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Chapitre 53
Endophtalmies endogènes

C. Chiquet

Introduction
Les endophtalmies endogènes sont secondaires à une dissémination hématogène bactérienne ou fongique.
Il s'agit d'une infection sévère à la fois sur le plan visuel et général dont le diagnostic est souvent retardé, en particulier lorsque les patients ne présentent pas de signes généraux associés. Le tableau clinique est compatible avec une inflammation oculaire (panuvéite ou uvéite postérieure), et le diagnostic étiologique est donc guidé par le contexte général, les circonstances de début et la présence d'atteinte choriorétinienne.
Cette infection rare touche préférentiellement des patients à risque. Ces patients doivent être identifiés pour mettre en place une prévention secondaire et évoquer le diagnostic dans un contexte de présentation de panuvéite aspécifique.
Physiopathologie
L'endophtalmie endogène est liée à un processus infectieux métastatique secondaire principalement à une dissémination microbienne hématogène à partir d'un foyer infectieux extraoculaire ou suite à l'administration intraveineuse d'une solution contaminée.
Les lésions histologiques causées par l'embole septique peuvent être directes (liées à la nature infectieuse de l'embole) ou indirectes (liées à l'occlusion vasculaire parfois associée). L'embole septique se localise primitivement au niveau des vaisseaux de l'iris, du corps ciliaire, de la rétine ou de la choroïde.
Les infections endogènes bactériennes sont préférentiellement de localisation rétinienne ou ciliaire. L'infection à Aspergillus se caractérise par une infection initialement dans l'espace sous-rétinien, puis se produit un envahissement vasculaire choroïdien et rétinien associé à une nécrose rétinienne hémorragique. L'abcédation résultante est souvent unique et large, contrairement aux infections à Candida caractérisées par un envahissement secondaire du vitré, plus propice au développement du champignon à partir des foyers choriorétiniens.
Les infections endogènes oculaires sont classées en fonction de la localisation initiale de l'atteinte puis de son extension en infections antérieures (focales ou diffuses limitées au segment antérieur), en infections postérieures (focales de type choroïdite, rétinite, choriorétinite et rétinochoroïdite ou diffuse avec envahissement vitréen) et, enfin, en panophtalmie en cas d'atteinte diffuse.
Épidémiologie
Incidence
Les endophtalmies endogènes sont des affections relativement rares, représentant seulement 2 % à 8 % des endophtalmies [ 1 , 2]. Leur incidence est estimée à moins de 1 cas par million d'habitants et par an. L'âge moyen retrouvé au diagnostic est d'environ 50 ans [3-4-5-6]. L'ensemble des études retrouvent une prépondérance masculine [7-8-9-10].
L'atteinte est le plus souvent unilatérale. La bilatéralisation peut survenir d'emblée ou de manière décalée dans le temps et survient volontiers chez des sujets plus âgés.
L'incidence retrouvée des endophtalmies endogènes bactériennes chez les patients présentant des bactériémies serait de l'ordre de 0,04 %. La prévalence des endophtalmies endogènes fongiques chez les patients atteints de fongémie systémique avérée est estimée entre 2 % et 20 %.
Facteurs de risque
L'endophtalmie endogène affecte les patients de tout âge, préférentiellement des patients présentant des facteurs de risque ou FDR (tableau 53-1
Tableau 53-1
Principales caractéristiques épidémiologiques, microbiologiques et cliniques des endophtalmies endogènes.
BactériesChampignons
Gram positifGram négatif (< 30 %) Levures (80 %) Filaments
Staphylococcus aureus
Streptococcus pneumoniae et viridans (préférentiellement après méningite et endocardite, respectivement)
Listeria monocytogenes
Bacillus cereus (principalement en cas de toxicomanie IV)
Nocardia
Klebsiella pneumoniae
Escherichia coli
Pseudomonas aeruginosa
Nesseiria meningitidis
Haemophilus influenzae
Serratia marcescens
Candida albicans principalement
Candida tropicalis, stellatoidea, parapsilosis, krusei plus rarement
Aspergillus fumigatus principalement
– Plus rarement, Cryptococcus neoformans, Histoplasma, Fusarium
Facteurs de risque (60–90 %) – Diabète
– Chirurgie abdominale
– Endoscopie
– Cathétérisme
– Dialyse, lithotripsie
– Immunodépression
– Cancer
– Drépanocytose
– Lupus
– Cancer
– Diabète
– Cathétérisme en soins intensifs
– Alimentation parentérale
– Immunodépression
– Neutropénie
– Antibiothérapie prolongée
– Toxicomanie intraveineuse
– Immunodépression
– Transplantation d'organe : cardiaque, pulmonaire, hépatique
– Endocardite
– Leucémie
– Neutropénie
– Pneumopathie chronique sous corticoïdes au long cours
– Toxicomanie intraveineuse
Diagnostic microbiologique– Réalisation de culture standard et PCR panbactérienne (ARN 16S)
– Les infections plurimicrobiennes (3 %) et les mycobactéries (Mycobacterium tuberculosis) sont rares
– L'examen direct avec colorations spécifiques (Musto, noir chlorazole, Calcofluor) est rapide (réponse en 1 à 2 heures) et peut être réalisé sur les prélèvements si la quantité le permet (la sensibilité est faible, de l'ordre de 30–40 %)
– Les cultures réalisées sur milieux spécifiques de Sabouraud ont une sensibilité variant entre 54 % et 69 % et un délai de positivité de 24 à 48 heures pour les levures et de 2 à 5 jours pour les champignons filamenteux. L'analyse du vitré est souvent négative en cas d'infection à Aspergillus du fait de la croissance du champignon dans l'espace sous-rétinien. En cas de candidose, les prélèvements oculaires peuvent être négativés par le traitement systémique
– β-D-glucane dans le vitré (dont les taux sont élevés en cas d'infection à Candida)
– PCR panfongiques avec analyse de la séquence des ITS (internal transcribed spacer, régions divergentes et spécifiques) et de l'ADN ribosomique 58S
Topographie de l'atteinteLocalisation initiale choriorétinienne ou ciliaire avec abcédation intravitréenne Micro-abcédation choriorétinienne initiale avec tropisme vitréen préférentiel Abcédation sous-rétinienne avec tropisme sous-rétinien préférentiel
Particularités microbiocliniques ophtalmologiques– Exsudats brunâtres de chambre antérieure avec infiltrat annulaire cornéen blanchâtre sont évocateurs d'infection à Bacillus
– Un hypopion pupillaire et/ou un abcès sous-rétinien font suspecter une Klebsiella
– La présence de lésions sous-rétiniennes avec hémorragie sous-jacente chez un sujet immunodéprimé oriente vers une atteinte à Nocardia qui peut se compliquer d'abcès sous-rétinien pouvant évoluer vers la constitution d'un pseudo-hypopion
– Les pseudo-hypopions sont également rapportés en cas d'atteinte à Klebsiella pneumoniae, Pseudomonas aeruginosa, Streptococcus viridans, Staphylococcus aureus, Toxocara, Candida ou Aspergillus
– Présence de condensations intravitréennes inflammatoires en chapelets (notamment dans le vitré postérieur) en regard de foyers choriorétiniens crémeux multiples, profonds et bien circonscrits
– L'infection débute habituellement sous forme de choroïdite focale suivie d'envahissement rétinien puis vitréen
– Un hypopion, des nodules iriens, une sclérite, une vascularite et une neuropathie optique peuvent apparaître dans les cas les plus sévères
– L'évolution est volontiers plus fulminante avec baisse d'acuité visuelle rapidement progressive, douleurs oculaires importantes, présence de foyers choriorétiniens confluents à bords moins bien limités, avec abcédation sous-rétinienne ou rétro-hyaloïdienne, hémorragies intrarétiniennes et hyalite associée
– Dans les cas les plus graves : hypopion rétro-hyaloïdien ou sous-rétinien, nécrose rétinienne
Atteinte systémique– Hémocultures répétées aérobies et anaérobies systématiques
– Examen cytobactériologique des urines
– Recherche d'un syndrome inflammatoire biologique, évaluation des fonctions hépatique et rénale, contrôle de l'équilibre glycémique
– Ponction lombaire en cas de suspicion d'atteinte méningée
– Contrôle du statut immunitaire du patient, sérologies VIH, TPHA-VDRL, VHB, VHC systématiquement réalisées après accord du patient
– TDM thoracique, échographie cardiaque, échographie et/ou la TDM abdominopelvienne, imagerie cérébrale, scintigraphie au Galium 67 et tomographie d'émission par positron (PET-scan) rechercheront des localisations secondaires
– Le foyer infectieux primitif est retrouvé dans 90 % des cas; il s'agit alors le plus fréquemment d'une endocardite (46 % des cas), d'un foyer infectieux génito-urinaire, dentaire, hépatique, biliaire, intestinal, méningé ou pulmonaire
– Hémocultures sur milieu de Sabouraud (lyse-centrifugation, automates avec culture agitée) avec une sensibilité d'environ 50 % à 77 %
– Antigénémie Aspergillus et Candida
– β2-D-glucane
), retrouvés à l'interrogatoire dans environ 60 % des cas [1 , 8].
Le principal FDR d'endophtalmie endogène bactérienne est le diabète , retrouvé dans 30 % à 62 % des cas [ 2 , 8 , 10-11-12]. Les autres FDR sont l'immunodépression et l'injection récente de produit pharmacologique ou de drogue par voie intraveineuse. Les endophtalmies endogènes secondaires à une toxicomanie intraveineuse ou à la présence d'un dispositif intraveineux transitoire sont plus fréquentes dans les pays occidentaux [9].
Les foyers infectieux les plus fréquemment retrouvés sont illustrés dans la figure 53-1
Fig. 53-1
Foyers infectieux extraoculaires à l'origine des endophtalmies endogènes.
Dessin de Cyrille Martinet (d'après [1, 10]).
et sont identifiés dans 85 % des cas [ 4].
Agents infectieux en cause
Les bactéries représentent la majorité des micro-organismes en cause dans les endophtalmies endogènes (voir tableau 53-1
Tableau 53-1
Principales caractéristiques épidémiologiques, microbiologiques et cliniques des endophtalmies endogènes.
BactériesChampignons
Gram positifGram négatif (< 30 %) Levures (80 %) Filaments
Staphylococcus aureus
Streptococcus pneumoniae et viridans (préférentiellement après méningite et endocardite, respectivement)
Listeria monocytogenes
Bacillus cereus (principalement en cas de toxicomanie IV)
Nocardia
Klebsiella pneumoniae
Escherichia coli
Pseudomonas aeruginosa
Nesseiria meningitidis
Haemophilus influenzae
Serratia marcescens
Candida albicans principalement
Candida tropicalis, stellatoidea, parapsilosis, krusei plus rarement
Aspergillus fumigatus principalement
– Plus rarement, Cryptococcus neoformans, Histoplasma, Fusarium
Facteurs de risque (60–90 %) – Diabète
– Chirurgie abdominale
– Endoscopie
– Cathétérisme
– Dialyse, lithotripsie
– Immunodépression
– Cancer
– Drépanocytose
– Lupus
– Cancer
– Diabète
– Cathétérisme en soins intensifs
– Alimentation parentérale
– Immunodépression
– Neutropénie
– Antibiothérapie prolongée
– Toxicomanie intraveineuse
– Immunodépression
– Transplantation d'organe : cardiaque, pulmonaire, hépatique
– Endocardite
– Leucémie
– Neutropénie
– Pneumopathie chronique sous corticoïdes au long cours
– Toxicomanie intraveineuse
Diagnostic microbiologique– Réalisation de culture standard et PCR panbactérienne (ARN 16S)
– Les infections plurimicrobiennes (3 %) et les mycobactéries (Mycobacterium tuberculosis) sont rares
– L'examen direct avec colorations spécifiques (Musto, noir chlorazole, Calcofluor) est rapide (réponse en 1 à 2 heures) et peut être réalisé sur les prélèvements si la quantité le permet (la sensibilité est faible, de l'ordre de 30–40 %)
– Les cultures réalisées sur milieux spécifiques de Sabouraud ont une sensibilité variant entre 54 % et 69 % et un délai de positivité de 24 à 48 heures pour les levures et de 2 à 5 jours pour les champignons filamenteux. L'analyse du vitré est souvent négative en cas d'infection à Aspergillus du fait de la croissance du champignon dans l'espace sous-rétinien. En cas de candidose, les prélèvements oculaires peuvent être négativés par le traitement systémique
– β-D-glucane dans le vitré (dont les taux sont élevés en cas d'infection à Candida)
– PCR panfongiques avec analyse de la séquence des ITS (internal transcribed spacer, régions divergentes et spécifiques) et de l'ADN ribosomique 58S
Topographie de l'atteinteLocalisation initiale choriorétinienne ou ciliaire avec abcédation intravitréenne Micro-abcédation choriorétinienne initiale avec tropisme vitréen préférentiel Abcédation sous-rétinienne avec tropisme sous-rétinien préférentiel
Particularités microbiocliniques ophtalmologiques– Exsudats brunâtres de chambre antérieure avec infiltrat annulaire cornéen blanchâtre sont évocateurs d'infection à Bacillus
– Un hypopion pupillaire et/ou un abcès sous-rétinien font suspecter une Klebsiella
– La présence de lésions sous-rétiniennes avec hémorragie sous-jacente chez un sujet immunodéprimé oriente vers une atteinte à Nocardia qui peut se compliquer d'abcès sous-rétinien pouvant évoluer vers la constitution d'un pseudo-hypopion
– Les pseudo-hypopions sont également rapportés en cas d'atteinte à Klebsiella pneumoniae, Pseudomonas aeruginosa, Streptococcus viridans, Staphylococcus aureus, Toxocara, Candida ou Aspergillus
– Présence de condensations intravitréennes inflammatoires en chapelets (notamment dans le vitré postérieur) en regard de foyers choriorétiniens crémeux multiples, profonds et bien circonscrits
– L'infection débute habituellement sous forme de choroïdite focale suivie d'envahissement rétinien puis vitréen
– Un hypopion, des nodules iriens, une sclérite, une vascularite et une neuropathie optique peuvent apparaître dans les cas les plus sévères
– L'évolution est volontiers plus fulminante avec baisse d'acuité visuelle rapidement progressive, douleurs oculaires importantes, présence de foyers choriorétiniens confluents à bords moins bien limités, avec abcédation sous-rétinienne ou rétro-hyaloïdienne, hémorragies intrarétiniennes et hyalite associée
– Dans les cas les plus graves : hypopion rétro-hyaloïdien ou sous-rétinien, nécrose rétinienne
Atteinte systémique– Hémocultures répétées aérobies et anaérobies systématiques
– Examen cytobactériologique des urines
– Recherche d'un syndrome inflammatoire biologique, évaluation des fonctions hépatique et rénale, contrôle de l'équilibre glycémique
– Ponction lombaire en cas de suspicion d'atteinte méningée
– Contrôle du statut immunitaire du patient, sérologies VIH, TPHA-VDRL, VHB, VHC systématiquement réalisées après accord du patient
– TDM thoracique, échographie cardiaque, échographie et/ou la TDM abdominopelvienne, imagerie cérébrale, scintigraphie au Galium 67 et tomographie d'émission par positron (PET-scan) rechercheront des localisations secondaires
– Le foyer infectieux primitif est retrouvé dans 90 % des cas; il s'agit alors le plus fréquemment d'une endocardite (46 % des cas), d'un foyer infectieux génito-urinaire, dentaire, hépatique, biliaire, intestinal, méningé ou pulmonaire
– Hémocultures sur milieu de Sabouraud (lyse-centrifugation, automates avec culture agitée) avec une sensibilité d'environ 50 % à 77 %
– Antigénémie Aspergillus et Candida
– β2-D-glucane
). Les bactéries impliquées sont principalement des bactéries à Gram positif [10], aux États-Unis et en Europe, représentant jusqu'à 86 % des germes identifiés [ 2 , 4 , 13].
Les infections fongiques sont plus fréquentes en Europe et en Amérique du Nord [4 , 9]. Ces infections sont majoritairement représentées par les levures. Les endophtalmies dues à des champignons filamenteux sont moins fréquentes et principalement associées à Aspergillus [14].
Chez l'enfant et l'adolescent, 37 % des endophtalmies endogènes sont d'origine bactérienne, 10 % d'origine fongique et 27 % d'origine parasitaire ( Toxocara ).
Diagnostic positif
Signes fonctionnels
Parfois absents chez l'enfant, les signes fonctionnels sont plus bruyants dans les endophtalmies bactériennes que dans les atteintes fongiques.
Sur le plan général [ 11 , 13], des symptômes systémiques sont retrouvés dans 50 % à 70 % des endophtalmies endogènes [11 , 15] : signes de sepsis avec malaise, nausée, perte d'appétit ou de poids, douleurs abdominales, fièvre (60–80 %) et/ou frissons. Le délai de consultation est en moyenne de 7 à 12 jours après le début de la symptomatologie [11]. Il est plus long pour les endophtalmies fongiques comparativement aux endophtalmies endogènes bactériennes [ 2 , 7].
Le signe fonctionnel ophtalmologique le plus fréquemment retrouvé est la baisse d'acuité visuelle dans environ 90 % des cas [ 1]. La présence d'une douleur (50 %) ou d'une rougeur oculaire (36-52 %) [ 7 , 15 , 16] est plus inconstante.
Signes cliniques
Les signes d'examen sont ceux de toute endophtalmie (hyperhémie conjonctivale, inflammation de chambre antérieure, hypopion , œdème cornéen, hyalite). Une inflammation du segment antérieur semble plus fréquente dans les endophtalmies endogènes d'origine bactérienne comparativement aux endophtalmies d'origine fongique.
Le fond d'œil n'est pas visible dans 40 % à 60 % des cas [1 , 15]. L'examen recherche une vascularite rétinienne associée à des hémorragies rétiniennes ainsi que des foyers choriorétiniens profonds (fig. 53-2,
Fig. 53-2
a, b. Nombreux foyers choriorétiniens d'âge différents (d'allure active avec des bords crémeux et d'autres en cours de cicatrisation, à bords nets) chez une patiente immunodéprimée présentant une fongémie à Candida tropicalis.
fig. 53-3,
Fig. 53-3
Endophtalmie endogène à Candida chez un patient de 28 ans présentant comme antécédent une toxicomanie intraveineuse a la cocaïne.
La rétinographie objective un foyer choriorétinien maculaire.
fig. 53-4
Fig. 53-4
Endophtalmie endogène candidosique prouvée sur prélèvements sanguins chez une patiente immunodéprimée (cancer vésical ayant bénéficié d'une corticothérapie à haute dose dans le cadre d'une obstruction aiguë des voies urinaires sur carcinose péritonéale).
De nombreux foyers choriorétiniens au pôle postérieur (a) sont associés à l'œil gauche à des nodules de Roth (b).
). Le tableau 53-1
Tableau 53-1
Principales caractéristiques épidémiologiques, microbiologiques et cliniques des endophtalmies endogènes.
BactériesChampignons
Gram positifGram négatif (< 30 %) Levures (80 %) Filaments
Staphylococcus aureus
Streptococcus pneumoniae et viridans (préférentiellement après méningite et endocardite, respectivement)
Listeria monocytogenes
Bacillus cereus (principalement en cas de toxicomanie IV)
Nocardia
Klebsiella pneumoniae
Escherichia coli
Pseudomonas aeruginosa
Nesseiria meningitidis
Haemophilus influenzae
Serratia marcescens
Candida albicans principalement
Candida tropicalis, stellatoidea, parapsilosis, krusei plus rarement
Aspergillus fumigatus principalement
– Plus rarement, Cryptococcus neoformans, Histoplasma, Fusarium
Facteurs de risque (60–90 %) – Diabète
– Chirurgie abdominale
– Endoscopie
– Cathétérisme
– Dialyse, lithotripsie
– Immunodépression
– Cancer
– Drépanocytose
– Lupus
– Cancer
– Diabète
– Cathétérisme en soins intensifs
– Alimentation parentérale
– Immunodépression
– Neutropénie
– Antibiothérapie prolongée
– Toxicomanie intraveineuse
– Immunodépression
– Transplantation d'organe : cardiaque, pulmonaire, hépatique
– Endocardite
– Leucémie
– Neutropénie
– Pneumopathie chronique sous corticoïdes au long cours
– Toxicomanie intraveineuse
Diagnostic microbiologique– Réalisation de culture standard et PCR panbactérienne (ARN 16S)
– Les infections plurimicrobiennes (3 %) et les mycobactéries (Mycobacterium tuberculosis) sont rares
– L'examen direct avec colorations spécifiques (Musto, noir chlorazole, Calcofluor) est rapide (réponse en 1 à 2 heures) et peut être réalisé sur les prélèvements si la quantité le permet (la sensibilité est faible, de l'ordre de 30–40 %)
– Les cultures réalisées sur milieux spécifiques de Sabouraud ont une sensibilité variant entre 54 % et 69 % et un délai de positivité de 24 à 48 heures pour les levures et de 2 à 5 jours pour les champignons filamenteux. L'analyse du vitré est souvent négative en cas d'infection à Aspergillus du fait de la croissance du champignon dans l'espace sous-rétinien. En cas de candidose, les prélèvements oculaires peuvent être négativés par le traitement systémique
– β-D-glucane dans le vitré (dont les taux sont élevés en cas d'infection à Candida)
– PCR panfongiques avec analyse de la séquence des ITS (internal transcribed spacer, régions divergentes et spécifiques) et de l'ADN ribosomique 58S
Topographie de l'atteinteLocalisation initiale choriorétinienne ou ciliaire avec abcédation intravitréenne Micro-abcédation choriorétinienne initiale avec tropisme vitréen préférentiel Abcédation sous-rétinienne avec tropisme sous-rétinien préférentiel
Particularités microbiocliniques ophtalmologiques– Exsudats brunâtres de chambre antérieure avec infiltrat annulaire cornéen blanchâtre sont évocateurs d'infection à Bacillus
– Un hypopion pupillaire et/ou un abcès sous-rétinien font suspecter une Klebsiella
– La présence de lésions sous-rétiniennes avec hémorragie sous-jacente chez un sujet immunodéprimé oriente vers une atteinte à Nocardia qui peut se compliquer d'abcès sous-rétinien pouvant évoluer vers la constitution d'un pseudo-hypopion
– Les pseudo-hypopions sont également rapportés en cas d'atteinte à Klebsiella pneumoniae, Pseudomonas aeruginosa, Streptococcus viridans, Staphylococcus aureus, Toxocara, Candida ou Aspergillus
– Présence de condensations intravitréennes inflammatoires en chapelets (notamment dans le vitré postérieur) en regard de foyers choriorétiniens crémeux multiples, profonds et bien circonscrits
– L'infection débute habituellement sous forme de choroïdite focale suivie d'envahissement rétinien puis vitréen
– Un hypopion, des nodules iriens, une sclérite, une vascularite et une neuropathie optique peuvent apparaître dans les cas les plus sévères
– L'évolution est volontiers plus fulminante avec baisse d'acuité visuelle rapidement progressive, douleurs oculaires importantes, présence de foyers choriorétiniens confluents à bords moins bien limités, avec abcédation sous-rétinienne ou rétro-hyaloïdienne, hémorragies intrarétiniennes et hyalite associée
– Dans les cas les plus graves : hypopion rétro-hyaloïdien ou sous-rétinien, nécrose rétinienne
Atteinte systémique– Hémocultures répétées aérobies et anaérobies systématiques
– Examen cytobactériologique des urines
– Recherche d'un syndrome inflammatoire biologique, évaluation des fonctions hépatique et rénale, contrôle de l'équilibre glycémique
– Ponction lombaire en cas de suspicion d'atteinte méningée
– Contrôle du statut immunitaire du patient, sérologies VIH, TPHA-VDRL, VHB, VHC systématiquement réalisées après accord du patient
– TDM thoracique, échographie cardiaque, échographie et/ou la TDM abdominopelvienne, imagerie cérébrale, scintigraphie au Galium 67 et tomographie d'émission par positron (PET-scan) rechercheront des localisations secondaires
– Le foyer infectieux primitif est retrouvé dans 90 % des cas; il s'agit alors le plus fréquemment d'une endocardite (46 % des cas), d'un foyer infectieux génito-urinaire, dentaire, hépatique, biliaire, intestinal, méningé ou pulmonaire
– Hémocultures sur milieu de Sabouraud (lyse-centrifugation, automates avec culture agitée) avec une sensibilité d'environ 50 % à 77 %
– Antigénémie Aspergillus et Candida
– β2-D-glucane
résume les présentations cliniques faisant évoquer une étiologie bactérienne (exsudats brunâtres de chambre antérieure, infiltrat cornéen, hypopion, abcès sous-rétinien, nodules de Roth : hémorragies à centre clair) ou fongique (hyalite en collier de perles, foyers choriorétiniens, abcès sous-rétiniens ou rétro-hyaloïdiens).
Classiquement, les atteintes bactériennes sont plus rapidement évolutives que les atteintes fongiques. Dans le même temps, les atteintes par levures semblent d'évolution plus indolente et avec une meilleure acuité visuelle initiale en comparaison aux atteintes par champignons filamenteux [6].
Une échographie B oculaire est utile en cas de mauvaise visibilité de la rétine pour le diagnostic de hyalite, d'abcès sous-rétiniens (hyperéchogènes, à parois épaissies) et de lésions associées, comme un décollement de rétine, un décollement choroïdien (fig. 53-5
Fig. 53-5
Échographie B d'un patient présentant une endophtalmie endogène bilatérale à streptocoque bêta-hémolytique de groupe G.
Il existe une hyalite marquée (a). Cette hyalite est également associée par endroits a des zones de décollement choroïdien (b).
) ou une inflammation orbitaire (zone hypo-échogène périoculaire).
L'OCT permet d'objectiver, dans les infections candidosiques, des lésions sous-rétiniennes, des lésions intrarétiniennes, des lésions de toute l'épaisseur de la rétine (œdème maculaire, liquide sous-rétinien) et des atteintes avec soulèvement de la limitante interne et extension éventuelle vers le vitré.
L'examen général complet est indispensable et recherchera la présence d'un foyer infectieux superficiel ou profond (cardiaque, neurologique, aires ganglionnaires, masse hépatique, splénomégalie, signes infectieux superficiels, de points de ponction veineuse, examen articulaire).
Examens complémentaires
Examens biologiques ophtalmologiques
L'identification microbiologique est essentielle tant sur le plan oculaire que systémique. Les résultats de l'identification microbiologique sont importants, car l'identification de bactéries virulentes est un facteur pronostique.
La mise en évidence de l'agent infectieux intraoculaire est fondée sur les prélèvements microbiologiques d'humeur aqueuse ou de vitré. La ponction de vitré doit être privilégiée par rapport à la ponction d'humeur aqueuse [ 4]. En effet, le prélèvement d'humeur aqueuse possède une rentabilité diagnostique comprise entre 21 % et 32 % contre 59 % à 81 % pour les prélèvements de vitré [1].
L'analyse microbiologique combine idéalement cultures bactériennes aérobies et anaérobies, cultures fongiques et sur milieu de Sabouraud (sensibilité de 54 % à 69 %, délai de positivité de 24 à 48 heures pour les levures et de 2 à 5 jours pour les champignons filamenteux), polymerase chain reaction (PCR) panbactérienne et PCR fongique pour Candida et Aspergillus .
Bilan paraclinique systémique
Le bilan paraclinique systémique a pour objectif de déceler le foyer infectieux primitif, mais également de mettre en évidence le pathogène impliqué.
Les examens biologiques généraux comprennent la réalisation systématique d'hémocultures répétées aérobies et anaérobies et sur milieu de Sabouraud (sensibilité de 50 % à 77 % pour la détection de Candida ). Deux séries d'hémocultures périphériques au minimum doivent être réalisées. Ces hémocultures nécessitent d'être répétées en cas de négativité initiale, ou lors de tout accès fébrile et/ou de frissons.
Les antigénémies Aspergillus (sensibilité 50 % et spécificité 99 %) et Candida (sensibilité 60 % et spécificité 80 %) sont également utiles.
Le reste du bilan est orienté par le point d'entrée infectieux présumé ou avéré et comprend un examen cytobactériologique des urines en cas de symptômes urinaires, la recherche d'un syndrome inflammatoire biologique, l'évaluation des fonctions hépatiques et rénales, le contrôle de l'équilibre glycémique et/ou une ponction lombaire (en cas de suspicion d'atteinte méningée). Les prélèvements effectués sur le sang (72 %), l'urine (28 %) ou le liquide céphalorachidien (50 %) permettent de mettre en évidence un agent infectieux dans 70 % à 80 % des cas d'atteinte bactérienne [3 , 17]. Le statut immunitaire du patient est contrôlé, des sérologies VIH, syphilis, virus de l'hépatite B et C étant réalisées après accord du patient.
Les examens d'imagerie incluent la tomodensitométrie (TDM) thoracique, l'échographie cardiaque (transthoracique ou, mieux, transœsophagienne), l'échographie et/ou la TDM abdominopelvienne (suivie si besoin d'une ponction hématique sous contrôle échographique). La scintigraphie au Galium 67 et le PET-scan peuvent utilement compléter la recherche de foyers septiques profonds passés inaperçus. Une discussion et une prise en charge multidisciplinaires sont également souhaitables.
La recherche d'un syndrome inflammatoire est systématique. Une augmentation de la protéine C réactive (CRP) est constatée dans 96 % des cas d'endophtalmie endogène bactérienne et une hyperleucocytose dans 52 % des cas [18].
Diagnostic différentiel
L'endophtalmie endogène est un diagnostic qu'il faut évoquer devant une panuvéite associée à des foyers choriorétiniens et/ou des abcès sous-rétiniens. Les diagnostics différentiels suivants peuvent être discutés : atteinte bactérienne (syphilis, maladie de Lyme, maladie des griffes du chat, tuberculose) ou parasitaire (toxoplasmose, toxocarose).
Un antécédent de chirurgie oculaire doit faire suspecter une endophtalmie aiguë ou chronique, majoritairement d'origine bactérienne.
Prise en charge
Prise en charge préventive
Prévention primaire
Une antibioprophylaxie est délivrée aux patients à très haut risque d'endocardite infectieuse lors des procédures dentaires potentiellement hémorragiques. L'antibioprophylaxie recommandée est de 2 g d'amoxicilline une heure avant le geste à risque.
Les autres mesures de prévention à mettre en œuvre reposent sur le respect des règles strictes d'asepsie lors de la pose de voies veineuses périphériques ou centrales. La prévention de la toxicomanie intraveineuse consiste principalement à identifier les patients afin de leur proposer un accompagnement et un sevrage par une équipe d'addictologie.
Prévention secondaire
La prévention secondaire consiste à dépister précocement l'endophtalmie dans des conditions cliniques à risque. Il est recommandé de réaliser de manière systématique un fond d'œil aux patients présentant une fongémie systémique avérée . L'examen du fond d'œil est réitéré au moins une fois par semaine, car l'atteinte ophtalmologique peut apparaître de manière différée. Le traitement antifongique est continué jusqu'à résolution des lésions oculaires (environ 2 à 4 mois). Dans le cadre de bactériémies, l'examen du fond d'œil systématique n'est pas recommandé.
Traitement curatif
Le traitement curatif est pluridisciplinaire.
Traitement général
Le traitement médical général inclut une antibiothérapie par voie systémique pendant au moins 2 à 4 semaines et cible avant tout le foyer causal général, en étant initialement probabiliste et adaptée au terrain ainsi qu'à la topographie de l'atteinte (tableau 53-2
Tableau 53-2
Antibiothérapie générale probabiliste en fonction du terrain et de la topographie de l'atteinte systémique.
Foyer causal et/ou facteur de risque associé Antibiothérapie systémique probabiliste
ToxicomaniePénicilline M ± aminoside
Chirurgie abdominale, endoscopieBêta-lactamine + imidazolé ± aminoside
Cathétérisme vasculaire prolongéGlycopeptide ± aminoside
HémodialyseGlycopeptide ± aminoside
Foyer dentairePénicilline A + inhibiteur de l'acide clavulanique
Foyer urinaireCéphalosporine de 3 e génération ± aminoside
Foyer hépatique/biliaire/intestinalBêta-lactamine + imidazole ± aminoside
Foyer pulmonaireBêta-lactamine anti-pneumocoque ± fluoroquinolone
MéningiteCéphalosporine de 3 e génération dans la plupart des situations
Amoxicilline + gentamycine en cas de suspicion de listériose
EndocarditePénicilline A, pénicilline M ou daptomycine + aminoside
). Sur le plan antibactérien, une antibiothérapie à bonne pénétration intraoculaire de type céphalosporine de 3 e génération ou quinolone est privilégiée.
Le traitement antifongique systémique est institué au moins 6 semaines. Le traitement en première intention fait appel désormais au fluconazole ou au voriconazole. Le traitement systémique est privilégié pour les atteintes de type choriorétinite isolée, alors qu'un traitement mixte systémique et oculaire est prescrit pour une atteinte rétinienne et vitréenne.
En cas de candidose, le fluconazole peut être utilisé en première intention à la dose de 400 mg le 1 er jour puis 200 mg/jour. Beaucoup mieux toléré et doté d'une meilleure pénétration intraoculaire que l'amphothéricine B , le fluconazole est actif sur Candida albicans et Cryptococcus neoformans , moins actif sur Candida glabrata et inactif sur C. krusei . L'utilisation du voriconazole est alors l'alternative idéale.
L'amphotéricine B liposomale 3 mg/kg/jour est efficace sur la plupart des champignons : Candida , Cryptococcus neoformans , Blastomyces dermatitidis , Coccidiodes immitis , Histoplasma capsulatum , Aspergillus et Fusarium .
L'itraconazole (par voie orale à la dose de 200 à 400 mg/j en 1 à 2 prises) est un antifongique à large spectre, actif sur les levures, Aspergillus , et Histoplasma sp.
Le voriconazole , dérivé synthétique du fluconazole, administré par voie orale (200 mg/j), intraveineuse (6 mg/kg/12 h) ou intravitréenne, possède un spectre antifongique élargi ( Aspergillus , Candida , Blastomyces , Coccidioides , Cryptococcus , Fusarium , Histoplasma ), avec une action contre certains champignons résistants au fluconazole, à l'amphotericine B et/ou à l'itraconazole ( Candida glabrata et C. krusei notamment). Le voriconazole possède une excellente concentration intravitréenne après administration orale ou intraveineuse. Il peut être administré en première intention comme le fluconazole, au lieu de l'amphotéricine B liposomale.
Les échinocandines ne sont pas indiquées dans la prise en charge des endophtalmies endogènes fongiques associées à une atteinte vitréenne du fait de leur faible pénétration intraoculaire (rétinienne et vitréenne).
Les traitements antibactériens et antifongiques systémiques sont instaurés et surveillés en collaboration avec un infectiologue (tableau 53-3
Tableau 53-3
Principaux traitements anti-infectieux intravitréens et systémiques employés dans les endophtalmies endogènes fongiques et bactériennes.
Type d'anti-infectieuxPosologie intravitréennePosologie systémiqueGermes ciblés
Polyènes
Amphotéricine B 5 μg/0,1 ml 0,5–0,7 mg/kg (IV) Fongique (Candida ++, Aspergillus +)
Imidazoles
– Miconazole25–50 μm/0,1 ml Fongique (Candida +, Aspergillus +)
– Itraconazole5 μm/0,05 ml 200–400 mg/jour (oral)
200 mg/jour (IV)
Fongique (Candida +, Aspergillus +)
– Voriconazole100 μm/0,1 ml 200 mg × 2/jour (oral)
3-6 mg/kg × 2/jour (IV)
Fongique (Candida +++, Aspergillus ++, Fusarium +)
Pyrimidine
5-flucytosine2,25 mg/0,1 ml 25–37,5 mg/kg/jour Fongique (Candida –, Aspergillus +)
Échinocandines
Capsofungine50 mg/jour Fongique (Candida +, Aspergillus +)
Céphalosporines
– Ceftazidime2,25 mg/0,1 ml 50 mg/kg (IV) Bactéries à Gram négatif
– Céfazoline2,25 mg/0,1 ml 50 mg/kg (IV) Bactéries à Gram positif (inclut les SASV)
Aminosides
Amikacine0,4 mg/0,1 ml 6 mg/kg (IV) Bactéries à Gram négatif
Streptogramines
Quinupristine-dalfopristine0,4 mg/0,1 ml Bactéries à Gram positif (inclut les SARV)
Glycopeptide
Vancomcyine1 mg/0,1 ml 15 mg/kg (IV) Bactéries à Gram positif (inclut les SASV)
Daptomycine200 μg/0,1 ml 10 mg/kg (IV) Bactéries à Gram positif (inclut les SASV)

SARV : Staphylococcus aureus résistant à la vancomycine; SASV : SARV : Staphylococcus aureus sensible à la vancomycine.


et voir tableau 53-2
Tableau 53-2
Antibiothérapie générale probabiliste en fonction du terrain et de la topographie de l'atteinte systémique.
Foyer causal et/ou facteur de risque associé Antibiothérapie systémique probabiliste
ToxicomaniePénicilline M ± aminoside
Chirurgie abdominale, endoscopieBêta-lactamine + imidazolé ± aminoside
Cathétérisme vasculaire prolongéGlycopeptide ± aminoside
HémodialyseGlycopeptide ± aminoside
Foyer dentairePénicilline A + inhibiteur de l'acide clavulanique
Foyer urinaireCéphalosporine de 3 e génération ± aminoside
Foyer hépatique/biliaire/intestinalBêta-lactamine + imidazole ± aminoside
Foyer pulmonaireBêta-lactamine anti-pneumocoque ± fluoroquinolone
MéningiteCéphalosporine de 3 e génération dans la plupart des situations
Amoxicilline + gentamycine en cas de suspicion de listériose
EndocarditePénicilline A, pénicilline M ou daptomycine + aminoside
).
Traitement ophtalmologique
Le traitement ophtalmologique vise à contrôler l'infection intraoculaire et à limiter la survenue de complications ophtalmologiques.
Le recours aux injections intravitréennes d'antibiotiques (vancomycine 1 mg/0,1 ml et ceftazidime 2 mg/0,1 ml en première intention; voir tableau 53-3
Tableau 53-3
Principaux traitements anti-infectieux intravitréens et systémiques employés dans les endophtalmies endogènes fongiques et bactériennes.
Type d'anti-infectieuxPosologie intravitréennePosologie systémiqueGermes ciblés
Polyènes
Amphotéricine B 5 μg/0,1 ml 0,5–0,7 mg/kg (IV) Fongique (Candida ++, Aspergillus +)
Imidazoles
– Miconazole25–50 μm/0,1 ml Fongique (Candida +, Aspergillus +)
– Itraconazole5 μm/0,05 ml 200–400 mg/jour (oral)
200 mg/jour (IV)
Fongique (Candida +, Aspergillus +)
– Voriconazole100 μm/0,1 ml 200 mg × 2/jour (oral)
3-6 mg/kg × 2/jour (IV)
Fongique (Candida +++, Aspergillus ++, Fusarium +)
Pyrimidine
5-flucytosine2,25 mg/0,1 ml 25–37,5 mg/kg/jour Fongique (Candida –, Aspergillus +)
Échinocandines
Capsofungine50 mg/jour Fongique (Candida +, Aspergillus +)
Céphalosporines
– Ceftazidime2,25 mg/0,1 ml 50 mg/kg (IV) Bactéries à Gram négatif
– Céfazoline2,25 mg/0,1 ml 50 mg/kg (IV) Bactéries à Gram positif (inclut les SASV)
Aminosides
Amikacine0,4 mg/0,1 ml 6 mg/kg (IV) Bactéries à Gram négatif
Streptogramines
Quinupristine-dalfopristine0,4 mg/0,1 ml Bactéries à Gram positif (inclut les SARV)
Glycopeptide
Vancomcyine1 mg/0,1 ml 15 mg/kg (IV) Bactéries à Gram positif (inclut les SASV)
Daptomycine200 μg/0,1 ml 10 mg/kg (IV) Bactéries à Gram positif (inclut les SASV)

SARV : Staphylococcus aureus résistant à la vancomycine; SASV : SARV : Staphylococcus aureus sensible à la vancomycine.


) est systématique en cas d'atteinte bactérienne. Le traitement est répété au moins à deux ou trois reprises, à 48 heures d'intervalle, du fait de la demi-vie courte des antibiotiques intravitréens.
En cas d'atteinte fongique (voir tableau 53-3
Tableau 53-3
Principaux traitements anti-infectieux intravitréens et systémiques employés dans les endophtalmies endogènes fongiques et bactériennes.
Type d'anti-infectieuxPosologie intravitréennePosologie systémiqueGermes ciblés
Polyènes
Amphotéricine B 5 μg/0,1 ml 0,5–0,7 mg/kg (IV) Fongique (Candida ++, Aspergillus +)
Imidazoles
– Miconazole25–50 μm/0,1 ml Fongique (Candida +, Aspergillus +)
– Itraconazole5 μm/0,05 ml 200–400 mg/jour (oral)
200 mg/jour (IV)
Fongique (Candida +, Aspergillus +)
– Voriconazole100 μm/0,1 ml 200 mg × 2/jour (oral)
3-6 mg/kg × 2/jour (IV)
Fongique (Candida +++, Aspergillus ++, Fusarium +)
Pyrimidine
5-flucytosine2,25 mg/0,1 ml 25–37,5 mg/kg/jour Fongique (Candida –, Aspergillus +)
Échinocandines
Capsofungine50 mg/jour Fongique (Candida +, Aspergillus +)
Céphalosporines
– Ceftazidime2,25 mg/0,1 ml 50 mg/kg (IV) Bactéries à Gram négatif
– Céfazoline2,25 mg/0,1 ml 50 mg/kg (IV) Bactéries à Gram positif (inclut les SASV)
Aminosides
Amikacine0,4 mg/0,1 ml 6 mg/kg (IV) Bactéries à Gram négatif
Streptogramines
Quinupristine-dalfopristine0,4 mg/0,1 ml Bactéries à Gram positif (inclut les SARV)
Glycopeptide
Vancomcyine1 mg/0,1 ml 15 mg/kg (IV) Bactéries à Gram positif (inclut les SASV)
Daptomycine200 μg/0,1 ml 10 mg/kg (IV) Bactéries à Gram positif (inclut les SASV)

SARV : Staphylococcus aureus résistant à la vancomycine; SASV : SARV : Staphylococcus aureus sensible à la vancomycine.


), l'injection intravitréenne de 5 μg/0,1 ml d'amphotéricine B [19] (doses cumulatives toxiques pour la rétine) est recommandée, hormis en cas d'atteinte minime. Le voriconazole peut être administré par voie intravitréenne à la dose de 100 μg/0,1 ml, permettant d'obtenir une concentration intravitréenne de 25 μg/ml avec une bonne tolérance rétinienne [ 19].
L'intérêt de la corticothérapie est controversé et systématiquement contre-indiqué en cas de sepsis non contrôlé.
Le rôle bénéfique de la vitrectomie postérieure [1 , 3] a été rapporté en cas d'endophtalmie endogène bactérienne ou fongique, avec une probabilité trois fois plus importante d'obtenir une acuité visuelle utile et trois fois moins importante de nécessiter une éviscération/énucléation. Les principales indications de vitrectomie sont : l'atteinte vitréenne, sous-rétinienne et/ou choriorétinienne importante, l'atteinte bactérienne [5], la non-réponse au traitement médical et/ou l'atteinte maculaire.
Complications, pronostic oculaire et général
Le pronostic des endophtalmies endogènes dépend du terrain et de la rapidité de prise en charge : l'acuité visuelle finale est limitée à 1/10 es dans 60 % des cas [10] et un geste radical d'énucléation est nécessaire dans 30 % des cas. L'absence de perception lumineuse, un âge élevé, une infection par des bactéries à Gram négatif ou Aspergillus sont associés à un risque plus élevé d'énucléation ou d'éviscération. Les trois principaux facteurs pronostiques fonctionnels sont l'acuité visuelle initiale, le type de micro-organisme (à Gram négatif et filaments) en cause ainsi que le degré d'inflammation intraoculaire initial [9 , 12].
Sur le plan général, la mortalité des patients atteints d'endophtalmie endogène bactérienne varie entre 4 % et 32 % [ 1 , 3]. La mortalité des patients atteints d'endophtalmie endogène quel que soit le germe incriminé serait de 15 % à la fin de la première année et de 50 % après 16 ans de suivi [10].
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