En dépit des progrès remarquables de la chirurgie vitréo-rétinienne, seuls 50% des patients opérés de décollements de rétine rhegmatogènes (DRR) récupèrent plus de 6/10ème d’acuité visuelle. Parmi les facteurs de mauvais pronostique visuel, le décollement maculaire et la durée du décollement sont prédominants. Les facteurs biologiques responsables de l’altération définitive des photorécepteurs restent mal compris. La rupture de la barrière hémato-rétinienne externe, secondaire au décollement, induit l’accumulation de facteurs toxiques.
But : Comme le métabolisme du fer est finement régulé localement et que le fer est hautement toxique pour les photorécepteurs, nous avons recherché si le décollement de la rétine perturbe le métabolisme du fer.
44 patients opérés de décollement de la rétine par vitrectomie et 9 patients opérés de trou maculaire ou de membrane épimaculaire ont été inclus dans cette étude. Tous les patients ont accepté de participer à l’étude qui a été approuvée par le comité d’éthique du canton de Vaud. Lors de la vitrectomie, du vitré pur et du liquide sous rétinien ont été collecté pour analyser le fer libre, la transferrine, la saturation en fer de la transferrine, et la capacité de liaison de la transferrine. L’acuité visuelle des patients après chirurgie réussie a été mesurée à 3 mois.
Parmi les 44 vitrés, 35 provenaient de patients ayant un décollement macula OFF (âge moyen: 64.3 ans; SD: 9.6; 11 femmes, 24 hommes). Neufs vitrés contrôles ont été obtenus (4 membranes et 5 trous) sans autre pathologie (âge moyen: 70.2 ans; SD: 9.5, 5 femmes, 4 hommes ). Les taux de fer libre étaient significativement plus élevé dans le vitré des patients opérés de DRR par rapport aux patients dont la rétine n’étaient pas décollée. Les concentrations de fer libre dans les liquides sous rétiniens étaient d’autant plus importantes que la durée du décollement était longue (p = 0.038). La transférrine, deuxième protéine la plus abondante dans le vitré, était a quasi totale saturation dans le vitré des patients avec DRR. Les taux de fer mesurés dans le vitré et le liquide sous rétinien induisent la mort des photorécepteurs in vitro. L’acuité visuelle à 3 mois étaient d’autant plus faible que les taux de fer oculaires étaient élevés (p=0.04).
La toxicité du fer sur les photorécepteurs est reconnue et des mécanismes de protection existent dans la rétine pour prévenir l'accumulation de fer. Ainsi, les protéines qui neutralisent le fer, comme la transferrine, sont produites localement par les cellules oculaires et les barrières protégent de l'entrée du fer dans la rétine. Au cours du décollement, la rupture de la barrière externe contribue à une accumulation de fer à des taux toxiques pour les photorecepteurs. ces taux augmentent avec la durée du décollement et sont inversement corrélés à la récupération fonctionnelle.
L’accumulation de fer au cours du DRR est l’un des facteurs biologiques responsables de la faible récupération visuelle. La neutralisation du fer est une cible thérapeutique adjuvante à la chirurgie afin d’améliorer le pronostic visuel des patients opérés avec succès de DDR.
