autre. Leur application assure la protection des droits de l'homme dans les situations de recherche.
  • Du point de vue juridique, les projets de recherche doivent être en conformité avec les lois pertinentes du pays dans lequel la recherche va être menée.
  • Quant à la loi de chaque pays, elle doit répondre aux exigences de l'ensemble des lois/traités internationaux auxquels le pays concerné a souscrit.
Par ailleurs, ces règles d'éthique sont également reprises dans les normes de BPC appliquées par les acteurs de la recherche (promoteurs, comités d'éthique, investigateurs, etc.).
Nouvelles lois de bioéthique et conséquences
Loi Huriet-Sérusclat
La loi Huriet-Sérusclat de décembre 1988, intégrée au Code de la santé publique (CSP), a posé les fondements juridiques en France de l'autorisation et l'organisation de la recherche sur l'homme, dont le volontaire sain, et notamment la protection des participants à la recherche biomédicale [7].
La loi crée les comités d'éthique de la recherche appelés comités consultatifs pour la protection des personnes se prêtant aux recherches biomédicales (CCPPRB) en 1991, transformés en comités de protection des personnes (CPP) en 2004 qui émettent un avis consultatif, et met en place l'information et le consentement à la recherche. Elle définit également des populations vulnérables à protéger (mineurs, prisonniers, etc.), exige l'affiliation à la Sécurité sociale et impose une assurance au promoteur.
Le socle de base de la loi Huriet-Sérusclat restait la recherche biomédicale : « Recherches organisées et pratiquées sur l'être humain en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales». Ce cadre était néanmoins restrictif. La loi de santé publique de 2004 (art. L1121-1) a étendu le périmètre des recherches encadrées juridiquement en identifiant les « recherches visant à évaluer les soins courants», recherches également interventionnelles avec des risques et contraintes négligeables, et devant être évaluées par un CPP. Le cadre juridique, même s'il était très complet en termes de protection des patients, restait néanmoins insuffisant, car il excluait du champ de l'évaluation par un comité d'éthique l'ensemble des recherches non interventionnelles. Ce point posait des problèmes aux équipes de recherche pour communiquer les résultats de la recherche, notamment lors de la soumission d'un article à une revue scientifique qui exige en prérequis l'approbation d'un comité d'éthique.
Une évolution juridique, la loi Jardé
La recherche biomédicale est aujourd'hui encadrée juridiquement par la loi Jardé [8]. Celle-ci a fait l'objet d'une première proposition en 2009, et d'un vote à l'Assemblée nationale et au Sénat en 2012. Les recherches sont néanmoins restées encore plusieurs années sous l'ancien cadre juridique, car les décrets d'application de la loi Jardé n'ont été promulgués qu'en novembre 2016. Les arrêtés précisant le périmètre des catégories de recherches ont été disponibles en 2018.
Contexte de la loi Jardé
Le souhait des pouvoirs publics était :
  • de « professionnaliser davantage la recherche clinique»;
  • d'établir un cadre juridique unique pour les recherches impliquant la personne humaine;
  • de réduire les potentiels liens d'intérêts entre promoteurs/investigateurs et CPP.
La loi Jardé s'inscrit dans un contexte d'évolution des textes européens : règlement européen sur les essais cliniques de médicaments et dispositifs médicaux, règlement européen sur les données personnelles. Les principaux apports ont consisté à créer un cadre juridique unique pour toutes les catégories de recherches « impliquant la personne humaine», y compris les recherches observationnelles, avec un socle réglementaire commun (avis systématique d'un CPP, identification d'un promoteur, etc.). L'approche pragmatique est fondée sur le risque avec la création de trois catégories de recherches en fonction du risque et de la contrainte ajoutés par la recherche (CSP, art. L1121-1) :
  • catégorie 1 : recherches interventionnelles (ex-recherches biomédicales [RBM] loi Huriet);
  • catégorie 2 : recherches avec des contraintes minimes (ex-recherches en soins courants);
  • catégorie 3 : recherches non interventionnelles (non décrites dans la loi Huriet).
Cette catégorisation des recherches avec une approche fondée sur le risque a également été développée dans le cadre de la rédaction du règlement européen des essais de médicaments, et dans le cadre de la révision des BPC (ICH-GCP) en 2017. La loi Jardé a permis une clarification des dispositions relatives aux échantillons et collections biologiques constituées au cours de la recherche. Le socle commun est défini par le terme recherches impliquant la personne humaine (RIPH) : « recherches organisées et pratiquées sur l'être humain en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales». Ne sont pas des RIPH :
  • les recherches qui ne répondent pas aux finalités des RIPH (développement des connaissances biologiques ou médicales), même si elles sont pratiquées ou organisées sur la personne saine ou malade (exemple des expérimentations en sciences humaines ou sociales);
  • les recherches qui visent à évaluer des modalités d'exercice des professionnels de santé (EPP) ou des pratiques d'enseignement dans le domaine de la santé.
Catégorie 1 (RIPH catégorie 1)
Ce sont des recherches interventionnelles qui comportent une intervention sur la personne non justifiée par sa prise en charge habituelle. Ces RIPH de catégorie 1 doivent faire l'objet d'une évaluation et d'une autorisation conjointe de l'ANSM et d'un CPP.
Catégorie 2 (RIPH catégorie 2)
Ce sont des recherches interventionnelles avec risques et contraintes minimes. Elles intègrent une ou plusieurs interventions ajoutées à la pratique courante, mais ne comportant que des risques et contraintes minimes. Le caractère minime des risques et contraintes s'apprécie au regard de l'âge, de la condition physique et de la pathologie éventuelle de la personne se prêtant à la recherche, ainsi que de la fréquence, de la durée et des éventuelles combinaisons de ces interventions. Sont exclues des recherches de catégorie 2 celles dont l'objet porte sur un médicament. La liste des interventions pouvant être réalisées dans une catégorie 2 a été fixée par arrêté [ 9]. À titre d'exemples, on peut citer :
  • les prélèvements de sang effectués spécifiquement pour la recherche qui sont réalisés par ponction veineuse, périphérique ou capillaire et dont le volume total du prélèvement ne dépasse pas les limites définies en annexe de l'arrêté [9];
  • le prélèvement et la collecte d'échantillons biologiques, autre que le sang, spécifiquement pour les besoins de la recherche :
    • biopsies cutanées superficielles à l'exclusion des biopsies de la face et plis;
    • tissus ou biopsies élargis ou supplémentaires à l'occasion de gestes médico-chirurgicaux réalisés dans le cadre du soin;
    • urines après sondage;
    • liquide amniotique supplémentaire à l'occasion d'un prélèvement réalisé dans le cadre du soin;
    • liquide céphalorachidien prélevé à l'occasion du soin (volume total du soin et de la recherche ≤ 5 ml).
  • les techniques de recueil de données au moyen de capteurs ou de méthodes d'imagerie, sans franchissement de la barrière cutanée ou muqueuse. L'imagerie ne doit pas comporter d'injection de produits de contraste ou de médicaments radiopharmaceutiques (radiographie standard, scanners, imagerie par résonance magnétique [IRM]);
  • les techniques de psychothérapie et de thérapies cognitivo-comportementales dans le cadre d'un protocole établi et validé;
  • d'autres interventions susceptibles d'être réalisées et portant sur les produits cosmétiques :
    • prélèvements de cheveux sans conséquence esthétique significative;
    • tests par instillation dans l'œil;
    • tests de détection de la sensibilité cutanée au moyen de substances pharmacologiques habituellement utilisées pour cet usage; tests de protection solaire.
  • les entretiens, observations et questionnaires dont les résultats peuvent conduire à la modification de la prise en charge médicale habituelle du participant et ne relevant pas de ce fait de la recherche de catégorie 3.
Catégorie 3 (RIPH catégorie 3)
Ce sont des recherches non interventionnelles portant sur des personnes saines ou malades et comportant un ou plusieurs actes ou procédures dénués de risques. L'absence de risque s'apprécie notamment au regard du sexe, de l'âge, de la condition physique et de la pathologie éventuelle de la personne se prêtant à la recherche. Lorsque ces recherches sont réalisées dans le cadre du soin, ces actes ou procédures ne doivent pas retarder, prolonger ou perturber le soin. Comme pour les catégories 2, ces actes ou procédures dénués de risques sont fixés par un arrêté du 12 avril 2018 [10]. À titre d'exemples, on peut citer :
  • le recueil supplémentaire d'éléments ou de produits du corps humain effectué à l'occasion d'un prélèvement de ces éléments et produits réalisé dans le cadre du soin, pour les besoins spécifiques de la recherche. Le volume de sang supplémentaire respecte les indications fixées en annexe de l'arrêté. La différence avec les recherches de catégorie 2 est qu'il s'agit dans ce cas de prélèvements de sang effectués spécifiquement pour la recherche;
  • le recueil d'éléments de produits du corps humain qui ne présente aucun caractère invasif, ces éléments n'étant pas prélevés dans le cadre du soin : salive, glaire, urine, selles, lait maternel, poils, cheveux, sueur, etc.;
  • l'écouvillonnage superficiel de la peau, du nez, du conduit auditif, de la cavité buccale incluant l'oropharynx;
  • le recueil par capteurs extracorporels non invasifs. Les techniques de recueil intègrent par exemple :
    • enregistrements et mesures électriques ou électromagnétiques et optiques, notamment par tensiométrie, ECG, EEG, EMG, polysomnographie, électro-oculographie, échographie externe;
    • mesures transcutanées (oxymétrie); mesures par bio-impédancemétrie, calorimétrie indirecte;
    • Doppler, débitmétrie.
  • les enregistrements audio-vidéo, photographiques, hors imagerie médicale;
  • le recueil de données électrophysiologiques sur matériel implanté ou en cours d'implantation pour le soin;
  • les entretiens, observations, tests et questionnaires qui ne peuvent pas mettre en jeu la sécurité de la personne ou conduire à la modification de sa prise en charge habituelle, et dont les contraintes apportées à la personne qui se prête à la recherche sont négligeables.
La distinction entre une recherche de catégorie 2 ou 3, notamment sur les questions de prélèvements sanguins ou l'intégration d'entretiens ou questionnaires, est importante car l'obligation d'assurance ne concerne que les catégories 2.
Toutes les recherches non interventionnelles (RNI) sont-elles des recherches de catégorie 3 entrant dans le cadre de la loi Jardé?
Non, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) entérine la distinction de la loi Jardé entre les recherches « impliquant la personne» et la « recherche sur données, ou personne source de données» (existantes ou recherches rétrospectives). En pratique :
  • RNI sur la personne humaine (loi Jardé) : par exemple des observations portant sur l'observance des traitements, la tolérance d'un médicament après son AMM, les pratiques d'un centre de soins comparé à un autre;
  • RNI sur les données (loi Jardé) : les recherches portant sur des données rétrospectives (thèses sur dossiers médicaux par exemple) sont exclues du cadre Jardé car elles ne portent pas sur des personnes, mais sur des données.
Cette distinction est importante car, pour les recherches hors loi Jardé, la soumission du projet de la recherche à un CPP n'est pas requise. Ces recherches relèvent du seul avis de la CNIL, qui repose sur un avis préalable du comité d'expertise pour les recherches, les études et les évaluations dans le domaine de la santé (CEREES). Il existe quoi qu'il en soit une obligation d'informer les personnes de la recherche, sans obligation d'un consentement signé. La loi Jardé définit les modalités de soumission du projet de recherche. Tous les documents du dossier sont déposés sous forme électronique (plateforme SI). Le contenu du dossier du projet de recherche pour autorisation est défini par des arrêtés publiés au Journal Officiel . Après dépôt du dossier sur la plateforme électronique, un tirage au sort électronique est réalisé pour la désignation du CPP qui évaluera le dossier. La figure 7-1
Fig. 7-1
Synthèse des recherches impliquant la personne humaine (RIPH) de catégories 1, 2 et 3.
ANSM : Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé; CNIL : Commission nationale de l'informatique et des libertés; CPP : comité de protection des patients.
synthétise les RIPH de catégories 1, 2 et 3.
Règlement européen des essais cliniques de médicaments
Le règlement européen sur les essais cliniques de médicaments est entré en vigueur le 31 janvier 2022 [11]. Tous les essais cliniques de médicaments seront désormais encadrés par cette réglementation. Un des objectifs est d'harmoniser l'évaluation des essais cliniques dans les différents pays européens tout en conservant un niveau élevé de protection des participants.
Les essais cliniques devront faire l'objet de deux évaluations qui devront être favorables :
  • une évaluation coordonnée au niveau européen (protocole de la recherche, documents scientifiques sur le médicament à l'essai, etc.) par les autorités de santé, l'ANSM en France;
  • une évaluation systématiquement française et effectuée par les CPP, concernant la protection des participants à l'essai, les modalités de recrutement des patients, la lisibilité de l'information fournie, l'adéquation du lieu de recherche ou encore la formation des investigateurs.
Si l'essai est conduit uniquement en France, l'évaluation de la demande d'autorisation d'un essai clinique sera effectuée uniquement en France pour les deux décisions. En cas de conduite d'un essai dans plusieurs pays européens, la décision sur les documents scientifiques et le protocole de la recherche sera une décision commune des autorités de santé des pays impliqués dans cette recherche (donc avec implication de l'ANSM en France), et la décision portant sur la protection des personnes sera une décision prise uniquement par la France, par les CPP, pour les centres investigateurs français.
Protection des données dans la recherche
C'est une obligation réglementaire quel que soit le type de recherche, et les données de santé sont considérées comme des données sensibles. La France est l'un des pays qui offre un cadre très strict sur cette question, dans la cadre des lois « informatique et liberté» et du fonctionnement de la CNIL, mais également dans le cadre européen plus récent du RGPD (règlement général sur la protection des données).
La CNIL a notamment comme mission d'informer les personnes de leurs droits que leur reconnaît la loi informatique et libertés, et d'accompagner la conformité au RGPD.
Les questions relatives à la protection des données doivent faire l'objet d'un paragraphe très complet dans la note d'information de la recherche destinée au patient. La désignation et les coordonnées du délégué à la protection des données sont obligatoires. Le droit de retrait, la confidentialité des données, et la possibilité de déposer une réclamation auprès de l'autorité compétente, à savoir la CNIL, doivent également y figurer.
Bibliographie
Les références peuvent être consultées en ligne à l’adresse
Les références peuvent être consultées en ligne à l’adresse suivante : http://www.em-consulte.com/e-complement/477020.
Bibliographie
[1]
Verner P. Ophthalmic pharmaceutical clinical trials : design considerations. Clin Invest (Lond) 2015 ; 5(5) : 457-75.
[2]
Guideline for good clinical practice E6 (R2), 9 novembre 2016. ICH harmonised guideline from international council for harmonisation of technical requirements for pharmaceutics for human use (ICH).
[3]
Décision du 24 novembre 2006 fixant les règles de bonnes pratiques cliniques pour les recherches biomédicales portant sur des médicaments à usage humain. JORF n° 277 du 30 novembre 2006.
[4]
Nuremberg : trials of war criminals before the Nuremberg military tribunals under control council law n° 10. Washington DC : US Government Printing Office 1949 ; 2 : 181-2.
[5]
World Medical Association Declaration of Helsinki. Ethical principles for medical research involving human subjects. JAMA 2013 ; 310(20) : 2191-4.
[6]
Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine, 1997 Oviedo.
[7]
Loi Huriet-Sérusclat du 20 décembre 1988 relative à la Protection des personnes dans la recherche biomédicale, n° 88-1138. JO du 22 décembre 1988.
[8]
Loi n° 2012-300 du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine. JORF n° 0056 du 6 mars 2012.
[9]
Arrêté du 12 avril 2018 fixant la liste des recherches mentionnées au 2° de l’article L. 1121-1 du Code de la santé publique. JORF n° 0089 du 17 avril 2018.
[10]
Arrêté du 12 avril 2018 fixant la liste des recherches mentionnées au 3° de l’article L. 1121-1 du Code de la santé publique. JORF n° 0089 du 17 avril 2018.
[11]
Règlement (UE) n° 536/2014 du Parlement européen et du conseil du 16 avril 2014 relatif aux essais cliniques de médicaments à usage humain et abrogeant la directive 2001/20/CE. JO de l’Union européenne L158/1.