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040 - Histoire naturelle de l’atteinte cornéenne par insuffisance limbique dans le syndrome EEC (ectrodactylie-dysplasie ectodermique-fentes orofaciales)

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Orateurs :
Dr Gilles MARTIN
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Résumé

But

Le syndrome EEC, associant ectrodactylie, dysplasie ectodermique et fentes orofaciales, est une maladie génétique autosomique dominante, due à une mutation du gène p63. Des ulcérations cornéennes récidivantes, allant jusqu’à la perforation, ont été décrites, mais leur physiopathologie est discutée. 

Observation

Nous rapportons les cas de six patients atteints d’un syndrome EEC, âgés de 3, 33, 45, 52, 56 et 61 ans. L’objectif est de rapporter l’histoire clinique de ces patients, afin de décrire l’évolution de l’atteinte cornéenne, ainsi que leur réponse à différentes thérapeutiques. 

Cas clinique

Les cas 1 et 2 sont un homme de 33 ans et son fils de 3 ans, respectivement. Le cas 1 présente une kératite ponctuée superficielle (KPS) Oxford 1 sur syndrome sec avec une absence de glandes de meibomius, et une insuffisance limbique bilatérale. Il présente par ailleurs un kératocone bilatéral. Son acuité visuelle a pu être corrigée à 12/10 ODG par lentilles sclérales. Le cas 2 présente une insuffisance limbique inférieure et une KPS Oxford 3 à droite, traitée par agents mouillants. Les cas 3 et 4 sont un homme de 45 ans et sa sœur aînée de 56 ans. Tout deux sont monophtalmes de l’œil gauche depuis environ 25 ans. Le cas 3 avait bénéficié d’une kératopathie transfixiante à l’âge de 18 ans, avec rejet chronique et ulcères récidivants traités par greffes de membrane amniotique itératives, ayant abouti à une conjonctivalisation totale du greffon. Dans le cas 4, la mise en place d’une kératoprothèse à droite avait également échoué. Cette patiente présentait à gauche une insuffisance limbique sur 360 degrès, ainsi qu’un ulcère cornéen persistant, pour lequel un traitement par sérum autologue puis par Cacicol® n’ont pas permis une cicatrisation complète. Des greffes de membrane amniotique ne permettent qu’une cicatrisation temporaire, une lentille sclérale a permis la stabilisation de l’épithélium cornéen. Le cas 3 présente une insuffisance limbique supérieure, sans ulcère, permettant une correction par lentilles sclérales lui donnant une acuité visuelle de 7/10. Le cas 5 est un patient de 52 ans avec un ulcère cornéen persistant de l’œil droit et une insuffisance limbique sur 360 degrès, chez qui l’utilisation de Cacicol® permet la cicatrisation complète à chaque récidive (N=3, cicatrisation < 15 jours). Le cas 6 est un patient de 61 ans, monophtalme de l’œil gauche. Son œil voyant présentait une insuffisance limbique supérieure et inférieure avec pannus néovascularisé, ainsi qu’un ulcère creusant. Le Cacicol®, puis le sérum autologue n’ont pas permis la cicatrisation. Le patient a subit 12 greffes de membrane amniotique et une greffe «bouchon» à chaud suite à une perforation. L’introduction de NGF-recombinant collyre a permis l’obtention d’une cicatrisation en six semaines. Devant la présence d’un descemetocele et l’absence de récupération visuelle, une kératoprothèse de Boston a été finalement réalisée.

Discussion

Alors que certains auteurs attribuent les ulcères cornéens du syndrome EEC à un syndrome sec sévère, l’histoire clinique de nos patients suggère que ces complications sont liées à l’insuffisance limbique, s’aggravant elle-même dans le temps suite à la survenue d’ulcèrations répétées. 

Conclusion

La mutation p63 du syndrome EEC est responsable d’une insuffisance limbique d’aggravation progressive, ne permettant plus à terme un renouvellement harmonieux de l’épithélium cornéen ni la bonne cicatrisation d’ulcères cornéens spontanés.