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Chapitre 6
Tumeurs mélanocytaires

Introduction
C. Levy-Gabriel
Au niveau de la surface oculaire et de la conjonctive palpébrale, les authentiques tumeurs mélanocytaires sont représentées par le nævus, la mélanose primitive acquise sans et avec atypies, le mélanome in situ et le mélanome invasif. Ces tumeurs mélanocytaires se présentent souvent sous une forme pigmentée, mais elles peuvent aussi être achromes (fig. 6-1
Fig. 6-1
Les lésions pigmentées conjonctivales ne sont pas toutes des tumeurs mélanocytaires.
et 6-2
Fig. 6-2
Les tumeurs mélanocytaires ne sont pas toujours pigmentées.
).
Les autres diagnostics à évoquer devant un aspect pigmenté de la surface oculaire ou de la conjonctive palpébrale sont :
  • la mélanose ethnique , qui correspond à une hypersécrétion de mélanine au sein de mélanocytes augmentés en nombre mais d'aspects normaux, sans véritable prolifération tumorale ;
  • les mélanoses réactionnelles ou secondaires, ou l'aspect de pigmentation est secondaire à des dépôts de pigments intra- ou extracellulaires sans augmentation du nombre des mélanocytes ;
  • la mélanocytose oculaire , qui est une prolifération mélanocytaire de type nævique située non pas au niveau de la surface oculaire, mais plus profondément, au niveau de l'uvée. L'aspect pigmenté est cependant visible sous la conjonctive et la mélanocytose oculaire est parfois confondue avec une mélanose primitive acquise.
Toutes les lésions mélanocytaires de la surface oculaire n'ont pas le même potentiel évolutif : la mélanose ethnique, le nævus et la mélanose primitive acquise sans atypies sont des lésions bénignes : la mélanose primitive acquise avec atypies est une lésion précancéreuse ; enfin, le mélanome est une authentique tumeur maligne [ 1].
Dans ce chapitre, nous reviendrons dans le détail sur les authentiques tumeurs mélanocytaires cornéoconjonctivales (nævus, mélanose primitive acquise sans et avec atypies, mélanome in situ et invasif) et sur la mélanose ethnique. La mélanocytose oculaire sera citée pour mémoire (elle est traitée dans le détail au chapitre 13.3 au paragraphe « Mélanose oculaire »).
Nævus conjonctival
C. Levy-Gabriel
Le nævus est la plus fréquente des tumeurs de la surface oculaire. Il est constitué de cellules mélanocytaires næviques arrangées en thèques. Les cellules mélanocytaires ne présentent pas d'atypie cytonucléaire. Le nævus a une architecture bien limitée à contours réguliers.
Types de nævus
En fonction de la localisation des thèques næviques, on distingue les nævus jonctionnels (contingent mélanocytaire intra-épithélial), les nævus sous-épithéliaux (contingent mélanocytaire exclusivement dans le chorion de la muqueuse conjonctivale) et les nævus composés (comportant un contingent mélanocytaire à la fois dans le chorion et au niveau de l'épithélium). La formation de kystes épithéliaux issus de récessus de la muqueuse conjonctivale entourés par la prolifération nævique est fréquente, en particulier en cas de nævus composé (nævus kystique de Parinaud). Une réaction inflammatoire périlésionnelle peut également être présente. Le nævus jonctionnel s'observe surtout chez l'enfant, rarement chez l'adulte (fig. 6-3,
Fig. 6-3
Nævus conjonctival avec pigmentation progressive. a. Aspect achrome à l'âge de 6 ans. b. Aspect chez le même enfant à l'âge de 14 ans avec une pigmentation partielle et hétérogène, le nævus restant par ailleurs inchangé en dimensions.
fig. 6-4,
Fig. 6-4
Nævus achrome chez un jeune homme de 19 ans.
fig. 6-5,
Fig. 6-5
Nævus achrome et kystique chez un jeune homme de 24 ans. Lésion connue du patient depuis l’âge de 11 ans, parfaitement stable.
fig. 6-6,
Fig. 6-6
Nævus achrome et très kystique chez une fillette de 9 ans. Lésion connue des parents depuis les premiers mois de vie.
fig. 6-7,
Fig. 6-7
Nævus pigmenté et kystique chez un enfant de 6 ans. Lésion visualisée pour la première fois vers l’âge de 2 ans. Les parents ont constaté une pigmentation progressive.
fig. 6-8,
Fig. 6-8
Nævus limbique à pigmentation hétérogène chez une femme de 38 ans. La lésion est connue depuis la naissance et stable.
fig. 6-9,
Fig. 6-9
Petit nævus du repli semi-lunaire connu et stable depuis la jeunesse chez un homme de 52 ans.
fig. 6-10,
Fig. 6-10
Volumineux nævus polykystique chez un homme de 69 ans. On note une très discrète pigmentation par endroits.
fig. 6-11,
Fig. 6-11
Nævus limbique kystique connu depuis la petite enfance et stable chez un homme de 84 ans originaire d’Afrique du Nord.
fig. 6-12,
Fig. 6-12
Nævus de la conjonctive bulbaire nasale avec un volumineux kyste chez un homme de 74 ans. Lésion connue depuis la jeunesse parfaitement stable.
fig. 6-13
Fig. 6-13
Volumineux nævus intrastromal avec pigmentation hétérogène, discret relief et vaisseaux nourriciers chez un patient de 67 ans.
). Le nævus composé est plus fréquent ; il se voit surtout chez l'enfant et l'adulte jeune [1]. Le nævus sous-épithélial se voit essentiellement chez l'adulte.
Clinique
Sur le plan clinique, le nævus peut parfois être visible dès les premiers mois de vie, mais dans la plupart des cas il n'est visualisé par l'entourage que plus tard, au cours de la première ou deuxième décennie. Chez le petit enfant, la pigmentation est souvent peu visible voire totalement absente. Le nævus apparaît alors comme une lésion rosée très discrètement en relief. Il va ensuite se pigmenter progressivement pendant l'enfance et surtout l'adolescence. Seuls 50 à 65 % des nævus ont un aspect totalement pigmenté.
Des kystes intralésionnels peuvent être visualisés en lampe à fente ou, encore mieux, avec un OCT du segment antérieur [2]. Leur présence plaide en faveur de la bénignité de la lésion. En cas de lésion peu pigmentée, il est possible de visualiser un fin réseau vasculaire au sein de la lésion. Deux ou trois vaisseaux dilatés nourriciers peuvent aussi être présents au pourtour du nævus. Dans deux tiers des cas, le nævus est localisé au niveau de la conjonctive bulbaire dans l'aire de la fente palpébrale. La localisation caronculaire ou au niveau du repli semi-lunaire est moins fréquente (31 %), et les nævus sont très rares au niveau de la conjonctive palpébrale (moins de 3 %) [3-4-5].
Le diamètre du nævus peut varier de 0,2 mm à 30 mm (en moyenne 4 mm). Les lésions géantes dont le diamètre est supérieur à 10 mm ne représentent que 5 % des cas [ 6].
Évolution et prise en charge
Les nævus sont des lésions stables dans le temps, mais des modifications discrètes et très lentes de la pigmentation ou de la taille peuvent s'observer [ 4 , 5] pendant la jeunesse et la puberté. Chez l'enfant, la pigmentation progressive d'un nævus initialement achrome peut donner alors une fausse impression d'apparition récente ou de croissance.
Le risque de transformation maligne est extrêmement faible, inférieur à 1 % [4 , 7]. La meilleure attitude consiste donc en une surveillance régulière avec réalisation de photographies comparatives. L'exérèse chirurgicale est réalisée en cas de modification objective et suspecte, surtout si cette modification survient à l'âge adulte. Elle peut aussi être réalisée à la demande du patient pour des raisons esthétiques. L'exérèse doit alors toujours être réalisée en totalité, avec une no touch technique (fig. 6-14,
Fig. 6-14
a. Nævus caronculaire chez un garçon de 15 ans. b. Aspect de nævus composé en coupe histologique HES × 10.
fig. 6-15,
Fig. 6-15
a. Nævus caronculaire chez un jeune homme de 19 ans. b. Aspect de nævus intrastromal en coupe histologique HES × 5 avec une prolifération mélanocytaire située exclusivement au sein du chorion, sans activité jonctionnelle. Les cellules næviques (cellules de petite taille au noyau arrondi) se disposent en massifs, en nappes, sans atypie cytonucléaire, ni mitose. Il existe par places des pigments intracytoplasmiques mélaniques et quelques formations kystiques.
fig. 6-16,
Fig. 6-16
a. Nævus intrastromal caronculaire chez un homme de 35 ans. Noter la présence de quelques poils au sommet de la lésion. b. Chez le même patient, aspect en coupe histologique HES × 10 d'un nævus conjonctival sous-épithélial ou intrastromal avec au niveau du chorion une prolifération mélanocytaire faite de nappes à répartition symétrique, sans atypie cytonucléaire ni activité mitotique, formant en superficie des thèques, et montrant un gradient de différenciation vers la profondeur. Il existe des récessus kystiques épithéliaux superficiels. Il n'y a pas d'ascension au niveau du revêtement épithélial de surface.
fig. 6-17,
Fig. 6-17
Nævus très pigmenté de la conjonctive bulbaire chez un enfant mélanoderme de 12 ans (a). Chez le même patient, aspect en coupe histologique HES × 10 d'un nævus conjonctival composé kystique (b) avec une muqueuse conjonctivale largement occupée à sa partie centrale par une prolifération mélanocytaire occupant d'une part la jonction entre le revêtement épithélial conjonctival, et d'autre part la partie superficielle et moyenne du chorion où elle s'organise en thèques ou en nappes. Le revêtement épithélial conjonctival de surface est responsable de récessus souvent kystisé au sein du chorion sous-jacent. La composante mélanocytaire jonctionnelle est retrouvée au sein de l'épithélium de ces récessus conjonctivo-kystiques du chorion. Il n'y a pas d'atypies cytonucléaires significatives, bien que les noyaux des cellules mélanocytaires soient souvent difficiles à observer compte tenu de la forte charge cytoplasmique en pigment mélanique au niveau de ces cellules mélanocytaires.
fig. 6-18,
Fig. 6-18
Nævus achrome avec très volumineux kystes chez un garçon de 13 ans (a). Chez le même patient, aspect en coupe histologique HES × 10 d'un nævus composé kystique (b) avec une lésion située dans le chorion sous-conjonctival, constituée d'inclusions kystiques de l'épithélium, revêtues de cellules mucosécrétantes sans atypie. Autour d'elles sont présentes des cellules næviques formant en périphérie des thèques, aux noyaux allongés monomorphes, non atypiques, sans atypie ni mitose, formant un gradient de différenciation vers la profondeur. Absence de pigmentation.
fig. 6-19,
Fig. 6-19
Petit nævus très pigmenté du repli semi-lunaire constaté pour la première fois à l'âge de 29 ans chez une patiente mélanoderme (a). Chez la même patiente, aspect en coupe histologique HES × 10 d'un nævus sous-épithélial (b) avec une prolifération mélanocytaire nævique localisée dans le chorion. Les mélanocytes sont réguliers, sans atypies ni mitoses.
fig. 6-20
Fig. 6-20
a-c. Nævus géant en cours de pigmentation chez un garçon de 11 ans. d-f. Aspect post-exérèse chirurgicale du nævus.
).
Les études génomiques des nævus conjonctivaux ont montré la présence de mutations BRAF ou NRAS mutuellement exclusives. Ce profil génomique s'apparente donc à celui des nævus cutanés, et est très différent de celui des nævus choroïdiens [8].
Mélanose ethnique
C. Levy-Gabriel
La mélanose ethnique est relativement commune, mais ne se voit que chez les patients à la peau pigmentée. En anatomopathologie, elle se caractérise par une augmentation de la pigmentation des cellules basales de l'épithélium avec des mélanocytes par ailleurs normaux en nombre et en aspect. Il n'y a pas de prolifération tumorale des mélanocytes, et pas d'atypies cytonucléaires.
Cliniquement, la pigmentation conjonctivale est bilatérale, parfois un peu asymétrique. Elle prédomine au niveau du limbe sur 360 degrés et au niveau de la conjonctive bulbaire. L'atteinte des culs-de-sac ou de la conjonctive palpébrale est moins fréquente. La pigmentation est brune, plane, à bords irréguliers. Cette pigmentation est présente et connue du patient depuis sa jeunesse ; elle est peu évolutive. Le risque de transformation maligne est extrêmement faible. La conduite à tenir se résume donc à une surveillance régulière (fig. 6-21,
Fig. 6-21
Patient mélanoderme 52 ans. a-c. Photographie en lampe à fente (LAF) de la mélanose ethnique de l'œil droit avec une pigmentation conjonctivale plane au limbe et un peu plus marquée au niveau de la conjonctive bulbaire nasale. Cette pigmentation nasale bien visible est connue du patient depuis plus de 20 ans et stable. d. Aspect de la mélanose ethnique nasale en coupe histologique HES × 40 : l'épithélium conjonctival est régulier avec une augmentation de la pigmentation des cellules basales. Les mélanocytes sont sans atypies et en nombre normal, comme le confirme l'étude immunohistochimique par les anticorps anti-Melan A, -SOX10, -HMB45.
fig. 6-22,
Fig. 6-22
Patiente melanoderme de 30 ans. Photographies en LAF œil droit (a) et œil gauche (b) montrant une mélanose ethnique avec une discrète pigmentation bilatérale limbique sur 360°, au niveau du repli semi-lunaire (c), et au niveau du sommet des caroncules avec quelques poils à ce niveau (d).
fig. 6-23
Fig. 6-23
a, b. Aspect de mélanose ethnique avec une pigmentation plus intense et plus étendue chez deux patients originaires d'Afrique noire.
).
Mélanose primitive acquise ou prolifération mélanocytaire intra-épithéliale sans atypies et avec atypies
C. Levy-Gabriel
Terminologie
Le terme de mélanose primitive acquise, qui exprime bien les caractéristiques cliniques de ces lésions (avec une pigmentation acquise), mais ne permet pas de préjuger de leur caractère néoplasique, a été remis en question ces dernières années par certains auteurs. Les termes de « néoplasie mélanocytaire intra-épithéliale » ou de « prolifération mélanocytaire intra-épithéliale », témoignant mieux du caractère néoplasique et de la réalité histologique, ont ainsi été proposés, et semblent plus légitimes. En effet, ces lésions se caractérisent en anatomopathologie par une prolifération anormale de mélanocytes présentant un degré variable d'atypies. Cette prolifération est strictement limitée à l'épithélium (conjonctival ou cornéen), sans franchissement de la membrane basale et sans envahissement du chorion. C'est sur ce terrain que surviennent la plupart des mélanomes de la conjonctive.
Clinique
Ces néoplasies mélanocytaires intra-épithéliales sont généralement hyperpigmentées par excès de mélanine, mais peuvent également être, dans une faible proportion de cas, achromes. Cliniquement, elles se différencient du nævus par une pigmentation conjonctivale toujours plane et non kystique, et un âge d'apparition plus tardif (entre 40 et 60 ans). Cette pigmentation brune et irrégulière peut être plus ou moins dense, avec un aspect « poivre et sel ». Contrairement au nævus, la pigmentation peut s'étendre à l'épithélium cornéen adjacent, aux culs-de-sac et à la conjonctive palpébrale. L'atteinte est unilatérale, et elle apparaît dans la grande majorité des cas chez des patients à la peau claire, ce qui permet de la distinguer d'une mélanose ethnique où la pigmentation conjonctivale est bilatérale et le patient mélanoderme [1 , 2].
Risque de dégénérescence en mélanome invasif
Les proliférations mélanocytaires intra-épithéliales peuvent parfois rester stables, mais dans la plupart des cas, elles vont s'étendre progressivement sur plusieurs années. Le potentiel de dégénérescence en mélanome invasif est variable selon les cas. L'importance de ce risque est difficile à préciser sur l'aspect clinique. Une étude rétrospective a cependant montré que l'étendue de l'atteinte conjonctivale (mesurée en nombre de quartiers horaires) pouvait être considérée comme un facteur de risque prédictif de transformation maligne : les lésions dont l'étendue est inférieure à 1 cadrant horaire ont un risque faible de transformation maligne, alors que les lésions de 3 cadrans horaires et plus ont plus de 20 % de risque de transformation maligne [ 3]. Pour les lésions inférieures à 1 cadrant horaire, on pourrait donc se contenter d'une surveillance, alors qu'une biopsie devrait être envisagée pour les lésions de 3 cadrans et plus.
En effet, la présence ou non d'atypies et leur importance sur l'analyse anatomopathologique permettent d'évaluer avec plus de précision le risque de dégénérescence maligne [2 , 4]. On distingue ainsi les proliférations mélanocytaires intra-épithéliales sans atypies, caractérisées en histologie par une prolifération lentigineuse de mélanocytes sans caractère atypique, limitée au niveau de la membrane basale de l'épithélium. Ces proliférations mélanocytaires intra-épithéliales sans atypies n'ont pas de potentiel évolutif vers le mélanome à ce stade, mais peuvent évoluer avec le temps vers une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies. À l'opposé, les proliférations mélanocytaires intra-épithéliales avec atypies se caractérisent en histologie par une migration de mélanocytes au niveau de l'épithélium superficiel (ascension pagétoïde), par un degré variable de pléomorphisme et d'atypies cellulaires, avec un volumineux noyau hyperchromatique et un important nucléole, certains groupes cellulaires allant jusqu'à présenter une morphologie épithélioïde ; des figures mitotiques peuvent être présentes ; une réponse inflammatoire chronique peut être notée au niveau du chorion. La prolifération de mélanocytes atypiques peut rester confinée au niveau de la membrane basale ou intéresser une épaisseur plus ou moins importante de l'épithélium [ 5].
Classification
En fonction de l'importance de ces anomalies, on peut classifier ces lésions en proliférations mélanocytaires intra-épithéliales avec atypies minimes, modérées ou sévères [6] (fig. 6-24,
Fig. 6-24
a. Jeune homme de 28 ans présentant une pigmentation conjonctivale unilatérale gauche apparue 6 ans auparavant avec une discrète augmentation progressive. Aspect en lampe à fente (LAF) montrant une pigmentation hétérogène, plane, non kystique. b, c. Aspect en LAF à plus fort grossissement (b) ; coupe histologique HES × 15 montrant une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale sans atypies (c).
fig. 6-25,
Fig. 6-25
Femme de 40 ans présentant une lésion pigmentée conjonctivale temporale depuis plus de 10 ans avec doute sur des modifications récentes. a. Aspect en LAF lors de la première consultation montrant une pigmentation limbique plane, non kystique, empiétant légèrement sur la cornée adjacente. b. Aspect en LAF un an plus tard montrant un étalement net de la pigmentation au niveau de la cornée et de la conjonctive bulbaire. Décision d’exérèse chirurgicale. L’analyse histologique a conclu à une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies légères. Pas de traitement complémentaire, poursuite de la surveillance régulière.
fig. 6-26,
Fig. 6-26
Femme de 60 ans présentant une lésion pigmentée conjonctivale unilatérale droite depuis une vingtaine d’années, avec une discrète évolutivité progressive. a. Aspect en LAF montrant une pigmentation plane hétérogène au niveau de la conjonctive bulbaire temporale supérieure et temporale inférieure, plus dense au niveau du limbe avec essaimage de pigment au niveau de l’épithélium cornéen adjacent. Des biopsies sont réalisées. b. Coupe histologique HES × 20 correspondant à une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies légères, avec une muqueuse conjonctivale siège d’une prolifération mélanocytaire lentigineuse sur un tiers de son épaisseur. Les mélanocytes sont pigmentés et présentent des atypies cytonucléaires minimes. Il n’est pas observé d’infiltration du chorion.
fig. 6-27,
Fig. 6-27
Femme de 64 ans présentant une lésion conjonctivale pigmentée unilatérale de l’œil droit évoluant depuis une dizaine d’années avec apparition récente d’une densification de la pigmentation au niveau du limbe supérieur. a, b. Aspect en LAF retrouvant une pigmentation relativement diffuse nasale supérieure du limbe au cul-de-sac supérieur. Réalisation d’une biopsie au niveau du limbe supérieur. c. Coupe histologique HES × 40 retrouvant une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies légères à modérées. Les atypies intéressent le tiers inférieur de l’épithélium conjonctival avec quelques rares ascensions. d. Aspect post-biopsie. Traitement de la mélanose résiduelle par collyre à la mitomycine 0,04 %. e. Disparition complète de la pigmentation conjonctivale 18 mois plus tard. Aucune récidive de la mélanose au dernier contrôle 6 ans plus tard.
fig. 6-28,
Fig. 6-28
Femme de 66 ans présentant depuis une dizaine d’années une pigmentation conjonctivale limbique nasale supérieure de l’œil droit. a. Constatation récente d’une extension de la pigmentation vers le limbe nasal inférieur et réalisation d’une biopsie. b. Coupe histologique HES × 15 montrant une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies légères. c. Aspect post-biopsie avec persistance d’un saupoudrage de pigment plan au voisinage du limbe sur 1 heure et 4-5 heures. Pas de traitement complémentaire. d. Surveillance régulière avec réapparition 3 ans plus tard d’une zone de pigmentation dense et évolutive sur 3 heures. Réalisation d’une nouvelle biopsie avec cryoapplication. e. Coupe histologique HES × 15 montrant une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies modérées. Les cellules légèrement pigmentées avec des atypies cytonucléaires prédominent au niveau de la couche basale de l’épithélium avec de rares ascensions mieux visualisées après immunohistochimie dirigée contre SOX10. Patiente perdue de vue après la biopsie.
fig. 6-29,
Fig. 6-29
Femme de 44 ans présentant une lésion pigmentée conjonctivale de l’œil gauche apparue 6 ans auparavant. a, b. Aspect en LAF avec une pigmentation plane poivre et sel limbique temporale inférieure étendue au niveau de l’épithélium cornéen adjacent et au niveau de la conjonctive palpébrale inférieure. Réalisation d’une exérèse de la lésion temporale inférieure et d’une biopsie de la pigmentation palpébrale. c. Coupe histologique HES × 20 de la lésion temporale inférieure montrant une néoplasie mélanocytaire intra-épithéliale conjonctivale avec atypies sévères, équivalent à un mélanome in situ (prolifération de mélanocytes atypiques intéressant toute l’épaisseur de l’épithélium, sans envahissement du chorion). Une irradiation complémentaire par faisceaux de protons a été réalisée sur cette zone. La biopsie de la conjonctive palpébrale a conclu à une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies légères. Une cryoapplication a été réalisée sur cette zone. d. Aspect 1 an après traitement sans pigmentation résiduelle visualisable.
fig. 6-30
Fig. 6-30
Femme de 78 ans présentant une lésion pigmentée conjonctivale unilatérale droite apparue il y a 12 ans avec extension progressive. a, b. Aspect en LAF montrant une pigmentation hétérogène, plane, intéressant la conjonctive bulbaire au voisinage du limbe, nasale inférieure et supérieure, avec extension à l’épithélium cornéen adjacent. Biopsies réalisées au niveau des zones les plus suspectes sur 1 heure et 8 heures. c. Même patiente, coupe histologique HES × 10 montrant au niveau des deux zones biopsiées la présence d’une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies sévères, équivalent à un mélanome in situ.
).
  • Dans les proliférations mélanocytaires intra-épithéliales avec atypies minimes, on n'aura que quelques mélanocytes au niveau de l'épithélium superficiel et le risque de transformation maligne, s'il existe, est minime.
  • En cas d'atypies modérées ou plus importantes, le risque de transformation maligne est corrélé au degré d'atypies [ 2 , 4].
  • En cas de lésion envahissant toute l'épaisseur de l'épithélium avec des atypies sévères, on parlera de mélanome in situ.
Cette classification des proliférations mélanocytaires intra-épithéliales en fonction des atypies en trois classes (minimes, modérées ou sévères) est cependant imprécise et par conséquent peu objective et reproductible. Damato et al. ont donc proposé un système de score de 0 à 10 calculé en fonction 1) de l'aspect de l'extension horizontale (basale, pagétoïde ou nodulaire) ; 2) du degré d'extension verticale (limité aux couches basales, < 50 % de l'épaisseur de l'épithélium, 50 à 90 % de l'épaisseur, > 90 %) ; et 3) de l'importance des atypies cytonucléaires (taille du noyau, abondance du cytoplasme, importance des mitoses) [6]. Un score à 0 correspond à une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale sans atypies ; un score à 1 équivaut à une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies minimes ; un score à 2-3 à une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies modérées ; un score à 4 à une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies sévères ; et au-delà de 5, la lésion sera considérée comme un mélanome in situ [1].
Prise en charge
Les proliférations mélanocytaires intra-épithéliales sans atypies ne nécessitent qu'une simple surveillance. En cas de prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies, le traitement a pour but d'éviter l'apparition d'un mélanome invasif.
Il n'y a pas actuellement de consensus concernant la meilleure prise en charge. Pour certains auteurs, en cas de lésions peu étendues (inférieures à un quadrant horaire), on peut se contenter d'une surveillance, ou proposer une exérèse chirurgicale associée à une cryoapplication . En cas de lésions plus étendues ou évolutives, la classique exérèse chirurgicale (avec ou sans greffe de membrane amniotique) associée à une cryoapplication a actuellement tendance à être remplacée par des biopsies (éventuellement multiples) associées à une chimiothérapie topique.
Ces chimiothérapies topiques présentent l'avantage de traiter l'ensemble de la conjonctive, y compris les zones d'infiltrations mélanocytaires intra-épithéliales achromes non visibles cliniquement. Elles représentent donc une bonne alternative à l'exérèse chirurgicale ou à la cryoapplication en cas de mélanose primitive acquise avec atypies avec atteinte diffuse ou multifocale. En revanche, elles sont inefficaces sur les proliférations sous-épithéliales correspondant aux zones de dégénérescence en mélanome invasif.
Le médicament le plus utilisé dans ce contexte est la mitomycine C, les séries publiées rapportant, avec des protocoles variables (concentrations, durée et nombre de cycles), une diminution ou une disparition complète de la pigmentation conjonctivale [7 , 8]. Des récidives avec réapparition d'une pigmentation conjonctivale évolutive peuvent cependant être constatées quelques années après le traitement. Certaines complications de la mitomycine C collyre sont passagères (hyperémie conjonctivale, chémosis, kératite ponctuée superficielle) ; d'autres persistent à long terme voire sont définitives : larmoiement, insuffisance limbique [9]. L'importance de la dose cumulative de mitomycine C (concentration à 0,04 %, cycles longs et nombre importants de cycles), ainsi que les antécédents d'exérèses chirurgicales larges avec cryoapplication pourraient pour certains auteurs influencer la survenue d'une insuffisance limbique [ 10 , 11].
L'interféron alpha-2b en collyre a aussi fait l'objet récemment de quelques publications rapportant une diminution ou une disparition de la pigmentation sans aucun effet secondaire ; le recul post-thérapeutique reste cependant encore faible [ 12 , 13] (fig. 6-31,
Fig. 6-31
Homme de 67 ans présentant une pigmentation conjonctivale unilatérale gauche apparue il y a 15 ans avec lente extension progressive. a. Aspect en LAF montrant une pigmentation conjonctivale plane relativement dense et étendue intéressant la conjonctive bulbaire temporale supérieure et temporale inférieure, légèrement plus dense au limbe. Réalisation d’une biopsie. b. Coupe histologique HES × 40 montrant une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies minimes. Décision de surveillance. Aucun traitement n’est réalisé. c. Constatation au cours du suivi d’une importante régression progressive et spontanée de la pigmentation conjonctivale sur 6 ans. Aspect en LAF un an après la biopsie. d. Aspect en LAF 7 ans après la biopsie. Ce phénomène de régression spontanée de la mélanose est peu fréquent. Une surveillance rapprochée reste cependant toujours indispensable.
fig. 6-32,
Fig. 6-32
Femme de 78 ans présentant une lésion pigmentée conjonctivale unilatérale gauche apparue il y a plus de 10 ans avec extension progressive. Réalisation d’une biopsie avec cryoapplication dans un autre centre. Analyse anatomopathologique ayant conclu à une mélanose de Reese avec atypies sans précisions sur la quantification des atypies. a, b. Aspect en LAF lors de la première consultation dans notre centre quelques mois plus tard montrant une pigmentation résiduelle plane et dense au voisinage du limbe nasal avec extension à l’épithélium de la cornée en nasal. Décision de surveillance. c. Aspect 2 ans plus tard avec régression complète de la mélanose suite à la cryoapplication réalisée.
fig. 6-33,
Fig. 6-33
Lésion pigmentée conjonctivale unilatérale droite apparue chez une femme de 48 ans. Une première exérèse est réalisée en ville après 5 ans d'évolution ; l'analyse a conclu à l'absence d'atypies cytonucléaires. a, b. Aspect en LAF lors de la première consultation dans notre centre pour récidive de la lésion pigmentée, 5 ans après la première exérèse. La pigmentation est dense en nasal, beaucoup plus discrète au limbe supérieur. Décision de surveillance avec aspect stable pendant plusieurs années. c, d. Sept ans plus tard, constatation d'une évolutivité de la mélanose (âge 66 ans). Décision de traitement par collyre mitomycine 0,04 %, 2 cycles de 15 jours. e, f. Disparition progressive de la pigmentation sur 9 mois avec aspect en LAF 9 mois après le traitement par collyre mitomycine. g. Aucune réapparition de pigment au niveau de la surface oculaire au dernier contrôle 6 ans plus tard.
fig. 6-34
Fig. 6-34
a-d. Lésion pigmentée temporale de l'œil droit constatée il y a 25 ans avec extension progressive depuis 5 à 6 ans chez une femme de 58 ans. Aspect en LAF montrant une pigmentation étendue limbique et bulbaire avec un aspect inflammatoire suspect en temporal ; on ne note pas de pigmentation palpébrale. Exérèse sous anesthésie générale de la lésion temporale et réalisation de biopsies multiples (au niveau du limbe entre 10 heures et 11 heures, au niveau du limbe supérieur entre 12 heures et 1 heure, et au niveau du limbe inférieur sur 6 heures). L'analyse anatomopathologique retrouve différents stades évolutifs de la mélanose. La lésion inflammatoire temporale correspond à un mélanome in situ avec micro-infiltration du chorion (zone ayant bénéficié d'une irradiation complémentaire par faisceaux de protons). Le limbe sur 10-11 heures correspond à une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies modérées. Le limbe supérieur et inférieur correspond à une prolifération mélanocytaire intra-épithéliale avec atypies légères. e-g. Aspect post-chirurgical montrant la mélanose résiduelle. La zone de mélanome micro-infiltrant temporale a été irradiée par faisceaux de protons. Puis, un traitement par collyre mitomycine 0,04 % a été réalisé pour traiter la mélanose résiduelle. h-j. Aspect 2 ans plus tard avec disparition complète de la pigmentation conjonctivale résiduelle.
).
Mélanome conjonctival
C. Levy-Gabriel
Épidémiologie
Le mélanome conjonctival est une tumeur maligne rare, mais dont incidence est actuellement en augmentation. Des études épidémiologiques réalisées aux États-Unis et en Finlande ont noté un doublement de l'incidence en 30 ans avec une incidence entre 0,54 et 0,80 pour 1 000 000 d'habitants par an à la fin des années 1990 [1 , 2].
Dans la majorité des cas (50 à 70 % des cas), le mélanome conjonctival se développe sur une mélanose conjonctivale primitive acquise ( primary aquired conjunctival melanosis [PAM]) avec atypies, mais il peut aussi apparaître sur une conjonctive saine (mélanome de novo  ; fig. 6-35,
Fig. 6-35
Homme de 51 ans présentant une lésion pigmentée conjonctivale apparue il y a 1 an avec croissance progressive. a. Aspect en LAF typique de mélanome avec une lésion pigmentée en relief, à cheval sur le limbe, empiétant largement sur la cornée, avec nombreux vaisseaux nourriciers dilatés. b. Aspect 4 ans après traitement par exérèse chirurgicale et irradiation par faisceaux de protons.
fig. 6-36,
Fig. 6-36
Lésion apparue récemment avec augmentation progressive chez une femme de 67 ans. a. En LAF, aspect de mélanome avec une tuméfaction conjonctivale nasale modérément pigmentée, en relief avec des vaisseaux nourriciers dilatés. b. Coupe histologique HES × 15 montrant une prolifération mélanocytaire infiltrant massivement le chorion, avec de très nombreuses mitoses, correspondant à un mélanome in situ et infiltrant. Une irradiation complémentaire par faisceaux de protons a été réalisée.
fig. 6-37
Fig. 6-37
Volumineux mélanome de novo achrome chez une patiente de 73 ans (contexte de maladie d’Alzheimer). a. Aspect avant traitement. Exérèse chirurgicale avec fermeture directe par glissement de la conjonctive adjacente. Analyse anatomopathologique concluant à un mélanome infiltrant, nodulaire de 20 mm de grand axe pour 6 mm d’épaisseur maximale. Une irradiation complémentaire par faisceaux de protons (60 Gy en 8 fractions) est réalisée. b. Aspect quelques mois après traitement. Patiente perdue de vue sans récidive 4 ans plus tard.
) ou, plus rarement provenir de la dégénérescence d'un nævus conjonctival préexistant [3 , 4].
Le terrain de prédilection est l'adulte à la peau claire d'environ 60 ans. Le mélanome conjonctival est rare chez le patient mélanoderme [5], et chez l'enfant (seulement 32 cas de moins de 18 ans publiés dans la littérature [ 6]).
Histologie
Le mélanome conjonctival est caractérisé en histologie par une prolifération mélanocytaire atypique qui intéresse l'épithélium conjonctival, franchit la membrane basale et envahit le chorion sous-jacent. Les cellules mélanocytaires tumorales peuvent être de conformation épithélioïde (globuleuses, voire polygonales, mimant une lésion épithéliale), ou fusiforme. Les atypies cytonucléaires des mélanocytes tumoraux sont plus ou moins marquées, pouvant être discrètes ; le diagnostic différentiel avec un nævus bénin peut alors être délicat. Dans d'autres cas, les cellules peuvent présenter des atypies sévères, avec un noyau à très volumineux nucléole, de fortes anisocaryose et anisocytose. La présence de figures de mitose dans le contingent infiltrant le chorion fait porter le diagnostic de mélanome. Lorsque le diagnostic histologique est difficile, l'immunohistochimie peut apporter une aide en utilisant différents marqueurs. Les colorations immunohistochimiques des mélanocytes comme les anticorps anti Melan-A, HMB-45, S 100, SOX 10 peuvent être utiles pour identifier l'origine mélanocytaire des cas problématiques. S100 est sensible mais non spécifique du mélanome conjonctival, alors que l'HMB-45 est moins sensible mais plus spécifique.
Clinique
À l'examen en lampe à fente, le mélanome se présente sous la forme d'une lésion qui croît progressivement, unilatérale, en général pigmentée, plus ou moins en relief et vascularisée. Mais certains mélanomes peuvent avoir une présentation plus atypique, avec très peu ou pas de pigmentation (mélanome achrome), ou avec un aspect plan (en particulier en cas de mélanome in situ). Le mélanome peut se développer au niveau de la conjonctive limbique, bulbaire, mais aussi au niveau des culs-de-sac ou de la conjonctive palpébrale supérieure et inférieure. Il peut s'étendre en surface au niveau de la cornée ; l'atteinte peut être dans certains cas plurifocale avec plusieurs localisations sur le même œil.
En cas de mélanome achrome, l'aspect clinique peut faire porter à tort le diagnostic de carcinome épidermoïde, ou de granulome inflammatoire. Le contexte, le terrain, l'âge, l'ancienneté et l'évolutivité de la lésion, l'existence d'une mélanose conjonctivale primitive acquise associée aident en général à orienter le diagnostic.
Il est aussi difficile de faire cliniquement la différence entre une PAM avec atypies, un mélanome in situ et un petit mélanome invasif débutant. Bien qu'elle ne remplace pas l'analyse histologique, l'imagerie peut alors apporter une aide diagnostique intéressante et non invasive. L'OCT en haute résolution du segment antérieur et l'échographie haute fréquence (50 et 100 MHz) permettent de visualiser les limites de la tumeur et certains détails de son architecture histologique (présence de kystes en particulier). L'OCT permet de distinguer les lésions intra-épithéliales des lésions sous-épithéliales [ 7]. L'échographie haute fréquence permet de mesurer l'épaisseur du mélanome, de visualiser une éventuelle invasion intraoculaire, et de faire la distinction entre un mélanome conjonctival et une extension extraoculaire d'un mélanome uvéal sous-jacent. La microscopie confocale à réflectance, qui a une plus haute résolution, permet de mieux visualiser certaines caractéristiques cytologiques. Pour certains auteurs, elle peut faire la distinction entre une PAM sans atypies, une PAM avec atypies et un mélanome, avec une sensibilité rapportée entre 89 % et 100 % et une spécificité entre 78 % et 100 % [8]. L'analyse anatomopathologique reste cependant indispensable au diagnostic.
La classification TNM du mélanome conjonctival est indiquée au tableau 6-1
Tableau 6-1
Classification TNM du mélanome conjonctival (d'après la 7 e classification de l'American Joint Committee on Cancer).
apT is : mélanome in situ (y compris la mélanose acquise primitive) avec atypie de l'épaisseur épithéliale normale supérieure à 75 %, avec caractéristiques cytologiques de cellules épithélioïdes, dont un cytoplasme abondant, des noyaux vésiculaires ou des nucléoles proéminents, ou la présence de réseaux intra-épithéliaux de cellules atypiques. bLes quadrants correspondent à des quadrants horaires, commençant à partir du limbe (par exemple 6, 9, 12 et 3 heures) et allant de la cornée centrale jusqu'aux bords palpébraux et au-delà. Cela divise en deux la caroncule.
Tumeur clinique primitiveTumeur pathologique primitive
TXLa tumeur primitive ne peut pas être évaluéeTXLa tumeur primitive ne peut pas être évaluée
T0Pas de signe de tumeur primitiveT0Pas de signe de tumeur primitive
T isMélanome confiné à l'épithélium conjonctivalT isMélanome confiné à l'épithélium conjonctival a
Mélanome conjonctival malin de la conjonctive bulbaire
T1pT1
T1a≤ 1 quadrant bpT1aMélanome ≤ 0,5 mm d'épaisseur, avec envahissement de la substance propre
T1b> 1 à 2 quadrants pT1bMélanome de 0,5 mm à 1,5 mm d'épaisseur, avec envahissement de la substance propre
T1c> 2 à 3 quadrants pT1cMélanome > 1,5 mm d'épaisseur, avec envahissement de la substance propre
T1d> 3 quadrants
Mélanome conjonctival malin non bulbaire (paupière, fornix, caroncule)
T2pT2
T2aNon caronculaire, ≤ 1 quadrant pT2aMélanome ≤ 0,5 mm d'épaisseur, avec envahissement de la substance propre
T2bNon caronculaire, > 1 quadrant pT2bMélanome de 0,5 mm à 1,5 mm d'épaisseur, avec envahissement de la substance propre
T2cCaronculaire de tout type, ≤ 1 quadrant pT2cMélanome > 1,5 mm d'épaisseur, avec envahissement de la substance propre
T2dCaronculaire de tout type, > 1 quadrant
Tout mélanome conjonctival malin avec envahissement local
T3pT3Le mélanome envahit l'œil, la paupière, le système lacrymonasal, les sinus ou l'orbite
T3aBulbe oculaire
T3bPaupière
T3cOrbite
T3dSinus
T4La tumeur envahit le système nerveux centralpT4Le mélanome envahit le système nerveux central
Nœuds lymphatiques régionaux cliniquesMétastases distantes cliniques
NXLes nœuds lymphatiques régionaux ne peuvent pas être évaluésM0Pas de métastases distantes (M0 non pathologique ; utiliser le M clinique pour effectuer la stadification)
N0a (biopsie)Pas de métastases des nœuds lymphatiques régionaux ; réalisation d'une biopsie
N0b (pas de biopsie)Pas de métastases des nœuds lymphatiques régionaux ; pas de réalisation de biopsie
N1Métastases des nœuds lymphatiques régionauxM1Métastases distantes
.
Prise en charge
La prise en charge thérapeutique du mélanome conjonctival commence avant toute chose par une évaluation précise et documentée de la localisation et des dimensions tumorales avec réalisation d'un dessin et de photographies préopératoires. Tous les auteurs s'accordent ensuite sur la nécessité d'une exérèse chirurgicale. Les biopsies sont contre-indiquées en cas de mélanome, car elles sont susceptibles de disséminer des cellules tumorales à distance du site initial [9]. Pour les mêmes raisons, toute infiltration sous-conjonctivale est à proscrire (anesthésiques locaux).
La technique d'exérèse chirurgicale du mélanome, maintes fois décrite, doit respecter certaines règles : manipulation ­minimale de la tumeur, utilisation d'alcool absolu pour décoller l'épithélium cornéen, cautérisation des vaisseaux nourriciers, exérèse de la tumeur en un seul bloc avec marges latérales de quelques millimètres, changements d'instruments pour la reconstruction [ 10 , 11].
Depuis une vingtaine d'années, la réalisation de plus en plus systématique d'une radiothérapie adjuvante après chirurgie a permis de réduire les marges d'exérèse au minimum, et d'éviter les kératectomies ou sclérectomies lamellaires qui ne prémunissent pas du risque de récidive locale et peuvent favoriser les récidives profondes [ 9].
En cas de mélanome intéressant uniquement la conjonctive palpébrale, sans atteinte des culs-de-sac, l'exérèse chirurgicale consistera idéalement en une résection palpébrale transfixiante de pleine épaisseur. En cas de mélanome très évolué ou de lésions multifocales ou multirécidivantes, une exentération orbitaire peut être nécessaire pour stopper localement le mélanome, mais l'intérêt de cette chirurgie large dans la diminution du risque de dissémination métastatique reste discuté [ 12 , 13].
Après l'exérèse chirurgicale localisée du mélanome, l'intérêt d'un traitement adjuvant pour diminuer le risque de récidive locale est reconnu par la plupart des équipes [9 , 14-15-16].
La cryothérapie, régulièrement utilisée il y a 40 ans en traite­ment adjuvant après exérèse chirurgicale d'un mélanome conjonctival, réduit significativement le risque de récidive locale, comparée à l'exérèse chirurgicale seule [ 17]. La cryothérapie n'est cependant efficace que sur les proliférations mélanocytaires atypiques résiduelles intra-épithéliales présentes au niveau des berges ; elle ne permet pas de stopper les lésions plus profondes. Il en est de même pour la mitomycine collyre, qui traitera les lésions intra-épithéliales associées au mélanomes invasif, mais pas la maladie microscopique résiduelle située sous l'épithélium [ 18].
Actuellement, pour diminuer le risque de récidive locale du mélanome, la plupart des auteurs privilégient la radiothérapie complémentaire. Missoten et al. ont ainsi montré la supériorité de la curiethérapie sur la chirurgie seule et sur la chirurgie avec cryothérapie, pour diminuer le risque de récidive locale du mélanome [19]. Les isotopes utilisés pour la curiethérapie varient selon les auteurs (strontium 90, ruthénium ou iode 125), avec des résultats comparables et des effets secondaires acceptables [9 , 19 , 20]. Certaines techniques de curiethérapie peuvent même être utilisées lorsque la tumeur présente une localisation palpébrale [21], ou envahit la cornée ou la sclère [22]. La protonthérapie , technique de radiothérapie de haute précision, permet quant à elle d'adapter parfaitement le champ d'irradiation au volume initial du mélanome, avec des taux de récidives locales comparables à la curiethérapie [16], tout en maintenant une acuité visuelle stable dans 57 % des cas.
Pour bon nombre d'équipes spécialisées européennes, l'indication d'une radiothérapie complémentaire est systématiquement retenue en cas de mélanome invasif, que l'exérèse soit complète ou incomplète sur l'analyse anatomopathologique, l'analyse des berges étant considérée comme peu fiable, même lorsqu'elle est très rigoureuse [ 9 , 20].
Facteurs de risque de récidive locale
Les principaux facteurs de risque identifiés dans la littérature pour le risque de récidive locale sont : 1) l'absence de traitement complémentaire après chirurgie ; 2) la localisation tumorale (l'atteinte des culs-de-sac, de la caroncule, ou de la conjonctive palpébrale étant défavorable [ 9 , 23 , 24] comparée aux localisations bulbaires et limbiques) ; 3) l'absence de prise en charge initiale en centre spécialisé qui a aussi été associée à un risque plus élevé de récidive locale [ 14 , 16]. Les facteurs pronostiques du risque de dissémination métastatique et de mortalité sont une épaisseur tumorale supérieure à 2 mm et une localisation tumorale défavorable (atteinte des culs-de-sac, caronculaire, ou palpébrale) [23-24-25]. La valeur pronostique de l'origine clinique ou histologique du mélanome ( de novo , ou provenant d'une PAM) reste discutée [ 4 , 23]. Enfin, plusieurs études ont montré une forte corrélation entre la survenue de récidives locales et l'évolution métastatique [23 , 24 , 26]. La classification clinique pronostique la plus récente est la 8 e édition de la classification TNM de l'American Joint Committee on Cancer (AJCC). Elle a une bonne valeur prédictive en ce qui concerne le risque de dissémination métastatique et de mortalité [27].
Le taux de récidive locale à 5 ans varie selon les études et le type de traitement réalisé, allant de 24 % (lorsque la prise en charge initiale est réalisée en centre spécialisé avec une irradiation complémentaire par faisceaux de protons [16]) à 45 % (en cas de traitement par chirurgie et cryothérapie sans irradiation complémentaire [ 4]). Plus le recul des études publiées augmente, plus le taux de récidives locales s'élève, allant jusqu'à 65 % à 15 ans [4 , 19 , 24]. Le taux de mortalité varie entre 7 % et 32 % à 5 ans, et entre 13 % et 38 % à 10 ans [23-24-25 , 28].
Évolution métastatique
La dissémination métastatique peut se faire par voie lymphatique au niveau des ganglions parotidiens, pré- et rétro-­auriculaires ou sous-mandibulaires, et par voie sanguine ou lymphatique au niveau viscéral (foie, poumon, cerveau) ; 45 % des patients métastasent en premier lieu au niveau du ganglion lymphatique ; 50 %, à l'opposé, métastasent au niveau viscéral avant de développer des métastases ganglionnaires [25]. Les bilans comprendront donc la palpation systématique des aires ganglionnaires, associée en fonction du contexte à des examens d'imagerie : échographie cervicale et hépatique, scanner ou IRM cérébral(e), cervical(e), thoracique, abdominal(e), TEP-scanner corps entier [ 29 , 30]).
Lors de la prise en charge initiale, si le bilan d'extension est négatif, il n'y a pas à ce jour d'indication à réaliser un curage ganglionnaire, une irradiation prophylactique des aires ganglionnaires ipsilatérales, ou un traitement systémique. L'intérêt de la biopsie du ganglion lymphatique sentinelle qui pour but d'identifier les patients présentant une micrométastase ganglionnaire infraclinique reste aussi controversé [ 18 , 31]. Cette technique non dénuée de complications n'a pas pour l'instant montré qu'elle permettait d'augmenter la survie sans métastase.
Les études génomiques récentes ont permis d'identifier la présence de mutations du suppresseur de tumeur NF1 (17 % à 37 % des cas), des oncogènes BRAF (12 % à 60 %) et NRAS (17 % à 37 %). Ces mutations sont mutuellement exclusives. Le profil génomique du mélanome conjonctival est donc très proche de celui des mélanomes cutanés, confortant la similitude entre ces deux pathologies [32 , 33], et ouvrant la voie à de nouvelles thérapeutiques ayant déjà fait la preuve de leur efficacité dans le mélanome cutané.
Au stade de maladie localement avancée, c'est-à-dire avec atteinte métastatique ganglionnaire régionale ipsilatérale (pré-/rétro-auriculaire, cervicale), il faut envisager un traitement systémique après curage (ou radiothérapie si le patient est inéligible à un curage) dont l'objectif est curatif (réduction du risque de rechute). En l'absence d'essai clinique spécifique aux mélanomes conjonctivaux, les indications des traitements systémiques suivront les recommandations thérapeutiques des mélanomes cutanés. On choisira le plus souvent un traitement d'immunothérapie par anti-PD1 (pembrolizumab ou nivolumab) pour une durée d'un an qui présente une meilleure balance bénéfice-risque que l'ipilimumab (anti-CTLA4) ou un anti-BRAF.
Au stade métastatique (présence de métastases viscérales), l'objectif du traitement devient palliatif, visant à retarder la progression et améliorer la survie globale. La stratégie thérapeutique est complexe, dépendant des mutations tumorales ( BRAF , KIT ), de la présentation clinique (petites lésions asymptomatiques versus volumineuses lésions symptomatiques), de l'état général du patient, de ses symptômes et de ses désirs.
On associera souvent traitements locaux et systémiques. Les traitements locaux consistent en des traitements chirurgicaux ou de radiothérapie à visée symptomatique (décompression médullaire, radiothérapie antalgique, etc.). Le traitement systémique repose sur deux classes médicamenteuses. Les thérapies ciblées , tout d'abord, concernent exclusivement les patients porteurs de tumeurs mutées BRAF ou KIT . Dans le premier cas, on peut proposer une combinaison d'inhibiteurs de BRAF/MEK  ; dans le second, un inhibiteur de KIT . Ces thérapies ciblées sont habituellement associées à des réponses tumorales rapides, permettant de soulager les symptômes en quelques jours/semaines, mais de façon transitoire, avec des résistances après quelques mois de traitement.
La seconde classe thérapeutique est celle des immunothérapies . Les anti-PD1 (nivolumab et pembrolizumab) sont des traitements mieux tolérés que les thérapies ciblées, envisageables chez des patients du grand âge avec des modes d'administration confortables pour les patients (perfusion d'une heure par intraveineuse périphérique toutes les 4 ou 6 semaines). Les réponses sont retardées, mais peuvent être prolongées avec des patients en réponse pendant des années. Une combinaison de deux immunothérapies anti-PD1/anti-CTLA4 (nivolumab/ipilimumab) apporte un bénéfice clinique en taux de réponse et de contrôle de la maladie comparativement à la monothérapie par anti-PD1, mais au prix d'un profil de toxicité clairement plus lourd [34]. Elle peut être discutée au cas par cas chez des patients jeunes, en bon état général.
Au total, on choisit dans la plupart des cas un traitement par immunothérapie (simple ou combinée) en première ligne en réservant la thérapie ciblée à la résistance dans les cas mutés, sauf en cas de patient porteur d'un mélanome BRAF -muté avec forte masse tumorale pour lequel les thérapies ciblées sont envisagées dès la première ligne (fig. 6-38,
Fig. 6-38
Patient de 43 ans présentant une lésion pigmentée conjonctivale temporale de l’œil droit connue depuis l’âge de 15 ans. Cette lésion s’est modifiée récemment avec augmentation du relief, extension vers la cornée et aspect en LAF de mélanome (a). Aspect de la cicatrice en LAF 5 ans plus tard, avec des télangiectasies conjonctivales post-radiques dans le secteur irradié (b), et une acuité conservée à 10/10e. Le patient a été traité par exérèse chirurgicale et irradiation complémentaire par faisceaux de protons. Coupe histologique HES × 40, où on retrouve par endroit un aspect de nævus avec des mélanocytes disposés en petits massifs réguliers dans le chorion (c), et dans d’autres secteurs un aspect de mélanome infiltrant avec mélanocytes atypiques en plages au niveau du chorion (d).
fig. 6-39,
Fig. 6-39
Homme de 76 ans présentant une lésion pigmentée conjonctivale droite limbique, à 9 heures, connue depuis l’enfance (probable nævus). Modification nette de la lésion depuis quelques mois avec apparition d’une gêne oculaire et d’une baisse de l’acuité visuelle. Aspect en LAF du mélanome à extension essentiellement cornéenne, développé sur nævus.
fig. 6-40,
Fig. 6-40
Femme de 56 ans présentant une lésion pigmentée conjonctivale connue depuis l’adolescence, et stable pendant 40 ans (probable nævus). Constatation récente d’une modification avec augmentation du relief et aspect inflammatoire. Aspect en LAF avant exérèse chirurgicale confirmant le diagnostic de mélanome invasif sur nævus.
fig. 6-41,
Fig. 6-41
Petite lésion pigmentée limbique découverte fortuitement chez une femme de 76 ans (a). L’absence de lésion signalée auparavant, l’âge de la patiente et l’existence d’une extension pigmentée cornéenne plane font évoquer le diagnostic de mélanome développé sur mélanose de Reese. Le traitement a comporté une exérèse chirurgicale, une protonthérapie puis un traitement par collyre à la mitomycine. b. Coupe histologique HES × 20 montrant une prolifération tumorale constituée de cellules mélanocytaires atypiques intéressant l’épithélium conjonctival de surface (a), avec quelques amas de mélanocytes atypiques au niveau du chorion superficiel (b). Il s’agit donc d’un mélanome invasif développé sur une mélanose primitive acquise avec atypies.
fig. 6-42,
Fig. 6-42
Lésion pigmentée apparue il y a 6 mois avec extension progressive chez un homme de 89 ans. Aspect en LAF avec une zone de pigmentation plus dense, discrètement en relief correspondant au mélanome invasif, entourée d’une pigmentation conjonctivale plane « poivre et sel » correspondant à la mélanose de Reese (ou prolifération mélanocytaire atypique intra-épithéliale). Le traitement a consisté en une exérèse chirurgicale de l’ensemble de la lésion pigmentée complétée d’une irradiation par faisceaux de protons.
fig. 6-43,
Fig. 6-43
Aspect en LAF d’un mélanome conjonctival développé sur une mélanose primitive acquise de Reese chez une femme de 80 ans. Noter l’existence d’une discrète pigmentation cornéenne linéaire sur 9 heures évocatrice de mélanose de Reese. Traitement par exérèse chirurgicale, protonthérapie et collyre à la mitomycine.
fig. 6-44,
Fig. 6-44
Mélanome achrome chez une patiente de 78 ans. La lésion en relief est située au voisinage du limbe temporal inférieur avec quelques vaisseaux nourriciers (a). On peut observer à distance, au limbe nasal supérieur, la présence d’une pigmentation plane évocatrice de mélanose de Reese (b).
fig. 6-45,
Fig. 6-45
Femme de 49 ans présentant une mélanose de Reese évoluant depuis 3 ans avec apparition récente d'une petite zone suspecte de mélanome invasif au limbe entre 10 heures et 11 heures. Aspect en LAF avant traitement (a). Aspect après exérèse de la zone suspecte de mélanome invasif (confirmation histologique du diagnostic de mélanome invasif) et irradiation complémentaire par faisceaux de protons (b, c) ; noter la mélanose de Reese résiduelle laissée en place (pigmentation plane au niveau du limbe et du cul-de-sac inférieur) et traitée secondairement par collyre à la mitomycine 2 mois après la fin de la protonthérapie. Aspect 18 mois après le traitement par mitomycine avec disparition presque complète de la mélanose de Reese (d, e). La patiente n'a présenté aucune récidive locale (recul actuel de 14 ans, acuité visuelle 10/10e).
fig. 6-46,
Fig. 6-46
Lésion pigmentée conjonctivale apparue il y a 10 mois chez un homme de 52 ans. Aspect en LAF d'un mélanome limbique supérieur (a) avec une lésion partiellement pigmentée, discrètement en relief, envahissant la périphérie cornéenne supérieure, entourée de lésions pigmentées planes évocatrices de mélanose de Reese. Aspect après exérèse chirurgicale de la zone de mélanome invasif et irradiation complémentaire par faisceaux de protons (b, c). Il persiste encore une pigmentation plane correspondant à la mélanose de Reese au limbe nasal et au niveau de la conjonctive bulbaire supérieure qui sera ensuite traitée par collyre à la mitomycine. Aspect 10 ans après la fin du traitement (d, e.). L'acuité visuelle est à 10/10e. Le patient n'a pas présenté de récidive. Noter les télangiectasies conjonctivales post-radiques dans la zone du champ d'irradiation, l'absence de pigmentation conjonctivale évocatrice de mélanose de Reese résiduelle.
fig. 6-47,
Fig. 6-47
a. Lésion pigmentée conjonctivale sans relief notable, apparue il y a quelques mois avec croissance tumorale rapide chez une patiente de 40 ans, mélanoderme d’origine martiniquaise. b. Coupe histologique HES × 30 de la lésion montrant un mélanome intra-épithélial infiltrant focalement le chorion. La jonction entre le revêtement épithélial et le chorion est le siège d’une prolifération mélanocytaire atypique sous forme lentigineuse (a) et thécale, avec un infiltrat inflammatoire modéré constitué essentiellement de mélanophages au niveau du chorion (b). Mais en un secteur, on retrouve aussi quelques cellules mélanocytaires atypiques réalisant une infiltration débutante du chorion (c). L’exérèse chirurgicale a été complétée par une irradiation (disque d’iode 125). c. Un an plus tard, une récidive locale au niveau de la conjonctive palpébrale supérieure a été traitée par résection palpébrale transfixiante du tiers externe de la paupière. L’analyse histologique a conclu à une néoplasie mélanocytaire intra-épithéliale atypique de haut grade (équivalent d’un mélanome in situ). Une phaco-exérèse pour cataracte radique a été réalisée 5 ans plus tard. La patiente a actuellement 6 ans de recul sans récidive et une acuité visuelle à 10/10e.
fig. 6-48,
Fig. 6-48
Lésion pigmentée conjonctivale apparue il y a 18 mois avec croissance rapide chez une femme de 72 ans avec acuité visuelle réduite à 3/10e en raison d’une dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA). a. Aspect de volumineux mélanome conjonctival polylobé développé sur mélanose de Reese, étendu à l’ensemble de la conjonctive bulbaire temporale jusqu’au cul-de-sac inférieur, mais restant à distance du cul-de-sac supérieur et du cantus externe. b, c. Aspect 6 mois après traitement par exérèse chirurgicale, reconstruction par greffe de membrane amniotique, protonthérapie et collyre à la mitomycine. La patiente est décédée d’une autre pathologie, sans récidive du mélanome, 9 ans après le traitement.
fig. 6-49,
Fig. 6-49
a-c. Mélanome du cul-de-sac conjonctival inférieur étendu au repli semi-lunaire et à une partie de la caroncule. La lésion est très pigmentée, en relief et polylobée (a). Aspect 4 semaines après exérèse chirurgicale et reconstruction par greffe de membrane amniotique, avec anneau à symblépharons en place (b). L’analyse histologique a conclu à un mélanome conjonctival in situ et infiltrant de 3,65 mm d’épaisseur maximale et avec un index mitotique très élevé. Une irradiation complémentaire conventionnelle a été réalisée au niveau de la paupière inférieure et du canthus interne. Aspect 1 an après la fin de l’irradiation (c). La patiente a présenté une évolution métastatique 22 mois plus tard dont elle est décédée.
fig. 6-50,
Fig. 6-50
Volumineux mélanome de la conjonctive palpébrale supérieure développé sur une mélanose de Reese Mélanose de Reese chez une femme de 74 ans. Le traitement a consisté en une résection palpébrale transfixiante de la totalité de la paupière supérieure.
fig. 6-51,
Fig. 6-51
Mélanome invasif du cul-de-sac conjonctival supérieur chez un homme de 52 ans présentant une très discrète pigmentation limbique plane évocatrice de mélanose de Reese.
fig. 6-52,
Fig. 6-52
Femme de 77 ans présentant un volumineux mélanome conjonctival nodulaire au niveau du cul-de-sac inférieur (a), avec une deuxième localisation de mélanome invasif au niveau de la conjonctive palpébrale supérieure (b), sur une mélanose de Reese visible au niveau de la conjonctive bulbaire inférieure, du cul-de-sac inférieur et des bord libres palpébraux.
fig. 6-53,
Fig. 6-53
Lésion pigmentée connue depuis 18 mois chez un patient de 84 ans en mauvais état général. Aspect de mélanome nodulaire sur mélanose de Reese intéressant la conjonctive palpébrale inférieure (a, b). Exérèse par résection palpébrale transfixiante de la moitié interne de la paupière avec aspect à 1 mois postopératoire (c). Irradiation complémentaire conventionnelle (tomothérapie 54 Gy). Collyre à la mitomycine non réalisé en raison de l’âge et du mauvais état général. Aspect 3 mois après la fin de la radiothérapie externe (d). Patient décédé d’une autre cause 5 ans plus tard sans récidive du mélanome.
fig. 6-54,
Fig. 6-54
a, b. Volumineux mélanome situé au niveau du cul-de-sac inférieur chez une femme de 68 ans.Exérèse chirurgicale par résection de la lamelle postérieure de la paupière inférieure et du cul-de-sac conjonctival inférieur, avec reconstruction par greffe de membrane amniotique. Analyse histologique concluant à un mélanome infiltrant nodulaire de 2 mm d’épaisseur maximale avec index mitotique modéré, associé à des lésions de mélanome in situ. Une irradiation complémentaire conventionnelle est réalisée sur la paupière inférieure et l’orbite antérieure, puis un traitement par collyre à la mitomycine. Aspect 18 mois plus tard (b). Évolution métastatique viscérale 20 mois après le traitement avec décès de la patiente.
fig. 6-55,
Fig. 6-55
Patient de 83 ans, monophtalme de l'œil droit, présentant au niveau de cet œil droit un volumineux mélanome multifocal développé sur mélanose de Reese. L'atteinte est très étendue avec de multiples lésions plus ou moins en relief correspondant à des localisations de mélanome invasif : au niveau de la moitié interne de la conjonctive palpébrale supérieure (a, b), de la conjonctive bulbaire inférieure, du cul-de-sac inférieur et de la conjonctive palpébrale inférieure (c). On note aussi un mélanome de Dubreuilh cutané Mélanome de Dubreuilh cutané intéressant la partie interne de la paupière inférieure et le canthus interne (d). Le traitement a consisté en une exérèse maximale des zones de mélanome invasif (résection palpébrale transfixiante de la moitié interne de la paupière supérieure et du canthus interne avec fermeture par suture directe. Exérèse en bloc de la lamelle postérieure de la paupière inférieure avec le cul-de-sac inférieur et la conjonctive bulbaire inférieure et reconstruction par greffe de membrane amniotique. La chirurgie a été complétée par une irradiation externe (50 Gy en tomothérapie sur l'ensemble de la paupière inférieure, la conjonctive bulbaire inférieure droite et le canthus interne), puis 2 cycles de collyre à la mitomycine 0,04 %. Aspect actuel (e). Le patient a un recul post-thérapeutique de plus de 5 ans. Il n'a pas présenté de récidive et l'acuité visuelle est à 2/10e.
fig. 6-56,
Fig. 6-56
Patiente de 74 ans présentant un volumineux mélanome développé sur mélanose de Reese. Les lésions pour la plupart achromes et en relief s'étendent sur la conjonctive bulbaire inférieure et temporale (a), les culs-de-sac inférieur, externe et temporal supérieur ainsi que la conjonctive palpébrale attenante (b, c). Étant donné l'existence d'une atteinte au voisinage de la glande lacrymale, et les séquelles attendues d'une irradiation dans ce secteur, il n'a pas été possible de proposer un traitement conservant le globe oculaire. Le bilan d'extension initial par scanner corps entier était négatif et une exentération orbitaire a été réalisée (photographie de la pièce d'exentération orbitaire, d). e. Coupe histologique du mélanome montrant des mélanocytes atypiques avec noyau irrégulier et rapport nucléocytoplasmique augmenté, infiltrant massivement le chorion. L'épaisseur maximale du mélanome a 6 mm, l'index mitotique est élevé. La patiente est décédée d'une évolution métastatique polyviscérale 8 mois plus tard.
fig. 6-57
Fig. 6-57
Mélanome achrome étendu avec atteinte plurifocale apparu rapidement chez une jeune femme de 23 ans enceinte de 8 mois. Les lésions de mélanome intéressent la conjonctive bulbaire temporale (a, b), et les conjonctives palpébrales supérieure et inférieure (c, d). Dans un premier temps, réalisation d'une exérèse chirurgicale de l'ensemble des nodules (exérèse conjonctivale simple, non transfixiante au niveau palpébral, reconstruction par greffe de membrane amniotique au niveau bulbaire). La patiente a refusé tout traitement complémentaire (chirurgical ou radiothérapique) après son accouchement. Elle a présenté une récidive de mélanome invasif au niveau de la conjonctive palpébrale supérieure 6 mois plus tard, traitée par résection palpébrale transfixiante de l'ensemble de la paupière supérieure. Elle n'a ensuite plus présenté de récidive et va bien avec un recul post-thérapeutique actuel de 9 ans. e, f. Aspect 7 ans après le traitement de la rechute avec acuité visuelle à 9/10e.
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