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Une hyalite révélatrice d’un lymphome primitif oculaire et cérébral : à propos d’un cas

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Auteurs :
Dr Charlotte JAILLARD
Dr Julien BOULEAU
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Résumé

But

Les condensations vitréennes ont des causes variées et sont parfois idiopathiques. Certaines caractéristiques doivent alerter le clinicien afin de ne pas méconnaitre un « masquerade syndrome » dont l’étiologie pourrait mettre en jeu le pronostic vital du patient.

Observation

Nous rapportons le cas d’un patient chez qui une hyalite s’est avérée révélatrice d’un lymphome primitif intraoculaire et cérébral grâce à une vitrectomie diagnostique et bilan d’extension par imagerie.

Cas clinique

Mr F, 75 ans, consulte aux urgences pour baisse d’acuité visuelle brutale de l’œil droit depuis 15 jours. Ses principaux antécédents sont un diabète de type 2 équilibré ainsi qu'un carcinome urothélial de haut grade traité par voie chirurgicale et immunothérapie 3 mois auparavant. A l’examen, à droite, l’acuité visuelle est limitée à « compte les doigts », le segment antérieur sans particularité et le fond d’œil inaccessible en raison de condensations vitréennes denses. L’échographie en mode B met en évidence un vitré hyperéchogène ainsi qu’une hyaloide postérieure décollée très épaissie. L’hypothèse initiale est une hémorragie intra-vitréenne « vieillie ». Une vitrectomie diagnostique et thérapeutique est alors entreprise. En per-opératoire on découvre la présence d’un décollement de rétine temporal limité exsudatif. Il existe de multiples dépots blancs vitréo-rétiniens. Le liquide de vitrectomie est envoyé en anatomopathologie et hématologie pour analyse. Le jour même, les résultats cytopathologique, immunohistochimique et l’analyse en cytométrie de flux sont en faveur d’un lymphome non hodgkinien diffus à grandes cellules de phénotype B. Au contrôle post-opératoire, l'acuité visuelle est de 4/10ème R1/4. On retrouve au fond d’œil le décollement de rétine exsudatif. Il n’y a pas d’infiltrat sous-rétinien. L’OCT et l’angiographie double sont sans particularité. Le patient est alors adressé en hématologie pour prise en charge. A la clinique, il n’existe pas de signe d’évolutivité lymphoïde. Un bilan d’extension par morpho-TEP et IRM cérébrale révèle par contre la présence associée d’un lymphome cérébral localisé entre les deux ventricules latéraux en regard du corps calleux.

Discussion

Le diagnostic final retenu chez notre patient est donc celui de lymphome intraoculaire et cérébral primitif. Cette affection maligne rare dont l’incidence est en augmentation (environ 4 % par an) est de diagnostique difficile. Certains signes à l’examen clinique doivent alerter le clinicien, notamment le contraste entre un segment antérieur calme et une infiltration cellulaire du vitré très marquée. Des infiltrats tumoraux peuvent être mis en évidence au niveau de l’épithélium pigmentaire. Leur identification au fond d’œil, à l’angiographie ou à l’OCT rendent le diagnostic de lymphome très probable. Chez notre patient, l’atteinte rétinienne était limitée à un décollement de rétine exsudatif. Le diagnostic de certitude repose sur l’identification des cellules malignes du vitré ou d’une biopsie lésionnelle cérébrale. L'analyse est cependant souvent non contributive en raison de la fragilité des cellules tumorales et de la nécessité d’un grand nombre pour étude. La localisation cérébrale qui fait le pronostic vital affecte le malade tôt ou tard dans 80 % des cas. Si elle n’est pas mise en évidence initialement elle devra être recherchée par un suivi IRM régulier.

Conclusion

Ce cas clinique souligne l’importance du repérage clinique des signes orientant vers un « marquerade syndrome ». En effet, le lymphome primitif intraoculaire et cérébral est rare mais il engage le pronostic vital. Son diagnostic est difficile et nécessite des techniques invasives parfois non contributives. Le bilan d’extension doit être systématique.