Un nouveau critère pour dépister les patients a risque de régression après chirurgie réfractive

Chirurgie réfractive

Parmi les différentes méthodes de chirurgie réfractive de la myopie, la PRK (kératectomie photoréfractive), le LASIK (keratomileusis in situ assisté par laser) et l’epi-LASIK (pour epipolis-LASIK, ou LASIK superficiel) sont les techniques les plus fréquemment utilisées en raison de leur efficacité et de leur faible nombre de complications majeures. Il peut cependant y avoir une réduction secondaire de l’efficacité de la correction myopique, phénomène appelé régression, qui semble du (au moins en partie) à une hyperplasie épithéliale cornéenne centrale survenant dans un second temps. Il s’agirait en fait d’un excès d’un mécanisme normal de compensation épithéliale des irrégularités de surface induites par la perte stromale liée au principe même de la chirurgie (réduction localisée de l’épaisseur du stroma). 
Les dernières générations d’OCT de segment antérieur permettent de réaliser une cartographie très précise de l’épaisseur cornéenne, ce qui autorise un suivi de la croissance épithéliale post-chirurgicale. Sachant que des études antérieures avaient montré que cette croissance n’est pas seulement centrale, mais aussi périphérique, l’hypothèse de travail de l’équipe de Kinoshita était que l’épaisseur de l’épithélium cornéen (EEC) préopératoire influe sur l’erreur réfractive (ER) post-opératoire tardive, c’est-à-dire la différence entre la réfraction obtenue après la chirurgie et la réfraction qui était visée. 
L’EEC a été mesurée de 5 façons : par la valeur dans les zones centrales, paracentrales, et médio-périphériques (6 mm de diamètre maximal) et aussi par la différence entre les zones centrales et paracentrales, ou entre les zones centrales et médio-périphériques.

L’analyse de la corrélation entre ces 5 valeurs et l’ER postopératoire a montré que c’est bien la différence entre la zone centrale et les zones médio-périphériques qui est liée statistiquement à l’erreur réfractive, quelle que soit la période postopératoire pendant laquelle cette erreur réfractive était mesurée. 
Cette étude basée sur une méthode très moderne de la mesure de l’épaisseur cornéenne ne retrouve pas les mêmes résultats que plusieurs publications de références en la matière. Ainsi, Gauthier et al. avaient estimé qu’une augmentation de l’EEC centrale de 18 microns induit une modification réfractive de 1 dioptrie, alors que la présente étude ne retrouve qu’une modification de 0,28 dioptries pour la même variation épithéliale. De même, alors qu’il est classiquement admis que la PRK induit une cicatrisation plus agressive que le LASIK, la présente étude ne retrouvait aucune différence significative entre le LASIK et l'épi-LASIK (dont la procédure d’ablation de surface est similaire à celle de la PRK), y compris en termes de haze mais les auteurs commentent peu ce résultat surprenant. Les auteurs reconnaissent qu’une des limites de l’étude revient à l’OCT de segment antérieur utilisé, à savoir une zone de mesure limitée aux 6 mm centraux. Il n’est pas exclu que des informations plus précises sur le rôle du remodelage épithélial dans le phénomène de régression pourraient encore être obtenues si l’ensemble de la surface couverte par l’épithélium cornéen pouvait être analysée d’un seul tenant. En attendant que ce phénomène soit mieux compris, et donc mieux prédictible, il y a fort à parier que ces nouveaux paramètres seront rapidement incorporés dans les algorithmes décisionnels utilisés par les chirurgiens pour optimiser la prise en charge de leur patients myopes. 
 


Cho Y, Hieda O, Wakimasu K, Yamamura K, Yamasaki T, Nakamura Y, Sotozono C, AND Kinoshita S Multiple linear regression analysis of the impact of corneal epithelial thickness on refractive error post corneal refractive surgery. Am J Ophthalmol 2019;207:326–332 


Reviewer : Marc Labetoulle