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Chapitre 11
Formulations destinées au segment antérieur de l'œil

F. Lallemand, M. Schmitt

L'essentiel
  • Les pathologies du segment antérieur de l'œil sont le plus souvent traitées par des collyres.
  • Pour être efficace, l'administration oculaire topique des médicaments doit défier le temps de résidence court de la formulation sur la surface oculaire et sa dilution dans les larmes.
  • Peu de médicaments peuvent être formulés en collyre du fait de leur structure physicochimique ou de leur efficacité trop faible.
  • De multiples formulations, polymères et méthodes innovantes sont à l'origine de collyres bien tolérés et efficaces à des fréquence réduite d'instillation.
  • La formulation, en particulier des nouveaux médicaments, reste l'un des enjeux majeurs de l'ophtalmologie moderne.
Introduction
Pendant des décennies, l'administration de médicaments s'est cantonnée à l'utilisation de collyres aqueux simples et de pommades. Ces deux formes répondaient aux besoins principaux, à savoir administrer des molécules solubles dans l'eau et des molécules insolubles sur la surface de l'œil. Pourtant, que faire quand la pathologie nécessite de nombreuses administrations par jour; quand le principe actif est irritant ou est instable chimiquement; quand la molécule n'arrive pas à pénétrer les différentes barrières de protection de l'œil? Certains patients éprouvent des difficultés à s'instiller des gouttes et, avec l'âge, cela devient de plus en plus difficile conduisant à une mauvaise observance du traitement. Il est évident que de nouveaux besoins sont apparus, combinés avec des contraintes réglementaires de plus en plus exigeantes.
Les médicaments ophtalmiques doivent être stériles, mais aussi suivre un grand nombre de monographies des pharmacopées européennes et américaines, les lignes directrices internationales des ICH ( International Council for Harmonisation of Technical Requirements for Pharmaceuticals for Human Use ) ainsi que des textes d'application régionale de l'European Medicines Agency (EMA) ou de la Food and Drug Administration (FDA). Par exemple, il s'agit de : spécifications très strictes sur les méthodes analytiques pour caractériser le collyre et pour le suivi de la stabilité au cours du temps; de limites en impuretés très basses (impuretés organiques, métaux lourds, nitrosamines, solvants résiduels); de critères sur le choix des excipients (qualité et sécurité), etc. De surcroît, les médicaments doivent être produits selon les bonnes pratiques de fabrication, un des référentiels industriels les plus stricts.
De tels obstacles ont toujours été la source d'innovation et de progrès. C'est particulièrement vrai de l'innovation galénique qui doit s'insérer dans ce cadre pour répondre aux problèmes médicaux. La première grande innovation fut l'arrivée des hydrogels au début des années 2000, qui a permis d'augmenter significativement le temps de rémanence à la surface de l'œil et ainsi de diminuer la fréquence d'instillation (exemple du Geltim timolol plus®, gel bioadhésif à base de carbomère).
Depuis, l'engouement des galénistes pour l'ophtalmologie ne s'est pas arrêté avec de nombreuses innovations qui apportent à l'ophtalmologiste un éventail de produits avec des propriétés et fonctionnalités nouvelles. À titre d'exemple, la ciclosporine A a été formulée sous plus de 50 formes galéniques différentes, allant de la solution huileuse simple aux nanoémulsions, nanoparticules, liposomes, micelles, lentilles, inserts, microparticules, etc., pour arriver in fine à plusieurs formulations différentes commercialisées dans le monde.
Il existe donc une très grande variété de formes galéniques, chacune avec ses avantages, ses inconvénients et ses usages. Le galéniste choisira en fonction de la pathologie, de la posologie, de la durée d'action et des propriétés physicochimiques du principe actif la forme galénique la plus appropriée pour répondre au cahier des charges.
Des formulations spécifiques sont nécessaires pour permettre l'administration topique de molécules :
  • non solubles dans l'eau ou hydrophobes (pommades et toutes les nouvelles formes);
  • instables chimiquement (toutes les formulations ayant la capacité d'encapsuler le principe actif);
  • irritantes ou peu confortables;
  • possédant une faible absorption ou un faible temps de résidence à la surface de l'œil.
Dans ce chapitre, nous passerons en revue les principales formes galéniques et innovations disponibles ou en cours de développement avancé qui permettent de répondre à ces besoins. Nous survolerons plus rapidement les formes plus traditionnelles comme les solutions, les hydrogels ou les pommades, et nous détaillerons un peu plus les formes galéniques nouvelles.
Formulations standard pour traiter des pathologies du segment antérieur
Un collyre de base est constitué d'eau stérile, en général de l'eau pour préparations injectables (eau ppi), d'un agent osmotique, d'un ajusteur de pH (un tampon la plupart du temps) et d'un conservateur (dans le cas de flacon multidose) auxquels on peut ajouter, de façon optionnelle, des agents mouillants, des stabilisants, des chélateurs (par exemple EDTA) ou antioxydants, des agents viscosifiants.
Le choix des excipients est notamment contraint par la réglementation. Chaque excipient utilisé dans la composition ainsi que sa concentration doivent être justifiables et justifiés dans les dossiers technico-réglementaires. De plus, seuls sont utilisés des excipients listés dans une pharmacopée (par exemple Pharmacopée européenne, British Pharmacopoeia, US Pharmacopoeia, etc.), ou pour les États-Unis listés sur la FDA inactive ingredient database [1]. Cette liste est fondamentale car elle indique tous les excipients utilisés dans les spécialités approuvées aux États-Unis, classés par voie d'administration (orale, injectable, rectale, ophtalmique etc.), et surtout la concentration maximale dans le produit fini. Cela permet de savoir quel excipient choisir et à quelle concentration pour ne pas avoir de problème de sécurité d'emploi, ni de refus de la part des autorités de santé.
Un collyre doit être stérile, c'est-à-dire exempt de toute contamination microbienne et être conditionné dans un flacon qui garantisse dans le temps sa stérilité. Cette stérilité peut être assurée pour les formes liquides par différentes techniques de production : l'autoclave (stérilisation par la chaleur humide), la filtration stérilisante avec des filtres à 0,22 μm, ou bien par procédé totalement aseptique (les composants sont stérilisés chacun de leur côté et réunis en atmosphère parfaitement aseptique).
Pour les formes solides comme les inserts ophtalmiques, ou semi-solides comme les pommades, la stérilisation par rayonnements gamma ou bêta peut être envisagée.
La stérilité doit être maintenue même après ouverture du flacon. Donc, pour un flacon multidose, il faudra soit ajouter un conservateur, soit utiliser un flacon multidose sans conservateurs.
L'efficacité d'un conservateur est mesurée par un test décrit dans la monographie Pharmacopée européenne 5.1.3 [ 2] qui est assez exigeante puisque la concentration du conservateur doit être suffisante pour faire disparaître à 28 jours un inoculum bactérien de 10 6 micro-organismes/ml. Cela nécessite une concentration assez forte et induit les problèmes de tolérance sur le long terme [3], sans que l'on puisse passer outre ce prérequis. Pour remplacer les ammoniums quaternaires (chlorure de benzalkonium, cétrimide), on parle souvent de conservateurs moins délétères comme le polyquaternium (Travatan®, Duotrav®, Systane balance®), ou les donneurs d'oxygène comme le perborate de sodium (Xailin®) et le chlorite de sodium (Optive Fusion®), encore très peu répandus.
Il reste les flacons multidoses sans conservateurs : système ABAK®, système OSD® ou système Novelia® qui apportent un réel bénéfice en termes de sécurité pour le patient. Certains d'entre eux peuvent être utilisés jusqu'à 2 mois après ouverture.
Le pH et l'osmolarité sont assez importants pour le confort du patient, même si les larmes peuvent rapidement corriger un pH trop éloigné des valeurs physiologiques ou une osmolarité non iso-osmotique. Si le principe actif est stable chimiquement à un pH différent du pH physiologique, on tamponne très légèrement, ou alors on ajuste seulement le pH avec un acide ou une base de sorte que le collyre ne déclenche pas de gêne à l'instillation.
Selon la molécule, des agents mouillants tels des tensioactifs qui aident à solubiliser l'actif peuvent être ajoutés.
Finalement, pour augmenter le temps de résidence de la solution, des hydrogels augmentent la viscosité et, par effet bioadhésif sur la cornée, permettent d'améliorer la pénétration, d'augmenter la durée de l'effet ou de baisser la dose administrée (par exemple Timoptol® LP).
Un collyre doit être obligatoirement exempt de particules solides. Un test décrit par la Pharmacopée européenne doit être effectué en fin de production pour le prouver.
À noter deux autres approches assez classiques permettant d'améliorer l'efficacité des collyres :
  • la combinaison de principes actifs dans le même collyre : c'est la combinaison de deux molécules actives qui agissent sur deux cibles pharmacologiques différentes, par exemple le Cosidime® (timolol + dorzolamide) ou le Chibro-Cadron® (néomycine + dexaméthasone). Il existe de nombreux produits sur le marché avec deux principes actifs. En revanche, on notera qu'on ne trouve pas ou peu de combinaison avec plus de deux principes actifs. Cela s'explique par la complexité du design des études cliniques nécessaires pour justifier du choix des doses et montrer leur synergie [4], et des contraintes purement techniques (plus de deux principes actifs dans le même collyre);
  • le promédicament [5] : une modification chimique du principe actif donne de nouvelles propriétés physicochimiques et biologiques, soit une meilleure affinité pour la cornée, une meilleure stabilité chimique et une sécurité améliorée. Après administration, la promédicament va être clivé par une enzyme présente dans les larmes ou les tissus oculaires pour libérer la molécule active. Le latanoprost et le travoprost sont deux exemples de prostaglandine F modifiée pour améliorer la perméabilité à travers la cornée. Ces promédicaments sont clivés par les estérases pour libérer la molécule mère. Il existe une littérature abondante sur les différentes tentatives. Il y a plusieurs difficultés liées à cette approche : en modifiant une molécule existante, une nouvelle entité chimique est créée pour laquelle toute la toxicologie doit être refaite; le promédicament doit être stable dans le temps dans son flacon, mais se dégrader immédiatement au contact des tissus ou liquides du corps. En conséquence, si cette approche paraît séduisante, elle est techniquement difficile à mettre en œuvre.
Le tableau 11-1
Tableau 11-1
Liste des excipients le plus couramment utilisés dans les collyres (valeurs tirées de la FDA inactive ingredients database).
FonctionNom de l'excipientConcentration usuelle
TamponsTris
Citrate
Acétate
Phosphate
Borate
0,8 %
0,01 %
1 %
2,15 %
1 %
Agents osmotiquesNaCl
Glycérol
Mannitol
Propylène glycol
Chlorure de calcium
Chlorure de potassium
Sorbitol
0,9 %
2,25 %
3,3 %
1 %
0,02 %
0,22 %
6 %
Agents mouillants/solubilisants/stabilisantsOtoxynol-40
Polyéthylène glycol (300, 400, 8000)
Polyoxyl 15 hydroxystéarate
Polyoxyl 35 huile de ricin
Polyoxyl-40 huile de ricin hydrogénée
Polyoxyl 40 stéarate
Polysorbate 20
Polysorbate 80
Tyloxapol
Poloxamer 188
0,05 %
4 %
0,25 %
5 %
1 %
7 %
0,05 %
0,25 %
0,3 %
0,1 %
Agents viscosifiantsCarbomères
Carboxyméthylcellulose
Hydroxyéthylcellulose
Crospovidone (polyvinylpolypyrrolidone)
Dextran
Gomme guar
Hypromellose
Méthyl cellulose
Poloxamère 407
Alcool polyvinylique
Povidone
Gomme xanthane
0,4 %
0,5 %
1,2 %
3 %
20 %
0,2 %
0,6 %
0,5 %
0,2 %
1,4 %
2 %
0,6 %
ConservateursChlorure de benzalkonium
Chlorure de benzéthonium
Bromure de benzododécinium
Buthylparabène
Méthylparabène
Propylglycol
Chlorure de cétylpyridinium
Sodium bisulfite
0,02 %
0,02 %
0,01 %
0,02 %
0,05 %
0,02 %
0,01 %
0,1 %
fournit la liste des excipients le plus couramment utilisés dans les collyres.
Formulation de molécules hydrophobes
Pommades ophtalmiques
Les pommades ophtalmiques sont utilisées depuis très longtemps pour administrer les molécules lipophiles. Elles sont étalées sur la cornée ou en application palpébrale avec le doigt. Ce sont des préparations semi-solides stériles d'aspect homogène. On peut citer le Sterdex®, certaines pommades antibiotiques (chlorhydrate d'oxytétracycline + sulfate de polymyxine B, néomycine), la pommade de vitamine A. Comme pour les collyres, les pommades doivent contenir un conservateur si le tube est « multidose». Les excipients des pommades sont spécifiques de ces formulations, principalement des corps gras auxquels peuvent être ajouter des antioxydants ou des émollients (tableau 11-2
Tableau 11-2
Excipients des pommades ophtalmiques .
ExcipientsConcentration usuelle
Lanoline et ses dérivés3–10 %
Huile de vaseline et ses dérivésJusqu'à 97 %
Paraffine liquideJusqu'à 59 %
Huiles de siliconeConcentration pas disponible
). Cette forme galénique est moins utilisée et remplacée par d'autres formes galéniques comme les émulsions, mais elle est très utile pour sa simplicité et pour l'application palpébrale.
Suspensions
Les suspensions sont utilisées pour des principes actifs insolubles dans l'eau. Il s'agit ici de disperser sous forme de particules solides et de taille homogène la molécule active. Les excipients sont identiques aux solutions. Les suspensions sont stabilisées par des hydrogels ainsi que des tensioactifs. En conséquence, la taille des particules en suspension doit être maîtrisée à la fabrication et surtout au cours du temps, car il arrive très souvent que la cristallisation se poursuive au sein d'une solution, en particulier si elle est suffisamment concentrée et conservée à basse température. C'est une forme galénique encore assez utilisée, mais qui, petit à petit, devrait être remplacée par des émulsions ou des nanosuspensions, permettant une solubilisation des principes actifs lipophiles.
Le cas de la ciclosporine A
La formulation de la ciclosporine est emblématique de la formulation galénique pour l'ophtalmologie [6]. En effet, la ciclosporine A (CsA) est un peptide cyclique (1202,6 Da) découvert dans les années 1970. Son indication première était l'immunosuppression pour la prévention du rejet de greffe lors de transplantations d'organes avant d'être utilisée dans d'autres indications en particulier en ophtalmologie, où son utilisation a été proposée en 1981 pour lutter contre le rejet de greffe de cornée. Néanmoins, la survenue d'effets indésirables (néphrotoxicité, hypertension, anémie, etc.) par suite de l'administration orale de CsA a rendu indispensable le développement de formes galéniques adaptées à une administration oculaire (tableau 11-3
Tableau 11-3
Liste des différents collyres de ciclosporine A (CsA) commercialisés ou proches de l'AMM.
NomSociétéForme galéniqueDosage CsAIndicationDatePays
Optimmune®Intervet Inc. (Merck Animal Health)Pommade2,0 mg/ml Kératoconjonctivite sèche chronique et kératite superficielle chez le chien 1995Monde
Modusik-A Ofteno®Laborarorios SophiaSolution1,0 mg/ml Kératoconjonctivite sèche avec diminution fonctionnelle des glandes lacrymales 2003Mexique, Chili, Colombie, Pérou, Équateur
Restasis®AllerganÉmulsion anionique0,5 mg/ml Syndrome d'œil sec2003États-Unis, Canada et 33 autres pays (hors UE)
TJ Cyporin®Teajoon Pharma Co. LtdSolution0,5 mg/ml Inflammation oculaire associé à une kératoconjonctivite2003Corée du Sud
Papilock mini®Santen Pharmaceutcial Co. LtdSolution1,0 mg/ml Kératoconjonctivite vernale2005Japon
Ikervis®Santen Pharmaceutcial Co. LtdÉmulsion cationique1,0 mg/ml Syndrome d'œil sec (kératite sévère chez les adultes sans amélioration après traitement par des substituts lacrymaux) 2015EU
Verkazia®Santen Pharmaceutcial Co. LtdÉmulsion cationique1,0 mg/ml Kératoconjonctivite vernale sévère chez les enfants et adolescents2018EU
Cyporin®Aristopharma LtdÉmulsion0,5 mg/ml Inflammation oculaire associée à une kératoconjonctiviteNDAsie
Cyporin®Ibn Sina Pharmaceutical Industry Ltd.Émulsion0,5 mg/ml Inflammation oculaire associée à une kératoconjonctiviteNDBangladesh
Cequa®Sun Pharma GlobalSolution micellaire0,9 mg/ml Augmenter la production de larmes chez les patients atteints de kératoconjonctivite sèche 2018États-Unis
Ciclograft®Laboratoires KOLSolution huileuse2,0 mg/ml Rejet de greffe de cornée2020France (ATU nominative)
Cyclasol®NovaliqSolution non aqueuse 1,0 mg/ml Syndrome d'œil secN/A (essai clinique de phase III en cours) N/A
MC2-03 PAD®MC2 TherapeuticsDispersion de polyaphrons0,6 mg/ml Syndrome de Gougerot-SjögrenN/A (essai clinique de phase III en cours N/A
). Le premier produit ophtalmique commercialisé contenant de la CsA était Optimmune™, une pommade ophtalmique vétérinaire. À partir du début des années 2000, les premiers médicaments ophtalmiques pour la médecine humaine ont été commercialisés. Il s'agissait principalement de solutions micellaires dans lesquelles la CsA était solubilisée grâce à l'utilisation de surfactants (polysorbate 80, polyoxyl-40 stéarate) et d'éthanol. Le principal inconvénient de ces solutions de CsA est leur tolérance lors de traitements chroniques liée à la présence des surfactants. De plus, ces solutions nécessitent des administrations répétées (2 à 3 fois par jour) pour garantir une efficacité suffisante. Certaines des solutions contiennent également des polymères cellulosiques qui augmentent légèrement leur viscosité afin d'augmenter le temps de résidence cornéenne. Récemment, une nouvelle génération de solutions de ciclosporine a été développée. Il s'agit de solutions non aqueuses ou huileuses dans lesquelles la CsA est directement solubilisée dans le véhicule non aqueux sans aide de surfactant. Il s'agit notamment du produit Ciclograft®, mis à disposition en France sous autorisation d'accès compassionnel pour la prévention du rejet de greffe de cornée chez les patients à risque de rejet en association (simultanée ou non) avec les corticoïdes, dans les situations à risque en cas de difficulté d'accès aux alternatives disponibles ou adaptées. Cette formulation dans laquelle la CsA est solubilisée dans des triglycérides à chaînes moyennes est dérivée des préparations hospitalières qui utilisent une solution de poudre de ciclosporine (matière première pharmaceutique) dans un véhicule approprié (huile de ricin, huile d'olive, etc.) pour atteindre la concentration en CsA souhaitée. L'avantage de Ciclograft® est d'avoir un produit prêt à l'emploi et fabriqué industriellement selon les standards de l'industrie pharmaceutique (BPF). Par ailleurs, Novaliq finalise actuellement le développement de Cyclasol®, une solution sans conservateurs de CsA composée d'alcanes semi-fluorés (essai clinique de phase III en cours) de nature à améliorer la biodisponibilité oculaire, à augmenter le temps de résidence cornéenne tout en réduisant le volume administré (10 μl versus 30-50 μl pour les solutions aqueuses). Des émulsions huile dans eau (h/e) ont également été mises à disposition des praticiens à partir de 2003, avec la commercialisation de Restasis® aux États-Unis. Dans ce cas, la ciclosporine est solubilisée dans une huile (huile de ricin, triglycérides à chaînes moyennes), puis cette phase huileuse est ensuite dispersée de manière homogène afin d'obtenir des gouttelettes d'huiles nanométriques. Depuis 2015 et 2018, deux émulsions cationiques (Ikervis® et Verkazia®) sont commercialisées en Europe pour le traitement du syndrome d'œil sec sévère et des kératoconjonctivites vernales respectivement. La différence principale avec les émulsions anioniques comme Restasis® réside dans les surfactants. Ikervis® et Verkazia® sont fondés sur la technologie d'émulsions cationiques Novasorb® qui augmentent le temps de résidence et améliorent la biodisponibilité par rapport aux émulsions anioniques. Cet effet est supposé dû aux interactions électrostatiques entre les gouttelettes d'huile avec une charge de surface positive et le mucus de l'épithélium cornéen chargé négativement. L'avantage principal des émulsions est leur faculté de s'étaler instantanément sur la cornée. De plus, il est également possible que les émulsions participent à la restauration de la couche lipidique du film lacrymal et ainsi limitent l'évaporation du film lacrymal. Cette restauration du film lipidique pourrait également permettre une délivrance prolongée de CsA, ce dernier servant de réservoir de CsA. En 2018, Cequa®, une solution micellaire de CsA, a obtenu une AMM aux États-Unis pour augmenter la production de larmes chez les patients souffrant d'une maladie de l'œil sec. Ces micelles sont fondées sur un réarrangement de tensioactifs huile de ricin pegylé (Cremophor RH40®), Octoxynol-40® et un agent stabilisant la polyvinylpyrrolidone (povidone). Plusieurs essais cliniques ont prouvé l'efficacité par rapport au véhicule et permis sa commercialisation. Parallèlement à ces émulsions de CsA, MC2 Therapeutics développe une formulation ophtalmique de CsA fondée sur une dispersion de polyaphrons. À la différence des émulsions, la phase huileuse dispersée représente jusqu'à 90 à 95 % de la composition, avec une quantité de surfactant typiquement inférieure à 0,5 % ce qui limite les effets indésirables associés aux surfactants. Le produit MC2-03 PAD™ correspond à une dispersion de polyaphrons dans un véhicule aqueux.
Systèmes nanoparticulaires
Les suspensions de nanoparticules sont décrites et étudiées depuis plus 30 ans [ 7]. Le principe est d'inclure un principe actif dans des particules solides composées de différents matériaux de taille nanométrique (50 à 200 nanomètres en général). Du fait de leur petite taille, les nanoparticules ont des propriétés physicochimiques et biologiques particulières, par exemple une meilleure stabilité chimique, une pénétration augmentée dans les tissus et les cellules, une tolérance locale améliorée, etc.
De plus, leur surface peut être fonctionnalisée avec de nombreux types d'excipient, leur procurant de nouvelles propriétés : meilleur passage à travers la cornée, adhésion ou non au mucus, temps de rémanence augmenté, ciblage de cellules, etc. Le formulateur peut ainsi faire varier un grand nombre de paramètres pour modifier le comportement de ces particules. Il est aussi possible de rajouter d'autres excipients dans le solvant de suspension, tels que des hydrogels, afin d'augmenter encore le temps de rémanence. Tout cela donne une forme galénique à très fort potentiel et extrêmement versatile (fig. 11-1
Fig. 11-1
Nanoparticules polymériques.
De très nombreux facteurs peuvent modifier leur comportement physique et biologique.
).
Malgré de nombreuses et solides preuves de concept positives chez l'animal, seul un collyre nanoparticulaire a pu atteindre la mise sur le marché aux États-Unis, l'Eysuvis®. Il s'agit d'une technologie proposée par Justin Hanes (Wilmer Eye Institute, hôpital Johns Hopkins à Baltimore) [8]. Ces nanoparticules particulières ont la propriété de traverser la couche mucinique de la surface de l'œil sans rester bloquées pour atteindre la cornée et ainsi délivrer le principe actif. Dans une étude pharmacocinétique chez le lapin (dose unique), les concentrations cornéennes en lotéprednol étabonate étaient 3,6 fois supérieures avec les nanoparticules d'Eysuvis® chargées à 0,4 % en comparaison au Lotémax® dont la concentration est de 0,5 % [9]. L'Eysuvis® a prouvé son efficacité dans une étude sur 2900 patients souffrant d'une maladie de de l'œil sec versus placebo, justifiant l'octroi d'une AMM par la FDA en octobre 2020 aux États-Unis.
L'absence d'autre médicament mettant en œuvre la technologie des nanoparticules s'explique principalement par la complexité de fabrication à grande échelle de cette forme galénique, impliquant parfois l'utilisation de solvants organiques pour solubiliser les polymères, mais aussi une reproductibilité difficile d'un lot à l'autre.
Liposomes
Les liposomes sont des vésicules simples constituées d'une bicouche externe de lipides entourant un noyau central aqueux. Grâce à cette structure unique, ils peuvent piéger les médicaments hydrophiles ou hydrophobes. Outre cet avantage particulier, les liposomes sont également biocompatibles, biodégradables et non toxiques. Ils sont suffisamment flexibles pour permettre leur synthèse en différentes tailles et peuvent être formulés sous forme de gouttes ophtalmiques, de gels et de pommades pour une administration topique. Cependant, les liposomes classiques présentent l'inconvénient d'être instables, de s'agréger et d'être sensibles à la phagocytose. De nouveaux types de liposomes ont été développés avec une surface modifiée (fig. 11-2
Fig. 11-2
Représentation schématique des liposomes conventionnels et de nouvelle génération.
a. Liposomes conventionnels avec une enveloppe lipidique bicouche externe et un noyau aqueux interne. b. Liposomes furtifs protégés par des chaînes polymères fixées sur la surface externe. c. Immunoliposomes équipés d'anticorps pour l'administration ciblée de médicaments. d. Immunoliposomes furtifs portant des anticorps soit à la surface des liposomes, soit fixés à l'extrémité des chaînes polymères. e. Représentation de liposomes multifonctionnels avec un polymère protecteur pour conférer des propriétés furtives; des anticorps pour l'administration ciblée de médicaments; des lipides sensibles au pH pour améliorer l'administration intracellulaire de médicaments (–); l'incorporation de lipides cationiques pour l'administration de gènes (+); la fixation de peptides pénétrant dans les cellules pour améliorer la pénétration des cellules (P). A : médicament soluble dans l'eau; L : médicament soluble dans les lipides.
Source : Cyrille Martinet.
), des tailles variables permettant d'améliorer la pénétration dans les cellules, le temps de rémanence ainsi que le ciblage de la cornée [ 10]. De nombreux travaux ont évalué l'administration topique de liposomes chargés en aciclovir, ganciclovir, gentamicine, ciprofloxacine, amphotéricine B, fluconazole, diclofénac, ciclosporine, latanoprost, etc.
Néanmoins, il n'existe pas à ce jour de spécialité commercialisée sous forme liposomale. On peut citer l'utilisation en collyre, de longue date, de l'Ambisome®, liposomes d'amphotéricine B pour perfusion, utilisé par voie topique hors AMM pour le traitement des infections fongiques de la cornée [ 11]. Il existe aussi le spray oculaire Vyséo®, dispositif médical, utilisant des liposomes pour soulager les yeux secs ou irrités, mais sans principe actif. Il se vaporise sur les paupières fermées. Il permet de soulager les yeux grâce aux liposomes qui atteignent le film lacrymal par le bord des paupières à chaque clignement des yeux.
Il est surprenant de voir qu'aucun médicament à AMM fondé sur les liposomes n'ait été autorisé. Il n'y a pourtant pas beaucoup d'inconvénients avec cette technologie. Y a-t-il des problèmes de production, de stérilité, de toxicité, de stabilité?
Cyclodextrines
Les cyclodextrines sont des oligosaccharides formant une « molécule cage» qui ont la propriété d'encapsuler les molécules peu hydrosolubles grâce à une cavité hydrophobe. Cette propriété permet de solubiliser un grand nombre de molécules dans l'eau; cela permet aussi de masquer le caractère irritant d'une molécule.
Une littérature très abondante a décrit les nombreux essais de formulation et d'efficacité de ces complexes cyclodextrine-principe actif. Les complexes augmentent la solubilité du médicament dans le liquide lacrymal et améliorent la biodisponibilité dans les tissus oculaires. Les complexes [principe actif-cyclodextrine] pénètrent également dans la couche muqueuse et assurent une libération prolongée du médicament. Par conséquent, la perméation et la biodisponibilité du médicament dans les tissus oculaires sont accrues.
Un certain nombre de spécialités utilisant des cyclodextrines sont déjà sur le marché, telles que le Voltaren Ophtha CD® (en Suisse), qui contient de l'hydroxypropyl gamma-cyclodextrine. En France, l'Indocollyre®, l'Indotiotic®, le Levofree® et l'Allergiflash®, contenant tous les quatre de l'hydroxypropyl bêta-cyclodextrine, sont disponibles. Ces spécialités sont utilisées en routine sans effets indésirables liés à cet excipients.
Thorstein Loftsson, professeur de pharmacie galénique à l'Université d'Islande, a créé la société Oculis, fondée en Suisse, pour développer des collyres à base de cyclodextrines. Le premier candidat médicament y est un complexe cyclodextrine-dexaméthasone qui permet de traverser le segment antérieur pour traiter l'œdème maculaire diabétique [ 12]. Des résultats de phase II (133 patients) ont montré une efficacité et une sécurité dans cette indication. Le deuxième médicament à l'étude résulte de l'encapsulation d'un fragment d'anticorps monoclonal indiqué pour l'uvéite et l'œil sec (de phase II).
À l'hôpital, les ophtalmologistes utilisent pour le traitement des infections fongiques de la surface de l'œil des préparations hospitalières de voriconazole à 10 mg/ml (1 %). Ces préparations sont réalisées par dilution du VFend® injectable (voriconazole 200 mg à reconstituer) et présentées en collyres. Le voriconazole étant insoluble dans l'eau, une bêta-cyclodextrine est présente dans la spécialité.
Si les cyclodextrines ne sont que peu utilisées, c'est en raison de leur coût élevé pour un collyre standard. En revanche, pour un produit à plus forte valeur ajoutée comme pour le traitement de l'œdème maculaire diabétique, un surcoût pourrait être acceptable.
Formes ophtalmiques pour la libération prolongée de molécules dans le segment antérieur
Afin de prolonger la durée d'action des formes topiques, des formes solides ont été imaginées pour créer un effet retard : lentilles de contact chargées en principe actif, inserts ophtalmiques, minidisques adhésifs à la surface de l'œil, implants intracamérulaires pour les pathologies du segment antérieur. Nous nous focaliserons sur les inserts et implants intracamérulaires, puisque seules ces deux formes galéniques ont pu parvenir au stade de la mise sur le marché.
Inserts
Une forme galénique particulièrement prometteuse mais oubliée en raison de quelques échecs est l'insert ophtalmique.
Il s'agit ici d'une forme solide qui est placée dans le cul-de-sac conjonctival (fig. 11-3
Fig. 11-3
Insert ophtalmique placé dans le cul-de-sac conjonctival, ici l'Ocusert®, anneau de silicone chargé en pilocarpine.
) pouvant libérer pendant plusieurs heures ou jours un ou plusieurs principes actifs. Ce solide peut être obtenu de différentes façons : par compression comme un comprimé conventionnel, par extrusion, par moulage etc. Une longue histoire entoure ces inserts avec la mise sur le marché en 1974 de l'Ocusert®, un insert de silicone chargé en pilocarpine. Cet insert a été retiré du marché car de nouvelles molécules ont remplacé la pilocarpine et l'insert était difficile à appliquer. Plus tard, en 1980, le Lacrisert® a été autorisé pour soulager l'œil sec. Il s'agit ici d'un insert d'hydroxypropyl cellulose, un dérivé hydrophile de cellulose, fabriqué par extrusion. Il a été retiré du marché en 2010 en raison d'un coût trop élevé et de problèmes de tolérance locale.
Mis sur le marché en 2000, le Mydriasert® est le dernier insert ophtalmique vendu en Europe. Ce comprimé, contenant une combinaison de tropicamide et de phényléphrine pour la mydriase préopératoire, est un produit très utilisé et très apprécié en dépit de deux limitations : l'insert n'est pas soluble, il doit être retiré; et une insertion à la pince est parfois difficile. Néanmoins, ce médicament montre que cette approche galénique peut être acceptable et apporter à l'ophtalmologiste ainsi qu'au patient un réel bénéfice. Malgré des premiers échecs ou succès relatifs, le potentiel de cette forme galénique est considérable : administration unique pour plusieurs heures ou jours, résolution des problèmes liés à la solubilité du principe actif dans l'eau ou au problème de stabilité chimique et amélioration de l'observance.
Implants intracamérulaires – exemple du Durysta®
Les maladies du segment antérieur peuvent être traitées par des formes injectables localement pour la libération prolongée dans le segment antérieur. Cette approche est particulièrement intéressante dans le cas de maladies de longue durée où l'observance diminue avec le temps, comme pour le glaucome. C'est dans ce cadre que le Durysta®, un implant intracamérulaire de bimatoprost développé par Allergan, a reçu son AMM pour le traitement du glaucome à angle ouvert et l'hypertension oculaire en mars 2020 aux États-Unis [ 13]. Il s'agit d'un cylindre constitué d'un mélange de PLGA – poly (D,L-lactide-co-glycolide) – et de PLA – poly (D,L-lactide) et polyéthylène glycol 3350 contenant 10 μg de bimatoprost. L'implant a été conçu pour générer une libération prolongée, stable et non pulsatile. Lors des essais cliniques, une baisse de la pression intraoculaire a pu être observée pendant 15 semaines; peu d'effets secondaires ont été relevés, faisant de cette approche une bonne alternative pour les patients ayant des problèmes d'administration. Pour le moment, seule une injection est autorisée, mais des études complémentaires sont en cours pour évaluer les effets à long terme d'une répétition d'injections.
Autres innovations galéniques
Il existe d'autres innovations galéniques ou technologiques plus anecdotiques, mais qui apportent à l'ophtalmologiste de nouvelles possibilités.
Iontophorèse pour le traitement du kératocône
Iontofor-CXL® permet l'administration de la solution de riboflavine à 0,1 % (Ricrolin®) pour le traitement du kératocône. Il s'agit ici d'un dispositif d'iontophorèse qui consiste à appliquer une électrode sur la cornée qui crée un champ électrique de faible intensité pour faire pénétrer la riboflavine dans la cornée. Dans un second temps, la cornée est irradiée aux UV-A. La riboflavine, sous l'effet de cette lumière, génère une réticulation du collagène de la cornée. Cette procédure permet de rigidifier et de renforcer la cornée afin de ralentir ou d'arrêter la progression du kératocône. L'intérêt de ce dispositif est de permettre la pénétration stromale de la riboflavine sans recours au retrait de l'épithélium, réduisant ainsi les douleurs induites par cette procédure.
Formule autoconservée
Une autre innovation galénique originale est le concept de la solution autoconservée . L'effet délétère pour l'œil des conservateurs antimicrobiens n'est plus à démontrer pour les traitements de longue durée (voir chapitre 6.3 ). Les monodoses ou flacons sans conservateurs ayant un coût non négligeable, une formule a été créée sans ammoniums quaternaires, mais avec un mélange d'excipients relativement neutres, qui, tous ensemble, jouent le rôle d'un conservateur (chlorure de zinc, acide borique, propylène glycol, sorbitol). Ce mélange est suffisant pour répondre à la monographie de la Pharmacopée américaine sur l'efficacité des conservateurs et est commercialisé depuis de nombreuses années sous la marque Travatan Z®.
Conclusion et perspectives
Ce bref survol des technologies disponibles montre à quel point la galénique est importante et nécessaire pour traiter le plus grand nombre de patients dans les meilleures conditions.
Néanmoins, ce chapitre met en évidence les besoins encore nombreux en ophtalmologie et le travail de développement des académiques et laboratoires pharmaceutiques nécessaire pour encore améliorer l'existant et inventer de nouveaux systèmes de délivrance. L'exemple de la ciclosporine A avec ses dizaines de tentatives de formulation en est l'illustration.
Le besoin majeur reste les formes retard, permettant de diminuer la fréquence d'instillation des collyres. À ce jour, les formes solides sont les plus prometteuses, comme les inserts et apparentés (minidisque bioadhésifs, lentilles) ou les implants. Pour ces produits, une matrice sert de réservoir en principe actif et permet facilement de contrôler la libération. Nous n'avons pu citer que deux produits à ce jour, le Mydriasert® et le Durysta®, laissant entrevoir une large place pour de nouveaux produits.
Des collyres fondés sur les nanotechnologies (nanoparticules, micelles, liposomes) pourraient aussi apporter leur contribution comme l'Eysuvis®, ou l'Ambisome®. Seulement, la fréquence d'administration reste quotidienne. Idéalement, au lieu d'une administration par jour, il faudrait une instillation hebdomadaire. Un schéma plus compliqué, comme un jour sur deux, entraînerait trop d'oublis et une mauvaise observance. Ces approches sont encore loin de répondre à ce cahier des charges.
Par ailleurs, la réduction du volume des gouttes ophtalmiques est un facteur rarement considéré lors du développement, alors que le bénéfice apporté par l'administration de gouttes de faible volume peut être particulièrement significatif. Il est généralement admis que le volume de liquide accommodable par la surface de l'œil est d'environ 30 μl, incluant 7 à 10 μl de larmes. Durant le clignement, ce volume précornéen diminue à environ 10 μl, et tout volume en excès est éliminé par drainage nasolacrymal. De plus, la vitesse de drainage nasolacrymal est proportionnelle au volume des gouttes administrées. Une réduction du volume des gouttes permettrait ainsi de limiter l'élimination précornéenne et de maximiser l'absorption cornéenne. Cela a été largement démontré dans la littérature. De plus, l'administration d'un faible volume améliore également le confort pour le patient en limitant le clignement réflexe et le flou visuel résultant de l'augmentation du volume lacrymal et du larmoiement. C'est un axe de recherche à creuser en galénique et pour le développement de dispositifs d'instillation.
Il existe aussi un besoin de formulations innovantes pour l'administration des produits biotechnologiques, telles que les protéines, l'ADN/ARN, les peptides, etc. Dans l'avenir, un nombre croissant de médicaments seront fondés sur ces molécules et nécessiteront des formes galéniques particulières. Avec des principes actifs aussi coûteux, il est difficilement concevable que plus de 80 % de la dose administrée soit éliminée par le tractus nasolacrymal. Il devient donc urgent d'imaginer des formes galéniques optimisées afin d'administrer de très petits volumes concentrés en protéines et d'améliorer le temps de rémanence à la surface de l'œil. Les formes nanoparticulaires pourraient avoir un rôle à jouer ici.
Il reste encore de nombreux «chantiers» pour les galénistes spécialisés en ophtalmologie et plus spécifiquement pour le segment antérieur pour réussir à améliorer les produits existants et à inventer de nouveaux procédés permettant d'administrer les médicaments avec de belles perspectives d'innovation.
Bibliographie
Les références peuvent être consultées en ligne à l’adresse suivante : http://www.em-consulte.com/e-complement/477020.
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