Name
Episclérite bilatérale révélant une granulomatose avec polyangéite

Merci de vous identifier pour accéder à ce contenu.

Je me connecte  


Orateurs :
Dr Nattie LECOLIER
Auteurs :
Dr Nattie LECOLIER
Dr Marie Laure LE LEZ
Stéphanie Jobard
pierre-jean pisella
Raoul Khanna
Tags :
Résumé

But

La granulomatose avec polyangéite est une vascularite auto-immune qui touche les vaisseaux de petit calibre. Bien que rare, elle peut conduire au décès du patient principalement par défaillance rénale ou respiratoire en l’absence de traitement. L'ophtalmologiste est le praticien de premier recours en cas de manifestation oculaire inaugurale et joue un rôle important dans le diagnostic, facilité par la présence d’anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles de spécificité anti-protéinase-3 dans 90% des cas. Nous rapportons le cas d’un patient ayant présenté une rougeur oculaire bilatérale diagnostiquée à tort comme une conjonctivite, qui était en réalité une épisclérite bilatérale révélatrice d'une granulomatose avec polyangéite.

Observation

Il s’agit d’un homme de 27 ans, sans antécédents hormis un terrain allergique, ayant consulté pour une rougeur oculaire bilatérale avec photophobie, prurit et sensation de corps étranger, évoluant depuis deux mois. Des traitements successifs par collyres anti-inflammatoires n’ont entraîné qu’une amélioration transitoire des symptômes.

Cas clinique

L’examen retrouvait une hyperhémie conjonctivale bilatérale, un break-up-time diminué et des papilles sous palpébrales, évocateurs d'une conjonctivite virale. Après quinze jours de traitement par lavages au sérum physiologique, le patient rapportait une photophobie intense accompagnée de céphalées. Cliniquement il n’y avait pas de kératite, et le test à la phényléphrine 10% était positif, faisant retenir le diagnostic d’épisclérite bilatérale avec introduction d’un collyre anti-inflammatoire non stéroïdien. Devant l’absence d’amélioration un mois plus tard, associée à une asthénie et à des douleurs articulaires, un bilan inflammatoire et auto-immun est réalisé en collaboration avec les internistes, concluant au diagnostic de granulomatose avec polyangéite. Un traitement par rituximab et corticothérapie orale a permis la rémission complète des symptômes, avec des épisodes de récidive de la rougeur oculaire lors de la décroissance de la corticothérapie. Un an plus tard, l'examen ophtalmologique sera normal sous cinq milligrammes de prednisone par jour et injections semestrielles de rituximab.

Discussion

L’épisclérite est une affection le plus souvent bénigne et idiopathique ne nécessitant pas de bilan particulier. Toutefois, en cas d’évolution inhabituelle, il faut penser à rechercher des signes généraux évocateurs d'une maladie systémique sous-jacente. Dans la littérature, l'atteinte ophtalmologique dans la granulomatose avec polyangéite est présente dans 29 à 57% des cas, et peut concerner tous les segments de l’oeil et de l’orbite. Ses manifestations les plus fréquentes divergent selon les auteurs entre rougeur oculaire et atteinte orbitaire inflammatoire dite "pseudo-tumorale", toutes pouvant être source de douleurs et de baisse d'acuité visuelle. L’atteinte conjonctivale est par ailleurs associée à un risque de sténose laryngée et de détresse respiratoire. 

Conclusion

Devant une rougeur oculaire bilatérale, il faut se méfier d’une photophobie majeure, discordante avec le diagnostic de conjonctivite en l’absence de kératite. L'œil peut être le siège de la manifestation inaugurale et unique d’une granulomatose avec polyangéite. La collaboration avec les médecins internistes est indispensable afin d’introduire au plus tôt un traitement destiné à préserver le pronostic non seulement visuel, mais également vital du patient.