Tabagisme passif : des effets sur la choroide dès l’enfance.

Le tabagisme, problème majeur de santé publique, est associé à de nombreuses maladies oculaires, parmi lesquelles la DMLA et la cataracte au premier plan. Un lien entre le tabagisme passif chez l’enfant et le développement oculaire n’avait encore jamais été exploré avant Yuan et al. et la « Hong Kong Children Eye Study ».
En préambule à cette étude, les auteurs ont postulé que le tabagisme passif pouvait avoir des conséquences sur la vascularisation choroïdienne. Afin de vérifier cette hypothèse, une investigation clinique a été menée dans une université de Hong Kong de janvier 2016 à juillet 2017. Au total, 1720 enfants âgés de 6 à 8 ans ont été inclus dans cette étude. Seuls les yeux droits ont été étudiés, après un examen complet, incluant réfraction sous cycloplégie, mesure de la longueur axiale, calcul du rapport poids/taille (BMI ; body mass index) et réalisation d’une imagerie rétino-choroïdienne en OCT Swept Source. Les acquisitions OCT étaient alors segmentées par un algorithme de segmentation automatique. Un questionnaire déclaratif permettait d’estimer l’importance de l’exposition au tabagisme des enfants, sur la base du nombre de parents qui fumaient à la maison ainsi que le nombre de cigarettes fumées par chacun.

Sur les 1720 yeux inclus, 320 examens en OCT étaient de qualité insuffisante pour l’analyse. Aussi l’échantillon finalement étudié comportait 1400 yeux répartis en 941 contrôles non-fumeur (67,2%) et 459 exposés à un tabagisme passif (32,8%). Les caractéristiques démographiques étaient comparables dans les deux groupes et les auteurs retrouvaient la classique corrélation négative entre la longueur axiale (LA) et l’épaisseur choroïdienne, à savoir que 1mm de LA supplémentaire était associée à 18,24 µm de réduction d’épaisseur choroïdienne. Les auteurs mettaient en évidence, dans le groupe des enfants exposés au tabac, une réduction significative de 6 à 8 µm d’épaisseur choroïdienne dans les secteurs rétro-fovéolaire, inférieur interne, inférieur externe, temporaux interne et externe, en ajustant les données pour l’âge, le BMI, la longueur axiale et le poids de naissance. Ces données étaient inchangées en excluant les 14 enfants de l’étude exposés à un tabagisme in utero. Les auteurs mettaient d’ailleurs même en évidence un effet dose-dépendant, avec une épaisseur choroïdienne d’autant plus faible que le nombre de parents fumeurs au foyer familial était important, et  le nombre de cigarettes consumées à la maison.
Pour la première fois, une étude souligne l’importance probable du tabagisme passif sur le développement de la vascularisation choroïdienne infantile. D’un point de vue de la méthodologie, il est établi que les populations de fumeurs ont, de nos jours, un niveau socio-culturel moins élevé 1et on pourrait regretter que certains facteurs potentiellement confondant notamment nutritionnels ou liés aux habitudes sportives n’aient pas été explorés via le questionnaire. Cependant ces données sont bien entendues à prendre en considération afin de renforcer les mesures de santé publique qui tendent à limiter au maximum l’exposition au tabac des plus jeunes.