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Chapitre 15
Tumeurs rétiniennes

Rétinoblastome
Rétinoblastome – aspects moléculaires et cellulaires
F. Radvanyi, L. Golmard, A. Matet
Introduction
Bien que rare (50 à 60 nouveaux cas par an en France), le rétinoblastome est la tumeur intraoculaire la plus fréquente de l'enfant. Cette tumeur a comme origine la rétine en développement. Cependant, la cellule précise de la rétine donnant naissance au rétinoblastome (type de cellule et état de différenciation de cette cellule au moment de la transformation) fait encore l'objet de controverses. Si les événements initiaux nécessaires à l'initiation de cette tumeur sont bien connus (inactivation des deux allèles du gène RB1 dans plus de 95 % des cas), les événements moléculaires additionnels nécessaires à la progression tumorale sont encore incomplètement définis. Ces événements moléculaires ne sont probablement pas les mêmes dans tous les rétinoblastomes, ce qui pourrait expliquer l'hétérogénéité du rétinoblastome sur le plan clinique.
Altérations moléculaires initiales
Inactivation de RB1
L'altération moléculaire la plus fréquente dans le rétinoblastome est l'inactivation bi-allélique du gène RB1 . Dans les formes héréditaires (40 % des cas de rétinoblastome), un des deux allèles de RB1 est déjà inactivé au niveau constitutionnel (toutes les cellules de l'organisme présenteront cette altération de RB1 ). Un deuxième événement inactivant le second allèle de RB1 au niveau somatique (dans les cellules de l'organe atteint) initiera le rétinoblastome. Les formes héréditaires sont la plupart du temps multifocales et bilatérales. Dans les formes sporadiques (60 % des cas), les deux événements conduisant à l'inactivation de RB1 se produisent au niveau somatique, successivement dans la même cellule. La probabilité que ces deux événements se produisent est très faible, ce qui fait que les formes sporadiques sont majoritairement unifocales et unilatérales.
Plusieurs mécanismes peuvent conduire à l'inactivation de RB1 : variant pathogène ponctuel (affectant un ou quelques nucléotides), délétion d'une partie ou de tout le gène, méthylation de son promoteur (cette dernière altération n'est présente qu'au niveau tumoral, à l'exception d'un cas rapporté d'hyperméthylation constitutionnelle du promoteur de RB1 [1]. Au niveau constitutionnel, le type de variant pathogène de RB1 peut conduire à des formes plus ou moins pénétrantes. Par exemple, de grandes délétions, conduisant à la perte complète de RB1 et du gène MED4 localisé dans la même région génomique, sont associées à des formes faiblement pénétrantes [2]. La pénétrance des formes héréditaires ne dépend pas uniquement du type de variant pathogène de RB1  ; d'autres facteurs génétiques peuvent moduler le risque de rétinoblastome, comme un polymorphisme du gène MDM2 [3].
Plus rarement, amplification de MYCN
Dans une minorité de cas et seulement dans les formes sporadiques (environ 2 % des formes sporadiques), le rétinoblastome peut être initié par une amplification très importante de MYCN (plus d'une centaine de copies de MYCN au lieu de deux copies dans une cellule normale) sans altération de RB1 [ 4]. Ces cas sont d'apparition plus précoce par rapport aux autres formes sporadiques (âge médian 4,5 mois versus 24 mois).
Altérations génétiques somatiques associées à la progression tumorale des rétinoblastomes
D'autres altérations de l'ADN au niveau somatique sont retrouvées dans les rétinoblastomes. Certaines de ces altérations touchent de façon récurrente différentes régions du génome : gain du bras long du chromosome 1 (1q), du bras court des chromosomes 2 (2p) et 6 (6p), perte du bras long des chromosomes 13 (13q) et 16 (16q). Les gènes ciblés par ces altérations ne sont pas connus avec certitude, sauf pour les altérations touchant le 2p ( MYCN ) et le 13q ( RB1 ). Plusieurs candidats ont été proposés dont MDM4 sur le chromosome 1q, E2F3 sur le chromosome 6p et RBL2 (un autre membre de la famille de RB1 ) sur le chromosome 16q [ 5].
De façon générale, comme dans la plupart des cancers pédiatriques, peu de gènes sont trouvés mutés dans le rétinoblastome. Outre RB1 , un autre gène est inactivé de façon récurrente par des mutations ponctuelles ou des délétions, BCOR, mais dans seulement environ 10 % des cas [6].
Gènes impliqués au niveau fonctionnel dans les rétinoblastomes
Des expériences fonctionnelles réalisées sur des modèles précliniques de rétinoblastome ont permis d'identifier, outre MYCN, plusieurs autres protéines impliquées dans les rétinoblastomes comme MDM2 et MDM4 (ces protéines participent à l'inactivation de la protéine codée par le gène suppresseur de tumeurs TP53 ), OTX2, RXRG et THRB (des protéines exprimées par les cellules photoréceptrices ou les cellules cônes), SYK (potentiellement activée par des mécanismes épigénétiques) [ 5].
La cellule d'origine du rétinoblastome, une cellule cône en maturation ?
La rétine mature est composée de sept types cellulaires différents : les deux types de cellules photoréceptrices (cônes et bâtonnets), quatre autres types de cellules neurales (cellules horizontales, bipolaires, amacrines, ganglionnaires) et les cellules gliales de Müller. Ces sept types cellulaires proviennent toutes des mêmes cellules progénitrices de la rétine.
S'il est clairement admis que le rétinoblastome a comme origine une cellule de la rétine au cours du développement, la cellule exacte d'origine est encore débattue, cellule progénitrice de la rétine ou cellule cône en maturation [ 7 , 8].
Le fait que des marqueurs de plusieurs types cellulaires de la rétine soient exprimés par les rétinoblastomes pourrait suggérer que la cellule d'origine est la cellule progénitrice de la rétine. Cependant, les différents arguments énumérés ci-dessous sont plutôt en faveur d'une cellule cône en maturation comme cellule d'origine du rétinoblastome :
  • les rétinoblastomes expriment de nombreux marqueurs de cellules photoréceptrices et de cellules cônes [ 9] ;
  • certaines protéines indispensables à la prolifération des rétinoblastomes sont des marqueurs de cellules photoréceptrices ou de cellules cônes comme OTX2 et THRB citées plus haut.
Il est à noter que ces deux arguments ne suffisent pas pour démontrer de façon certaine que l'origine des rétinoblastomes est une cellule cône. En effet, il pourrait être argumenté que la cellule d'origine pourrait être une cellule à une étape plus précoce du développement qu'une cellule déjà engagée dans la voie des cônes, qui au cours de la transformation évoluerait et se trouverait bloquée à une étape de différenciation cône.
Les deux autres arguments sont les suivants :
  • la distribution des foyers de rétinoblastomes à la surface de la rétine est la même que celle des cônes de type L/M [9] ;
  • l'inactivation de RB1 dans des explants de rétine humaine entraîne une prolifération des cellules cônes à une étape précise de leur maturation (cellules cônes exprimant le marqueur ARR3). L'inactivation de RB1 n'entraîne pas la prolifération d'autres types cellulaires de la rétine [8].
L'expression dans les rétinoblastomes de quelques marqueurs d'autres types cellulaires de la rétine que les cônes pourrait être due soit à une expression anormale de ces marqueurs au cours du processus de transformation cellulaire, soit à une expression transitoire de ces marqueurs au cours de la différenciation normale des cônes.
Hétérogénéité moléculaire des rétinoblastomes
Des analyses moléculaires fondées sur le transcriptome (étude de tous les ARN de la cellule) et les altérations génomiques (étudiant l'ADN) ont montré une hétérogénéité des rétinoblastomes. Une partie des rétinoblastomes, souvent de diagnostic très précoce (moins de 18 mois), présentent très peu d'altérations génomiques, hormis celles touchant RB1 . Les autres rétinoblastomes, en général de diagnostic plus tardif, présentent plusieurs altérations génomiques. Ces rétinoblastomes sont moins différenciés (ils expriment des marqueurs associés à la différenciation précoce des cônes) et peuvent présenter une hétérogénéité intratumorale. Il est à noter que deux rétinoblastomes chez un même patient peuvent présenter des caractéristiques différentes [ 10].
Caractérisation moléculaire des rétinoblastomes grâce à l'étude des fluides biologiques
Contrairement à d'autres tumeurs, il n'est pas possible d'effectuer des biopsies à partir d'un rétinoblastome et la caractérisation moléculaire des rétinoblastomes a été faite essentiellement sur des tumeurs énucléées. Des études récentes ont montré que l'on pouvait caractériser les altérations génomiques des rétinoblastomes à partir d'ADN provenant de la tumeur et présent dans des fluides biologiques comme l'humeur aqueuse. Ces premiers travaux ont permis de montrer que le gain du chromosome 6p était associé à des tumeurs nécessitant plus fréquemment une énucléation [ 11].
Conclusion
Le rétinoblastome est une maladie hétérogène au niveau moléculaire. Les nouvelles connaissances obtenues et les travaux en cours devraient permettre de proposer des thérapies plus efficaces et moins agressives. La possibilité de caractériser la tumeur à partir de fluides biologiques permettra à l'avenir de mieux prédire l'évolution de la maladie et de proposer précocement un suivi adapté à chaque patient.
Remarques et définitions
  • Le nom d'un gène est toujours noté en majuscules et en italiques (le gène RB1 ). Le nom d'une protéine est noté en majuscules, non italique (la protéine RB).
  • C'est l'étude du rétinoblastome qui a conduit à l'identification de RB1 ( RB1 pour retinoblastoma 1 ), premier gène suppresseur de tumeurs identifié.
  • La protéine RB possède de multiples fonctions ; elle est impliquée dans le contrôle du cycle cellulaire (première fonction connue), mais également dans le contrôle de la ploïdie et dans la réparation de l'ADN.
  • Un chromosome est composé d'un bras court appelé p (pour petit) et d'un bras long appelé q organisés autour d'un centromère. 1q signifie bras long du chromosome 1.
  • Altération constitutionnelle : altération touchant l'ADN retrouvée dans toutes les cellules d'un individu.
  • Altération somatique : altération touchant l'ADN qui se produit dans une cellule au cours du développement ou chez l'adulte. Cette altération se retrouvera seulement dans toutes les cellules filles issues de cette cellule.
  • Gène suppresseur de tumeurs : gène dont l'inactivation est nécessaire à l'initiation ou à la progression tumorale. L'introduction d'un gène suppresseur de tumeurs dans une cellule tumorale entraînera l'arrêt de la prolifération ou la mort de cette cellule. RB1 est un gène suppresseur de tumeurs.
  • Mécanisme épigénétique : mécanisme conduisant à un changement dans l'expression de gènes, transmissible d'une cellule mère à ses cellules filles, mais ne touchant pas la séquence de l'ADN.
  • Oncogène : gène altéré par des mécanismes génétiques dans les cancers et impliqué dans la progression tumorale. Ces altérations conduisent à une activité augmentée de la protéine codée par ce gène. MYCN , amplifié et surexprimé dans certains rétinoblastomes et dans plusieurs tumeurs pédiatriques dont le neuroblastome, est un oncogène.
  • Transcriptome : ensemble des transcrits (ARN) présents dans une cellule. Les ARN sont transcrits à partir de l'ADN. Les ARN messagers sont traduits en protéines. D'autres ARN, comme les micro-ARN, ne codent pas de protéines et ont des fonctions régulatrices.
Génétique du rétinoblastome
J. Le Gall, L. Golmard, M. Gauthier-Villars
La plupart des cas de rétinoblastomes sont sporadiques, isolés. Dans deux tiers des cas, l'atteinte est unilatérale et l'âge médian au diagnostic est de 2 ans. Dans l'autre tiers, l'atteinte est bilatérale et l'âge médian du diagnostic est de 1 an. Dans 10 à 15 % des cas, une histoire familiale de rétinoblastome est retrouvée, correspondant à l'existence d'un facteur génétique de prédisposition transmis selon le mode autosomique dominant.
Prédisposition au rétinoblastome
La prédisposition au rétinoblastome est liée à des altérations du gène RB1 , gène suppresseur de tumeurs identifié en 1986 [12]. Elle suit le modèle des deux événements proposé par Knudson et Comings dans les années 1970 (fig. 15-1
Fig. 15-1
Modèle de Knudson et Comings.
) [ 13 , 14]. L'inactivation des deux allèles du gène RB1 dans une cellule de la rétine est nécessaire pour qu'un rétinoblastome se développe. La probabilité d'apparition de deux variants pathogènes somatiques inactivant les deux allèles de RB1 dans la même cellule de la rétine est extrêmement faible et explique la plupart des atteintes unilatérales. En revanche, la probabilité d'apparition d'un seul variant pathogène somatique lorsqu'un variant pathogène constitutionnel est déjà présent est un événement non rare qui provoque le développement d'un rétinoblastome. On comprend alors pourquoi les enfants ayant un variant pathogène constitutionnel d'un allèle de RB1 , hérité d'un parent ou survenu très tôt au cours de l'embryogenèse, variant de novo , ont un risque important d'avoir non seulement une, mais deux ou plusieurs localisations tumorales au niveau des deux rétines à un âge plus jeune.
La prédisposition au rétinoblastome explique l'ensemble des atteintes familiales et l'ensemble des atteintes bilatérales sporadiques. On estime de plus que près de 10 % des patients atteints d'un rétinoblastome unilatéral sont porteurs d'une prédisposition. Ainsi, la question de la prédisposition au rétinoblastome peut se poser pour tout patient et il est important d'évaluer le risque de récurrence pour les enfants apparentés au patient avec la recommandation d'une surveillance ophtalmologique régulière dès la naissance. Les explorations génétiques et l'étude moléculaire du gène RB1 permettent de mieux déterminer les enfants à risque et de lever la surveillance ophtalmologique des enfants n'ayant pas hérité de la prédisposition au rétinoblastome.
Le gène RB1 est localisé sur le chromosome 13, en 13q14. Il est composé de 27 exons codant la protéine RB (pRB) de 928 acides aminés. pRB est une protéine nucléaire interagissant avec de nombreuses protéines (plus de 200 interactions décrites à ce jour [15]), dont le principal rôle décrit est l'inhibition de la prolifération cellulaire. Elle est également impliquée dans d'autres fonctions telles que l'apoptose et la différenciation cellulaire [16].
Variants pathogènes du gène RB1
Les variants pathogènes identifiés sur le gène RB1 sont des variants perte de fonction, c'est-à-dire que la protéine produite ne sera pas ou peu fonctionnelle. Les variants majoritairement identifiés sont des variants tronquants, aboutissant à la production d'une protéine tronquée ou à l'absence de protéine. Des variants faux sens peuvent également être identifiés. Au niveau tumoral, on retrouve fréquemment une perte d'hétérozygotie ; la méthylation du promoteur de RB1 peut également être à l'origine d'une perte d'expression de pRB.
La pénétrance de la maladie est élevée, estimée à 90 %, c'est-à-dire que, pour tout patient porteur d'un variant pathogène constitutionnel sur le gène RB1 , la probabilité de développer un rétinoblastome est de 90 % [17]. Cependant, il existe des formes à pénétrance variable (patient porteur d'un variant pathogène qui ne développera pas de rétinoblastome) et expressivité variable (patient porteur d'un variant pathogène du gène RB1 et qui présentera une forme unilatérale). Le type de variant peut expliquer ces défauts de pénétrance et expressivité. C'est notamment le cas de certains variants faux sens, de la délétion complète du gène RB1 , des variants tronquants dans le premier exon, ou des variants situés sur le promoteur du gène RB1 .
Les variants pathogènes sont de novo dans plus de 90 % des cas, c'est-à-dire qu'aucun des parents n'est porteur du variant identifié chez leur enfant. Néanmoins, on ne peut pas éliminer la présence d'une mosaïque germinale (variant de novo prézygotique), c'est-à-dire la présence du variant au niveau des gamètes d'un des parents avec alors un risque de récurrence dans la fratrie. Le variant pathogène de novo peut aussi être survenu de façon post-zygotique, apparaissant au cours des premières divisions cellulaires, et n'est donc pas présent au sein de toutes les cellules au niveau constitutionnel ; le variant est alors présent à l'état de mosaïque chez le patient. Dans ces cas-là, et selon le taux de mosaïcisme, l'expressivité peut être incomplète (rétinoblastome unilatéral si peu de cellules de la rétine sont porteuses du variant).
Analyse du gène RB1
En pratique, si le patient a été énucléé, l'analyse du gène RB1 par séquençage haut débit se fait sur l'ADN tumoral à la recherche des deux variants pathogènes tumoraux retenus comme responsables de la tumeur. Dans 95 % des cas, les deux variants pathogènes sont identifiés, puis recherchés au niveau constitutionnel. En l'absence d'ADN tumoral, l'étude du gène RB1 se fait sur ADN leucocytaire (constitutionnel) par séquençage haut débit (fig. 15-2
Fig. 15-2
Stratégie d'analyse en génétique moléculaire.
).
Conseil génétique
L'étude du gène RB1 permet de proposer un conseil génétique et les tests génétiques doivent être réalisés dans le cadre d'une consultation de génétique. En cas d'identification d'un variant pathogène constitutionnel chez le cas index, il sera recherché chez les apparentés. La surveillance peut être levée chez les non-porteurs et, à l'inverse, une surveillance accrue chez les enfants porteurs est instaurée. En l'absence d'identification de variant pathogène RB1 , la surveillance ne peut pas être levée car il reste une interrogation (absence réelle de variant ou défaut de détection du variant) ; la surveillance est adaptée selon la présentation clinique chez le cas index et le degré de parenté [18]. Une étude indirecte, fondée sur l'étude de microsatellites au locus RB1 , peut être proposée à la fratrie d'un cas index sans variant pathogène RB1 identifié, ayant pour objectif de lever la surveillance chez un enfant qui n'aurait aucun allèle du gène RB1 en commun avec son frère ou sa sœur atteint d'un rétinoblastome, soit dans un cas sur quatre.
Le résultat de l'étude génétique lors du diagnostic de l'enfant est très important pour guider la prise en charge de sa fratrie voire de ses cousins. Ce résultat doit être pérennisé afin que l'enfant, en grandissant, en dispose pour son projet parental. Une personne porteuse d'un variant pathogène constitutionnel du gène RB1 a un risque sur deux de le transmettre à sa descendance. Un enfant porteur de ce variant a un risque de rétinoblastome proche de 90 %, avec un risque d'atteinte bilatérale. À l'âge adulte, le patient doit être informé des tests recommandés pour sa descendance et des différentes options de projet parental possibles : diagnostic postnatal, diagnostic anténatal et diagnostic préimplantatoire.
Rétinoblastome sans altération du gène RB1
Il a été identifié récemment de très rares cas de rétinoblastome (2 % des cas) pour lesquels, au niveau tumoral, aucune altération du gène RB1 n'est retrouvée, mais il existe une amplification du gène MYCN . Cliniquement, ces patients ont un rétinoblastome unilatéral, précoce (médiane de diagnostic de 4,5 mois) [19]. Des études sont en cours pour mieux préciser ces tumeurs.
Clinique et classification
L. Lumbroso-Le Rouic
Introduction
Le rétinoblastome est une tumeur maligne intraoculaire du petit enfant. Il s'agit d'une maladie rare, génétique. Sa survenue est estimée à un cas sur 15 à 20 000 naissances. En France métropolitaine, on décrit environ 50 cas par an [20]. Son pronostic vital est excellent dans les pays dits à « hauts revenus » avec, en France, une survie de 98,9 % [21].
Le diagnostic est avant tout clinique. Il se fait par la constatation d'une tumeur rétinienne blanche caractéristique à l'examen du fond d'œil. La prise en charge est urgente. Elle est multidisciplinaire, en milieu hautement spécialisé.
Clinique
Le rétinoblastome est une tumeur de la rétine, blanche, pouvant contenir des calcifications. Son diagnostic se fait à l'examen du fond d'œil (FO). Celui-ci est réalisé suite à la constatation par les parents d'un signe d'appel. En effet, bien que la médiane d'âge au diagnostic varie en fonction du niveau économique des pays avec 14 mois dans les pays occidentaux, pouvant aller jusqu'à 30 mois dans les pays à « faible revenu » [22], dans la grande majorité ses cas, les enfants atteints de rétinoblastome sont d'âge préverbal. Le FO est donc réalisé suite à la constatation par les proches de l'enfant d'une anomalie oculaire, la plupart du temps une leucocorie ou un strabisme.
La constatation ou même l'évocation par des parents de la présence d'une leucocorie doit faire penser à un rétinoblastome et le fond d'œil doit être réalisé en urgence (fig. 15-3
Fig. 15-3
Leucocorie droite chez une enfant de 8 mois révélatrice d'un rétinoblastome bilatéral.
). Le strabisme aussi nécessite un avis ophtalmologique rapide avec examen du FO pour éliminer le rétinoblastome, mais aussi d'autres pathologies organiques.
Les autres circonstances de découverte sont beaucoup plus rares : dépistage systématique chez des enfants à risque (apparentés à un patient traité pour rétinoblastome), aspect inflammatoire ou tumoral orbitaire très « bruyant » avec une buphtalmie (fig. 15-4
Fig. 15-4
a, b. Aspect buphtalme de l'œil chez un enfant révélateur d'un rétinoblastome bilatéral.
). De façon générale, toute anomalie oculaire (hétérochromie, décollement de rétine, etc.) chez un petit enfant doit faire pratiquer un examen ophtalmologique complet avec un FO et, si ce dernier n'est pas accessible, une imagerie oculaire par échographie, voire IRM, pour éliminer un processus tumoral (fig. 15-5
Fig. 15-5
a. Hétérochromie irienne liée à une néovascularisation de l'iris révélatrice d'un rétinoblastome unilatéral. On devine au travers de la pupille une lésion blanchâtre et hémorragique. b. IRM confirmant la présence d'une masse tumorale.
).
La prise en charge en milieu spécialisé est une urgence. Elle débute par un examen du FO sous anesthésie générale. Celui-ci permet de confirmer le diagnostic et de réaliser l'évaluation clinique ophtalmologique et pédiatrique initiale ainsi que de proposer un traitement.
Aspect clinique caractéristique
Un enfant atteint de rétinoblastome présente à l'examen du FO une ou plusieurs masses tumorales, de façon uni- ou bilatérale (fig. 15-6a-c
Fig. 15-6
a. Masse tumorale unique et unilatérale du fond d'œil (FO) gauche découverte suite à la constatation par les parents d'une leucocorie gauche intermittente. b, c. Rétinoblastome bilatéral découvert au FO de dépistage chez une enfant présentant une délétion du chromosome 13. d. Rétinoblastome unilatéral au diagnostic, lésion rétinienne tumorale gauche contenant des calcifications.
). Ce sont des tuméfactions rétiniennes blanches pouvant contenir des calcifications (fig. 15-6d
Fig. 15-6
a. Masse tumorale unique et unilatérale du fond d'œil (FO) gauche découverte suite à la constatation par les parents d'une leucocorie gauche intermittente. b, c. Rétinoblastome bilatéral découvert au FO de dépistage chez une enfant présentant une délétion du chromosome 13. d. Rétinoblastome unilatéral au diagnostic, lésion rétinienne tumorale gauche contenant des calcifications.
). La masse tumorale peut être plus ou moins importante. Lorsque la masse est très volumineuse, elle est souvent associée à un décollement de rétine exsudatif (fig. 15-7a
Fig. 15-7
a. Volumineux rétinoblastome unilatéral gauche avec décollement de rétine exsudatif et essaimage sous-rétinien. b. Rétinoblastome unilatéral gauche associé à un important essaimage vitréen. c. Essaimage vitréen dense en regard d'une masse du pôle postérieur. d. Essaimage vitréen localisé en regard d'une tumeur chez un enfant présentant des lésions bilatérales multiples.
). Un essaimage tumoral sous-rétinien (fig. 15-7a
Fig. 15-7
a. Volumineux rétinoblastome unilatéral gauche avec décollement de rétine exsudatif et essaimage sous-rétinien. b. Rétinoblastome unilatéral gauche associé à un important essaimage vitréen. c. Essaimage vitréen dense en regard d'une masse du pôle postérieur. d. Essaimage vitréen localisé en regard d'une tumeur chez un enfant présentant des lésions bilatérales multiples.
) ou intravitréen (fig. 15-7b
Fig. 15-7
a. Volumineux rétinoblastome unilatéral gauche avec décollement de rétine exsudatif et essaimage sous-rétinien. b. Rétinoblastome unilatéral gauche associé à un important essaimage vitréen. c. Essaimage vitréen dense en regard d'une masse du pôle postérieur. d. Essaimage vitréen localisé en regard d'une tumeur chez un enfant présentant des lésions bilatérales multiples.
) peut y être associé. La présence d'un essaimage sous-rétinien ou intravitréen ainsi que son étendue (minime et localisé ou diffus) (fig. 15-7c
Fig. 15-7
a. Volumineux rétinoblastome unilatéral gauche avec décollement de rétine exsudatif et essaimage sous-rétinien. b. Rétinoblastome unilatéral gauche associé à un important essaimage vitréen. c. Essaimage vitréen dense en regard d'une masse du pôle postérieur. d. Essaimage vitréen localisé en regard d'une tumeur chez un enfant présentant des lésions bilatérales multiples.
) sont un facteur de moins bon pronostic de conservation oculaire.
Dans le cas des dépistages systématiques des enfants à risque, des lésions parfois millimétriques sont détectées (voir fig. 15-6c
Fig. 15-6
a. Masse tumorale unique et unilatérale du fond d'œil (FO) gauche découverte suite à la constatation par les parents d'une leucocorie gauche intermittente. b, c. Rétinoblastome bilatéral découvert au FO de dépistage chez une enfant présentant une délétion du chromosome 13. d. Rétinoblastome unilatéral au diagnostic, lésion rétinienne tumorale gauche contenant des calcifications.
).
Cas particuliers
Rétinoblastomes arrêtés ou spontanément résolutifs
Dans quelques très rares cas, des tumeurs peuvent apparaître, se développer et ne plus évoluer. Il s'agit de « rétinocytomes  », ou de rétinoblastomes dits « spontanément involués » ou « spontanément régressifs ». Cette présentation clinique est très rare (moins de 2 % des cas de rétinoblastome). Cliniquement, l'aspect est comparable à celui d'une tumeur cicatricielle, mais survenant chez un patient n'ayant reçu aucun traitement et la plupart du temps asymptomatique, avec une masse tumorale translucide associée à des zones calcifiées et souvent entourée d'altérations de l'épithélium pigmentaire réactionnelles [ 23] (fig. 15-8
Fig. 15-8
Aspect clinique de rétinocytome ou rétinoblastome spontanément involué avec masse fragmentée calcifiée entourée d'altérations de l'EP chez une patiente asymptomatique et jamais traitée.
). Cet aspect peut exceptionnellement être observé au FO chez les parents d'un enfant pris en charge pour rétinoblastome, ce qui signe son caractère héréditaire et familial.
Une surveillance est recommandée en raison des rares cas décrits de réévolutivité tumorale [23]. Un bilan avec consultation génétique est aussi nécessaire.
Rétinoblastome infiltrant diffus
Dans cette présentation clinique aussi très rare (2 % des rétinoblastomes), il n'y a pas de masse tumorale rétinienne classique identifiable. Les enfants sont souvent plus âgés. Ils présentent souvent une atteinte du segment antérieur avec aspect de pseudo-uvéite avec pseudo-hypopion (fig. 15-9
Fig. 15-9
Aspect de pseudo-hypopion correspondant à des cellules tumorales de rétinoblastome.
). Des nodules iriens ou une néovascularisation de l'iris peuvent aussi être associés. Au FO, il peut de même exister des éléments dans le vitré, nodulaires, plus ou moins denses qui peuvent simuler une pathologie inflammatoire. La rétine est souvent infiltrée et blanchâtre, épaissie en échographie ou imagerie oculaire par IRM, mais sans masse tumorale rétinienne classique [24] (fig. 15-10
Fig. 15-10
a. FO d'une enfant présentant un rétinoblastome infiltrant diffus. Le vitré est le siège de lésions blanchâtres multiples, la rétine décollée et épaissie ; on ne visualise pas de masse tumorale identifiable. b. Échographie montrant un décollement de rétine total avec rétine épaissie et nodulaire et contenant des microcalcifications très évocatrices du diagnostic de rétinoblastome infiltrant diffus.
).
Le FO en milieu hautement spécialisé est réalisé sous anesthésie générale et complété par la réalisation de photographies couleur grand champ (fig. 15-11
Fig. 15-11
Rétinographe grand champ adapté aux examens pédiatriques sous anesthésie générale.
). Un OCT (fig. 15-12c
Fig. 15-12
a, b. FO de dépistage systématique chez un nouveau-né porteur d'une anomalie génétique du gène RB1. Cliniquement, pas d'atteinte visible. c. Tumeur infraclinique détectée par l'OCT.
) ou une échographie peuvent aussi être réalisés, complétant le bilan ophtalmologique. L'OCT peut détecter une tumeur ou une récidive infracliniques.
Le bilan pédiatrique est systématique ainsi que l'imagerie oculaire et encéphalique par IRM essentiellement. L'ensemble des données cliniques et paracliniques permet ensuite de réaliser la classification du stade de la maladie et de proposer la prise en charge thérapeutique adaptée.
Classifications
Classer la maladie permet d'évaluer et de préciser le stade de la maladie, au moment du diagnostic, du point de vue intraoculaire et aussi général. Plusieurs classifications existent. Elles ont évolué au fil du temps afin d'être adaptées aux évolutions thérapeutiques. Les différentes classifications permettent d'estimer les chances de réponse aux traitements ainsi que le pronostic visuel, oculaire et, pour la classification TNM, général.
La classification historique est celle de Reese-Ellsworth. Elle évaluait l'atteinte intraoculaire et ses chances de réponse au traitement conservateur par radiothérapie externe. Elle n'est plus utilisée car inadaptée pour prédire la réponse aux traitements actuels qui utilisent essentiellement une chimiothérapie. La classification IIRC ( International Intraocular Retinoblastoma Classification ) a donc été proposée afin de s'adapter au mieux aux traitements par chimiothérapie. Elle comprend cinq groupes allant de A (très bon pronostic de conservation oculaire et bon pronostic visuel) à E (pas de conservation oculaire possible) [ 25] (tableau 15-1
Tableau 15-1
Classification IIRC (d'après Murphree et al. [25]).
Groupe A : bon pronostic tumoral et visuel
Tumeurs < 3 mmSituées à plus de 3 mm de la fovéola et 1,5 mm de la tête du nerf optiqueSans essaimage sous-rétinien Sans essaimage vitréen
Groupe B
Tumeurs ≥ 3 mmDécollement séreux < 5 mm autour de la tumeurSans essaimage dans le vitré ou en sous-rétinien
Groupe C
Tumeurs associées à :
  • un essaimage vitréen ou sous-rétinien localisé
  • un décollement séreux de plus de 5 mm de la base tumorale et pouvant aller jusqu'à un quadrant
Groupe D
Tumeurs associées à :
  • un essaimage vitréen massif et/ou sous-rétinien diffus et massif
  • un décollement de rétine supérieur à un quadrant
Groupe E : pas de conservation oculaire possible
Globes sans potentiel visuel avec présence d'un ou de plusieurs signes suivants :
  • Hémorragie intravitréenne massive
  • Rétinoblastome infiltrant diffus
  • Glaucome néovasculaire
  • Tumeur touchant le cristallin
  • Tumeur en avant de la hyaloïde antérieure
  • Phtyse du globe
  • Cellulite orbitaire aseptique
). La classification TNM , récemment remaniée (tableau 15-2
Tableau 15-2
Classification clinique TNM pour le rétinoblastome (d'après Mallipatna et al. [26]).
cT1 : tumeurs rétiniennes avec DSR ≤ 5 mm autour de la lésion cT1a : lésions ≤ 3 mm à plus de 1,5 mm de la fovéa et du nerf optiquecT1b : lésions > 3 mm ou à moins de 1,5 mm de la fovéa et du nerf optique
cT2 : tumeurs associées à un décollement de rétine, essaimage vitréen, essaimage rétinien cT2a : DSR à plus de 5 mm de la base tumoralecT2b : essaimage vitréen et/ou sous-rétinien
cT3 : tumeurs intraoculaires étendues cT3a : phtyse du globecT3b : atteinte choroïdienne, de la pars plana, du corps ciliaire, de l'iris ou la chambre antérieurecT3c : hypertonie oculaire avec rubéose irienne et/ou buphtalmiecT3d : hyphéma et/ou hémorragie intravitréenne massive cT3e : cellulite orbitaire aseptique
cT4 : tumeurs extraoculaires avec atteinte orbitaire et du nerf optique cT4a : atteinte radiologique du nerf optique ou de l'orbitecT4b : atteinte orbitaire clinique avec exophtalmie et/ou masse orbitaire évidente cliniquement
N1Atteinte ganglionnaire (prétragienne, sous-maxillaire ou cervicale)
cM1 : atteinte métastatique clinique cM1a : atteinte métastatique de tout site à distance, clinique ou radiologiquecM1b : atteinte du système nerveux central en imagerie
H : prédisposition génétique HX : statut génétique pas connuH0 : pas d'anomalie génétique constitutionnelle retrouvéeH1 : rétinoblastome bilatéral ou rétinoblastome associé à un pinéaloblastome ou antécédents familaux de rétinoblastome ou d'anomalie génétique constitutionnelle retrouvée
), est désormais aussi régulièrement utilisée. Contrairement à l'IIRC qui ne concerne que l'œil, elle permet d'évaluer le pronostic oculaire mais aussi général et y associe le statut génétique (présence ou pas d'une anomalie génétique constitutionnelle) [26].
Diagnostic différentiel
Les diagnostics différentiels du rétinoblastome peuvent être très divers et pas toujours faciles à établir, comme pour une maladie de Coats évoluée ou une autre pathologie tumorale telle que le médulloépithéliome ou l'hamartome astrocytaire.
Médulloépithéliome
Le médulloépithéliome est une tumeur très rare du corps ciliaire qui survient chez les enfants en général un peu plus grands que pour le rétinoblastome (voir au chapitre 13.3, « Médulloépithéliome » ).
Maladie de Coats
G. Caputo
Clinique
La maladie de Coats, initialement décrite par Coats en 1908, se traduit par une atteinte vasculaire rétinienne congénitale comprenant des dilatations anévrismales, des télangiectasies, une raréfaction du lit capillaire (stade 1 de la classification de Shields) et une exsudation intra- et sous-rétinienne (stade 2 : 2a, atteinte extramaculaire et 2b, sous-maculaire). Dans les cas les plus sévères, se développe un décollement de rétine exsudatif partiel puis total (stade 3a puis 3b), responsable à terme d'un glaucome néovasculaire (stade 4) et d'une phtyse du globe (stade 5) [27]. Elle touche les garçons dans 75 à 90 % des cas et l'atteinte est à 80 % unilatérale, sans qu'aucune cause génétique ou familiale n'ait été pour l'instant déterminée [28 , 29]. Des tableaux cliniques bilatéraux similaires ont été décrits associés à des formes de rétinopathie pigmentaire [ 30], dans des cas de dystrophie scapulohumérale (fig. 15-13
Fig. 15-13
a, b. Maladie de Coats, stade 2b chez un enfant présentant une atteinte bilatérale dans le cadre d'une dystrophie scapulohumérale Dystrophie scapulohumérale .
), ou en cas de microangiopathie rétinienne et cérébrale avec microcalcifications et kystes [ 31].
Les éléments du diagnostic différentiel sont la présence d'anomalies vasculaires visibles, une exsudation jaunâtre comparée à la leucocorie plus blanche du rétinoblastome, et l'absence de réaction vitréenne dans la très grande majorité des cas (fig. 15-14
Fig. 15-14
Maladie de Coats, stade 3b. Décollement de rétine total exsudatif avec télangiectasies et dilatations vasculaires bien visibles.
).
Examen complémentaire
L'échographie met en évidence une rétine pouvant être épaissie et un liquide sous-rétinien riche en protides sans masse ou calcification.
Traitement
Le traitement de la maladie de Coats consiste dans un premier temps à occlure les vaisseaux télangiectasiques par photocoagulation directe au laser vert ou jaune de ces anomalies ; ceci est réalisable même en cas de rétine décollée [32] (fig. 15-15
Fig. 15-15
Maladie de Coats, stade 2b, avec exsudation sous-rétinienne majeure et télangiectasies. a. Tableau initial. b. Après une séance de laser, fragmentation des exsudats plus diffus. c. Aspect angiographique avec dilatation des vaisseaux encore visible.
). Une cryoapplication peut être également effectuée, et il est judicieux de traiter les territoires rétiniens en aval des vaisseaux occlus afin d'éviter l'apparition d'un glaucome néovasculaire secondaire. Le dosage de cytokines dans le liquide sous-rétinien retrouve des taux élevés de VEGF ( vascular endothelial growth factor ), et certains auteurs associent des injections répétées d'anti-VEGF, sans qu'aucune étude contrôlée n'ait prouvé leur efficacité seuls [33 , 34]. En cas d'échec ou d'efficacité incomplète de ces traitement ablatifs, une vitrectomie associant une photocoagulation directe des anomalies vasculaires et un tamponnement par huile de silicone peut être proposée [ 32] (fig. 15-16
Fig. 15-16
Enfant de 8 ans présentant une maladie de Coats stade 2b. a. Tableau initial. b. Hématome rétrohyaloïdien après une séance de laser. c. Aspect postopératoire après vitrectomie et tamponnement par silicone. d. À 6 mois post-ablation de l'huile de silicone ; l'acuité visuelle est de 3/10e.
).
Une atteinte précoce et le jeune âge du patient sont des facteurs défavorables du pronostic fonctionnel de la maladie [ 35 , 36].
Autres diagnostics différentiels du rétinoblastome
A. Daruich, M.P. Robert, D. Brémond-Gignac
Introduction
Différentes anomalies vitréorétiniennes de l'enfant se présentent avec des signes cliniques similaires à ceux d'un rétinoblastome, notamment une leucocorie ou un strabisme, et entraînent un doute sur le diagnostic.
Établir le juste diagnostic, le plus précocement possible, est essentiel chez ces patients, et vise non seulement à ne pas retarder la prise en charge oncologique urgente d'un rétinoblastome, mais aussi à préserver le pronostic visuel dans le cas des maladies vitréorétiniennes pédiatriques, qui peut également être impacté en cas de prise en charge tardive.
Des diagnostics différents selon l'âge de présentation
Parmi les patients adressés pour rétinoblastome, 16 à 22 % présentent réellement une pathologie simulant un rétinoblastome, ou « pseudo-rétinoblastomes  » [37 , 38]. Les deux pathologies les plus fréquentes pouvant simuler un rétinoblastome sont la maladie de Coats et la persistance de la vascularisation fœtale (PVF) (fig. 15-17
Fig. 15-17
Rétinophotographie chez un enfant de 2 ans adressé pour suspicion de rétinoblastome. On note un décollement de rétine total, exsudatif, jaunâtre, associé à des télangiectasies périphériques (flèche) faisant poser le diagnostic de maladie de Coats Coats, maladie de .
et 15-18
Fig. 15-18
Rétinophotographie chez un enfant de 4 mois adressé pour strabisme et masse blanche au fond d'œil. La présence d'un cordon hyaloïdien reliant la capsule postérieure du cristallin à la papille optique fait poser le diagnostic d'une persistance de la vascularisation fœtale Persistance de la vascularisation fœtale .
) [37-38-39-40]. Une grande étude américaine a permis d'établir une liste de 27 diagnostics les plus fréquemment retrouvés parmi 604 patients adressés à tort pour rétinoblastome (tableau 15-3
Tableau 15-3
Diagnostics différentiels de rétinoblastome les plus fréquents (d'après Shields et al. [37]).
Diagnostic différentiel de rétinoblastomeÂge (années) moyenne/médiane (intervalle)Nombre de patients (%) n = 604
Maladie de Coats6/4 (0,2–30)244 (40)
Persistance de la vascularisation fœtale2/1 (0,2–24)158 (26)
Hémorragie vitréenne1/1 (0,5–8)27 (5)
Toxocarose8/8 (1–18)22 (4)
Vitréorétinopathie exsudative familiale7/7 (0,6–16)18 (3)
Décollement de rétine rhegmatogène5/1 (0,5–24)18 (3)
Colobomes3/1 (0,3–11)17 (3)
Hamartome astrocytaire8/6 (0,5–28)15 (2)
Hamartome combiné4/2 (0,5–16)15 (2)
Endophtalmie endogène5/5 (0,2–11)10 (2)
Persistance de fibres à myéline4/4 (0,5–11)9 (1)
Cataracte congénitale3/1 (0,2–12)8 (1)
Rétino-uvéite3/2 (0,5–6)7 (1)
Rétinopathie du prématuré2/2 (0,8–7)7 (1)
Décollement de rétine non rhegmatogène1/1 (0,6–4)5 (< 1)
Médulloépithéliome4/4 (2–5)4 (< 1)
Rétinoschisis lié à l'X2/1 (0,6–7)4 (< 1)
Tuft vitréorétinien 3/1 (0,6–8)3 (< 1)
Incontinentia pigmenti4/4 (2–6)2 (< 1)
Xanthogranulome juvénile1/1 (0,7–0,8)2 (< 1)
Maladie de Norrie1/1 (0,7–0,8)2 (< 1)
Tumeur vasoproliférative10/10 (3–17)2 (< 1)
Ostéome choroïdien31 (< 1)
Syndrome de morning glory11 (< 1)
Hémangiome capillaire rétinien161 (< 1)
Fibrose rétrocristallinienne21 (< 1)
Toxoplasmose11 (< 1)
) [ 37].
De façon précise, cette même étude a montré que les pathologies pédiatriques pouvant le plus fréquemment simuler un rétinoblastome varient en fonction de l'âge de présentation. Selon cette série, la PVF représente le « pseudo-rétinoblastome » le plus fréquent chez les enfants de moins d'un an (49 % des cas), alors que chez les enfants de plus de 2 ans, la maladie de Coats est le diagnostic différentiel le plus fréquent (60 % des cas) [37].
D'autres pathologies sont plus fréquemment retrouvées avant l'âge de 1 an, comme les décollements de rétine (fig. 15-19
Fig. 15-19
Rétinophotographie chez un enfant de 20 mois, né prématuré, adressé pour décollement de rétine. La présence d'un décollement de rétine total d'origine tractionnel et rhegmatogène (flèche indiquant une déhiscence) est compatible avec le diagnostic de rétinopathie du prématuré méconnue, confirmée par l'examen de l'œil controlatéral.
), les hémorragies du vitré (fig. 15-20
Fig. 15-20
Rétinophotographie chez un enfant d'un mois adressé pour strabisme. On observe une hémorragie intravitréenne dense et des hémorragies intrarétiniennes paramaculaires inférieures (flèche) liées à un accouchement par ventouses.
), les cataractes congénitales et les colobomes choriorétiniens (fig. 15-21
Fig. 15-21
Rétinophotographie chez un enfant de 12 mois adressé pour lésion blanchâtre au fond d'œil. On note la présence d'un colobome choriorétinien Colobome choriorétinien en nasal inférieur.
).
D'autres diagnostics comme la toxocarose rétinienne (fig. 15-22
Fig. 15-22
Rétinophotographie chez un enfant de 4 ans adressé pour baisse d'acuité visuelle et lésion blanchâtre au fond d'œil, chez qui un bilan sérologique a permis de diagnostiquer une toxocarose oculaire Toxocarose oculaire .
), la vitréorétinopathie exsudative familiale, la persistance de fibres à myéline (fig. 15-23
Fig. 15-23
Rétinophotographie (a) et tomographie par cohérence optique (OCT) (b, c) chez un enfant de 4 ans adressé pour suspicion de rétinoblastome. On note l'association de fibres à myéline étendues et d'un hémangioblastome blanchâtre qui occasionne un décollement de rétine exsudatif, bien visible en OCT.
Source : Dr Emmanuel Barreau, Hôpital du Kremlin-Bicêtre.
et 15-24
Fig. 15-24
Rétinophotographie ultra grand champ chez un enfant de 2 ans adressé pour suspicion de rétinoblastome. On note la présence de fibres à myéline sans autre lésion associée.
), l'hamartome astrocytaire (fig. 15-25
Fig. 15-25
Rétinophotographie montrant un hamartome astrocytaire rétinien dans le cadre d'une sclérose tubéreuse de Bourneville Sclérose tubéreuse de Bourneville , chez un enfant de 4 ans.
) et l'endophtalmie endogène sont plus fréquemment retrouvés après l'âge de 5 ans [ 1].
Un examen clinique détaillé, si besoin sous anesthésie générale, permet de poser un diagnostic et d'orienter la prise en charge. Il comporte un examen du segment antérieur, du fond d'œil avec dilatation pupillaire et une pression intraoculaire. Si nécessaire, une imagerie multimodale est réalisée, pouvant inclure une tomographie par cohérence optique (OCT), une angiographie à la fluorescéine et une échographie en mode B. Dans les cas plus complexes, une imagerie par résonance magnétique (IRM) peut être réalisée.
Maladie de Coats
La maladie de Coats, pseudo-rétinoblastome le plus fréquent, est abordé en détail dans le sous-chapitre précédent. La présence de télangiectasies périphériques caractéristiques, d'exsudats jaunâtres et l'absence de masse à l'échographie, chez un enfant de sexe masculin, permettent d'orienter vers un diagnostic de maladie de Coats, y compris dans les cas avancés présentant un décollement de rétine totale (voir fig. 15-17
Fig. 15-17
Rétinophotographie chez un enfant de 2 ans adressé pour suspicion de rétinoblastome. On note un décollement de rétine total, exsudatif, jaunâtre, associé à des télangiectasies périphériques (flèche) faisant poser le diagnostic de maladie de Coats Coats, maladie de .
). La présence d'un nodule sous-fovéolaire, une forme clinique particulière de maladie de Coats, ne doit pas être interprétée à tort comme une masse tumorale (fig. 15-26
Fig. 15-26
Rétinophotographie (a) et échographie en mode B (b), montrant un nodule sous-fovéolaire exsudatif dans le cadre d'une maladie de Coats.
Source : Daruich A, Moulin AP, Tran HV, et al. Subfoveal nodule in Coats disease : towards an updated classification predicting visual prognosis. Retina 2017 ; 37(8) : 1591-8.
) [ 41].
Persistance de la vascularisation fœtale
La PVF, souvent unilatérale, se manifeste par une leucocorie ou un strabisme, et peut également simuler un rétinoblastome. Cependant, il existe fréquemment chez ces jeunes patients une microphtalmie associée, qui peut aider à orienter le diagnostic.
Trois formes de PVF sont classiquement décrites, selon la localisation antérieure, postérieure ou mixte des anomalies vasculaires [ 42]. La forme mixte, la plus fréquemment observée [42], associe une membrane fibrovasculaire rétrocristallinienne et un cordon hyaloïdien reliant la capsule postérieure du cristallin à la papille optique (voir fig. 15-18
Fig. 15-18
Rétinophotographie chez un enfant de 4 mois adressé pour strabisme et masse blanche au fond d'œil. La présence d'un cordon hyaloïdien reliant la capsule postérieure du cristallin à la papille optique fait poser le diagnostic d'une persistance de la vascularisation fœtale Persistance de la vascularisation fœtale .
). Cette membrane fibrovasculaire rétrocristallinienne peut entraîner dans les formes sévères un étirement centripète des procès ciliaires, signe caractéristique de la maladie. Au niveau postérieur, des tractions vitréorétiniennes non extensibles peuvent être à l'origine d'un décollement de rétine, notamment au cours de la croissance du globe oculaire.
L'échographie permet de confirmer l'absence de masse tumorale, et de visualiser la persistance de l'artère hyaloïdienne et la longueur axiale réduite, symptomatique de la microphtalmie associée.
La prise en charge chirurgicale précoce des formes sévères, suivie d'une prise en charge rigoureuse de l'amblyopie, améliore le pronostic visuel des yeux atteints de PVF [43 , 44].
Toxocarose oculaire
La toxocarose oculaire peut se présenter chez le jeune enfant sous la forme de granulomes postérieurs (voir fig. 15-22
Fig. 15-22
Rétinophotographie chez un enfant de 4 ans adressé pour baisse d'acuité visuelle et lésion blanchâtre au fond d'œil, chez qui un bilan sérologique a permis de diagnostiquer une toxocarose oculaire Toxocarose oculaire .
) ou périphériques, souvent associés à une hyalite, pouvant donc simuler un rétinoblastome avec essaimage vitréen. Cependant, l'éventuel contexte épidémiologique, la présence de tractions vitréorétiniennes et l'absence de calcifications peuvent orienter le diagnostic. Celui-ci est confirmé par sérologie sanguine avec recherche des anticorps spécifiques, ou par prélèvement des liquides oculaires [ 45].
Autres diagnostics différentiels
Les hémorragies vitréennes denses (voir fig. 15-20
Fig. 15-20
Rétinophotographie chez un enfant d'un mois adressé pour strabisme. On observe une hémorragie intravitréenne dense et des hémorragies intrarétiniennes paramaculaires inférieures (flèche) liées à un accouchement par ventouses.
) et les décollements de rétine d'étiologies diverses (voir fig. 15-17
Fig. 15-17
Rétinophotographie chez un enfant de 2 ans adressé pour suspicion de rétinoblastome. On note un décollement de rétine total, exsudatif, jaunâtre, associé à des télangiectasies périphériques (flèche) faisant poser le diagnostic de maladie de Coats Coats, maladie de .
et 15-19
Fig. 15-19
Rétinophotographie chez un enfant de 20 mois, né prématuré, adressé pour décollement de rétine. La présence d'un décollement de rétine total d'origine tractionnel et rhegmatogène (flèche indiquant une déhiscence) est compatible avec le diagnostic de rétinopathie du prématuré méconnue, confirmée par l'examen de l'œil controlatéral.
) font toujours évoquer la possibilité d'un rétinoblastome. Il peut en être de même pour certaines malformations d'aspect blanchâtre au fond d'œil telles que les colobomes choriorétiniens (voir fig. 15-21
Fig. 15-21
Rétinophotographie chez un enfant de 12 mois adressé pour lésion blanchâtre au fond d'œil. On note la présence d'un colobome choriorétinien Colobome choriorétinien en nasal inférieur.
) et les fibres à myéline (voir fig. 15-23
Fig. 15-23
Rétinophotographie (a) et tomographie par cohérence optique (OCT) (b, c) chez un enfant de 4 ans adressé pour suspicion de rétinoblastome. On note l'association de fibres à myéline étendues et d'un hémangioblastome blanchâtre qui occasionne un décollement de rétine exsudatif, bien visible en OCT.
Source : Dr Emmanuel Barreau, Hôpital du Kremlin-Bicêtre.
). D'autres tumeurs se développant chez l'enfant, comme les hamartomes astrocytaires rétiniens (s'inscrivant le plus souvent dans le cadre d'une sclérose tubéreuse de Bourneville) (fig. 15-25
Fig. 15-25
Rétinophotographie montrant un hamartome astrocytaire rétinien dans le cadre d'une sclérose tubéreuse de Bourneville Sclérose tubéreuse de Bourneville , chez un enfant de 4 ans.
), les hamartomes dits combinés de la rétine et de l'épithélium pigmentaire (fig. 15-27
Fig. 15-27
Rétinophotographie montrant un hamartome combiné de la rétine et de l'épithélium pigmentaire chez un enfant de 18 mois.
), les hémangioblastomes (hémangiomes capillaires rétiniens, pouvant s'inscrire dans un syndrome de von Hippel-Lindau) (voir fig. 15-23
Fig. 15-23
Rétinophotographie (a) et tomographie par cohérence optique (OCT) (b, c) chez un enfant de 4 ans adressé pour suspicion de rétinoblastome. On note l'association de fibres à myéline étendues et d'un hémangioblastome blanchâtre qui occasionne un décollement de rétine exsudatif, bien visible en OCT.
Source : Dr Emmanuel Barreau, Hôpital du Kremlin-Bicêtre.
) ou les tumeurs vasoprolifératives (fig. 15-28
Fig. 15-28
Rétinophotographie chez un enfant de 20 mois montrant une tumeur vasoproliférative inférieure associée à une exsudation jaunâtre massive atteignant la macula.
) peuvent également constituer un diagnostic différentiel du rétinoblastome [39 , 40]. Enfin, il est important de souligner l'existence de cas exceptionnels de patients présentant un rétinoblastome combiné avec d'autres pathologies oculaires pédiatriques, comme une PVF [ 46], ou une maladie de Coats [ 47], rendant plus complexe encore la démarche diagnostique.
Imagerie : diagnostic différentiel et bilan d'extension
H.J. Brisse, L. Cardoen
Introduction
Le diagnostic de rétinoblastome et le bilan d'extension intraoculaire sont habituellement effectués lors de l'examen du fond d'œil sous anesthésie générale. L'imagerie intervient à visée diagnostique lorsque la présentation au fond d'œil est atypique ou impossible à analyser en raison d'un décollement de rétine total ou d'une hémorragie intravitréenne.
Imagerie à visée diagnostique – échographie avec Doppler
Dans ces situations, l'examen le plus contributif de première intention est l'échographie avec Doppler [ 48 , 49]. Réalisée avec une sonde de haute fréquence (> 15 MHz), de préférence sous anesthésie (mais réalisable sans), par voie transpalpébrale, elle fournit des arguments essentiels pour le diagnostic positif de rétinoblastome en identifiant une ou plusieurs masses tissulaires, vascularisées en Doppler, échogènes, infiltrant la rétine sous forme de nodules de taille variable, et contenant dans 90 % des cas des microcalcifications (parfois confluentes, réalisant des macrocalcifications) [49]. Le volume du globe oculaire est généralement normal, parfois augmenté (buphtalmie) dans les formes avancées ; mais une microphtalmie marquée doit toujours suggérer une autre hypothèse diagnostique (voir fig. 15-29
Fig. 15-29
Rétinoblastome unilatéral étendu. a. L'échographie montre un décollement de rétine total et une masse tissulaire infiltrant la rétine, contenant des microcalcifications (flèche). b. L'étude Doppler couleur confirme le caractère tissulaire vascularisé. c. Corrélation macroscopique.
, 15-32
Fig. 15-32
Rétinoblastome unilatéral étendu, forme infiltrante diffuse (enfant de 4 ans). a. L'échographie montre un décollement de rétine total et une infiltration diffuse de la rétine avec rares microcalcifications (flèche). b. L'étude Doppler couleur confirme le caractère tissulaire vascularisé. c. Corrélation IRM en coupe coronale T2 montrant l'épaississement diffus et micronodulaire de la rétine (flèche).
et 15-33
Fig. 15-33
Maladie de Coats (enfant de 18 mois). a. L'échographie montre un décollement de rétine total, et une infiltration échogène non nodulaire de la rétine sans microcalcification et avasculaire en mode Doppler. b. L'IRM (coupe axiale T2) montre l'épaississement diffus et non nodulaire de la rétine. c. Le fond d'œil montre un décollement de rétine bulleux jaunâtre et des télangiectasies caractéristiques.
).
La forme infiltrante diffuse du rétinoblastome [ 50 , 51] est parfois de diagnostic plus difficile car survenant chez des enfants plus âgés ; elle est moins fréquemment calcifiée et peut simuler une uvéite avec un pseudo-hypopion. L'échographie retrouve néanmoins un aspect évocateur sous forme d'une infiltration nodulaire diffuse et échogène de la rétine.
Diagnostic différentiel
L'imagerie, et en premier lieu l'échographie, contribue fortement au diagnostic différentiel [52 , 53]. Le principal est la maladie de Coats , pathologie unilatérale liée à des télangiectasies rétiniennes et des exsudats sous-rétiniens jaunâtres décollant la rétine, réalisant des pseudomasses rétrocristaliniennes et se traduisant en échographie par un décollement de rétine avec un épanchement sous-rétinien échogène (cholestérol), mais avasculaire en Doppler et habituellement non calcifié.
La persistance de la vascularisation fœtale (ou du vitré primitif) est habituellement associée à une relative microphtalmie, une cataracte, et à la visibilité en écho-Doppler de l'artère hyaloïdienne au centre du vitré. Les dysplasies rétiniennes sont uni- ou bilatérales, également associées à un décollement rétinien et une rétine épaissie, mais sans nodule tissulaire, ni calcification [ 54].
Bilan d'extension – IRM
Une fois le diagnostic de rétinoblastome établi, l'imagerie contribue au bilan d'extension locorégional. L'examen le plus performant dans cette indication est l'IRM (voir fig. 15-30
Fig. 15-30
Rétinoblastome unilatéral étendu, forme exophytique. a. L'IRM en haute résolution (coupe sagittale pondérée T2) montre un décollement de rétine total et une masse tissulaire exophytique, contenant des microcalcifications (flèche). b. La coupe axiale T1 après injection montre un faible rehaussement de la tumeur (astérisque) et une choroïde fine et homogène (flèche) (envahissement minime superficiel à l'histologie), et un nerf optique d'aspect normal (non envahi à l'histologie). c. Fond d'œil.
, 15-31
Fig. 15-31
Rétinoblastome unilatéral étendu, forme endophytique. a. L'IRM en haute résolution (coupe sagittale pondérée T2) montre la masse tumorale endophytique, contenant des microcalcifications (flèches). b. La coupe axiale T1 après injection montre un faible rehaussement de la tumeur (astérisque) et une choroïde fine et homogène (flèche) (normale à l'histologie). c. Fond d'œil.
, 15-34
Fig. 15-34
Rétinoblastome unilatéral étendu avec infiltration limitée du nerf optique. a. L'IRM (coupe sagittale pondérée T1 après injection) montre une volumineuse tumeur (astérisque) recouvrant le pôle postérieur et une prise de contraste (flèche) sur les quatre derniers millimètres du nerf optique. b. L'étude histologique, après chimiothérapie néoadjuvante puis énucléation, confirme la présence de cellules tumorales (flèche) en arrière de la lame criblée (pointillés).
et 15-35
Fig. 15-35
Rétinoblastome unilatéral étendu avec infiltration étendue du nerf optique. L'IRM (coupes axiales pondérée T2, a, et pondérée T1 après injection, b) montre une volumineuse tumeur remplissant la quasi-totalité du globe, ainsi qu'un élargissement et une prise de contraste (flèches) du nerf optique jusqu'à l'apex orbitaire.
) [ 48 , 55 , 56]. Des recommandations techniques ont été publiées pour sa réalisation, idéalement sous anesthésie générale et en haute résolution [48]. Les rétinoblastomes se traduisent par des images nodulaires de taille variable. En pondération T1, le signal tumoral est intermédiaire et le rehaussement après injection est d'intensité variable, le plus souvent modéré. Les séquences pondérées en T2 sont les plus contributives, les lésions apparaissant en relatif hyposignal relativement au vitré, contenant des spots en hyposignal marqué correspondant aux calcifications. L'extension intraoculaire est en partie évaluable, identifiant les gros flocons intravitréens des formes endophytiques, les décollements rétiniens et nodules sous-rétiniens des formes exophytiques.
La résolution de l'IRM reste toutefois très inférieure à l'examen direct du fond d'œil, et des lésions inframillimétriques n'ont pas de traduction IRM. L'extension choroïdienne peut être visible sous forme d'un épaississement hétérogène focal en regard de la tumeur, mais la précision de l'IRM pour la caractérisation des extensions choroïdiennes profondes reste imparfaite [56]. L'extension extrasclérale est rare en dehors des cas de diagnostic très tardif, mais bien identifiable par IRM, visualisant le défect de la sclère et l'infiltration de la graisse orbitaire.
L'apport principal de l'IRM est l'analyse du nerf optique. Une extension au nerf se traduit, au départ, par un rehaussement anormal de la portion rétrolaminaire du nerf [57], puis par un élargissement de celui-ci [58]. L'extension peut être limitée à la portion orbitaire du nerf, mais peut s'étendre jusqu'au chiasma optique. L'extension à la gaine méningée du nerf peut engendrer une dissémination leptoméningée.
L'IRM doit analyser l'encéphale dans le même temps, à la recherche d'une (rare) lésion tumorale associée de la ligne médiane (rétinoblastome « trilatéral » [59]) ou d'une pathologie malformative (associée à une éventuelle délétion 13q constitutionnelle).
Anatomopathologie du rétinoblastome
A. Gauthier, J. Cyrta, P. Fréneaux
Introduction
Le rétinoblastome a d'abord été identifié comme une entité par Wardop en 1809. Le terme de neuroépithéliome rétinien a été proposé par Flexner en 1881, puis celui de rétinoblastome par Verhoeff. C'est cette dernière dénomination qui a été adoptée par la Société américaine d'ophtalmologie et l'Organisation mondiale de la santé.
Cette tumeur dérive des cellules neuroectodermiques primitives à différenciation rétinienne de l'épithélium neural immature [ 60].
Examen macroscopique
Des procédures de macroscopie de l'œil à l'état frais en cas de suspicion de rétinoblastome ont été décrites dans la conférence de consensus du Groupe de travail international de stadification des rétinoblastomes ( International Retinoblastoma Staging Working Group ) [ 61]. Le diamètre du globe oculaire et la longueur du nerf optique sont mesurés. Le tissu adipeux peut être prélevé pour cryopréservation d'un fragment de tissu non tumoral. La section postérieure du nerf optique est prélevée à l'état frais.
La tumeur est ensuite localisée par transillumination. Elle est visible à travers la pupille la plupart du temps. Elle correspond à une masse blanchâtre d'allure encéphaloïde adhérente à la rétine. Celle-ci peut ne pas être visible en raison d'une hémorragie vitréenne, de la proximité avec l'iris ou en cas de tumeur de petite taille. Une aiguille est introduite à travers la sclère du côté opposé à la tumeur. Une aspiration douce permet ensuite de recueillir une partie de la tumeur. Il faut alors prendre garde de ne pas toucher la sclère du côté de la tumeur afin de limiter le risque d'image d'invasion choroïdienne ou sclérale artéfactuelle. Il est possible de solubiliser la tumeur et le vitré pour faciliter son aspiration en injectant un peu de milieu de conservation RPMI. Une fois la tumeur prélevée, du formol tamponné est injecté dans le globe oculaire ; l'aiguille est laissée en place. Ce dernier est ensuite fixé en formol.
À aucun moment l'œil n'est ouvert à l'état frais afin d'éviter tout risque d'ensemencement de ces tumeurs extrêmement friables.
Après fixation, l'œil est coupé en deux en passant par le centre de l'iris, le point de pénétration de l'aiguille et le centre du nerf optique. Des coupes parallèles à ce premier plan sont ensuite réalisées tous les 3 mm. L'ensemble du globe oculaire est inclus en totalité.
Examen microscopique
Éléments du diagnostic positif
Microscopiquement, le rétinoblastome correspond à une prolifération tumorale constituée de « petites cellules rondes basophiles indifférenciées » à cytoplasme peu abondant et à noyau hyperchromatique. Les corps apoptotiques sont fréquents. Quelques tumeurs montrent des aspects anaplasiques marqués qui pourraient être associées à un risque augmenté de métastase [62]. Les signes de différenciation neurectodermique se manifestent par la formation de rosettes de Flexner-Wintersteiner et/ou de fleurettes (fig. 15-36
Fig. 15-36
Rétinoblastome. a. Rétinoblastome bien différencié : présence de nombreuses rosettes. À noter : l'importante activité mitotique le distinguant du rétinocytome. b. Rétinoblastome peu différencié au faible grandissement : absence de rosette. À noter : nécrose tumorale à distance des vaisseaux donnant un aspect en manchon. c. Rétinoblastome peu différencié au fort grossissement : prolifération tumorale à cellules rondes basophiles indifférenciées. Importante activité mitotique. d. Infiltration prélaminaire, laminaire et rétrolaminaire du nerf optique par un rétinoblastome peu différencié.
). Les rosettes de Flexner-Wintersteiner correspondent à la différenciation rétinienne et sont constituées de cellules tumorales cubiques circonscrivant une lumière apicale. Le noyau est basal et le cytoplasme forme des projections endoluminales. Ces formations sont classiquement décrites dans les rétinoblastomes, mais sont également observées dans les pinéaloblastomes et les médulloépithéliomes (fig. 15-37
Fig. 15-37
Médulloépithéliome Médulloépithéliome . a. Médulloépithéliome tératoïde : maillage de cordons de cellules neuro-épithéliales. À noter : présence d'une matrice chondroïde (en bas et à droite). b. Médulloépithéliome non tératoïde : cordons de cellules neuro-épithéliales sur le corps ciliaire. À noter : présence d'une composante à cellules rondes indifférenciée d'allure rétinoblastique (en bas à droite).
).
Les rosettes de Homer-Wright ressemblent à celles de Flexner-Wintersteiner, mais ne montrent pas de lumière apicale car les processus cytoplasmiques apicaux forment un enchevêtrement de structures neurofibrillaires. Contrairement aux rosettes de Flexner-Wintersteiner, elles ne sont pas considérées comme un signe de différenciation.
Les fleurettes correspondent à une différenciation en photorécepteurs [63 , 64]. Elles correspondent à de longs prolongements cytoplasmiques dont l'extrémité est plus large que la base, organisés en bouquets, d'où leur nom. Ces zones sont généralement facilement identifiables au faible grandissement, car relativement éosinophiles (en raison d'un cytoplasme plus abondant) comparativement aux secteurs basophiles (constitués de petites cellules bleues et rondes). Les noyaux sont réguliers, à chromatine fine, sans activité mitotique ou apoptotique notable. Les calcifications sont fréquentes. Ces aspects correspondent à ceux d'un rétinocytome, pendant bénin du rétinoblastome. Ces secteurs sont observés sur des tumeurs primitives et sont parfois les seules composantes tumorales persistantes après traitement néoadjuvant. Elles sont résistantes à la radiothérapie et à la chimiothérapie. Il est également possible que la chimiothérapie favorise la maturation de la tumeur vers cette forme tumorale [ 65 , 66].
Ces signes de différenciation architecturale sont de moins en moins présents à mesure que l'âge du patient augmente [ 67]. Ils ne semblent pas avoir d'impact sur l'évolution ultérieure de la maladie. De la nécrose parfois calcifiée est fréquemment retrouvée, en particulier lorsque les cellules tumorales arrivent à plus de 100 μm d'un vaisseau sanguin. On observe alors un aspect caractéristique de manchons tumoraux centrés par un vaisseau et circonscrits par des plages de nécrose. L'activité mitotique est généralement très importante (souvent supérieure à 30 mitoses/mm 2). Le mode de croissance de ces tumeurs peut être endophytique (développement vers le vitré, avec ou sans essaimage dans le corps vitré), exophytique (développement entre la rétine et la choroïde) ou un mélange des deux.
Après traitement néoadjuvant, la réponse tumorale est fréquemment complète. Ne persistent alors que des remaniements nécrotiques souvent calcifiés et des remaniements fibreux de la choroïde ainsi qu'une réaction gliale cicatricielle au niveau de la rétine. Une régression spontanée complète est également possible. Cette régression s'accompagne d'une importante réaction inflammatoire susceptible d'entraîner la phtyse oculaire. Les mécanismes de cette régression spontanée sont mal connus. On évoque une occlusion vasculaire, une toxicité calcique ou des phénomènes inflammatoires.
Immunophénotype
Les données bibliographiques sont peu abondantes. L'examen immunohistochimique n'est pas nécessaire dans l'immense majorité des cas. Son rôle se limite le plus souvent à l'élimination d'un diagnostic différentiel ou à l'examen d'une métastase que l'on souhaite rattacher à la tumeur oculaire.
Les cellules de rétinoblastome montrent une perte d'expression de Rb1 en immunohistochimie. Elles expriment CD56 et la synaptophysine [ 68 , 69]. Une expression de GFAP et NSE est décrite [ 70].
Diagnostic différentiel
Les principaux diagnostics différentiels histopathologiques à évoquer sont le rétinocytome, le médulloépithéliome, l'hémopathie, la dysplasie rétinienne et la métastase d'une tumeur à petites cellules rondes extraoculaire.
Facteurs pronostiques
Une fois le diagnostic posé, le pathologiste doit rechercher des facteurs de risque associés à une augmentation du risque d'évolution métastatique. Dans cette situation, un traitement adjuvant (chimiothérapie et éventuellement radiothérapie) permet d'abaisser le risque de métastase de 24 % à 4 % [ 71]. Les critères ont été décrits au fil des ans. Leur évaluation est complexe en raison de la rareté de la maladie [ 72], de la présence de facteurs de risque dans moins de 50 % des rétinoblastomes [73 , 74] et de l'efficacité des traitements néoadjuvants [75 , 76]. Ce défaut d'évaluation rigoureuse des facteurs de risque entraîne une variabilité de prise en charge entre les différents centres de référence à travers le monde [77]. Cependant, quelques facteurs pronostiques ont été validés par la conférence de consensus de l' International Retinoblastoma Staging Working Group [61] et étendus secondairement par le Groupe européen du rétinoblastome ( European Retinoblastoma Group [EURbG]) [77].
Les éléments devant figurer dans le compte-rendu anatomopathologique sont indiqués ci-après.
Invasion choroïdienne
  • L'invasion « focale » se définit par une infiltration de la sclère sur moins de 3 mm de plus grand axe, sans contact avec la sclère. Le risque métastatique est alors faible.
  • Elle est considérée comme « massive » dans les autres cas (si elle mesure plus de 3 mm de plus grand axe ou si elle atteint la sclère). Dans ce cas, le risque métastatique est intermédiaire [ 61 , 78 , 79].
  • Il convient de bien distinguer une véritable atteinte ou infiltration sclérale d'un ensemencement artéfactuel, très fréquent au cours de la macroscopie de ces tumeurs particulièrement friables.
Invasion du nerf optique
  • L'invasion du nerf optique s'associe à différents niveaux de risque métastatique en fonction du niveau d'infiltration du nerf [71 , 78- 79- 80- 81]. Lorsque l'infiltration se limite aux segments prélaminaire et laminaire du nerf optique, le risque métastatique est faible. Ce risque devient intermédiaire lorsque le segment post-laminaire est atteint. Il convient alors de mesurer la longueur de cette infiltration à partir de la lame criblée. Le risque devient élevé lorsque la tranche de section du nerf optique est atteinte [ 77 , 79 , 80].
  • L'extension aux gaines méningées.
Extension extrasclérale
L'extension extrasclérale se définit comme la présence de cellules tumorales au-delà la sclère par infiltration de celle-ci [ 80]. Elle s'associe à un risque élevé d'évolution métastatique.
Invasion du segment antérieur (chambre antérieure, angle iridocornéen, iris et corps ciliaire)
Il s'agit du critère le plus discuté car difficile à analyser en raison du manque d'une définition consensuelle, de l'absence de relecture centralisée dans les études, de la nature uniquement rétrospective de ces études, de la disparité des attitudes thérapeutiques lorsque ce facteur est présent et de son association dans l'immense majorité des cas avec d'autres critères de mauvais pronostic [82-83-84-85-86]. Ainsi, la plupart des équipes européennes (mais pas toutes) considèrent ce facteur comme une indication de traitement adjuvant afin de réduire le risque métastatique [77 , 78 , 86 , 87].
Traitements de première ligne
Principes thérapeutiques
L. Lumbroso-Le Rouic
Généralités sur la prise en charge et principes thérapeutiques
La prise en charge du rétinoblastome est fondée sur la nécessité d'assurer le meilleur taux de guérison du cancer, de minimiser les séquelles visuelles et esthétiques, et de réduire le risque de deuxième tumeur. Les indications, la réalisation, l'évaluation et le suivi des traitements imposent une prise en charge pluridisciplinaire en milieu spécialisé onco-ophtalmologique. Les indications des différentes possibilités thérapeutiques (chirurgie, chimiothérapie intraveineuse ou intra-artérielle, traitements locaux ophtalmologiques par laser, cryothérapie, disque d'iode, injections intravitréennes) et leurs combinaisons sont posées en fonction du bilan initial oculaire et pédiatrique et après validation en réunion de concertation pluridisciplinaire (fig. 15-38
Fig. 15-38
Modalités de prise en charge pour une suspicion de rétinoblastome.
).
Un bilan général est rarement indiqué d'emblée lorsque les tumeurs sont strictement intraoculaires et pas trop étendues. Il est proposé en cas de lésions intraoculaires très étendues au moment du diagnostic (buphtalmie), ou en cas de constatation en IRM d'une atteinte du nerf optique ou extrasclérale. Ce bilan consiste en une ponction médullaire, une biopsie de moelle et une ponction lombaire.
L'imagerie elle, est systématique. Elle consiste en une IRM oculaire et encéphalique réalisée sous anesthésie générale.
Un prélèvement d'humeur aqueuse avec recherche d'ADN tumoral circulant (biopsie liquide) est désormais possible. Il permet de réaliser une analyse génomique, d'identifier les mutations causales, mais aussi dans certains cas de préciser l'éventuel caractère plus agressif de la tumeur par la recherche de biomarqueurs comme un gain du 6p [88 , 89].
Traitement
Le traitement, conservateur ou pas, dépend de multiples paramètres, en particulier ophtalmologiques, tels que le caractère uni- ou bilatéral des tumeurs, le nombre des tumeurs, leur volume, leur localisation par rapport à la macula et/ou au nerf optique, la présence d'un essaimage sous-rétinien ou vitréen ; mais aussi généraux, comme l'âge de l'enfant, le caractère génétique ou pas de l'atteinte et les éventuelles pathologies associées que l'enfant pourrait présenter.
Énucléation
Pour des lésions très étendues (groupes E/cT3), l'énucléation est le plus souvent nécessaire. L'IRM oculaire est indispensable avant le geste pour vérifier l'absence d'extension au niveau du nerf optique ou extrasclérale (fig. 15-39
Fig. 15-39
a, b. Rétinoblastome unilatéral très étendu aves décollement de rétine non accessible à un traitement conservateur.
).
Traitements conservateurs
Pour les groupes moins évolués, un traitement conservateur a de très bonnes chances de réussite sur le plan tumoral. La vision dépendra de la localisation par rapport à la macula et à la tête du nerf optique des tumeurs (fig. 15-40
Fig. 15-40
Rétinoblastome bilatéral familial découvert au fond d'œil de dépistage systématique. Groupe A bilatéral au diagnostic (lésions de moins de 3 mm à distance de la macula et de la tête du nerf optique) (a, b) et après traitement par thermothérapie seule (c, d). Le pronostic visuel est excellent.
). Les traitements conservateurs font appel à diverses techniques qui sont le plus souvent associées entre elles pour chaque enfant voire chaque œil. Ils sont souvent réalisés dans le cadre d'essais cliniques. Chacun peut être réalisé seul ou en association avec une chimiothérapie.
Cryoapplication
La cryoapplication est réalisée pour les plus petites tumeurs périphériques.
Thermothérapie transpupillaire (TTT)
Il s'agit d'une hyperthermie réalisée sur chaque site tumoral. Utilisée seule, elle est efficace pour les plus petites tumeurs de moins de 3 mm équatoriales ou postérieures à l'équateur, comme celles qui peuvent être dépistées par des fonds d'œil systématiques chez un enfant porteur d'une anomalie génétique.
Pour les lésions plus importantes, la TTT est associée à une chimiothérapie (intraveineuse ou intra-artérielle) pour en potentialiser les effets.
La photocoagulation classique n'a plus d'indications dans le traitement du rétinoblastome.
Brachythérapie ou curiethérapie
Ce traitement consiste en l'irradiation localisée proposée pour le traitement des tumeurs périphériques non accessibles aux autres traitements.
Chimiothérapie
La majorité des enfants pris en charge pour rétinoblastome ont des tumeurs dont la taille au diagnostic ne permet pas la réalisation de l'un de ces traitements d'emblée. Une chimiothérapie est alors nécessaire afin de réduire le volume tumoral et de rendre les tumeurs accessibles au traitement local qui est ensuite associé au traitement chimiothérapique.
La chimiothérapie peut être réalisée par voie intraveineuse ou intra-artérielle directement dans l'artère ophtalmique.
Par voie veineuse, les protocoles d'administration, (médicaments utilisés, nombre de cures) sont nombreux. Ils associent le plus souvent de l'étoposide, du carboplatine et de la vincristine. Lorsque le volume tumoral a diminué, on y associe des traitements locaux par thermothérapie, cryoapplication ou ponctuellement une curiethérapie (fig. 15-41
Fig. 15-41
Rétinoblastome bilatéral nécessitant une chimiothérapie de réduction au diagnostic (a, b). Aspect après deux cures de chimiothérapie (c, d), puis à la fin du traitement associant chimiothérapie et traitements par thermothérapie et cryoapplication (e).
).
La chimiothérapie intraveineuse associée aux traitements locaux est réalisée depuis plus de 20 ans et donne des résultats très satisfaisants, avec un contrôle tumoral excellent pour les yeux les moins atteints (groupes A à C). Les yeux ayant une atteinte plus évoluée (groupe D) ont un risque plus important de rechute tumorale et d'énucléation secondaire [90].
Depuis une dizaine d'années, l'administration de la chimiothérapie peut aussi se faire par injection intra-artérielle sélective directement dans l'artère ophtalmique après cathétérisme fémoral. Le médicament le plus couramment utilisé est le melphalan, mais d'autres molécules telles que le topotécan ou le carboplatine peuvent y être associées [ 91].
Après chimioréduction par intra-artérielle
Un traitement local par cryoapplication et TTT sur les tumeurs est ensuite associé lorsque le volume tumoral a diminué selon des modalités comparables aux traitements associés à la chimiothérapie intraveineuse. Les résultats sont intéressants en termes de contrôle tumoral et conservation oculaire. La tolérance générale est bonne ; cependant, des effets secondaires oculaires avec risque d'occlusions vasculaires sont possibles et le pronostic fonctionnel des yeux traités par cette technique reste à évaluer à moyen et long terme.
Au total
Quelle que soit la stratégie thérapeutique utilisée, une grande partie des échecs tumoraux sont liés à la présence d'un essaimage dans le vitré ou en sous-rétinien . Ces essaimages, parfois présents dès le diagnostic, peuvent aussi apparaître en cours de traitement ou de surveillance. L'essaimage intravitréen répond souvent mal à la chimiothérapie utilisée par voie veineuse ou intra-artérielle. C'est dans cette situation clinique que l'utilisation d'une chimiothérapie par voie intravitréenne peut être discutée. Les molécules actuellement utilisées sont essentiellement le melphalan et le topotécan [ 92].
Les différentes options thérapeutiques sont schématisées dans les fig. 15-42
Fig. 15-42
Rétinoblastome unilatéral sans atteinte extraoculaire ou du nerf optique – options thérapeutiques.
et 15-43
Fig. 15-43
Rétinoblastome bilatéral sans atteinte extraoculaire ou du nerf optique – options thérapeutiques. TTT : thermothérapie transpupillaire.
.
Traitement non conservateur
L. Lumbroso-Le Rouic
Énucléation pour rétinoblastome
Bien que les indications de traitements conservateurs se soient progressivement étendues, l'énucléation reste l'une des options thérapeutiques importantes dans la prise en charge d'un enfant atteint de rétinoblastome.
En effet, il s'agit du traitement de choix en cas de rétinoblastome étendu (groupes E, cT3), ce qui est le plus souvent le cas dans les formes unilatérales, qui représentent entre 50 et 81 % des formes décrites dans la littérature [93-94-95].
Il n'existe pas de recommandations ni de consensus international pour indiquer une énucléation et, malgré une augmentation des indications d'un traitement conservateur, la majorité des centres spécialisés s'accordent pour réaliser une énucléation d'emblée en cas d'atteinte intraoculaire très étendue, en particulier pour un enfant atteint de façon unilatérale. En pratique, il s'agit d'yeux présentant une buphtalmie, un glaucome néovasculaire, voire une phtyse du globe [ 96] (fig. 15-44
Fig. 15-44
Segment antérieur chez un enfant présentant un rétinoblastome unilatéral évolué avec néovascularisation de l'iris, hypertonie oculaire (groupe E, cT3). On devine dans l'aire pupillaire une masse calcifiée blanchâtre partiellement masquée par une hémorragie du vitré.
).
L'attitude thérapeutique diffère selon que l'enfant présente une atteinte uni- ou bilatérale. Dans ce dernier cas, il est très rare de procéder d'emblée à l'ablation de l'œil, même du plus atteint, et l'indication chirurgicale sera rediscutée après la prise en charge initiale et la chimiothérapie intraveineuse, la plupart du temps utilisée dans ce contexte.
En cas de rétinoblastome unilatéral, l'énucléation est nécessaire dans les formes intraoculaires très étendues en raison de la lourdeur des traitements qui seraient nécessaires pour un bénéfice visuel nul, et un risque important d'énucléation secondaire.
L'utilisation des classifications IIRC ( International Intraocular Retinoblastoma Classification ) et TNM est l'un des éléments nécessaires pour valider l'indication de la chirurgie. Mais d'autres éléments cliniques sont aussi à prendre en considération pour les discussions en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) qui, en domaine oncologique, valident les propositions thérapeutiques. En effet, bien que les groupes E et cT3 soient étiquetés comme « non accessibles » à un traitement conservateur, dans les deux classifications cliniques, il existe des cas de figure qui pourraient faire discuter d'un traitement conservateur.
Avant toute décision thérapeutique, la réalisation d'une IRM est indispensable pour vérifier l'absence d'une atteinte extraoculaire. En effet, en cas d'atteinte extraoculaire, un bilan général et une chimiothérapie par voie veineuse sont nécessaires, avant de discuter et de réaliser le geste chirurgical et de considérer ses modalités.
Indications d'une énucléation de première intention
Les indications retenues d'une énucléation d'emblée sont :
  • tumeur manifestement extraoculaire avec atteinte orbitaire et/ou du nerf optique extraoculaire ; dans ces deux cas, une chimiothérapie est nécessaire avant le geste chirurgical ;
  • formes intraoculaires étendues avec buphtalmie (groupes E/cT3c) ; pour ces patients, une chimiothérapie avant le geste chirurgical peut se discuter. Dans ce dernier cas, et bien que cela fasse encore l'objet de controverse, la chimiothérapie sera poursuivie en postopératoire. En effet, l'administration d'une chimiothérapie peut modifier la présence de facteurs de risque en histologie [ 97] ;
  • atteinte du nerf optique en imagerie (invasion rétrolaminaire) ; dans ce cas aussi, une chimiothérapie peut être discutée avant le geste chirurgical en fonction de l'étendue de l'invasion rétrolaminaire ;
  • glaucome néovasculaire : néovascularisation irienne avec hypertonie majeure (voir fig. 15-44
    Fig. 15-44
    Segment antérieur chez un enfant présentant un rétinoblastome unilatéral évolué avec néovascularisation de l'iris, hypertonie oculaire (groupe E, cT3). On devine dans l'aire pupillaire une masse calcifiée blanchâtre partiellement masquée par une hémorragie du vitré.
    ) ;
  • tumeurs intraoculaires très importantes : masses prenant plus des deux tiers de la cavité vitréenne et/ou associées à une atteinte intravitréenne ou sous-rétinienne massive (fig. 15-45
    Fig. 15-45
    Rétinoblastome très étendu avec masses prenant la totalité de la cavité vitréenne ; pas d'espace de rétine saine.
    ). Pour ces patients, l'énucléation est probablement la meilleure option en raison de la lourdeur des traitements nécessaires, du risque important d'échec et d'énucléation secondaire pour un bénéfice visuel très faible.
Technique
La chirurgie consiste dans la plupart des cas en un geste classique d'énucléation par voie antérieure avec pose d'implant orbitaire. Dans les très rares cas d'atteinte étendue du nerf optique, une approche à deux équipes est réalisée avec une section du nerf optique par voie neurochirurgicale et la réalisation de l'énucléation par voie antérieure.
Examen anatomopathologique
Après la chirurgie, l'examen anatomopathologique est une étape importante de la prise en charge pour préciser la nécessité d'un traitement complémentaire par chimiothérapie, voire exceptionnellement par une irradiation orbitaire, en fonction des critères histologiques de risque [98] (voir plus haut « VI. Anatomopathologie du rétinoblastome » ).
Traitements conservateurs de première ligne
L. Lumbroso-Le Rouic
Introduction
Les indications des traitements conservateurs dépendent de l'âge de l'enfant au diagnostic, du caractère uni- ou bilatéral du rétinoblastome, du volume tumoral, du nombre de tumeurs, de leur situation par rapport à la macula et la papille, de l'existence d'un décollement de rétine total ou partiel, ainsi que de l'existence d'un envahissement vitréen ou prérétinien. La stratégie thérapeutique conservatrice est complexe et, souvent, plusieurs traitements différents sont associés entre eux pour obtenir le contrôle tumoral et la conservation oculaire.
En fonction de la taille de la lésion et de sa localisation, différentes modalités peuvent être appliquées.
Cryoapplication
La cryoapplication est couramment utilisée depuis de nombreuses années. Il s'agit d'une triple cryoapplication de la tumeur, réalisée sous contrôle ophtalmoscopique indirect (fig. 15-46
Fig. 15-46
Cryoapplication sous contrôle ophtalmoscopique d'une tumeur périphérique.
). Cette technique est réalisable pour les plus petites tumeurs (inférieures à 3 mm de diamètre), antérieures à l'équateur (fig. 15-47
Fig. 15-47
Tumeur périphérique nasale inférieure, découverte à l'examen sous anesthésie générale d'une enfant porteuse de l'anomalie du gène RB1. Avant (a) et après (b) traitement par cryoapplication : obtention d'une cicatrice plane.
). Son efficacité est proche de 80 %. Cette technique n'a aucune efficacité sur un essaimage vitréen, même localisé [99].
La cryoapplication est aussi utilisée pour traiter les zones rétiniennes périphériques présentant un essaimage sous-rétinien. Parfois, même en l'absence de lésions cliniquement visibles, elle est réalisée en prévention des rechutes périphériques après résorption d'un décollement de rétine initial (fig. 15-48
Fig. 15-48
a, b. Rétinoblastome bilatéral étendu avec décollement de rétine total au diagnostic. Puis après chimiothérapie initiale de réduction et résorption du soulèvement rétinien (c). En fin de traitement cicatrice de cryoapplication préventive en périphérie supérieure (d).
).
Les cicatrices des lésions ainsi traitées sont planes, avec une réaction pigmentaire variable à leur pourtour. Il n'y a que peu d'effets secondaires de ce traitement, mais il faut éviter de cryoappliquer plus d'un quart de la périphérie afin d'éviter un soulèvement rétinien réactionnel. Par ailleurs, il est déconseillé de traiter une lésion postérieure à l'équateur car, dans ce cas, des complications de type cicatrice rétractile ont été décrites.
Thermothérapie transpupillaire (TTT)
La thermothérapie transpupillaire (TTT) consiste en une hyperthermie réalisée sur chaque site tumoral, grâce à un laser diode émettant dans les infrarouges. Le but est l'obtention d'une lente élévation de la température dans la tumeur et non une photocoagulation. L'appareil laser et les paramètres sont adaptés en conséquence. Les spots utilisés sont larges (0,8 à 1,2 mm) et les durées d'exposition très longues, pouvant aller jusqu'à plusieurs minutes sur chaque site tumoral. Il existe des adaptateurs laser pour microscope opératoire ou pour ophtalmoscope indirect (fig. 15-49
Fig. 15-49
a. Adaptateur laser pour ophtalmoscope indirect. b. Adaptateur pour microscope opératoire. c. source laser diode.
). Utilisée seule, la TTT est efficace pour les plus petites tumeurs de moins de 3 mm, équatoriales ou postérieures à l'équateur, comme celles qui peuvent être dépistées par des fonds d'œil systématiques chez un enfant porteur d'une anomalie génétique. Réalisée dans ces conditions, le contrôle tumoral est de 85 % [100] (fig. 15-50
Fig. 15-50
a. Petite tumeur détectée par dépistage systématique chez une enfant porteuse d'une anomalie du gène RB1. b. Aspect après traitement par TTT.
). Pour les lésions de plus de 3 mm, la TTT seule peut être insuffisante ; elle doit alors être associée à une chimiothérapie (intraveineuse ou intra-artérielle) pour en potentialiser les effets.
Les effets secondaires sont très rares. En cas de dilatation médiocre, des lésions iriennes avec atrophie voire synéchies peuvent apparaitre, parfois associées à des opacités du cristallin (fig. 15-51
Fig. 15-51
Aspect d'atrophie irienne et opacités cristalliniennes séquellaires après traitement par TTT.
). En cas de traitements multiples d'une lésion rétinienne, des syndromes tractionnels peuvent être observés (fig. 15-52
Fig. 15-52
Aspect de traction entre deux cicatrices traitées par thermochimiothérapie.
).
Curiethérapie (ou brachythérapie)
Cette irradiation localisée est proposée pour le traitement des tumeurs périphériques non accessibles aux autres traitements (> 3 mm) ou associées à un essaimage vitréen localisé. Dans le cadre de la prise en charge thérapeutique actuelle, la curiethérapie est considérée comme un traitement « local » et est le plus souvent associée à une chimiothérapie (intraveineuse ou intra-artérielle) (fig. 15-53
Fig. 15-53
Aspect initial de rétinoblastome bilatéral multifocal (a). Une des lésions en périphérie nasale supérieure a un fin essaimage au sommet (flèche). b. Après chimioréduction, régression de la tumeur rétinienne, mais persistance d'un essaimage vitréen en regard (flèche). c. Après traitement par disque de la lésion avec essaimage et chimiothérapie associée à la TTT sur les autres lésions, cicatrice nasale plane, vitré clair, début d'atrophie pavimenteuse.
). Cette technique peut aussi être proposée en cas d'évolutivité en rapport avec des fragments sous-rétiniens massifs ou étendus, toujours en périphérie rétinienne. Le disque radioactif est posé chirurgicalement sur la sclère, en regard de la zone à traiter. Les radio-isotopes les plus fréquemment utilisés sont l'iode 125 ou le ruthénium 106. Les modalités opératoires sont comparables à celles d'un traitement réalisé dans le cadre d'un mélanome de l'uvée, mais les doses délivrées sont inférieures (45 Gy au sommet de la tumeur).
L'efficacité de la curiethérapie est excellente, seule ou associée au traitement par chimiothérapie, avec un contrôle des lésions traitées de près de 80 à 90 % en fonction de la situation clinique. La toxicité est essentiellement oculaire, avec apparition d'une cataracte (30 % des cas) ou d'une rétinopathie radique localisée au niveau de la zone irradiée [ 101 , 102].
Chimiothérapie de réduction
La majorité des enfants pris en charge pour rétinoblastome ont des tumeurs dont la taille au moment du diagnostic ne permet pas la réalisation de l'un de ces traitements d'emblée. Une chimiothérapie est alors nécessaire afin de réduire leur taille et de les rendre accessibles aux traitements locaux. Une fois cette première phase de réduction réalisée, la chimiothérapie est poursuivie et associée aux traitements locaux.
La chimiothérapie peut être réalisée par voie intraveineuse, ou désormais aussi par voie intra-artérielle, directement dans l'artère ophtalmique.
Les protocoles de traitements par chimiothérapie intraveineuse sont nombreux en termes de médicaments utilisés et de nombre de cures, et peuvent différer en fonction des centres. Le plus souvent sont administrés l'étoposide, le carboplatine et la vincristine, et le nombre de cures peut aller jusqu'à 6. Les traitements locaux par thermothérapie, cryoapplication (ou ponctuellement une curiethérapie ou des injections intravitréennes) sont associés dès que la réduction du volume tumoral le permet, souvent à partir de la deuxième ou troisième cure [103] (fig. 15-54
Fig. 15-54
Rétinoblastome bilatéral au diagnostic (a, b). Les tumeurs ne sont pas accessibles à un traitement local d'emblée. c, d. Après deux cures de chimiothérapie intraveineuse (trois médicaments). e, f. Aspect à la fin du traitement ayant ensuite associé des traitements pas laser et cryoapplication à la chimiothérapie IV.
et 15-55
Fig. 15-55
Rétinoblastome bilatéral au diagnostic (a, b). Les tumeurs ne sont pas accessibles à un traitement local d'emblée. c, d. Après deux cures de chimiothérapie intraveineuse (trois médicaments). e, f. Aspect à la fin du traitement ayant ensuite associé des traitements pas laser et cryoapplication à la chimiothérapie IV.
). Lorsque la taille tumorale est modérée, après la première phase de réduction, la chimiothérapie peut ne comporter qu'un médicament, le carboplatine, associé à la TTT ; c'est la thermochimiothérapie [ 104].
Thermochimiothérapie
La thermochimiothérapie est l'association synergique d'une TTT qui doit être administrée sur chaque site tumoral très rapidement après l'administration IV du carboplatine. Cette association est efficace pour des tumeurs moyennes (jusqu'à 12-15 mm de diamètre). Le contrôle tumoral, dans ces cas, est obtenu dans 92 % des cas (fig. 15-56
Fig. 15-56
a. Tumeur au diagnostic, dont le volume nécessite une chimiothérapie de réduction. b. Après deux cures de chimiothérapie IV, nette régression de la lésion qui dégage partiellement la macula. c. Après thermochimiothérapie (carboplatine seul associé à la TTT) de la tumeur principale et des fragments rétiniens.
).
Les résultats des traitements associant une chimiothérapie intraveineuse et des traitements locaux sont satisfaisants, avec un contrôle tumoral excellent pour les yeux les moins atteints (groupes A à C). Les yeux ayant une atteinte plus évoluée (groupe D) ont un risque plus important de rechute tumorale et d'énucléation secondaire.
La toxicité immédiate consiste en la toxicité hématologique attendue des médicaments de chimiothérapie utilisés (neutropénies, anémies, thrombopénie, aplasie, etc.). Il n'y a que très peu d'événements graves après chimiothérapie dans ce contexte. Le carboplatine a par ailleurs une toxicité auditive bien connue, et un retentissement sur l'audition peut être observé à moyen/long terme [ 105].
Les effets secondaires oculaires sont rares et comparables à ceux décrits après TTT seule, comme une cataracte localisée, des atrophies iriennes ou des réactions fibrogliales et des syndromes tractionnels.
Depuis une dizaine d'années, l'administration de la chimiothérapie peut aussi se faire par injection intra-artérielle sélective directement dans l'artère ophtalmique après cathétérisme fémoral. Le médicament le plus couramment utilisé est le melphalan, et d'autres molécules telles que le carboplatine ou le topotécan peuvent y être associées. De façon comparable aux approches thérapeutiques par chimiothérapie intraveineuse, un traitement local par cryoapplication et TTT sur les tumeurs y est associé. Les résultats sont intéressants en termes de contrôle tumoral et de conservation oculaire. La tolérance générale est bonne ; cependant, des effets secondaires oculaires avec risque d'occlusions vasculaires ont été décrits et le pronostic fonctionnel des yeux traités par cette technique reste à évaluer à moyen et long terme.
Chimiothérapie intra-artérielle
R. Blanc, B. Maier, F. Delvoye
Techniques
L'administration intra-artérielle peut être accomplie par deux techniques principales. La première, aussi appelée technique japonaise, consiste dans le placement d'un ballon occluant l'artère carotide interne (ACI) distalement par rapport à la naissance de l'artère ophtalmique (AO). La chimiothérapie est ensuite directement administrée dans l'ACI lorsque le ballon est gonflé, occluant de fait la circulation antérieure intracrânienne [106]. Cette méthode a démontré un haut taux de préservation oculaire sans événement indésirable systémique sévère, dans une série de cas publiée en 2011 [107].
La technique utilisée dans notre institution, appelée chimiothérapie sélective de l'artère ophtalmique ( selective ophthalmic artery chemotherapy [SOAC]) et rapportée pour la première fois par Abramson, consiste en un cathétérisme sélectif de l'AO pour délivrer directement la quantité totale de la chimiothérapie dans l'AO.
D'un point de vue technique, le cathétérisme sélectif de l'AO est réalisé sous anesthésie générale, monitorage continu et supervision permanente d'un anesthésiste pédiatrique expérimenté.
Après la ponction fémorale échoguidée, réalisée selon la technique de Seldinger, un introducteur 4 French (Fr) est inséré dans l'artère fémorale et un bolus IV d'héparine non fractionnée (50 UI/kg) est administré.
Le cathétérisme sélectif de l'ACI est réalisé avec un cathéter diagnostique 4 Fr positionné dans le segment distal de l'ACI. Une première série angiographique est réalisée pour montrer l'anatomie de l'ACI et de l'AO (fig. 15-57
Fig. 15-57
Image angiographique après cathétérisme de l'artère carotide interne (ACI).
), et plus spécifiquement pour visualiser le blush choroïdien causé par l'injection des artères ciliaires postérieures, utilisées comme marqueur de l'artère centrale de la rétine (ACR), souvent elle-même non visualisée (fig. 15-58
Fig. 15-58
Visualisation du blush choroïdien.
). En l'absence de blush choroïdien, l'explication la plus fréquente est l'occlusion de la partie proximale de l'AO avec reprise en charge des branches distale de l'AO par des anastomoses préexistantes entre les branches de l'artère maxillaire interne (AMI) (habituellement de l'artère méningée moyenne) et de l'AO (fig. 15-59
Fig. 15-59
Anastomose entre les branches de l'artère maxillaire interne (habituellement de l'artère méningée moyenne) et de l'artère ophtalmique.
). Dans cette situation, le cathétérisme sélectif de l'AMI est réalisé et l'injection de l'agent de chimiothérapie est ensuite réalisé, celle-ci permettant de visualiser le blush choroïdien.
Le cathétérisme sélectif de l'AO est ensuite réalisé avec un microcathéter 0,013″ et un microguide 0,012″ (fig. 15-60
Fig. 15-60
Cathétérisme sélectif de l'artère ophtalmique.
). Si le cathétérisme de l'AO ne peut pas être réalisé parce que l'ACI est tortueuse ou parce que le premier segment de l'AO est récurrent, une autre stratégie est de cathétériser sélectivement l'artère vertébrale ipsilatérale avec le cathéter diagnostique 4 Fr et de rejoindre ensuite sélectivement l'ACI par le microcathéter au travers de l'artère communicante postérieure (fig. 15-61
Fig. 15-61
a-c. Cathétérisme par l'artère vertébrale ipsilatérale puis l'ACI au travers de l'artère communicante postérieure.
). Cette technique peut rendre l'angle de cathétérisme de l'AO plus favorable.
Une seconde série angiographique est ensuite réalisée sélectivement à l'intérieur de l'AO avec trois objectifs distincts : démontrer l'absence de reflux dans l'ACI, confirmer la stabilité du microcathéter dans l'AO et confirmer la présence du blush choroïdien.
L'incidence de l'occlusion proximale de l'OA atteignait 11,1 % dans une série dédiée publiée par Sweid [ 108]. L'un des facteurs de risque identifiés était le nombre total d'injections intra-artérielles consécutives [ 109]. Alors que le cathétérisme est probablement traumatique pour l'endothélium et peut donc augmenter le risque d'occlusion à partir d'un certain niveau de répétition, une solution pourrait être de tolérer un reflux dans l'ACI, qui semble ne pas changer l'efficacité du traitement [ 110] et amener à moins de tentatives de cathétérisme sélectif de l'OA.
Une fois le cathéter placé avec succès dans l'AO, une perfusion continue de chimiothérapie est réalisée pendant environ 30 minutes (melphalan, 0,4 mg/kg avec une dose maximale de 5 mg par injection).
La fermeture du point de ponction fémoral est ensuite réalisée par une compression manuelle douce de 10 à 15 minutes.
Résultats
Le taux de sauvetage de l'œil, dans les séries historiques, était très intéressant avec 7 des 9 yeux initialement destinés à l'énucléation finalement épargnés [111].
Dans la série prospective française récente, le taux de préservation oculaire à moyen et long terme était de 69 % (suivi de 30 mois au minimum) (fig. 15-62
Fig. 15-62
Enfant ayant un rétinoblastome unilatéral avec décollement de rétine et essaimage sous-rétinien au diagnostic. a, b. Aspect préthérapeutique. c. Aspect après deux cycles de chimiothérapie intra-artérielle (IA) par melphalan avec régression de la masse principale, réapplication rétinienne et phénomènes exsudatifs. d. En fin de traitement après IA et traitements par TTT, la cicatrice est fragmentée ; altérations de l'épithélium pigmentaire.
et 15-63
Fig. 15-63
Rétinoblastome unilatéral en nasal avec essaimage de vitré localisé (a, b). c. Aspect après deux cycles de chimiothérapie IA par melphalan. d. Aspect en fin de traitement avec, en association aux IA, une TTT. Reliquat tumoral en partie fragmenté et essaimage vitréen calcifié au-dessus de l'arcade temporale supérieure.
) [ 112].
Effets secondaires et complications
Un certain nombre d'effets secondaires et de complications de l'injection intra-artérielle de chimiothérapie sont décrits.
Au niveau systémique, une attention particulière doit être portée à la survenue d'une décroissance brutale de la compliance pulmonaire (par exemple la survenue de bronchospasmes) qui peut survenir chez environ 20 % des patients traités par SOAC et qui se produit presque exclusivement durant le cathétérisme de l'AO lui-même [113]. On notera également que des hématomes au point de ponction fémoral peuvent survenir et que certaines notes techniques proposent de réaliser une ponction radiale chez les enfants plus âgés [114].
Les effets secondaires de la chimiothérapie elle-même sont minimes, avec des neutropénies sans retentissement la plupart du temps.
Les complications oculaires survenant durant le traitement peuvent être mineures (œdème transitoire de la paupière, rougeur frontale) (fig. 15-64
Fig. 15-64
a. Œdème palpébral post-IA, rapidement résolutif. b. Rash cutané frontal.
), ou plus sévères, comme la survenue d'un ptosis (chez 2 des 39 patients dans notre étude), ou la survenue d'une vasculopathie qui peut amener à l'ischémie rétinienne chez 5 % des patients traités par injection intra-artérielle (fig. 15-65
Fig. 15-65
Tableau d'ischémie rétinienne après injection intra-artérielle de melphalan.
) [ 112]. Dans la série collectée par Bianciotto et al., environ 46 % des yeux traités par chimiothérapie intra-artérielle montraient un certain degré d'altération vasculaire intra-oculaire, infraclinique dans la plupart des cas [115]. Des lésions endothéliales causées par le micro-guide ou le micro-cathéter, des effets toxiques locaux de la chimiothérapie sur l'endothélium, une précipitation de l'agent de chimiothérapie ou l'embolisation de corps étrangers ont été évoqués comme explications potentielles.
Certaines inconnues au sujet des effets secondaires systémiques liés à la dose de rayons X reçue pendant la procédure demeurent. Cette dernière, cependant, est inférieure au niveau toxique pour les gonades, la thyroïde, la moelle. Mais on ne peut pas totalement exclure un retentissement tardif chez des patients qui ont la mutation du gène RB1 et qui sont prédisposés à faire des sarcomes en territoire irradié, même à faible dose.
Évolution
La survenue d'une maladie métastatique et le taux de néoplasies secondaires chez les patients traités par cette technique sont deux autres points d'interrogation. Concernant ce dernier point, une série publiée par Suzuki et al. rapportait une incidence cumulative de 5,8 % de cancers secondaires à 15 ans, mais chez des patients traités par la technique japonaise et souvent en combinaison avec une chimiothérapie IV et/ou une radiothérapie externe [107].
Quelle que soit la stratégie thérapeutique utilisée, une grande partie des échecs tumoraux est liée à la présence d'un essaimage de cellules tumorales dans le vitré. Cet essaimage, parfois présent au moment du diagnostic, peut aussi apparaître en cours de traitement ou lors de rechutes rétiniennes. Sa prise en charge est plus difficile car les traitements focaux sont dans ce cas sans efficacité. La chimiothérapie, utilisée par voie veineuse ou même intra-artérielle, a peu d'effet sur ce type d'atteinte en raison de la faible pénétration des médicaments dans le vitré. Lorsque l'essaimage vitréen est très localisé et périphérique, il peut être traité par une irradiation par disque radioactif qui traitera la rechute rétinienne et le vitré en regard. Mais en cas d'essaimage étendu, ou dans le vitré central, l'irradiation externe, longtemps la seule possibilité thérapeutique conservatrice, a été supplantée par l'utilisation d'une chimiothérapie par voie intravitréenne.
Injections intravitréennes de chimiothérapie
N. Cassoux
Introduction
L'atteinte du vitré dans un rétinoblastome lors du diagnostic ou lors d'une rechute a été dans le passé une indication d'irradiation externe et d'énucléation secondaire. Le tabou de tout geste pénétrant dans un œil présentant un rétinoblastome était lié à de nombreux cas décrits de rechute orbitaire et de métastases lors d'éviscération par erreur, de chirurgie de décollement de rétine, de perforation du globe pendant une énucléation, etc. La radiothérapie n'était pas toujours efficace sur les rechutes vitréennes et était source de très nombreux effets secondaires : syndrome sec, cataracte, rétinopathie radique, défaut de croissance du massif facial, mais surtout un risque élevé de sarcome en territoire irradié pouvant être fatal [116]. Le risque d'échec de la radiothérapie conduisant à une énucléation secondaire était également non négligeable [117]. Par ailleurs, la chimiothérapie intraoculaire a été utilisée depuis les années 2000, en particulier dans le lymphome vitréorétinien, avec succès et sans complications majeures avec du méthotrexate [20].
Ces dernières années, les injections intravitréennes (IVT) de chimiothérapie se sont imposées comme le traitement au départ des rechutes vitréennes, puis rapidement aussi pour les atteintes vitréennes constatées au diagnostic. Deux médicaments se sont imposés, le melphalan et le topotécan. Le carboplatine est proposé en injection sous-ténonienne [119].
Indications des injections intravitréennes de chimiothérapie
Actuellement, ces injections sont utilisées en première ligne dans les rétinoblastomes unilatéraux avec atteinte du vitré associées à un traitement par des injections intra-artérielles de melphalan. Les rétinoblastomes bilatéraux sont traités par chimiothérapie intraveineuse d'emblée, et des IVT sont réalisées en cas de mauvaise réponse du vitré ou en cas de rechute vitréenne lors du suivi [ 120].
Les médicaments utilisés sont soit le melphalan à la dose de 20 à 30 μg en fonction du volume du globe, soit le topotécan à la dose de 20 à 30 μg dans 0,1 ml.
Technique
Même si, dans la littérature, seul un cas d'extériorisation post-IVT a été décrit, il convient de rester prudent. En effet, on peut facilement imaginer que les cas d'extériorisation aient été sous-publiés et que, dans l'étude de Francis et al. qui est rétrospective et sur la base de déclarations volontaires, les participants n'aient pas déclaré tous les incidents [ 121 , 122]. Néanmoins, en respectant quelques règles élémentaires de prudence, cette voie thérapeutique est efficace, avec un risque d'extériorisation très bas [120].
Il faut donc évaluer les risques et les minimiser. L'examen ophtalmologique va permettre d'objectiver une zone où le vitré n'est pas atteint. Avant l'IVT, une ponction de la chambre antérieure va hypotoniser le globe et diminuer le risque de reflux au moment de l'injection dans le vitré. Une aiguille 32 G est utilisée pour l'IVT réalisée dans une zone de vitré clair. À la fin de l'injection, une triple cryoapplication du point de ponction permet de stériliser le trajet de l'aiguille [ 120] (fig. 15-66
Fig. 15-66
Technique de l'injection intravitréenne pour rétinoblastome. a. Ponction de chambre antérieure pour hypotoniser le globe. b. Injection dans une zone non tumorale après vérification au fond d'œil. c. Cryoapplication.
).
Le nombre d'injections à réaliser pour stériliser un vitré dépend de l'importance de l'atteinte du vitré, d'une simple sphère où 3 IVT suffisent, à un vitré très chargé où plusieurs IVT sont nécessaires [123] (fig. 15-67
Fig. 15-67
Atteinte vitréenne. a. « Poussière » : discret essaimage présent dès le diagnostic en regard d'une masse temporale (dust). b. « Sphères » (spheres), aspect de rechute rétinienne associée à une rechute vitréenne en « sphère ». c. Massif en « nuage », essaimage massif à distance de la lésion principale (cloud). Selon la classification de Francis J et al. [123]. d. Aspect après traitement par injections intravitréennes de melphalan et laser TTT de la rechute rétinienne, avec disparition de la « sphère » précédemment visualisée (b) et disparition du nodule actif rétinien.
et 15-68
Fig. 15-68
Volumineux rétinoblastome unilatéral associé à un essaimage massif (a). Proposition d'un traitement par chimiothérapie IA et IV. b. Aspect après deux cures de chimiothérapie IA et IVT avec régression de la masse rétinienne et de l'essaimage. c, d. Diminution puis disparition de l'essaimage vitréen et aspect cicatriciel de la tumeur rétinienne. Présence d'altérations de l'épithélium pigmentaire séquellaires.
).
Efficacité et toxicité
Les IVT de melphalan et peut-être, dans une moindre mesure, de topotécan sont très efficaces et ont permis l'arrêt quasi complet des irradiations externes dans les pays utilisant ce traitement, ainsi que de réduire significativement les énucléations secondaires liées à une rechute vitréenne [ 124]. Cependant, la toxicité vasculaire du melphalan est avérée non seulement par voie intra-artérielle, mais aussi par voie intravitréenne. Chaque IVT de melphalan est associée à une diminution de l'activité électrique de la rétine à l'électrorétinogramme avec des signes d'atrophie rétinienne (aspect poivre et sel) et des occlusions vasculaires capillaires [ 124 , 125]. Ce risque de complications vasculaires est aussi clairement cumulé avec l'association des injections intra-artérielles qui induisent également des occlusions des vaisseaux choroïdiens, rétiniens et des atrophies rétiniennes parfois majeures [126]. Il semble que les IVT de topotécan soient moins toxiques.
Les protocoles thérapeutiques évoluent, et il est actuellement proposé de commencer par les injections intra-artérielles pour contrôler la tumeur rétinienne, puis de poursuivre par des IVT si le vitré n'est pas contrôlé. Les différentes combinaisons des chimiothérapies IVT et leur administration en combinaison avec les injections intra-artérielles sont mal codifiées et une réflexion internationale sur les modalités d'administration est souhaitable.
Suivi
En cours de traitement, l'enfant bénéficie d'un suivi conjoint ophtalmologique et pédiatrique pour évaluer la réponse aux traitements ainsi que leur tolérance (tableau 15-4
Tableau 15-4
Surveillance des patients atteints de rétinoblastome en cours de traitement .
SuiviModalités
OphtalmologiqueFond d'œil mensuel sous anesthésie générale pour évaluation et traitements
PédiatriqueAvant chaque cure de chimiothérapie ou avant énucléation
BiologiqueNFS deux fois par semaine en cours de chimiothérapieIonogramme sanguin, bilan hépatique avant chaque cure
ORLAudiogramme toutes les deux à trois cures en cas de chimiothérapie IV
GénétiqueConsultation d'information des parents et étude génétique
).
La majorité des enfants traités de façon conservatrice nécessitent de 3 à 5 cures de chimiothérapie (intraveineuse ou intra-artérielle) associées aux traitements locaux précédemment décrits et dont la périodicité est mensuelle.
Une fois les traitements initiaux terminés et si la réponse locale est favorable un suivi oculaire régulier par un fond d'œil sous anesthésie générale est réalisé pour dépister une éventuelle rechute oculaire qui nécessiterait un traitement approprié (voir ci-après « VIII. Suivi post-thérapeutique et traitement des rechutes » ).
Suivi post-thérapeutique et traitement des rechutes
L. Lumbroso-Le Rouic, I. Aerts-Gajdos
Introduction
Une fois les traitements initiaux terminés, l'enfant bénéficie régulièrement et conjointement d'un suivi régulier par l'ophtalmologiste et l'oncopédiatre, afin de dépister les éventuelles rechutes oculaires ou générales (métastases) ainsi que d'autres tumeurs (tableau 15-5
Tableau 15-5
Modalités de suivi des patients atteints de rétinoblastome .
SuiviEn fin de traitement puis à distance des traitements
OphtalmologiqueTraitement conservateur : FO mensuel avec réalisation de photographies/OCTPuis espacement progressif jusqu'à un rythme trimestriel Traitement non conservateur : FO controlatéral de dépistage tous les 3 mois pour les enfants de plus de 2 ansSous AG puis, lorsque le recul et la coopération le permettent, sans AG
PédiatriqueTous les 3 mois la première année, puis tous les 6 mois pendant 2 ans, puis annuel à partir de la 4 e année
BiologiquePas systématique
ORLAudiogramme en fin de traitement, puis suivi annuel pendant 5 ans, puis contrôle à 10 ans
Dépistage des tumeurs secondairesSurveillance clinique annuelleIRM du massif facial annuelle pour les patients irradiés à plus de 5 ans de la radiothérapie
GénétiqueConsultation d'information génétique du patient à l'adolescence
).
En France et dans les pays à fort pouvoir économique, les rechutes locorégionales ou métastatiques après énucléation sont exceptionnelles grâce à la chimiothérapie adjuvante proposée en cas de présence de facteurs de risques histologiques (voir plus haut « Traitement non conservateur » ). Une rechute orbitaire se manifesterait par l'apparition d'une masse orbitaire rapidement évolutive. Ce cas de figure est fort heureusement très rare. Les rechutes oculaires après traitement conservateur sont, quant à elles, assez fréquentes, et le plus souvent accessibles à un nouveau traitement conservateur.
Suivi ophtalmologique
Dépister une rechute oculaire
À l'issue du traitement initial, qu'il soit conservateur ou pas, une surveillance ophtalmologique très rapprochée du fond d'œil (FO, sous anesthésie générale tant que la coopération de l'enfant est insuffisante) pour bien explorer la rétine périphérique est nécessaire. Après un traitement conservateur, le rythme est d'abord mensuel puis, en l'absence d'évolutivité, il est espacé de façon progressive jusqu'à la réalisation d'un FO tous les 3 mois. Cet examen permet de constater rapidement une rechute d'une lésion précédemment traitée, mais aussi de dépister une nouvelle tumeur dont la localisation est le plus souvent périphérique, voire une bilatéralisation chez un enfant initialement traité pour une forme unilatérale [ 127 , 128]. Le but de ce suivi astreignant est de détecter précocement une évolutivité, dont la fréquence est importante (près de 47 % des enfants et pour la grande majorité dans les six premiers mois après la fin des traitements) afin d'augmenter les chances de préservation oculaire et visuelle [129].
En cas de difficulté d'accessibilité du FO (hémorragie du vitré, cataracte, etc.), une échographie et une IRM oculaires complètent l'examen clinique.
En cas de récidive ou d'apparition d'une nouvelle tumeur voire d'une évolutivité vitréenne ou sous-rétinienne, tous les traitements conservateurs décrits plus haut dans le sous-chapitre « Traitements conservateurs de première ligne » peuvent être proposés et réalisés.
Il n'existe pas de traitement « standard » d'une rechute et l'attitude thérapeutique est adaptée à la taille, à la localisation de la lésion active ainsi qu'aux traitements précédemment réalisés et à l'éventuelle toxicité constatée. Dans la grande majorité des cas, il s'agit de localisations de petite taille et une TTT ou une cryoapplication suffisent (fig. 15-69a-e
Fig. 15-69
Rechutes oculaires de rétinoblastome. a. Rechute millimétrique (flèche) au bord d'une lésion précédemment traitée par association chimiothérapie IV et thermothérapie transpupillaire (TTT). b. Aspect après traitement par TTT seule ; apparition d'une cicatrice pigmentée. c. Apparition d'une nouvelle petite tumeur (flèche). d. Aspect après traitement par TTT, lésion pigmentée. e. Rechute sur une cicatrice de cryoapplication périphérique (flèche). f. Rechute périphérique étendue nécessitant un traitement par irradiation par disque.
). Celles-ci sont réalisées selon les mêmes modalités (de critères de taille et de localisation) que pour la prise en charge d'une tumeur initiale. Le geste est réalisé au moment du FO de surveillance qui a permis de la dépister. Plus rarement, la reprise d'un traitement plus lourd, qui nécessiterait la reprise d'une chimiothérapie (intra-artérielle, intraveineuse ou intravitréenne) voire une irradiation par disque (fig. 15-69f
Fig. 15-69
Rechutes oculaires de rétinoblastome. a. Rechute millimétrique (flèche) au bord d'une lésion précédemment traitée par association chimiothérapie IV et thermothérapie transpupillaire (TTT). b. Aspect après traitement par TTT seule ; apparition d'une cicatrice pigmentée. c. Apparition d'une nouvelle petite tumeur (flèche). d. Aspect après traitement par TTT, lésion pigmentée. e. Rechute sur une cicatrice de cryoapplication périphérique (flèche). f. Rechute périphérique étendue nécessitant un traitement par irradiation par disque.
) est nécessaire.
Dans ces cas, le traitement est discuté au cas par cas, en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP), en fonction du type de rechute, des traitements déjà réalisés et de leurs éventuelles tolérance et toxicité. Le potentiel visuel de l'œil atteint et l'état de l'œil controlatéral entrent aussi dans la discussion des choix thérapeutiques. La toxicité de la chimiothérapie, même administrée par voie locorégionale, est additionnelle et les risques de complications générales (en particulier l'ototoxicité en cas de chimiothérapie IV) [ 130], mais aussi oculaires (complications ischémiques) sont plus importants en cas de retraitement (fig. 15-70,
Fig. 15-70
a. Rechute rétinienne sur une cicatrice chez un enfant précédemment traité et monophtalme. b. Aspect après deux cures de thermochimiothérapie : régression du nodule tumoral.
fig. 15-71,
Fig. 15-71
a. Rechute sur une cicatrice précédemment traitée par TTT ; proposition d'un traitement par injections intra-artérielles (IA) associées à de nouvelles TTT. b. Régression du nodule tumoral.
fig. 15-72,
Fig. 15-72
a. Aspect cicatriciel en fin de traitement d'un enfant traité par une association d'injections intra-artérielles de melphalan. Disque radioactif sur la tumeur temporale inférieure et injections intravitréennes de chimiothérapie. b. Petite récidive équatoriale (flèche) traitée par TTT. c. Aspect après traitement par TTT. d. Rechute sur la cicatrice principale ayant nécessité la reprise d'un traitement local par TTT.
fig. 15-73,
Fig. 15-73
Rechute vitréenne et rétinienne. a. Rechute après traitement initial d'un rétinoblastome par chimiothérapie intra-artérielle et TTT nécessitant la reprise d'un traitement par chimiothérapie IA et IVT. b. Aspect cicatriciel après reprise du traitement.
fig. 15-74
Fig. 15-74
Rechute rétinienne gauche. a. Rechute après traitement initial par chimiothérapie IV d'un rétinoblastome bilatéral. b. Régression partielle après une cure de chimiothérapie IA, mais apparition d'une ischémie rétinienne. c. Aspect à distance avec atrophie choriorétininenne profonde.
).
Si l'évolution tumorale persiste malgré la reprise des traitements, une énucléation secondaire peut s'avérer nécessaire [ 131] (fig. 15-75
Fig. 15-75
Rechutes rétiniennes multiples. a. Rechutes après multiples traitements par chimiothérapie IV, IA et traitements locaux. b. Hypertonie et rubéose irienne.
).
Pronostic visuel et recherche des effets secondaires à distance
Le suivi permet par la suite d'évaluer aussi la fonction visuelle et de noter les possibles effets secondaires tardifs des traitements réalisés.
Le pronostic visuel dépend de la conservation oculaire bien entendu, et en cas de préservation oculaire, la vision à long terme dépend de la localisation initiale de la tumeur par rapport à la macula et au nerf optique, ainsi que des possibles effets secondaires des traitements réalisés [ 132].
Le taux de conservation oculaire des traitements oculaires seuls ou associés à la chimiothérapie par voie veineuse est bon, surtout pour les atteintes les moins évoluées avec une moins bonne vision pour les groupes les plus avancés [ 133]. La tolérance oculaire est excellente ; 80 % des yeux traités selon cette approche ont pu être conservés [ 134], et dans le cas d'un rétinoblastome bilatéral, la conservation d'au moins un œil a été possible pour 92 % des enfants traités [135]. Rarement, on peut voir des effets secondaires oculaires tels qu'une cataracte (désormais essentiellement après réalisation d'une curiethérapie). Chez les enfants qui présentent des lésions importantes et multitraitées, les cicatrices peuvent se compliquer de tractions vitréorétiniennes, voire de décollement de rétine tractionnel. La rétinopathie radique est désormais exceptionnelle en raison de l'abandon de la radiothérapie externe comme traitement conservateur. On peut néanmoins en observer après traitement par disque radioactif. Dans ce cas, elle est le plus souvent localisée.
La vision binoculaire à long terme est supérieure à 5/10 e pour près de 53 % des enfants traités, y compris pour ceux qui avaient une lésion paramaculaire et qui ont bénéficié d'une chimiothérapie en limitant la TTT sur les lésions proches de la macula [136]. Malheureusement, entre 20 et 25 % environ des enfants auront une cécité légale [133 , 135]. Une prise en charge spécialisée en cas de handicap visuel est proposée chez les enfants qui le nécessitent.
L'apparition des traitements par injections intra-artérielles et intravitréennes de chimiothérapie a permis de proposer un traitement conservateur à plus de patients, notamment en cas d'atteinte unilatérale. Cette approche thérapeutique améliore le taux de conservation oculaire dans les formes les plus avancées, qui étaient auparavant énucléées, mais les effets secondaires oculaires semblent plus importants et le pronostic fonctionnel de ces yeux ne semble pas en être amélioré. En effet, des complications ischémiques rétiniennes voire choroïdiennes, parfois sévères, peuvent avoir un retentissement important sur la vision [ 137 , 138].
Dans une série d'enfants traités pour un rétinoblastome unilatéral par injections intra-artérielles, la conservation oculaire a été possible à moyen terme pour près de 70 % des yeux traités [ 139]. Les résultats fonctionnels montrent une vision utile pour moins de la moitié d'entre eux, mais tous ces enfants avaient un œil controlatéral normal et une vision binoculaire normale [139].
Suivi oncologique pédiatrique
Une surveillance pédiatrique est également préconisée afin d'évaluer les potentiels effets secondaires à moyen et long terme des chimiothérapies, d'informer et de dépister des cancers secondaires (notamment sarcomes et tumeurs osseuses en territoire irradié) chez les patients porteurs d'une mutation constitutionnelle du gène RB1 , et d'informer les patients sur les risques de transmission à la descendance.
Dépister les séquelles liées aux traitements
Le suivi pédiatrique est également nécessaire afin de dépister les séquelles liées au traitement (ototoxicité du carboplatine par exemple) [ 130].
Dépister les tumeurs secondaires
Actuellement, chez les patients atteints de forme héréditaire de rétinoblastome, la survenue de cancers secondaires représente la première cause de décès [140 , 141]. Ces tumeurs surviennent de façon retardée après le traitement initial du rétinoblastome, d'où l'importance d'un suivi prolongé. Leur pronostic est relativement sombre. Moll et al. ont estimé la survie après second cancer à 22 % à 15 ans [ 142]. Dans l'étude d'Aerts et al., la survie médiane après le diagnostic de second cancer était de 2 ans [ 143].
L'incidence cumulée des cancers secondaires a été estimée à environ 8 % à 18 ans du diagnostic, 16 % à l'âge de 20 ans, 19 % à l'âge de 35 ans [144] et 36 % à 50 ans [141]. Néanmoins, ces chiffres restent assortis d'une grande incertitude liée à la taille des cohortes examinées et à l'évolution dans le temps des modalités d'irradiation.
Le risque de cancers secondaires est considéré comme supérieur dans les formes familiales (mutation héritée du gène RB1 ) comparativement aux porteurs d'une mutation de novo [ 145].
Il a été démontré que le fait d'avoir été traité par radiothérapie externe (RTE) augmentait significativement le risque de second cancer du massif facial [141 , 146-147-148-149-150-151].
L'âge auquel est réalisée la RTE constitue possiblement un facteur de risque additionnel. Il a été rapporté que les patients irradiés au cours de leur première année de vie auraient un risque 2 à 8 fois supérieur à ceux irradiés après l'âge d'un an [152], mais ce facteur n'a pas été retrouvé dans toutes les études [ 143 , 146]. Ce risque pourrait être moindre en utilisant la protonthérapie [ 153].
L'association RTE et chimiothérapie systémique chez les patients atteints de rétinoblastome héréditaire augmente aussi significativement le risque de second cancer [154], notamment l'emploi d'agents alkylants [150 , 155], d'anthracyclines et d'épipodophylotoxines.
Les cancers secondaires les plus fréquemment observés sont des sarcomes osseux ou des tissus mous et plus rarement des mélanomes [ 156]. Les formes histologiques des seconds cancers en territoire irradié sont principalement des ostéosarcomes, rhabdomyosarcomes, léiomyosarcomes, sarcomes indifférenciés, des méningiomes [146 , 157] et, plus rarement, des carcinomes (fig. 15-76,
Fig. 15-76
Sarcome indifférencié après radiothérapie externe pour rétinoblastome Sarcome indifférencié, radiothérapie externe pour rétinoblastome et dans l'enfance.
fig. 15-77,
Fig. 15-77
Ostéosarcome en territoire irradié Ostéosarcome, radiothérapie pour rétinoblastome et .
fig. 15-78
Fig. 15-78
Méningiome Méningiome rétinoblastome et chez un patient traité pour rétinoblastome dans l'enfance.
). Des gliomes du système nerveux central ont également été décrits (notamment chez les patients ayant été traités par photons, et non par électrons) [157].
Dans l'étude rétrospective réalisée à l'Institut Curie, sur une cohorte de 427 patients traités pour rétinoblastome entre 1971 et 1988, avec un recul moyen de 11 ans par rapport au diagnostic du rétinoblastome, 25 patients avaient présenté un cancer secondaire, dont 84 % (21/25) en territoire irradié [ 143]. Néanmoins, en raison d'un grand nombre de perdus de vue (patients étrangers), la prévalence de ces cancers secondaires était probablement sous-estimée.
Une étude publiée en 2020 par la même équipe a étudié l'incidence, les facteurs de risque et le pronostic des patients ayant présenté une tumeur secondaire en champ irradié au sein d'une cohorte de 209 patients avec mutation constitutionnelle du gène RB1 et ayant été irradiés entre 1977 et 2010 [158]. Soixante tumeurs du massif facial en territoire irradié ou en bordure de champs chez 53 patients ont été recensées, avec un délai médian de survenue par rapport à la radiothérapie de 16,9 ans et un suivi médian de 24,8 ans.
Le pronostic global des seconds cancers du massif facial chez ces patients anciennement irradiés est globalement mauvais. Leur traitement repose sur la chimiothérapie, dont l'efficacité est médiocre, et surtout sur la chirurgie [ 159]. Un des facteurs pronostiques majeurs est la faisabilité d'une chirurgie d'exérèse complète [143]. Dans l'étude d'Aerts et al., un seul survivant était observé parmi les 9 patients n'ayant pu bénéficier d'une chirurgie [ 143].
Information génétique aux familles et aux patients
La consultation de génétique est une étape importante dans la prise en charge, puis lors du suivi de ces patients. Elle a pour objectif, en étroite collaboration entre les équipes cliniques, de répondre aux questions portant sur les divers risques (modalités de transmission d'une prédisposition, naissance d'un autre enfant atteint, survenue d'un second cancer) et de guider le suivi des enfants à risque.
La première consultation est le plus souvent réalisée lorsque l'enfant est encore petit pour informer les parents (voir « II. Génétique du rétinoblastome » ). Il est donc essentiel de proposer dès l'adolescence, ou à l'âge adulte si cela n'avait pas été fait auparavant, une nouvelle consultation pour reprendre les informations.
Conclusion
À l'issue du traitement, un suivi ophtalmologique et pédiatrique régulier est nécessaire. Initialement indispensable pour dépister précocement une rechute oculaire, il doit être poursuivi sur le long terme pour l'évaluation des séquelles des traitements reçus ainsi que pour l'information et la surveillance concernant les risques de secondes tumeurs et les risques de transmission à la descendance.
Traitement des formes avancées et métastatiques de rétinoblastome
I. Aerts-Gajdos
L'extension extraoculaire du rétinoblastome peut être locorégionale (tissus mous de l'orbite, adénopathies cervicales et prétragiennes ; stade 3 selon l' International Retinoblastoma Staging System [IRSS] ; stade cT4b, N1 selon la classification TNM) et/ou métastatique (essentiellement ostéomédullaire : stade 4a de l'IRSS et cM1a de la classification TNM ; système nerveux central : stade 4b de l'IRSS et cM1b de la classification TNM). Ces formes, devenues exceptionnelles dans les pays économiquement développés, restent les plus fréquentes au diagnostic dans les pays de faible revenu [160 , 161].
L'existence de métastases au diagnostic semble être étroitement liée au délai entre l'apparition des symptômes et le diagnostic, qui sont eux-mêmes reliées à des conditions socio-économiques défavorables. Par ailleurs, dans les pays à faible revenu, de nombreuses familles refusent l'énucléation, ce qui augmente la fréquence des formes métastatiques et des décès liés au rétinoblastome [162].
Grâce à la chimiothérapie conventionnelle mieux utilisée ou à son intensification, des progrès thérapeutiques considérables ont été accomplis dans les formes extraoculaires (atteinte orbitaire, ganglionnaire prétragienne ou cervicale, moelle osseuse et/ou tissu osseux) épargnant le système nerveux central [163-164-165-166-167]. En cas d'atteinte du système nerveux central, soit dans le cadre d'une forme trilatérale, soit dans le cadre d'une extension neuroméningée, le pronostic reste sombre malgré les différentes tentatives d'escalade thérapeutique.
Dans le cas particulier et rare d'un rétinoblastome étendu avec atteinte du nerf optique intraorbitaire détectable sur l'imagerie initiale (cT4), on réalise actuellement une chimiothérapie première suivie d'une énucléation à double équipe neurochirurgicale et ophtalmologique, permettant la section du nerf optique en zone saine, l'énucléation avec préservation des muscles oculomoteurs et la mise en place d'un implant orbitaire. Le traitement se poursuit par une chimiothérapie postopératoire [ 164 , 167 , 168].
L'utilisation de chimiothérapie intensive à base de carboplatine haute dose suivie d'une réinjection de cellules souches périphériques a nettement amélioré le pronostic des formes métastatiques en dehors des formes avec atteintes neuroméningées de pronostic péjoratif [163 , 165 , 166 , 169]. L'utilisation de la chimiothérapie haute dose reste rare dans les formes métastatiques dans la mesure où il s'agit d'une technique très coûteuse non disponible dans les pays où ces formes sont les plus fréquentes. Le mieux est encore de prévenir l'apparition de ces formes en réalisant une énucléation d'emblée dans les formes intraoculaires étendues de rétinoblastome, d'éviter des traitements conservateurs de façon prolongée en cas de récidives intraoculaires, et de tenir compte des facteurs de risque histologiques après énucléation première qui nécessiterait un traitement par chimiothérapie adjuvante (fig. 15-79,
Fig. 15-79
a-c. Extension extraoculaire d'un rétinoblastome.
fig. 15-80,
Fig. 15-80
Extension d'un rétinoblastome. a, b. Extension au nerf optique avec atteinte du chiasma. c, d. Extension extraoculaire avec extension au nerf optique jusqu'au niveau du chiasma.
fig. 15-81,
Fig. 15-81
Extension extrasclérale et atteinte du nerf optique initiale (a) ; récidive neuroméningée (b).
fig. 15-82,
Fig. 15-82
a-d. Extension neuroméningée d'un rétinoblastome.
fig. 15-83
Fig. 15-83
a-e. Métastase osseuse après traitement d'un rétinoblastome. Lésion tumorale initiale (a). Radiographie standard (b) : ostéocondensation de l'extrémité inférieure du radius avec appositions périostées. IRM (e) : lésion étendue de l'extrémité inférieure du radius, métaphyso-diaphysaire, avec extension à l'épiphyse radiale et skips métastases au niveau de la partie moyenne du radius ; importante extension au niveau du tissus mous en regard de l'atteinte radiale. Scintigraphie osseuse (c) : hyperfixation localisée au niveau de l'extrémité inférieure du radius gauche. Histologie (d) : localisation osseuse d'une prolifération tumorale maligne indifférenciée à « cellules rondes » dont l'immunophénotype est, dans le contexte, en faveur d'un rétinoblastome.
).
Le rétinoblastome dans les pays en voie de développement
L. Desjardins, P. Bey
Introduction
La prise en charge du rétinoblastome dans les pays en voie de développement pose des problèmes multiples. Les plus importants sont le diagnostic souvent tardif, à un stade incurable, le manque de structures de soins compétentes et les problèmes socio-économiques (difficultés pour l'accès aux structures de soins, pour l'hébergement sur place et pour la prise en charge financière du coût des traitements). Ainsi, si le taux de guérison avoisine 100 % des cas en France, il est encore inférieur à 50 % en Afrique subsaharienne.
État des lieux
Une analyse rétrospective sur les rétinoblastomes diagnostiqués dans 40 pays européens et 43 pays africains montre que, si on considère que la fréquence du rétinoblastome est de 1 sur 17 000 naissances, seulement 42 % des cas attendus sont diagnostiqués en Afrique versus 108,8 % en Europe. Les patients africains sont plus âgés, ont moins de forme familiale et se présentent à un stade plus évolué (p < 0,001) [170].
Ces faits ont été confirmés dans une étude plus large sur 153 pays avec 49,1 % de formes extraoculaires dans les pays à bas revenu [171].
Dans une étude publiée au Mali en 2013, l'âge médian au diagnostic des formes unilatérales est de 4 ans et deux tiers des enfants ont une extension extraoculaire au diagnostic [ 172]. En Côte d'Ivoire et en République démocratique du Congo, sur 116 cas de rétinoblastome diagnostiqués, 84 % sont unilatéraux et 76 % ont des formes extraoculaires au diagnostic [ 173]. Au Sénégal, dans une étude rétrospective entre 2005 et 2014, 106 cas ont été diagnostiqués dont 42,3 % avec une exophtalmie [174].
Projections
On estime actuellement, vu la natalité supérieure encore à 4 enfants par femme en Afrique qu'il y a environ 1100 cas de rétinoblastome et que cela devrait doubler d'ici 2050. En effet, la population en Afrique subsaharienne va doubler d'ici 2050 (à 2,1 milliards d'habitants) et être multipliée par 3,5 à la fin du siècle (à 3,8 milliards). On comprend donc que la plupart des cas de rétinoblastome seront en Afrique (et en Asie), alors que les centres de référence sont essentiellement aux États-Unis et en Europe.
Le programme de l'Alliance mondiale contre le cancer (AMCC)
C'est la raison pour laquelle l'Alliance mondiale contre le cancer (AMCC), sous la direction médicale du Pr Pierre Bey, a développé depuis 2011, avec l'appui de l'Institut Curie et de la Fondation Sanofi Espoir, un programme d'amélioration de la prise en charge du rétinoblastome en Afrique subsaharienne. Ce programme est mis en œuvre en étroite collaboration avec le Groupement franco-africain d'oncologie pédiatrique (GFAOP) qui fournit les médicaments de chimiothérapie gratuitement pour traiter cinq cancers de l'enfant dans le cadre de protocoles précis et dans les centres ou travaille un oncopédiatre compétent.
Le programme rétinoblastome a débuté au Mali en 2011 et a permis des améliorations notables grâce à l'énergie des équipes locales. Ainsi, 87 % des enfants atteints de rétinoblastome unilatéral intraoculaire ont pu être guéris, et le traitement conservateur des formes bilatérales a pu commencer avec thermochimiothérapie et injections intravitréennes de melphalan [175].
Le programme rétinoblastome s'est ensuite étendu en République démocratique du Congo à Lubumbashi, au Sénégal à Dakar, en Côte d'ivoire à Abidjan, et à Madagascar à Antananarive. Il comprend des missions dans les centres hospitaliers pour dialoguer avec les directions, l'organisation de formations de médecins (ophtalmologistes, oncopédiatres, anatomopathologistes et anesthésistes) et de prothésistes (les prothèses étaient réalisées à Paris au début, mais aussi dans les centre de référence africains déjà opérationnels), des actions de diagnostic précoce avec des informations à destination des parents (spot TV ou radio, affiches, etc.) et des informations à destination des professionnels de santé (cours, affiches, vidéos, etc.).
Le programme suppose aussi de respecter des recommandations communes de traitement qui ont été rédigées et d'enregistrer les cas dans une data base . Les data base ont été multiples au début, mais il en existe maintenant une centralisée qui permet de suivre les progrès du diagnostic précoce et du traitement.
Enfin, l'AMCC aide à l'acquisition du matériel nécessaire pour les ophtalmologistes formés au traitement conservateur (laser diode, casque d'ophtalmoscopie binoculaire, cryode, caméra de fond d'œil et boîtes de chirurgie)
Grâce aux améliorations constatées à Bamako et publiées en 2018, l'AMCC a pu obtenir en 2019 l'appui d'une fondation suisse pour continuer ses actions et étendre le programme rétinoblastome à l'ensemble de l'Afrique subsaharienne, y compris les pays anglophones [176 , 177].
Conclusion
Il reste encore beaucoup d'obstacles car l'objectif est de guérir 70 % des rétinoblastomes en Afrique alors qu'aujourd'hui encore beaucoup d'enfants ne sont pas diagnostiqués. Les problèmes socio-économiques et d'accès aux soins sont énormes et il faudrait obtenir la gratuité des soins pour les enfants atteints de cancer ou la création de fonds de soutien prenant en charge les plus démunis, comme c'est déjà le cas au Ghana ou en Tanzanie (fig. 15-84,
Fig. 15-84
L'équipe de l'Alliance mondiale contre le cancer (AMCC). Pr Pierre Bey, directeur médical ; Dr Laurence Desjardins, présidente ; Pascal Sirignano, oculariste ; Dr Karim Assani, manager du programme.
fig. 15-85,
Fig. 15-85
Dr Karim Assani, manager du programme (Kinshasa, République démocratique du Congo).
fig. 15-86,
Fig. 15-86
Pr Gaby Chenge (Lubumbashi, République démocratique du Congo).
fig. 15-87,
Fig. 15-87
Pr Fatou Sylla et Pr Fousseyni Traore (Bamako, Mali).
fig. 15-88,
Fig. 15-88
Pr Berete et son équipe au bloc (Abidjan, Côte d'Ivoire).
fig. 15-89,
Fig. 15-89
Dr Paule Aida Roth et Dr Laurence Desjardins, au congrès SAO de 2019 (Bamako).
fig. 15-90,
Fig. 15-90
Leucocorie.
fig. 15-91,
Fig. 15-91
Situation du stade au diagnostic du rétinoblastome en Afrique. a. Le rêve. b. La chance. c. Le cauchemar.
fig. 15-92,
Fig. 15-92
Images montrées aux parents à Bamako pour éviter le refus d'énucléation. a. Exophtalmie. b. Enfant avec prothèse.
fig. 15-93,
Fig. 15-93
Conseils aux parents.Parents, regardez les yeux de vos enfants. Une tache blanche dans l'œil peut être un cancer. Si vous voyez une tache blanche dans la pupille, un strabisme, allez dans votre centre de santé. Il peut s'agir d'une maladie grave de l'œil, le rétinoblastome. Soigné rapidement, il a toute chance de guérir. N'attendez pas : la tumeur évoluée est très difficile à soigner et très douloureuse.
fig. 15-94
Fig. 15-94
Programme 2019-2028 pour l'amélioration de la prise en charge du rétinoblastome de l'AMCC.
).
Diagnostic et prise en charge des hémangioblastomes capillaires rétiniens isolés ou associés à une maladie de von Hippel-Lindau
V. Krivosic
Définition
Les hémangioblastomes capillaires rétiniens (HCR) sont des tumeurs vasculaires rétiniennes bénignes et rares. Les HCR peuvent être sporadiques ou associés à une maladie de von Hippel Lindau (VHL). La probabilité qu'un HCR isolé, en l'absence d'histoire familiale, soit lié à une maladie de VHL est de 50 % [ 1 , 2]. La présentation clinique et le traitement des HCR sont les mêmes qu'ils soient isolés ou associés à une maladie de VHL [3]. Les principaux diagnostics différentiels sont les tumeurs rétiniennes vasoprolifératives et les communications artérioveineuses de type 3.
Aspect clinique et explorations
Les HCR se présentent le plus souvent comme des lésions rouge rosé du fond d'œil, bien limitées. On les retrouve le plus souvent en périphérie rétinienne (85 %). Les vaisseaux nourriciers et de drainage sont dilatés. Le diagnostic peut habituellement être fait à l'examen du fond d'œil.
L'angiographie à la fluorescéine permet de mieux les visualiser, en particulier les petites lésions périphériques. Le remplissage est rapide, dès les temps précoces. La fluorescence augmente ensuite au sein de la tumeur et devient très intense aux temps tardifs (fig. 15-95
Fig. 15-95
Hémangioblastome capillaire rétinien (HCR) de 1 diamètre papillaire. a. Sur le cliché couleur ultra grand champ, l'HCR se présente comme une lésion rouge orangé de la périphérie temporale. Les vaisseaux nourriciers et de drainage sont dilatés. b. Temps intermédiaire de l'angiographie à la fluorescéine. L'HCR qui s'est imprégné précocement diffuse intensément. La dilatation des vaisseaux nourriciers et de drainage est bien visible.
et 15-96
Fig. 15-96
HCR de petite taille traité par photocoagulation laser. a. Cliché couleur du fond d'œil droit d'une patiente de 24 ans présentant une maladie de von Hippel-Lindau. On retrouve en périphérie inférieure un petit HCR de moins de 1 diamètre papillaire découvert au décours d'un fond d'œil de dépistage de lésion présymptomatique. Les vaisseaux nourriciers et de drainage sont dilatés. Ils n'y ont néanmoins pas encore de retentissement maculaire et l'acuité visuelle est conservée à 10/10e. b. Cliché couleur 1 an après une seule séance de photocoagulation laser. L'HCR est pigmenté. Les vaisseaux nourriciers et de drainage ont retrouvé un diamètre normal. La surveillance devra être poursuivie tous les 6 mois afin de détecter et traiter toute nouvelle lésion.
). Il peut être observé une diffusion du colorant au niveau de l'HCR et des vaisseaux nourriciers et de drainage. Les lésions de plus grande taille sont habituellement associées à une exsudation intrarétinienne (décollement séreux rétinien [DSR], exsudats secs) qui peut s'étendre jusque dans la macula (fig. 15-97
Fig. 15-97
HCR de taille moyenne traité par photocoagulation laser. a. Cliché couleur de l'œil gauche d'une patiente de 28 ans présentant un HCR d'environ 2 diamètres papillaires entouré d'un décollement séreux rétinien (DSR). L'acuité visuelle est profondément altérée par l'accumulation d'exsudats dans la macula. L'angiographie à la fluorescéine (insert) révèle une imprégnation intense de l'HCR. b. Cliché couleur quelques heures après deux séances de photocoagulation laser intense. L'HCR est blanc. Le DSR ne s'est pas majoré. L'angiographie à la fluorescéine (insert) confirme l'occlusion complète de celui-ci. c. Cliché couleur réalisé 1 an plus tard. Plusieurs séances de laser supplémentaires ont été nécessaires afin de détruire complétement cet HCR. Les vaisseaux nourriciers et de drainage ont retrouvé un calibre normal. Les exsudats maculaires ont été résorbés. L'HCR est devenu fibreux et pigmenté.
et 15-98
Fig. 15-98
HCR de grande taille traité par photocoagulation laser et un complément de cryoapplication transsclérale. a. Cliché couleur du fond d'œil gauche d'un patient de 20 ans porteur de la maladie de von Hippel-Lindau et présentant un volumineux HCR de la périphérie temporale entouré d'une couronne d'exsudats et d'un décollement séreux rétinien. b. 2 ans après, plusieurs séances de laser et un complément de cryoapplication transsclérale, on note une fibrose de l'HCR. Les vaisseaux nourriciers et de drainage ont retrouvé un diamètre normal. Les exsudats ont été résorbés.
). Le bilan doit alors être complété par un examen en tomographie en cohérence optique (OCT).
La maladie de von Hippel-Lindau (VHL)
La maladie de VHL est une maladie autosomique dominante due à une mutation du gène VHL qui est un gène suppresseur de tumeur [ 4]. Les mutations entraînent ainsi une prédisposition à l'apparition de tumeurs vasculaires, endocrines et malignes pluriviscérales qui sont énumérées dans le tableau 15-6
Tableau 15-6
Localisations, fréquences et bilan diagnostique initial de la maladie de von Hippel-Lindau.
LocalisationTumeurBilan diagnostique initial
RétineHémangiome capillaire rétinien et papillaire (50–60 % des cas) Fond d'œil ± angiographie à la fluorescéine
Moelle épinière et cerveletHémangioblastome (60–80 %) IRM cérébrale et médullaire
ReinCancer du rein à cellules claires (30–60 %) Kystes Échographie et/ou TDM abdominale
SurrénalesPhéochromocytome (11–24 %) Échographie et/ou TDM abdominaleDosage des neurotransmetteurs sanguins et urinaires
Pancréas (60–80 %) Tumeur endocrineKystes Échographie et/ou TDM abdominale
Oreille interneTumeur du sac endolymphatique
ÉpididymeCystadénome (20–54 %)
Ligament largeCystadénome (2–11 %)
[5]. La protéine VHL dégrade les facteurs de transcription induits par l'hypoxie ( hypoxia-inducible factors [HIF]). Sa perte de fonction entraîne une élévation des taux d'HIF, ce qui stimule les médiateurs de l'angiogenèse (tels que le VEGF), de la croissance et de la division cellulaires. Le diagnostic génétique de maladie de VHL permet à l'heure actuelle d'identifier 100 % des mutations causales [6]. La maladie de VHL est une maladie rare (1 pour 36 000 naissances) [ 7] qui affecte un peu moins de 1000 familles en France.
Histoire naturelle
Les HCR sont une des manifestations cliniques les plus fréquentes de la maladie de VHL. Ils sont en effet retrouvés chez 38 à 60 % des patients porteurs d'une mutation du gène VHL . Ils sont multiples et bilatéraux dans plus de la moitié des cas [8]. Les patients VHL sont à risque de développer de nouveaux HCR toute leur vie, et les HCR déjà présents et non traités vont avoir tendance à augmenter de volume. Le risque cumulé de perte visuelle par HCR a été estimé à 35 % chez les patients porteurs de mutation VHL [9].
Les petits HCR (fig. 15-99
Fig. 15-99
a-e. Hémangioblastome de la papille de petite taille asymptomatique. a. Cliché couleur d'un hémangioblastome de la papille de l'œil gauche d'une patiente de 18 ans porteuse de la maladie de von Hippel-Lindau. b, c. La lésion s'imprègne précocement (b) et intensément au cours de l'angiographie à la fluorescéine, puis diffuse au temps tardifs (c). L'acuité visuelle est de 10/10e. La prise en charge peut se limiter à une surveillance régulière. d. 20 ans plus tard, on constate que l'hémangioblastome n'a que peu augmenté de volume. Le retentissement maculaire se limite à un discret aspect de trou lamellaire. L'acuité visuelle reste conservée à 10/10e.
), qu'ils soient périphériques ou localisés au niveau de la papille, n'entraînent habituellement pas de retentissement visuel. La baisse de l'acuité visuelle (AV) peut être liée à l'extension maculaire de l'exsudation secondaire à un volumineux HCR périphérique (que ce soit un DSR maculaire, un placard d'exsudats maculaires ou un œdème maculaire cystoïde [OMC]) (fig. 15-100
Fig. 15-100
Hémangioblastome de la papille de grande taille compliqué d'un œdème maculaire cystoïde. a. Cliché couleur d'un hémangioblastome de la papille découvert chez un patient de 47 ans au décours d'une baisse de l'acuité visuelle. b. L'examen OCT révèle la présence d'un œdème maculaire cystoïde. L'hémangioblastome est probablement trop épais pour donner un signal analysable. c, d. Temps précoces et tardifs de l'angiographie à la fluorescéine.
) ou à un décollement de rétine tractionnel du pôle postérieur par remaniement vitréen. De la même manière, les hémangioblastomes de la papille peuvent se compliquer d'OMC et de membrane épimaculaire. Les cas les plus sévères associent de nombreux HCR à un décollement de rétine total et chronique conduisant au glaucome néovasculaire et à un risque de perte du globe oculaire.
Traitement
L'objectif du traitement est la destruction des HCR. Le choix des modalités thérapeutiques doit tenir compte de la taille et de la localisation des HCR : périphérique ou juxtapapillaire. Plusieurs options ont été évaluées et décrites dans la littérature : l'observation, le laser thermique transpupillaire [10-11-12-13], la cryothérapie transconjonctivosclérale [ 14], la radiothérapie [15 , 16], la photothérapie dynamique (PDT) [17], la thermothérapie transpupillaire [18 , 19] et les injections intravitréennes (IVT) d'anti-VEGF [20]. Dans les cas les plus compliqués, une chirurgie vitréorétinienne peut aussi être envisagée [ 21 , 22].
Certains auteurs ont recommandé de surveiller les petites lésions. En pratique, il semble raisonnable de traiter tout HCR périphérique identifié étant donné son potentiel évolutif [23]. Les traitements par laser et la cryothérapie sont en pratique les deux traitements les plus utilisés [ 24].
Les HCR périphériques de petite taille (< 1 diamètre papillaire) sont habituellement assez facilement traitables par photocoagulation laser [10 , 12 , 13] (voir fig. 15-96
Fig. 15-96
HCR de petite taille traité par photocoagulation laser. a. Cliché couleur du fond d'œil droit d'une patiente de 24 ans présentant une maladie de von Hippel-Lindau. On retrouve en périphérie inférieure un petit HCR de moins de 1 diamètre papillaire découvert au décours d'un fond d'œil de dépistage de lésion présymptomatique. Les vaisseaux nourriciers et de drainage sont dilatés. Ils n'y ont néanmoins pas encore de retentissement maculaire et l'acuité visuelle est conservée à 10/10e. b. Cliché couleur 1 an après une seule séance de photocoagulation laser. L'HCR est pigmenté. Les vaisseaux nourriciers et de drainage ont retrouvé un diamètre normal. La surveillance devra être poursuivie tous les 6 mois afin de détecter et traiter toute nouvelle lésion.
). Les HCR de taille moyenne et de grande taille qui s'accompagnent d'une exsudation maculaire, avec au maximum un décollement de rétine localisé, peuvent également être détruits par le laser [12 , 13]. Dans ces cas, la surveillance doit être très rapprochée du fait du risque d'apparition ou de majoration d'un DSR préexistant (voir fig. 15-97
Fig. 15-97
HCR de taille moyenne traité par photocoagulation laser. a. Cliché couleur de l'œil gauche d'une patiente de 28 ans présentant un HCR d'environ 2 diamètres papillaires entouré d'un décollement séreux rétinien (DSR). L'acuité visuelle est profondément altérée par l'accumulation d'exsudats dans la macula. L'angiographie à la fluorescéine (insert) révèle une imprégnation intense de l'HCR. b. Cliché couleur quelques heures après deux séances de photocoagulation laser intense. L'HCR est blanc. Le DSR ne s'est pas majoré. L'angiographie à la fluorescéine (insert) confirme l'occlusion complète de celui-ci. c. Cliché couleur réalisé 1 an plus tard. Plusieurs séances de laser supplémentaires ont été nécessaires afin de détruire complétement cet HCR. Les vaisseaux nourriciers et de drainage ont retrouvé un calibre normal. Les exsudats maculaires ont été résorbés. L'HCR est devenu fibreux et pigmenté.
). Il peut être utile dans un second temps de réaliser une séance de cryoapplication transsclérale afin de geler la partie profonde de la lésion [ 13] (voir fig. 15-98
Fig. 15-98
HCR de grande taille traité par photocoagulation laser et un complément de cryoapplication transsclérale. a. Cliché couleur du fond d'œil gauche d'un patient de 20 ans porteur de la maladie de von Hippel-Lindau et présentant un volumineux HCR de la périphérie temporale entouré d'une couronne d'exsudats et d'un décollement séreux rétinien. b. 2 ans après, plusieurs séances de laser et un complément de cryoapplication transsclérale, on note une fibrose de l'HCR. Les vaisseaux nourriciers et de drainage ont retrouvé un diamètre normal. Les exsudats ont été résorbés.
).
Les hémangioblastomes capillaires de la papille associés à un œdème maculaire et une baisse de l'AV peuvent être traités par une PDT à la vertéporphine [ 25] combinée avec des injections intravitréennes d'anti-VEGF [20]. Du fait du risque de lésions du nerf optique, ce traitement est à réserver aux formes évoluées, associées à une baisse significative de l'AV.
Plus les HCR sont petits, plus il est facile d'en venir à bout avec le minimum de conséquence pour l'AV. Le dépistage des lésions présymptomatiques doit donc être réalisé très régulièrement chez tous les patients porteurs d'une mutation du gène VHL [26].
Lymphomes
Lymphome oculaire primitif ou lymphome vitréorétinien
V. Touitou, A. Toutee
Points importants
  • Il convient d'évoquer le diagnostic de lymphome vitréorétinien (LVR) devant toute uvéite postérieure chronique chez les patients de plus de 50 ans.
  • La cytologie est le gold standard concernant le diagnostic de LVR et doit être réalisée dans un centre expert.
  • La ponction de chambre antérieure avec dosage de l'IL-10 et de l'IL-6 est un bon élément d'orientation diagnostique.
  • L'IRM cérébrale doit faire partie du bilan étiologique de toute uvéite postérieure chronique du sujet âgé.
  • La surveillance des patients avec LVR est poursuivie à vie.
Présentation clinique
Le lymphome vitréorétinien (LVR) est un sous-type de lymphome primitif du système nerveux central (SNC), affectant primitivement l'œil (typiquement vitrée, rétine, épithélium pigmentaire, voire nerf optique). Ces lymphomes ont un tropisme préférentiel pour l'œil et le SNC, qui partagent certaines caractéristiques faisant d'eux des sanctuaires immunologiques.
Il s'agit généralement de lymphome B non hodgkinien à grandes cellules. Il doit être distingué des localisations oculaires des lymphomes systémiques, affectant préférentiellement la choroïde, et des lymphomes de MALT affectant principalement l'orbite et la conjonctive.
Les LVR sont rares (1 à 2 % des tumeurs oculaires), mais grevés d'un pronostic vital sombre, principalement lié à l'atteinte cérébrale et méningée qui est quasi systématique chez les patients à un moment de la maladie. Le retard diagnostique fréquent (délai diagnostique moyen de 44 mois) contribue en grande partie à ce pronostic sombre, même si le développement de centres experts nationaux, de réseaux de compétences, et l'amélioration des techniques de biologie moléculaire et d'analyse cytologique ont permis une nette amélioration du délai diagnostique moyen de ces patients.
Signes fonctionnels
Les signes fonctionnels sont marqués par des myodésopsies chez une grande partie des patients. L'œil est généralement blanc et indolore, sans doute en raison des taux importants d'interleukine-10 (IL-10) immunosuppressive. Parfois, des signes de localisations neurologiques peuvent également être au premier plan de la plainte fonctionnelle. L'atteinte est bilatérale chez plus de la moitié des patients au moment du diagnostic.
Examen clinique
Segment antérieur
Le segment antérieur est généralement calme, avec pas ou peu d'inflammation dans la majorité des cas. Lorsqu'ils sont présents, les précipités rétrocornéens sont souvent stellaires, volontiers granulomateux, avec un Tyndall de chambre antérieur absent ou minime. Les synéchies iridocristaliniennes sont typiquement absentes ou très rares. En revanche, on peut observer des dépôts cellulaires à la face postérieure du cristallin ou d'un implant intraoculaire.
Segment postérieur
L'atteinte la plus typique dans le cadre des LVR s'observe au niveau du segment postérieur. La hyalite est très fréquente et peut prendre la forme d'une hyalite diffuse plus ou moins dense, souvent à prédominance périphérique (« bouée périphérique »), ou s'accumulant en filaments telles des « toiles d'araignées » dans le vitrée, ou en agrégats cellulaires vitréens plus ou moins importants (fig. 15-101
Fig. 15-101
Hyalite cellulaire à gros grains d'un lymphome vitréorétinien. Les cellules sont organisées le long des fibres vitréennes, en amas ou en feuilles.
). Des infiltrats rétiniens ou sous-rétiniens sont présents chez la moitié des patients au diagnostic, ce qui est fortement évocateur du diagnostic de LVR (fig. 15-102
Fig. 15-102
Patiente de 90 ans présentant un lymphome vitréorétinien avec une panuvéite bilatérale non synéchiante, une hyalite cellulaire à gros grains et un infiltrat sous-rétinien du pôle postérieur.
et 15-103
Fig. 15-103
Infiltrat du nerf optique et infiltrat sous-rétinien du pôle postérieur par un lymphome vitréorétinien, chez un homme de 80 ans avec un antécédent de lymphome cérébral.
). Parfois, des altérations de l'épithélium pigmentaire, témoins d'infiltrats spontanément régressifs, peuvent être associés à ces infiltrats blanc-jaunâtre donnant au fond d'œil un aspect typique en « peau de léopard » fortement évocateur du diagnostic. L'œdème maculaire cystoïde est rare dans les LVR, mais est plutôt le fait des patients ayant déjà été opérés (cataracte ou vitrectomie).
Il existe des présentations cliniques plus rares, rendant parfois le diagnostic encore plus difficile car mimant des tableaux de nécrose rétinienne aiguë ou de vasculite rétinienne. Hémorragies rétiniennes, infiltration de la papille, vascularites rétiniennes (fig. 15-104
Fig. 15-104
a, b. Vascularite rétinienne occlusive survenant dans le cadre d'un lymphome vitréorétinien.
), occlusions veineuses, décollement de rétine exsudatif, extension sclérale sont autant de tableaux cliniques rares, décrits dans la littérature de façon anecdotique.
Examens complémentaires
Ophtalmologique
Imagerie multimodale dans les lymphomes vitréorétiniens
Si la première étape de suspicion est clinique, l'imagerie a permis de grands progrès pour l'exploration des patients suspects de LVR. Un aspect très évocateur du diagnostic est la juxtaposition de zones hyper-autofluorescentes et de zones hypo-autofluorescentes. En angiographie à la fluorescéine , l'association de petits points hypofluorescents plus ou moins confluents, correspondant aux infiltrats sous-rétiniens, donnent l'aspect poivre et sel ou peau de léopard typiquement observé chez les patients avec LVR (fig. 15-105
Fig. 15-105
Angiographie à la fluorescéine d'un lymphome vitréorétinien révélant de multiples infiltrats rétiniens caractéristiques sous forme de points hypofluorescents « en peau de léopard », associés à des points hyperfluorescents.
). Ces lésions sont plus difficiles à mettre en évidence en angiographie au vert d'indocyanine. L'OCT montre typiquement des dépôts d'allure nodulaires, hyper-réflectifs, de l'épithélium pigmentaire. Ces lésions ne sont pas spécifiques (fig. 15-106
Fig. 15-106
Patiente de 60 ans ayant un infiltrat sous-rétinien de tout le pôle postérieur de l'œil gauche associé à une infiltration rétinienne visible en OCT, révélant un lymphome vitréorétinien. Sur l'œil droit, présence d'infiltrats sous-rétiniens classiques de type « pseudo-drusen » situés entre l'épithélium pigmentaire et la membrane de Bruch.
).
Dosage de l'IL-10 et de l'IL-6 intraoculaire
La réalisation d'une ponction de chambre antérieure avec dosage des interleukines intraoculaires (IL-10 et IL-6) est une étape clé pour conforter la suspicion diagnostique. Les valeurs seuils des taux d'IL-10 significatifs pour évoquer un LVR ont été récemment redéfinies sur la base des nouvelles techniques de dosage moléculaire multiplex utilisées à la place de la technique ELISA. Ainsi, en dosage moléculaire multiplex, des taux d'IL-10 de 30 pg/ml dans l'humeur aqueuse (contre 50 pg/ml précédemment en ELISA) et de 65 pg/ml dans le vitrée (contre 400 pg/ml en ELISA) étaient associés à une sensibilité de 93 % et 78 % respectivement et une spécificité de 100 % et de 97 % respectivement. Un ratio d'IL-10/IL-6 est associé à une sensibilité de 93 % et une spécificité de 100 % pour le diagnostic de LVR. Un score de probabilité diagnostique (score ISOLD) a également été défini sur la base de ces dosages d'IL-10 et d'IL-6 permettant d'associer à ces taux une probabilité diagnostique fondée sur un algorithme mathématique.
Vitrectomie diagnostique
Si l'analyse moléculaire des LVR est particulièrement informative dans la démarche diagnostique, la cytologie reste l'examen de référence pour porter le diagnostic définitif de LVR et initier le traitement. La vitrectomie diagnostique est donc une étape clé du diagnostic de LVR. Compte tenu des multiples obstacles qui jalonnent ce diagnostic (extrême fragilité des cellules qui nécessite une logistique permettant une analyse des prélèvements dans l'heure suivant la vitrectomie ; difficulté de l'analyse cytologique nécessitant un hématologue expérimenté ; faible quantité de matériel disponible), il convient de réaliser le prélèvement au sein d'un réseau expérimenté.
La vitrectomie permet d'éliminer les diagnostics différentiels (analyse bactériologique, virologique, mycologique et parasitologique), mais surtout de confirmer le diagnostic positif de LVR et de le caractériser. La rentabilité de la vitrectomie dépend de la technique employée lors du prélèvement peropératoire, du transport rapide et adapté du prélèvement vers le laboratoire d'hématologie et de cytologie (le prélèvement doit pouvoir être analysé dans l'heure par le cytologiste) et de l'expérience du cytologiste. Même en prenant toutes les précautions nécessaires, la valeur prédictive négative de la vitrectomie diagnostique atteint 60 % et il n'est pas exceptionnel de devoir répéter la vitrectomie. Parfois, il faut recourir à une biopsie rétinienne ou cérébrale, beaucoup plus invasive.
Le diagnostic est confirmé par la mise en évidence de grandes cellules lymphomateuses, avec cytoplasme spumeux et gros noyau large et irrégulier. Ces cellules sont généralement positives pour le CD20 et le CD79α et négatives pour le CD3 (marqueur T-cellulaire). Un Ki-67 généralement élevé témoigne de leur malignité. Elles expriment un profil de restriction spécifique pour les chaînes κ ou λ. La recherche d'un marqueur pan-B en immunohistochimie est obligatoire lors de l'analyse histochimique (CD19, CD20, PAX5), ainsi que la recherche de BCL6, MUM1/IRF4 et CD10. La cytométrie est utilisée en complément si nécessaire. Enfin, lorsque le prélèvement est de mauvaise qualité avec de nombreuses cellules détruites, une recherche de mutation Myd88 peut également être utile car celle-ci est rapportée dans 70 % des lymphomes B à grandes cellules oculaires et cérébraux.
Bilan d'extension
IRM cérébrale
Il convient de garder en mémoire que 80 % des patients développeront une atteinte cérébrale ou méningée à un moment donné de leur maladie. Cette atteinte est le principal facteur pronostique de la maladie. Elle peut précéder le diagnostic de LVR, être concomitante, ou se développer ultérieurement. Il est donc nécessaire de réaliser une IRM cérébrale dans le cadre du bilan initial d'un LVR et, plus largement, dans le cadre du bilan initial de toute uvéite postérieure chronique d'un patient âgé. L'IRM doit également être répétée au cours du suivi, en particulier en cas d'apparition de signes cliniques neurologiques (signes d'hypertension intracrânienne ou signes focaux de localisation), ainsi qu'à titre systématique lors de la surveillance.
Ponction lombaire
La ponction lombaire fait partie du bilan initial nécessaire en cas de lymphome vitréorétinien. Comme pour la vitrectomie diagnostique, on effectuera un dosage des cytokines (IL-10 et IL-6) et une étude cytologique sera également réalisée.
Scanner thoraco-abdomino-pelvien
Un scanner thoraco-abdomino-pelvien fait partie du bilan d'extension initial de la maladie.
Autres examens
Une biopsie octéomédullaire ainsi qu'une échographie seront également demandées dans le cadre du bilan initial.
Diagnostics différentiels essentiels
Les LVR constituent des syndromes de mascarade. En effet, ils miment souvent un tableau d'uvéite postérieure chronique, qui constitue le principal diagnostic différentiel. Un bilan d'uvéite est généralement effectué, préalablement ou de façon concomitante à la suspicion diagnostique, incluant des sérologies bactériennes (maladie de Lyme, syphilis, tuberculose) ou virales (HSV, VZV, CMV) ou parasitaires (toxoplasmose).
Traitement de première intention
Lymphome vitréorétinien associé à une atteinte du système nerveux central (cérébrale ou méningée)
La prise en charge des LVR associés à une atteinte du SNC est assez consensuelle. En effet, la stratégie thérapeutique des lymphomes du SNC est bien codifiée, avec des recommandations internationales claires et largement validées par la communauté scientifique internationale. Cette stratégie ne sera pas modifiée en cas d'atteinte oculaire associée à une atteinte du SNC. Le traitement réponse sur une polychimiothérapie systémique incluant du méthotrexate forte dose (MTX-HD) :
  • patients de < 60 ans :
    • polychimiothérapie avec MTX-HD et Ara-C HD : R-MPV ou R-MBVP ou R C5R ;
    • consolidation par radiothérapie ou chimiothérapie de consolidation ± autogreffe de cellules souches ou surveillance ;
  • patient de > 60 ans : polychimiothérapie à base de MTX-HD suivie d'Ara-C, puis surveillance ou traitement d'entretien.
Lymphome vitréorétinien isolé
La stratégie thérapeutique en cas de LVR isolé est loin d'être consensuelle. En effet, certaines équipes considèrent qu'il s'agit dans ce cas d'une maladie locale et qu'il n'y a pas d'indication à un traitement systémique, et proposent un traitement local seul (radiothérapie ou injection intravitréenne de MTX). D'autres équipes, en revanche, soutiennent que l'enjeu en cas d'atteinte oculaire est d'éviter une dissémination et de prévenir une localisation cérébrale ou méningée en proposant un traitement systémique d'emblée. Dans ce cas, si l'état général et la fonction rénal du patient le permettent, on proposera un protocole de chimiothérapie systémique proche de celui proposé en cas de lymphome primitif du SNC. La supériorité de l'une ou l'autre de ces stratégies thérapeutiques n'est pas claire, d'autant que les seules études sur le sujet sont généralement des études rétrospectives, comparant des protocoles thérapeutiques très différents.
Surveillance recommandée
La surveillance des patients doit être rapprochée initialement. Elle comporte un examen clinique ophtalmologique à la lampe à fente, un fond d'œil dilaté et un OCT. Au moindre doute, on effectuera une angiographie à la fluorescéine et une ponction de chambre antérieure avec IL-10 et IL-6.
Les dosages cytokiniques sont systématiques en début et en cours de traitement afin de juger de l'efficacité de celui-ci, qu'il s'agisse d'un traitement local (radiothérapie ou injection intravitréenne de MTX) ou d'une chimiothérapie systémique.
La surveillance doit être effectuée en collaboration avec les équipes d'hématologie et de neuro-oncologie. Il faut veiller à surveiller également l'IRM cérébrale. La surveillance doit être poursuivie à vie [1-2-3-4-5-6-7-8-9-10].
Lymphome uvéal primitif
N. Cassoux
Points importants
  • Le lymphome uvéal primitif est beaucoup plus rare que la forme précédente, le lymphome vitréorétinien, et de diagnostic difficile.
  • L'atteinte de la choroïde ou de l'uvée est plutôt indolente.
  • Ce lymphome ressemble à une sclérite postérieure mais indolore ou une métastase choroïdienne, un pseudo-birdshot.
  • Un diagnostic histologique est obligatoire.
Atteinte uvéale du lymphome
L'atteinte uvéale du lymphome est une manifestation rare. Il existe deux cas de figure : l'atteinte uvéale métastatique d'un lymphome non hodgkinien (LNH) à grandes cellules ganglionnaires et le lymphome uvéal primitif [ 11].
L'atteinte uvéale par un LNH ganglionnaire peut survenir au début de la maladie et exceptionnellement en être révélatrice. Il s'agit de lymphomes de haut grade, évolutifs. Le patient présente, outre les signes ophtalmologiques, une dégradation de l'état général (amaigrissement, fatigue, sueur nocturne). Les cellules tumorales atteignent l'œil via la circulation sanguine, pouvant induire une ischémie de la choriocapillaire, avec des pin points à l'angiographie, un décollement séreux rétinien, des décollements de l'épithélium pigmentaire, plus rarement un épaississement de la choroïde, un syndrome de masse choroïdien, une infiltration de l'uvée antérieure avec pseudo-hypopion.
Le diagnostic ne pose généralement pas de problème car la découverte par un scanner thoraco-abdomino-pelvien et un TEP-scanner ainsi qu'un bilan sanguin vont rapidement y amener. La même symptomatologie peut survenir lors d'une rechute, l'atteinte oculaire pouvant précéder la rechute hématologique. Comme dans le système nerveux central, les cellules tumorales peuvent être moins bien contrôlées que les cellules situées dans d'autres organes et la moelle osseuse en raison des barrières hémato-encéphalique et oculaire peu perméables aux médicaments. Les ophtalmologistes peuvent donc être confrontés à un problème diagnostique lorsqu'un patient présente une rechute oculaire isolée alors qu'il est considéré comme en rémission complète par les hématologistes.
L'aspect de l'atteinte oculaire (atteinte choroïdienne) est bien différent des atteintes oculaires infectieuses chez un patient immunodéprimé par la chimiothérapie (rétinite virales, toxoplasmose). Un bilan infectieux par ponction de chambre antérieure pour éliminer un agent infectieux, une ponction lombaire (recherchant une atteinte méningée concomitante) et un nouveau bilan systémique du lymphome permettent d'orienter le diagnostic. Le dosage des cytokines (IL-10 et IL-6) n'a pas l'intérêt diagnostique que l'on retrouve dans le lymphome vitréorétinien.
Lymphome primitif choroïdien
Il s'agit d'une entité rare de diagnostic difficile [ 12]. Contrairement aux atteintes choroïdiennes secondaires, il s'agit ici d'un lymphome à petite cellules de bas grade de type MALT (fig. 15-107
Fig. 15-107
a, b. Lymphome de type MALT choroïdien de l'œil gauche (œil droit normal) montrant une choroïde épaissie et infiltrée.
). La symptomatologie est polymorphe, l'évolution lente avec des signes fonctionnels plutôt chroniques (flou visuel, métamorphopsies, baisse de la vision fluctuante). L'atteinte est généralement unilatérale.
Plusieurs types de présentations cliniques ont été décrits : atteinte choroïdienne en patchs multiples (pseudo-birdshot ; fig. 15-108
Fig. 15-108
Lymphome MALT choroïdien réalisant un aspect pseudo-birdshot (a) avec infiltration en avant de l'épisclère d'aspect saumonée (b).
) ; atteinte choroïdienne plus diffuse avec épaississement choroïdien et plis choroïdien pouvant faire évoquer une sclérite postérieure, mais indolore et peu bruyante ; masse choroïdienne avec dispersion pigmentaire achrome pouvant évoquer une métastase (fig. 15-109
Fig. 15-109
Infiltration choroïdienne diffuse avec exteriorisation antérieure de l'œil droit correspondant à un lymphome de type MALT primitif de l'uvée (a, b). L'IRM (c) avec injection de gadolinium montre une infiltration diffuse de l'uvée avec rehaussement de la sclère, diagnostic confirmé par énucléation à la demande du patient retrouvant une infiltration par des petit lymphocytes CD20 + (d).
). L'examen soigneux de l'épisclère antérieure à la lampe à fente peut montrer des patchs saumonés.
Dans un premier temps, le bilan consiste à éliminer une atteinte systémique par un scanner thoraco-abdomino-pelvien et un TEP-scanner, qui est négatif dans cette affection et qui permet d'éliminer une métastase. Les examens ophtalmologiques montrent un épaississement choroïdien hypofluorescent en ICG et en fluorescéine ; quelques pin points sont possibles ainsi que des DSEP et un remplissage lent d'un décollement séreux rétinien (DSR). En OCT, la lésion est choroïdienne, avec là aussi la possibilité de DSR et DSEP. En échographie, l'épaississement est hypo-échogène et on peut voir un aspect en double épaisseur (épaississement de la choroïde et épaississement en arrière de la sclère souvent autour du nerf optique ou à l'émergence des vortiqueuses (fig. 15-110
Fig. 15-110
Échographie montrant l'infiltration choroïdien et scléral en double couche. L'échographie permet de repérer des zones épisclérales très infiltrées accessibles à la biopsie ab externo.
). Cet aspect d'extériorisation le long des vortiqueuses est également très bien visible en IRM et très évocateur du diagnostic (fig. 15-111
Fig. 15-111
Imagerie par IRM montrant une infiltration de la choroïde et en arrière de la sclère avec un aspect péri-optique réalisant un aspect en double épaisseur.
).
Le diagnostic est local car l'atteinte oculaire est isolée. La biopsie est le seul moyen de faire le diagnostic histologique. Il est important de faire une IRM avant car s'il existe une atteinte épisclérale antérieure ou postérieure, la biopsie ab externo est de loin beaucoup plus simple que la biopsie choroïdienne ab interno . Même en l'absence de signe d'extériorisation extrasclérale, avant de réaliser le geste de biopsie choroïdienne ab interno , il est important de faire une désinsertion conjonctivale sur 360° et d'explorer les quatre quadrants scléraux. Il n'est pas rare de voir une atteinte épisclérale a minima et donc de la biopsier sans faire de chirurgie plus invasive. Si, en revanche, il n'y a rien, il faut alors réaliser une biopsie choroïdienne transrétinienne, non dénuée de complication. La biopsie peut se faire en fonction des habitudes au vitréotome 27 G, ou en cytoponction (moins rentable), éventuellement à la pince [13].
Le résultat histologique retrouve un lymphome de bas grade de type MALT.
Un bilan en hématologie est systématique pour éliminer une atteinte d'une autre muqueuse, ce qui est exceptionnel.
Le traitement repose sur une irradiation à faible dose particulièrement efficace. D'autres traitements ont été proposés (anticorps anti-CD20, chimiothérapie) dans des cas bien particuliers discutés en général en réunion multidisciplinaire.
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