Le mélanome uvéal représente la tumeur intraoculaire la plus fréquente et une des potentielles pathologies létales rencontrées en ophtalmologie. Historiquement, l’énucléation représentait le traitement de référence, mais de nouveaux traitements conservateurs tels que la brachythérapie ou la protonthérapie (PBT) ont par la suite prouvé leur efficacité avec des taux de survie similaires sans augmenter le risque de métastase. Malgré des progrès en termes de planification et de précision de ces traitements, ils exposent à de potentielles complications. C’est pourquoi il est important d’irradier uniquement les lésions mélanocytiques hautement suspectes d’être des mélanomes uvéaux malins. Pour nous aider à mieux sélectionner ces lésions à risque, plusieurs facteurs de risque de croissance tumorale évocatrice de malignité ont été décrits à l’aide de l’imagerie multimodale. Parfois, ce n’est pas chose aisée et c’est pourquoi de nombreux ophtalmologistes décident d’attendre d’observer une croissance tumorale avant de traiter. Il a d’ailleurs été montré qu’attendre une croissance documentée avant d’irradier ne modifiait pas le taux de métastase et le taux de survie. Néanmoins, il existe peu de données sur l’impact sur le pronostic visuel de ce délai avant traitement. Le but de cette étude est donc de comparer le pronostic visuel de lésions mélanocytiques maculaires traitées immédiatement par protonthérapie à celles irradiées dans un second temps ou jamais irradiées.
Name
Comparaison du pronostic visuel des lésions mélanocytiques maculaires observées ou traitées immédiatement ou secondairement par protonthérapie
Introduction
Matériels et Méthodes
Un total de 162 patients présentant une lésion mélanocytique suspecte localisée à moins de 3 mm de la fovéa diagnostiqués depuis 2009 dans deux centres d’onco-ophtalmologie français ont été recrutés.
Résultats
Les 82 patients traités précocement par PBT, dans les 4 premiers mois après la première visite, ont été comparés aux 24 patients traités plus tardivement par PBT et aux 56 patients observés. La baisse de vision était statistiquement significative dans les groupes PBT précoce et PBT tardive avec une perte moyenne [IQR] de 0.7 [0.2;1.8] (p<0.001) et 0.5 [0.2; 1.5] (p<0.001) respectivement. L’acuité visuelle finale était similaire à celle initialement retrouvée dans le groupe observation (p=0.325). Après irradiation, il n’y avait pas de différence significative entre PBT précoce ou PBT tardive pour la perte de vision (p=0.575), la réduction du diamètre (p=0.190) et la diminution de l’épaisseur (p=0.892). En analyse multivariée, la présence d’un diabète et la rupture de la membrane de Bruch étaient statistiquement associées à une perte de vision plus importante (p=0.036 et p=0.002 respectivement).
Discussion
Pour les lésions mélanocytiques localisées à moins de 3mm de la fovéa, un traitement par protonthérapie est associé à une baisse de vision significative. Retarder le traitement d’une lésion suspecte n’assombrit pas le pronostic visuel ; il est donc possible d’initialement surveiller ces lésions douteuses afin de documenter une éventuelle croissance tumorale évocatrice d’un caractère malin.
Conclusion
Pour les lésions mélanocytiques localisées à moins de 3mm de la fovéa, le traitement par PBT est associé à une baisse de vision significative. Retarder la PBT pour les petites lésions afin de documenter une croissance tumorale n’assombrit pas le pronostic visuel.