Fig. 40-1 Anti-VEGF Arbre décisionnel de traitement de l'occlusion veineuse en 2023. AF : autofluorescence; AV : acuité visuelle; BAV : baisse de l'acuité visuelle; CLD : compte les doigts; GNV : glaucome néovasculaire; OM : œdème maculaire; OVR : occlusion veineuse rétinienne; LAF : lampe à fente; PAMM : paracentral acute middle maculopathy (maculopathie médiane paracentrale aiguë); PPR : photocoagulation panrétinienne; TTT : traitement.
présente un arbre décisionnel pour le traitement de l'occlusion veineuse.
40.2. Stratégie de prise en charge des infections cornéennes
M. LabetoulleT. Bourcier
La stratégie de prise en charge des infections de la cornée repose sur une analyse logique des signes et symptômes cliniques du patient, tout en prenant en compte les antécédents, le contexte de survenue et les facteurs de risque présents. À titre d'exemple, l'existence d'une zone nécrotique et/ou abcédée dans la cornée n'évoque pas en priorité les mêmes étiologies selon qu'il s'agisse d'un porteur de lentilles de contact ou d'une personne avec des antécédents herpétiques.
La conduite diagnostique repose donc à la fois sur une analyse sémiologique probabiliste (toujours), un prélèvement microbiologique de cornée (lorsque des signes de gravité ou d'atypicité sont cliniquement présents) ou encore sur une imagerie confocale du tissu cornéen infecté (parfois).
Fig. 40-9 Amphotéricine B Natamycine Kératites fongiques : stratégies thérapeutiques.
ont pour seul objectif d'aider le clinicien dans la prise en charge médicale des infections cornéennes. Il s'agit par essence d'une simplification de la démarche thérapeutique, destinée seulement à indiquer les grandes lignes du raisonnement thérapeutique. Ces figures n'ont donc pas d'autre ambition que de servir de memento pour la prise de décision au quotidien, et ne se substituent en aucun cas aux articles de revue, rapports ou livres abordant spécifiquement et en détail les kératites bactériennes, virales, fongiques ou amibiennes [1-2-3-4-5-6-7-8].
40.3. Prise en charge des blépharites
X. Morel
Types de blépharites
Les types de blépharites sont indiqués dans la figure 40-10
Fig. 40-10Types de blépharites.DGM : dysfonctionnement des glandes de Meibomius.
Pathologies infectieuses et blépharites (tableau 40-2 )
Autres pathologies et blépharites (tableau 40-3 )
Antibiotiques et blépharites
Tétracyclines
Mécanisme d'action
Les antibiotiques bactériostatiques sont utilisés dans le DGM plutôt pour leurs propriétés anti-inflammatoires que pour leur effet antibiotique. Ils diminueraient la production de lipases ainsi que le relargage de molécules inflammatoires telles que les acides gras libres. Ils modulent la fonction neutrophile et lymphocyte. Ils ont un effet anti-oxydatif par différents mécanismes incluant l'inhibition des métalloprotéinases et des cytokines pro-inflammatoires comme le TNF-α, les MMP-8 et MMP-9. Ils sont anti-angiogéniques et anti-apoptotiques pour la surface oculaire. Un essai randomisé versus placebo a comparé chez 60 patients atteints de DGM un groupe traité par larmes artificielles simplement à un groupe traité par larmes artificielles et minocyclines per os. Une supériorité statistiquement significative a été observée dans le deuxième groupe avec amélioration du break-up time (BUT), du test de Schirmer, de la coloration cornéenne à la fluorescéine, de l'apparence de la marge palpébrale et de la qualité du meibum. Une baisse de la concentration lacrymale cytokines, d'interleukines à 2 mois de traitement a aussi été observée [9].
Posologie
La posologie suivant les molécules utilisées est la suivante :
doxycycline : 50 à 100 mg 1 à 2 fois par jour;
minocycline : 50 à 100 mg 1 à 2 fois par jour;
tétracycline : 250 mg 1 à 4 fois par jour.
La doxycycline et la minocycline sont plus lipophiles et pénètrent mieux dans les tissus oculaires et palpébraux. Ces doses permettent d'obtenir une activité tant anti-inflammatoire qu'antibiotique au niveau de la surface oculaire excepté pour la minocycline, pour laquelle il a été montré une réduction de la flore chez des patients atteints de rosacée [10 , 11]. La durée du traitement est en général de 3 mois [10].
Précautions d'emploi (non exhaustif)
Les contre-indications sont les suivantes : femme enceinte, allaitement, enfant de moins de 8 ans (coloration des dents, de la peau, des ongles de la sclère, de la conjonctive, de la langue et des os), hypersensibilité aux cyclines. Les effets indésirables sont les suivants : photosensibilisation, troubles digestifs et hypertension intracrânienne.
Azithromycine
Mécanisme d'action
L'azithromycine est un macrolide avec un spectre d'action prédominant sur les bactéries à Gram positif. Elle inhibe la synthèse protéique des bactéries cibles en se liant à la molécule 23S ARNr du ribosome 50S. Elle réduit la croissance des bactéries palpébrales, mais aussi inhibe les lipases bactériennes et l'inflammation conjonctivale. Elle réduit l'expression et le relargage de molécules pro-inflammatoires comme le facteur nucléaire kappa B, I'IL-6, l'IL-8, l'IL-18, le TNF-α et le MMP-9 ARNm, et augmente l'expression du TGF-β1 qui a un effet anti-inflammatoire. De surcroît, les macrolides influencent la fonction des neutrophiles et des macrophages.
Azithromycine topique
De nombreuses études ont prouvé l'efficacité de l'azithromycine topique (Azyter®) à 15 mg/g pour le traitement de la DGM [12 , 13]. Une étude de cohorte sur 26 patients atteints de DGM avec instillation d'azithromycine 1 % 2 fois par jour pendant un mois a montré l'amélioration significative du BUT, du test de Schirmer ainsi que de la coloration cornéenne et conjonctivale [ 12].
Azithromycine par voie orale
L'azithromycine per os a été utilisée avec succès comme alternative aux cyclines per os pour le traitement de l'acné rosacée. À la dose de 500 mg/jour pendant 3 jours à raison de trois cycles à 7 jours d'intervalle, l'amélioration était statistiquement cliniquement significative dans un essai prospectif portant sur 13 patients atteints de DGM [ 14]. Un essai randomisé incluant 110 patients atteints de DGM a comparé un traitement par azithromycine orale 500 mg/jour le premier jour, puis 250 mg/jour du 2 e au 5 e jour à un traitement par doxycycline 200 mg/jour pendant un mois. Le traitement par azithromycine serait supérieur concernant l'amélioration de la rougeur oculaire et l'image en fluorescence; pour le reste de la symptomatologie, il n'y a pas de différence entre les deux groupes [ 15].
Précautions d'emploi (non exhaustif)
Il convient de prêter attention aux troubles cardiaques, avec une augmentation de l'intervalle QT et un risque d'arythmie ventriculaire et de torsade de pointe. Une prudence accrue est indispensable chez les patients avec : un allongement congénital ou documenté du QT; un traitement par d'autres médicaments allongeant aussi le QT; un trouble électrolytique (hypokaliémie, hypomagnésémie); une bradycardie, une arythmie cardiaque, une insuffisance cardiaque grave. Des précautions sont aussi à observer dans les cas suivants : hypersensibilité aux macrolides, insuffisance hépatique, association avec les dérivés de l'ergot de seigle ou la colchicine.
Anti-inflammatoires et blépharite
Corticoïdes
Les corticoïdes en collyre ou en pommade peuvent trouver leur utilité dans le traitement des complications inflammatoires de la DGM comme le chalazion et la kératite marginale. On privilégiera bien sûr les traitements courts avec surveillance de la tension oculaire.
Une étude a comparé de façon prospective et randomisée le traitement des chalazions en trois groupes : le premier par application de compresses chaudes uniquement (10 minutes matin et soir avec massage); le deuxième par application de compresses chaudes, tobramycine collyre 0,3 % une goutte 3 fois par jour et tobramycine pommade en application cutanée le soir; et le troisième groupe par application de compresses chaudes, collyre tobramycine et dexaméthasone 3 fois par jour et tobramycine et dexaméthasone pommade en application cutanée le soir. La résolution complète à 5 semaines était observée chez 18 % des patients au total, 21 % dans le premier groupe, 16 % dans le deuxième et 18 % dans le troisième. Il en a été conclu l'absence de différence statistiquement significative entre les trois schémas thérapeutiques [16].
On notera que la plupart des articles de la littérature anglo-saxonne ne préconisent pas l'utilisation de pommade corticoïde en première ligne du traitement du chalazion [17].
Les corticoïdes retard (acétonide de triamcinolone) peuvent avoir un intérêt pour le traitement du chalazion en injection intralésionnelle. Une méta-analyse portant sur 8 publications comparant l'injection intralésionnelle de corticoïdes et le traitement par incision et curetage a été publiée en 2016 [ 18], concluant à la supériorité statistiquement significative de la chirurgie par rapport à l'injection intralésionnelle de corticoïdes.
Ciclosporine A
La ciclosporine A a une place de choix dans le traitement de la sécheresse oculaire, tout particulièrement pour sa composante inflammatoire, en inhibant la production de calcineurine et d'IL-2.
Il a également été montré qu'elle jouait un rôle dans le DGM avec une diminution de l'inflammation du bord libre, des télangiectasies, des inclusions des glandes de Meibomius, une amélioration de l'image en fluorescence et de la qualité des sécrétions des glandes de Meibomius [19].
Acides gras essentiels
Les acides gras essentiels (AGE) ont une action anti-inflammatoire. Une supplémentation orale par acides gras oméga 3 contribuerait à changer la concentration en acide gras dans le meibum [ 20]. Néanmoins, en 2018, une étude a comparé de façon prospective randomisée en double aveugle deux groupes de patients atteints de sécheresse oculaire modérée à sévère. Le premier bénéficiait d'une supplémentation par oméga 3 (1000 mg d'acide docosahexaénoïque et 2000 mg d'acide d'eicosapentaénoïque), le deuxième d'une supplémentation par placebo (huile d'olive). Il n'y avait pas de différence significative sur les scores de sécheresse oculaire entre les deux groupes [ 21].
Traitement du Demodex
Bien que la relation de causalité entre la présence de Demodex et le DGM ne soit pas clairement établie, une étude portant sur 150 patients a démontré la présence de Demodex chez 90 % des patients atteints de de blépharite antérieure et 60 % des patients atteints de DGM [22].
Le Demodex folliculorum endommage les cellules à la base des follicules pileux, entraînant une hyperkératinisation avec formation du manchon pelliculaire. Le Demodex brevis bloque physiquement les glandes de Meibomius, avec une réaction inflammatoire granulomateuse prédisposant au DGM et aux chalazions. De surcroît, Demodex peut servir de vecteur à certaines bactéries déclenchant une réaction inflammatoire et une réaction allergique par hypersensibilité.
Traitements par huile d'arbre à thé
L'huile d'arbre à thé (HAT) est une huile essentielle dérivée des feuilles de Melaleuca alternifolia . Elle est riche en composés terpéniques (terpinène-4-ol, 1,8-cinéole, etc.) présentant des propriétés antibactériennes et antifongiques. Elle est inscrite à la Pharmacopée européenne sous le nom d'« huile essentielle de mélaleuca». Elle a été décrite comme efficace dans le traitement des blépharites associées au Demodex . Un traitement d'un mois en application sur le bord libre palpébral éradiquerait la présence de Demodex , diminuerait l'inflammation du bord libre palpébral et de la surface oculaire, et diminuerait la concentration d'IL-1β et d'IL-17 [ 23 , 24]. L'HAT aurait également des propriétés antibactériennes et antifongiques.
Il existe néanmoins des dermatites de contact et des réactions d'hypersensibilité aux composants de l'HAT, et il a été suggéré de principalement utiliser le terpinène-4-ol, le composant le plus efficace contre Demodex . Il est présent dans les lingettes de Blephademodex® commercialisées en France.
Une revue de la littérature Cochrane a repris en 2020 l'ensemble des publications concernant l'utilisation de l'HAT pour les blépharites et conclu à une incertitude concernant l'efficacité de ce traitement sur le court terme en dosage de 5 à 50 % [25].
Autres traitements du Demodex
Pommade d'oxyde de mercure
Les pommades ophtalmologiques à base d'oxyde de mercure, dont la Pommade Maurice®, mais aussi Ophtergine® et Oxyde mercurique jaune®, ont été retirées du marché en France en 2010.
Ivermectine
Une étude portant sur 24 yeux de 12 patients avec blépharite postérieure et présence de Demodex folliculorum dans les cils a évalué un traitement par ivermectine 200 μg/kg, une dose à J0 et J7. Le nombre de Demodex à un mois avait statistiquement diminué, avec amélioration du test de Schirmer et du BUT [26].
Traitements non médicamenteux du DGM
Expression du meibum
Dispositifs électroniques de chauffage/massage des paupières
L'expression mécanique du meibum est fondamentale dans la prise en charge du DGM. Elle est facilitée par le réchauffement préalable de la paupière et, aux classiques compresses chaudes et massage manuel, on peut ajouter un traitement plus sophistiqué par des dispositifs électroniques automatisés. Le Lipiflow® est un dispositif de thermothérapie pulsée avec massage palpébral séquentiel. Des coques à usage unique sont disposées sur le globe oculaire. La chaleur est délivrée directement aux glandes de Meibomius par la conjonctive palpébrale, à la fois pour les paupières supérieures et inférieures. Une pression séquentielle est en même temps exercée par un système gonflable sur le versant cutané de la paupière. Le traitement, qui dure 12 minutes, améliorerait les scores de sécrétion des glandes de Meibomius, le BUT, le nombre de glandes fonctionnelles, l'épaisseur de la couche lipidique, la rougeur oculaire, la sensation de sécheresse oculaire et l'irritation, mesurées par les scores des questionnaires OSDI et SPEED. Une méta-analyse des publications sur le sujet publiée en 2021 a porté sur 10 études randomisées, avec un total de 761 patients. Étaient améliorés de façon significative l'image en fluorescence, les questionnaires de sécheresse oculaire OSDI et SPEED, ainsi que le score de sécrétion des glandes de Meibomius (MGGYLS et MGYSS). Les effets secondaires étaient comparables dans les deux groupes [27]. Une étude randomisée portant sur 400 yeux a comparé l'efficacité à 3 mois d'une séance unique de Lipliflow® à des compresses chaudes biquotidiennes pendant 10 minutes avec hygiène palpébrale. La qualité des sécrétions meibomiennes et les symptômes de sécheresse oculaire étaient améliorés de façon statistiquement significative dans le premier groupe [28]. Une autre étude a comparé l'efficacité d'une séance unique de Lipliflow® à la prise quotidienne de doxycycline pendant 3 mois. Le premier groupe montre une supériorité dans les mesures de sécheresse oculaire (score SPEED), le BUT, l'image en fluorescence et la fonction des glandes de Meibomius [ 29].
Sondage des glandes de Meibomius
Des sondes de diverses tailles sont introduites dans les orifices des glandes de Meibomius. Le geste est effectué à la lampe à fente et faciliterait l'expression du meibum bloqué.
Traitement par lumière pulsée
Le traitement par lumière pulsée ( intense pulsed light therapy [IPL]) est utilisé depuis une vingtaine d'années en dermatologie pour améliorer l'aspect de la peau, en particulier pour les lésions vasculaires de la rosacée cutanée. Le principe est celui de l'application d'une lumière de haute intensité avec une longueur d'onde de 500 à 1200 nm.
Concernant le DGM, l'IPL améliorerait la rougeur et l'œdème du bord libre palpébral, la viscosité du meibum, l'expression des sécrétions meibomiennes, l'épaisseur de la couche lipidique des larmes, leur osmolarité, le BUT, l'image en fluorescence et l'injection des vaisseaux conjonctivaux.
Les mécanismes d'action de l'IPL sur le DGM seraient les suivants : thrombose des télangiectasies palpébrales avec réduction des médiateurs pro-inflammatoires; liquéfaction du meibum; réduction de l'infestation par Demodex ; modification de l'architecture des glandes de Meibomius; photomodulation [30].
Une revue de la littérature publiée en 2020 a porté sur l'efficacité de l'IPL dans le DGM. Sur 12 études retenues, cinq souffraient de potentiels conflits d'intérêts, mais toutes les études rapportaient une amélioration du BUT, de l'image en fluorescence, de la qualité et de l'expression du meibum, de l'expression du meibum, des scores OSDI et SPEED. Les effets secondaires étaient rares (érythème, vésicules, perte des cils, corps flottants) [31].
Neurostimulation
L'introduction dans les fosses nasales d'un dispositif (TrueTear®, Allergan) exciterait le nerf ethmoïdal antérieur et le réflexe de stimulation lacrymale par l'intermédiaire des fibres parasympathiques du VII. Ces dernières induisent la sécrétion de larmes par les glandes lacrymales, la production des glandes de Meibomius et des cellules caliciformes conjonctivales [32].
40.4. Traitement de l'œdème maculaire diabétique en 2023
P. Massin
Introduction
L'arsenal thérapeutique de l'œdème maculaire diabétique (OMD) est large, mais nécessaire car l'OMD n'est pas une entité unique. Il résulte de plusieurs mécanismes pathogéniques qui peuvent être associés (rupture de la barrière hématorétinienne, altération des mécanismes de déshydratation de la rétine), et peut être aggravé par des facteurs systémiques, tels que l'hypertension artérielle (HTA), ou oculaires, tels qu'une traction vitréomaculaire. Il existe donc plusieurs formes cliniques de l'OMD et il est important, avant d'entreprendre son traitement, de réaliser un bilan pré thérapeutique complet, qui guidera les choix thérapeutiques [33 , 34].
Bilan préthérapeutique
Le bilan préthérapeutique a pour but de phénotyper l'OMD, mais également le patient (fig. 40-14
Fig. 40-14Démarche thérapeutique devant un œdème maculaire diabétique (OMD).
). En effet, l'OMD s'inscrit dans le cadre d'une pathologie systémique dont il est l'une des complications et il est donc essentiel de recueillir l'ensemble des données concernant le diabète et les facteurs de risque associés (HTA, dyslipidémie, etc.) susceptibles d'aggraver l'OMD. Une collaboration interdisciplinaire avec le diabétologue, le médecin généraliste, le cardiologue, etc. est un préalable indispensable à la bonne prise en charge d'un OMD.
Outre l'examen ophtalmologique complet, le bilan préthérapeutique comprend les examens complémentaires permettant de caractériser l'OMD, de préciser sa sévérité, l'association de facteurs tractionnels aggravants, et l'existence de facteurs prédictifs péjoratifs pour l'acuité visuelle (atrophie étendue des photorécepteurs ou amincissement de la rétine interne, par exemple).
Au terme de ce bilan, il est ensuite nécessaire de faire la synthèse des facteurs influençant la décision thérapeutique.
Traitement de l'œdème maculaire diabétique
L'algorithme thérapeutique devant un OMD est présenté dans la figure 40-15
Fig. 40-15 Dexaméthasone Ranibizumab Aflibercept Algorithme Fluocinolone thérapeutique devant un œdème maculaire diabétique (OMD). BAV : baisse d'acuité visuelle; IP : iridectomie périphérique.
L'équilibre des facteurs systémiques est toujours indispensable, en particulier l'équilibre tensionnel, de la fonction rénale, avec aussi la recherche d'apnées du sommeil.
En cas de grand déséquilibre initial des facteurs systémiques lors de la prise en charge initiale de l'OMD, on peut attendre 2 à 3 mois avant d'instaurer un traitement par injections intravitréennes (IVT), l'équilibration des facteurs systémiques pouvant permettre d'améliorer l'OMD, au moins partiellement. Sinon, l'équilibration des facteurs systémiques est menée conjointement au traitement de l'OMD, permettant d'obtenir une meilleure réponse au traitement par injections IVT.
Traitement ophtalmologique de première intention
Le moment du début du traitement dépend essentiellement de l'acuité visuelle.
En l'absence de baisse de l'acuité visuelle
Outre l'équilibre des facteurs systémiques, le seul traitement à envisager est celui d'éventuelles fuites focales accessibles au traitement par laser. Il est débuté sans tarder lorsqu'une menace visuelle existe, notamment en cas d'œdème maculaire modéré ou sévère. Le traitement est réalisé avec une intensité modérée et à distance prudente du centre de la macula. Seules les lésions (notamment les micro-anévrismes) situées à plus de 750 à 1000 μ du centre de la macula sont traitées. Sinon, une surveillance est recommandée. Les données du protocole V du DRCR.net n'ont pas montré d'intérêt à débuter le traitement par injections IVT tant que l'acuité visuelle est normale [36].
S'il existe une baisse de l'acuité visuelle significative due à un œdème maculaire sévère atteignant la région centrale
Le traitement de première intention consiste dans la majorité des cas à réaliser des injections IVT d'anti-VEGF ou de corticoïdes. Même s'il n'y a pas d'urgence à traiter, il est recommandé de ne pas trop attendre, un retard excessif à la mise en route du traitement par injections étant délétère pour l'acuité visuelle. Au vu des données publiées, notamment du protocole T [ 37], il paraît légitime de débuter le traitement par injections dès que l'acuité visuelle chute à 7/10 es , Parinaud 3 ou moins. Trois types de traitement par injections IVT peuvent être proposés en première intention : le ranibizumab, l'aflibercept ou l'implant de dexaméthasone. Le traitement par injections mensuelles d'anti-VEGF (ranibizumab ou aflibercept) est proposé en première intention :
d'autant plus qu'il existe une ischémie rétinienne périphérique sévère, et a fortiori une rubéose irienne;
en l'absence de contre-indications aux anti-VEGF : antécédents cardiovasculaires récents (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral datant de moins de 3 mois);
mais à condition qu'un suivi mensuel soit possible, indispensable au cours de la première année;
en cas de contre-indications à l'implant de dexaméthasone.
Le choix entre les deux anti-VEGF disponibles, ranibizumab ou aflibercept, est laissé à la libre appréciation des ophtalmologistes prescripteurs. Le traitement par injections IVT de l'implant de dexaméthasone peut être proposé en première intention, conformément à l'autorisation de mise sur le marché (AMM) : chez le patient pseudophake et chez le patient phake, pour lequel un traitement non corticoïde ne convient pas, particulièrement lorsqu'un suivi mensuel n'est pas possible (difficultés de déplacement, patient peu compliant, ou ne souhaitant pas venir tous les mois), ou lorsqu'il existe des contre-indications au traitement par anti-VEGF (voir ci-dessus). S'il s'agit d'un sujet jeune, dont le cristallin est clair, il doit être prévenu du risque de cataracte lié à l'utilisation des corticoïdes. Ce traitement est contre-indiqué en cas de glaucome évolué ou non équilibré. Il est habituel de ne pas l'utiliser chez des glaucomateux traités par bithérapie, en cas d'aphakie, en présence d'un implant à fixation irienne, ou d'une iridectomie périphérique de grande taille et en cas d'antécédents infectieux oculaires (herpès, toxoplasmose, etc.). Un traitement pas laser peut être proposé, comme éventuel complément du traitement par injections IVT sur des zones résiduelles d'épaississement périfovéal, en respectant les précautions déjà énoncées. Une vitrectomie peut être proposée en cas d'OMD tractionnel, c'est-à-dire s'il existe une traction vitréomaculaire évidente en OCT, ou une membrane épimaculaire épaisse en cas d'OM sévère responsable d'une baisse visuelle. S'il existe un doute sur l'existence d'une traction, une vitrectomie peut être proposée devant l'échec des traitements par injections IVT.
Traitement de deuxième intention
En cas d'inefficacité du traitement intravitréen initial, un changement de traitement, en utilisant d'autres médicaments, peut être effectué, en respectant les contre-indications respectives.
Un traitement par implant d'acétonide de fluocinolone peut être proposé aux patients insuffisamment répondeurs aux traitements par anti-VEGF. S'agissant d'un traitement de longue durée, il paraît logique de le proposer aux patients pour lesquels une efficacité des corticoïdes intravitréens de plus courte durée a déjà été démontrée, et n'ayant pas présenté d'hypertonie oculaire sévère lors des précédents traitements par corticoïdes.
Enfin, en cas d'OMD sévère et chronique ne répondant pas au traitement par injections IVT, la recherche de macro-anévrismes alimentant l'OMD par OCT et angiographie, et leur photocoagulation par laser peuvent être bénéfiques pour la résolution de l'OMD.
Cas particuliers
Grossesse : il est recommandé de ne pas traiter l'OMD pendant la grossesse, celui-ci disparaissant après l'accouchement dans la majorité des cas. Les traitements par anti-VEGF doivent être évités, et les corticoïdes sont peu recommandés, les patientes étant jeunes, et phakes dans la majorité des cas. Néanmoins, le site du CRAT autorise l'utilisation du ranibizumab quel que soit le terme de la grossesse et chez la femme allaitante [38].
Rétinopathie diabétique floride et OMD : l'association d'injections d'anti-VGEF avec la photocoagulation panrétinienne (PPR) est recommandée.
La chirurgie de la cataracte peut aggraver un OMD préexistant. En cas d'OMD préexistant atteignant la région centrale, un traitement par injections IVT d'anti-VEGF ou par implant de dexaméthasone est entrepris avant la chirurgie et poursuivi en postopératoire. En cas d'apparition d'un OMD après la chirurgie, le traitement de choix est l'implant de dexaméthasone en l'absence de contre-indications, du fait de la composante inflammatoire.
40.2. Stratégie de prise en charge des infections cornéennes
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