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Chapitre 16
Anti-inflammatoires, immunosuppresseurs et anti-allergiques

16.1. La réaction inflammatoire et les médicaments qui la régulent

F. Behar-Cohen

La réaction inflammatoire , indissociable de la réponse immune, est une réaction de l'organisme destinée à répondre de façon adaptée et limitée à une agression causée par un agent infectieux, un agent physique, chimique ou métabolique. L'inflammation a pour but d'éliminer les agents infectieux et autres causes de perturbation, de restaurer l'homéostasie le plus rapidement possible et de réparer les dommages tissulaires. Toute réaction inflammatoire entretenue et non contrôlée devient pathogénique (fig. 16-1
Fig. 16-1
Les deux types de réponses inflammatoires face à une agression.
).
Les agents pathogènes sont perçus par le système immunitaire inné et/ou acquis, qui mobilise de façon séquentielle et coordonnée des cellules résidentes, des cellules immunitaires locales et des cellules circulantes.
Des signaux de danger ( damage-associated molecular pattern [DAMP]) ou des motifs pathogéniques ( pathogen-associated molecular pattern [PAMP]) sont reconnus par les cellules sentinelles résidentes dans les tissus (mastocytes, macrophages et cellules dendritiques) via leurs récepteurs de type pattern recognition receptors (PRR) membranaires, en particulier les récepteurs Toll ( Toll-like receptors [TLR]).
Un vaste répertoire de molécules sont produites localement par ces première cellules mobilisées ou à distance avec des fonctions spécifiques sur le système vasculaire et les barrières tissulaires – l'activation du complément qui aboutit à la destruction des agents pathogènes – sur la production de cytokines qui induisent la mort des cellules trop endommagées et des agents pathogènes, et sur l'attraction d'autres cellules (neutrophiles, éosinophiles, basophiles, monocytes, cellules NK ou natural killer , et lymphocytes T et B). À chacune de ces étapes, une régulation négative assure l'autolimitation de ces processus. Il existe en particulier une communication bidirectionnelle entre le système nerveux central et le système immunitaire. Des cytokines et des endotoxines envoient des signaux au système nerveux central qui répond par la production d'ACTH (hormone adrénocorticotrope), laquelle induit la sécrétion de cortisol par les glandes surrénales. Le cortisol envoie, quant à lui, des signaux pour réguler de façon négative la production d'ACTH. Le cortisol est l'anti-inflammatoire le plus puissant, agissant comme un régulateur négatif de la réponse immune et inflammatoire, par des mécanismes transcriptionnels (effets en quelques heures) et non transcriptionnels (effets en quelques minutes).
La production des cytokines et des chimiokines résulte de la transmission du signal membranaire vers le noyau où des facteurs de transcription, parmi lesquels NF-κB, AP1 ou STAT3, sont activés. Cette transmission du signal passe par la voie des kinases (dont Janus kinase et signal transducer and activator of transcription [JAK-STAT], mitogen-activated protein kinase [MAPK], c-Jun-Kinase [ERK, JNK], etc.). Certaines de ces kinases sont des cibles thérapeutiques anti-inflammatoires. Les facteurs de transcription pro-inflammatoire induisent la synthèse de cytokines (IL-1β,TNFα, IL-2, -6, -8, -12, RANTES, MCP1, etc.), les enzymes du métabolisme oxydatif de l'acide arachidonique, phospholipase A2 (PLA2), cyclo-oxygénase (COX-2), lipo-oxygénases (LOX), et une sous-unité activatrice de la NADPH oxydase, enzyme qui produit des espèces réactives de l'oxygène (ERO) (fig. 16-2
Fig. 16-2
Schéma général de la réaction inflammatoire et sites d'action des médicaments anti-inflammatoires.
). Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) agissent en inhibant la voie de l'acide arachidonique.
L'inflammation se manifeste par quatre signes cliniques cardinaux : chaleur, rougeur, gonflement et douleur, auxquels on peut ajouter la perte fonctionnelle totale ou partielle. La chaleur, la rougeur et le gonflement (ou œdème) aigus résultent de la vasodilatation et de la rupture des barrières vasculaires, sous l'action de monoamines libérées par les mastocytes , du monoxyde d'azote libéré par les cellules endothéliales et circulantes, puis par des cytokines et par des facteurs comme le VEGF ( vascular endothelial growth factor ). La douleur aiguë résulte de la stimulation des nerfs sensitifs par les cellules inflammatoires et les mastocytes et par des stress mécaniques. La fièvre est, quant à elle, liée à une stimulation de régulateurs thermiques centraux par l'IL-1β.
L'inflammation est nécessaire, mais sa persistance ou son auto-amplification sont pathogènes et risquent de causer des dommages parfois plus importants que l'agression causale. Cela est bien illustré par l'« orage cytokinique» observé suite à l'infection par la Covid-19. Certains patients ont succombé à la réaction inflammatoire démesurée que l'organisme a déclenchée face à un intrus inconnu dans son répertoire mnésique. L'inflammation doit aussi permettre l'élimination et le « nettoyage» des débris et des cellules qui ont participé au combat aigu afin de restaurer l'homéostasie cellulaire et tissulaire.
À ces signes bruyants, témoignant d'un processus cliniquement décelable, peuvent se substituer des signes infracliniques, détectés uniquement par la mise en évidence de biomarqueurs d'imagerie ou biologiques, qui ont permis de déceler le rôle majeur et aujourd'hui incontesté de l'inflammation chronique « à bas bruit» dans la pathogénie de maladies métaboliques, cardiovasculaires et neurodégénératives, mais aussi dans le cancer ou dans les maladies psychiatriques. L'inflammation a été appelée le tueur silencieux sous-estimé. L'individu en bonne santé doit être capable de répondre rapidement et énergiquement à des agresseurs internes ou externes, mais doit aussi être capable de rétablir un état homéostatique. La régulation de ces processus fait intervenir, entre autres, une mémoire transgénérationnelle (épigénétique, microbiote, mitochondries, etc.) ainsi que des facteurs génétiques et environnementaux.
Lutter de façon ciblée, spécifique et efficace contre les effets néfastes de l'inflammation sans altérer les capacités de l'organisme de lutter contre les agresseurs reste un enjeu de la médecine moderne.
L'inflammation oculaire prend des formes très différentes en fonction du tissu agressé. L'inflammation aiguë de la surface oculaire se manifeste de façon cliniquement bruyante car la conjonctive héberge de multiples mastocytes, des cellules présentatrices d'antigène et est richement vascularisée. L'inflammation rétinienne peut se manifester de façon plus limitée car elle est une partie intégrante du système nerveux central, protégée par des barrières. Pour autant, l'inflammation rétinienne chronique est pathogène dans des maladies a priori non inflammatoires. L'abondance de l'innervation autonomique des tissus oculaires expose à une inflammation neurogénique, liée à l'activation de cellules inflammatoires par les nerfs du système nerveux autonome.
À ce jour, quatre grandes classes de médicaments permettent de contrôler les effets de l'inflammation : les glucocorticoïdes, les AINS, les anti-allergiques et les régulateurs de la réponse immune (voir fig. 16-2
Fig. 16-2
Schéma général de la réaction inflammatoire et sites d'action des médicaments anti-inflammatoires.
). Les régulateurs de la réponse immune agissent sur des cibles spécifiques et sont en plein développement. Ces médicaments peuvent être administrés par voie générale ou par voie locale avec des mécanismes d'actions très différents qu'il convient de reconnaître afin de traiter au mieux les patients.
16.2. Glucocorticoïdes

F. Behar-Cohen

L'essentiel
  • Les glucocorticoïdes (GC) sont les médicaments les plus prescrits en ophtalmologie.
  • Les GC dérivent des corticoïdes endogènes et agissent en se liant aux récepteurs gluco- et minéralocorticoïdes.
  • Les différents GC ont des affinités différentes pour les récepteurs gluco- ou minéralocorticoïdes, modifient leur biodisponibilité dans les tissus oculaires et influent sur leurs effets thérapeutiques, expliquant que les différents GC puissent avoir des effets thérapeutiques différents.
  • Les GC exercent des effets anti-inflammatoires et anti-allergiques, angiostatiques et anti-œdémateux par des mécanismes multiples et redondants.
  • Les administrations locales et locorégionales peuvent induire des effets indésirables systémiques.
  • Les formes intraoculaires de GC épargnent des effets indésirables généraux et augmentent les effets locaux, mais exposent aux effets secondaires oculaires.
  • La corticothérapie générale doit être limitée en dose et en durée car elle induit des effets indésirables non acceptables quand des alternatives sont disponibles.
Généralités
Corticoïdes endogènes
Les corticoïdes ou corticostéroïdes sont des hormones stéroïdiennes sécrétées par le cortex des glandes surrénales. Cette partie superficielle de la glande produit des hormones différentes dans les différentes zones : la zone glomérulée la plus externe produit les minéralocorticoïdes (principalement l'aldostérone); la zone fasciculée produit les glucocorticoïdes (dont le cortisol); et la zone réticulée, la plus proche de la médulla, produit les androgènes. Le cortisol est synthétisé à partir du cholestérol par une suite de réactions enzymatiques dont les ultimes étapes se déroulent dans la mitochondrie (fig. 16-3
Fig. 16-3
Schéma de la production des corticoïdes endogènes et de leur contrôle par l'axe hypothalamo-hypophysaire.
Source : Cyrille Martinet.
). La médullosurrénale, quant à elle, fait partie du système nerveux sympathique, et produit et sécrète les catécholamines.
Les hormones glucocorticoïdes, produites en réponse à la stimulation par des hormones hypothalamo-hypophysaires (la CRH pour corticotropin releasing hormone et l'ACTH pour adreno-corticotropin hormone ) (voir fig. 16-3
Fig. 16-3
Schéma de la production des corticoïdes endogènes et de leur contrôle par l'axe hypothalamo-hypophysaire.
Source : Cyrille Martinet.
), sont essentielles au développement et à la vie, contrôlant tous les aspects du métabolisme glucidique, lipidique et protéique, et agissant sur l'équilibre hydroélectrolytique via leur action directe sur le rein. Les minéralocorticoïdes (aldostérone essentiellement), dont la structure est très proche de celle du cortisol, sont aussi produites sous la stimulation de l'ACTH. Mais c'est essentiellement le système rénine-angiotensine, la kaliémie et l'endotéline-1 qui activent la production d'aldostérone, dont le rôle est majeur dans la préservation de l'équilibre hydroélectrolytique et la régulation de la pression artérielle. L'aldostérone induit en effet la rétention du sodium et la sécrétion du potassium, en augmentant la perméabilité au sodium par activation de la pompe Na + /K + -ATPase dans les tubules rénaux. Un excès d'activation de la voie minéralocorticoïde entraîne une augmentation de la rétention du sodium, un excès du volume de liquide extracellulaire et donc une hypertension artérielle par surcharge volémique.
Récepteurs des corticoïdes
Les corticoïdes sont des hormones qui passent les membranes cellulaires sans se lier à un récepteur membranaire. Certains travaux récents suggèrent cependant que des récepteurs membranaires gluco- et minéralocorticoïdes puissent exister et induire des effets différents, mais cela reste débattu. Les récepteurs intracellulaires aux glucocorticoïdes (GR) et aux minéralocorticoïdes (MR) ont été les mieux étudiés. Le GR est ubiquitaire alors que le MR est exprimé dans les organes « minéralosensibles», dont le rein, le cœur, les vaisseaux, le système nerveux et les tissus oculaires. Le cortisol se lie avec la même affinité au GR et au MR alors que l'aldostérone se lie essentiellement au MR. La liaison du ligand au récepteur induit une homodimérisation ou une hétérodimérisation des récepteurs qui entrent dans le noyau sous forme de dimères complexés à des cofacteurs (fig. 16-4
Fig. 16-4
Représentation schématique des récepteurs glucocorticoïde (GR) et minéralocorticoïde (MR) dans la cellule.
La liaison du ligand glucocorticoïde (GC) ou de l'aldostérone (Ald) au récepteur cytoplasmique induit la dimérisation des récepteurs, leur association avec des cofacteurs et leur nucléarisation. Les complexes interagissent avec des régions spécifiques de l'ADN. La HSD-1 convertit la cortisone en cortisol et la HSD-2 convertit le cortisol en cortisone, avant leur liaison aux récepteurs.
Source : Cyrille Martinet.
).
Les effets des corticoïdes dépendent de leur liaison au GR et/ou au MR et leurs effets biologiques sont très spécifiques des tissus en fonction de l'expression relative des récepteurs, des cofacteurs et de l'expression des enzymes préréceptrices, comme les 11β-hydroxystéroïde déshydrogénase de types 1 et 2 (HSD-1 et 2), qui contrôlent les quantités relatives de cortisol et de cortisone dans les cellules [1]. En effet, comme les niveaux de cortisol circulants sont beaucoup plus élevés que les niveaux d'aldostérone, le MR est en général occupé par les glucocorticoïdes. L'activation du MR par son ligand spécifique, l'aldostérone, ne peut se produire que dans les cellules exprimant l'enzyme HSD-2, qui convertit le cortisol en cortisone dont l'affinité pour le MR est réduite, autorisant alors la liaison de l'aldostérone à son récepteur spécifique. Le rein est l'organe considéré comme le plus « minéralosensible», car l'enzyme HSD-2 y est fortement exprimée, et l'aldostérone, par activation du MR, contrôle l'équilibre de l'excrétion du sodium et du potassium, régule la pression sanguine et l'hydratation de l'organisme [ 2 , 3]. Dans les autres organes « minéralosensibles», il a été démontré que l'hyperactivation du MR (le plus souvent par les glucocorticoïdes) est pathogène [ 4] et à l'origine de divers effets indésirables des glucocorticoïdes (hypertension artérielle, sensibilité à l'insuline, anomalie de la répartition des lipides, effets indésirables cutanés et des phanères comme l'alopécie, retard de cicatrisation cornéenne, etc.) [3].
L'activation du GR par les glucocorticoïdes dans les cellules immunitaires est à l'origine de la majorité de leurs activités anti-inflammatoires et immunosuppressives [5 , 6].
Glucocorticoïdes de synthèse
Les glucocorticoïdes (GC) synthétiques ou semi-synthétiques sont des molécules dérivées du cortisol dont l'activité anti-inflammatoire est associée à l'activation du GR et dont les effets indésirables sont essentiellement liés à l'activation du MR. Mais il est important de souligner que si ces molécules ont été optimisées pour limiter les effets systémiques indésirables, elles ne l'ont pas été pour réduire les effets indésirables oculaires qui restent associés à l'utilisation de tous les médicaments.
La structure de la plupart des GC utilisés en ophtalmologie est présentée dans la figure 16-5
Fig. 16-5
Triamcinolone, acétonide de Fluorométholone Cortisol Dexaméthasone Fluocinolone Prednisone Prednisolone Méthylprednisolone Structure de la plupart des glucocorticoïdes.
.
La fluoration du cycle B est l'une des modifications associées à une augmentation de l'activité anti-inflammatoire. Les modifications de la structure des molécules ont pour effet d'augmenter ou de réduire la lipophilie des molécules. Les dérivés alcool du composé de base renforcent la lipophilie du corticoïde. En revanche, des sels tels que le phosphate sodique et le chlorhydrate augmentent la solubilité dans l'eau. Par exemple, la dexaméthasone est une flurorométhyprednisolone, très hydrophobe, mais sa forme phosphate sodique la rend plus hydrophile et donc susceptible d'être formulée en solution. Les modifications chimiques augmentent également la biodisponibilité du GC instillé. Par exemple, la pénétration transcornéenne d'une forme phosphate est supérieure à celle de la forme acétate du même GC, quand la cornée est intacte.
Il apparaît de plus en plus clairement que les différentes molécules de GC ont des effets propres et spécifiques qui résultent de la conformation des complexes formés avec les récepteurs et les cofacteurs, des ratios de GR/MR dans les différentes populations cellulaires et des sites de liaisons sur l'ADN.
La comparaison de la puissance de l'activité anti-inflammatoire et de la spécificité des GC par rapport au cortisol est généralement présentée sous forme de tableaux dans tous les ouvrages de pharmacologie (tableau 16-1
Tableau 16-1
Classification traditionnelle des glucocorticoïdes en fonction de leurs propriétés anti-inflammatoires et de leurs effets minéralocorticoïdes, qui semble non pertinente en ophtalmologie.
Activité anti-inflammatoire (par rapport à l'hydrocortisol)Activité minéralo-corticoïde (par rapport à l'hydrocortisol)Équivalence de dose (mg)Demi-vie biologique (heures)
Hydrocortisol11208-12
Cortisone0,80,8258-12
Prednisone/prednisolone40,8512-36
Méthylprednisolone50,5412-36
Triamcinolone50412-36
Bétaméthasone2500,7536-54
Dexaméthasone2500,7536-54
), qui guident les médecins dans le choix du GC optimal pour une maladie spécifique dans tous les domaines de la médecine. Ces comparaisons se fondent essentiellement sur le test de blanchiment de la peau (test de McKenzie) qui évalue l'effet vasoconstricteur des formulations appliquées par voie topique cutanée [ 7 , 8].
En ophtalmologie, les GC injectés dans l'œil n'induisent pas de vasoconstriction cliniquement détectable, alors qu'ils induisent une vasoconstriction des vaisseaux de la surface oculaire démontrant que ces classifications ne peuvent pas être généralisées et que les effets sont tissus-spécifiques. Quelques expériences ont également comparé la transactivation du MR et/ou du GR dans des systèmes cellulaires modifiés génétiquement pour quantifier l'activation du GR ou du MR, mais la généralisation des résultats à tous les types cellulaires est inadéquate car ces effets sont également spécifiques des types cellulaires. Les effets minéralocorticoïdes ont été mesurés par rapport à la rétention hydrosodée, un effet non pertinent pour les traitement ophtalmologiques locaux, car les GC ne diffusent pas dans la circulation générale. Pourtant, les effets des GC sur l'activation du MR dans les tissus oculaires sont important à connaître car ils sont à l'origine de certains effets indésirables comme le retard de cicatrisation cornéenne [9].
Enfin, il faut garder à l'esprit que la spécificité d'un GC pour le GR ou le MR est fortement dépendante de la dose administrée. À forte dose, les molécules se lient toutes au GR et au MR. C'est la raison pour laquelle la corticothérapie par voie orale, dès qu'elle dépasse les quelques milligrammes par kg et par jour, induit tous les effets indésirables associés à l'activation du MR. Les doses de GC administrées par voies péri- ou intraoculaires dépassent largement les concentrations saturantes pour les récepteurs et sont donc susceptibles d'activer localement les deux types de récepteurs (fig. 16-6
Fig. 16-6
Expériences menées sur des cellules génétiquement modifiées afin de mesurer, grâce à un traceur, l'activation spécifique du GR humain (hGR) (a) ou du MR humain (hMR) (b) en réponse à des doses croissantes de différents GC synthétiques et de l'aldostérone ou du cortisol.
Tous les GC activent le GR et le MR à forte dose, mais à des doses plus faibles une spécificité est observée. Par exemple, la dexaméthasone à la dose de 0,01 μM active le MR à 50 %, mais le GR à 100 %, à 0,001 μM la dexaméthasone n'active que le GR.
D'après : Grossmann C, et al. Transactivation via the human glucocorticoid and mineralocorticoid receptor by therapeutically used steroids in CV-1 cells: a comparison of their glucocorticoid and mineralocorticoid properties. Eur J Endocrinol 2004; 151(3) : 397-406.
). Cela peut expliquer que les différents GC n'induisent ni les mêmes effets cliniques, ni les mêmes fréquences d'effets indésirables.
À retenir
  • La classification de la puissance des différents GC et de leur spécificité n'est pas adaptée à l'utilisation locale des GC oculaires.
  • Elle repose sur des mesures des effets vasculaires (effet glucocorticoïde) et de la rétention hydrosodée (effet minéralocorticoïde), non pertinents quand les GC sont utilisés en ophtalmologie.
  • Il existe des effets gluco- et minéralocorticoïdes spécifiques des GC dans les différents tissus, qui justifieraient une nouvelle classification permettant de définir quel GC est plus efficace pour traiter un signe ou un symptôme spécifique oculaire.
Historique de la découverte des effets anti-inflammatoires des glucocorticoïdes
L'inflammation est une réponse de l'organisme à une agression par des agents infectieux ou biologiques, une agression mécanique, chimique, métabolique ou à une plaie.
Les signes cardinaux de la réaction inflammatoire ( calor, dolor, rubor, tumor et functio laesa ) résultent de la vasodilatation localisée, de l'augmentation de la perméabilité vasculaire, de l'extravasation des protéines plasmatiques et de la migration des leucocytes dans le tissu affecté. Si cette réaction est nécessaire pour lutter contre les agressions et pour initier les processus de réparation, sa régulation est essentielle au retour à l'état homéostasique. Parmi les mécanismes régulateurs, l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et en particulier la sécrétion des GC sont essentiels; leurs puissants effets anti-inflammatoires ont été reconnus il y a plus de 70 ans.
En effet, le 21 septembre 1948, à la Mayo Clinic (Rochester, États-Unis), une femme de 29 ans souffrant d'une polyarthrite rhumatoïde sévère put retrouver la marche après qu'on lui eût injecté une petite quantité d'un médicament expérimental, le composé « E» qui n'était autre que de la cortisone [ 10 , 11]. Ce qui fut alors qualifié de « miracle» faisait suite aux travaux de chimistes qui, une dizaine d'années plus tôt, avaient d'abord extrait du cortisol de la glande surrénale de mouton, puis l'avaient préparé par la modification chimique des acides biliaires [12 , 13]. Mais la première description des corticoïdes remonte à 1855, quand Thomas Addison reconnut que la destruction de la glande surrénale provoquait un déséquilibre hydro-ionique majeur et la mort [14]. En 1950, Edward Calvin Kendall, Thaddeus Reichstein et Philip S. Hench reçurent le prix Nobel de physiologie pour la découverte de la structure et les activités biologiques des hormones corticosurrénaliennes [15].
Dès 1950, les ophtalmologistes perçurent le potentiel majeur des GC pour le traitement des maladies inflammatoires oculaires [ 16]. Ils proposèrent leur instillation topique [ 17] et observèrent leur danger potentiel en cas d'infections virales [18]. En quelques années, les principaux effets indésirables systémiques [19] et oculaires des corticoïdes furent décrits [ 20]. Des formes synthétiques ou semi-synthétiques furent produites pour optimiser les effets anti-inflammatoires et réduire les effets indésirables associés notamment à la rétention hydrosodée sans que les mécanismes associés à ces effets ne soient encore compris. En effet, le récepteur des glucocorticoïdes (GR) ne fut cloné qu'en 1972 [21] et le récepteur des minéralocorticoïdes (MR) en 1987 [22], bien après que les premières modifications chimiques du cortisol n'aient été proposées pour réduire leurs effets indésirables.
Effets anti-inflammatoires des glucocorticoïdes
Mécanismes moléculaires
Au sein de la cellule, les GC agissent sur l'inflammation par trois mécanismes (fig. 16-7
Fig. 16-7
Mécanismes moléculaires des activités anti-inflammatoires des glucocorticoïdes (GC).
Les cytokines pro-inflammatoires se lient aux récepteurs membranaires qui activent les facteurs de transcription NF-κB, STAT-1, AP-1 et IRF; ces facteurs régulent dans le noyau la transcription de molécules pro-inflammatoires. Les GC naturels ou synthétiques se lient à leurs récepteurs (1) et induisent la transcription de gènes qui codent pour des protéines anti-inflammatoires (Anxa1, DUSP1, GILZ, etc.) et répriment la production de protéines pro-inflammatoires par des mécanismes génomiques directs (2). Les complexes GC-récepteurs interfèrent aussi avec les facteurs de transcription pro-inflammatoires et inhibent la production de molécules de l'inflammation par des mécanismes génomiques indirects (3). Enfin, les complexes peuvent agir par des mécanismes non génomiques en déstabilisant des ARNm (4).
Source : Cyrille Martinet.
).
Mécanisme génomique direct
Le complexe GC/GR-GR ou GC/GR-MR se déplace jusqu'au noyau, où il se lie sous forme dimérique à des séquences d'ADN appelées éléments sensibles aux glucocorticoïdes ou GRE ( glucocorticoids responsive elements ). Le complexe résultant recrute soit des protéines co-activatrices, soit des protéines co-répressives qui modifient la structure de la chromatine, facilitant ou empêchant l'assemblage de la machinerie de transcription basale et l'initiation de la transcription par l'ARN polymérase. Par ailleurs, le GR dimérisé peut également reconnaître les GRE négatifs, ce qui entraîne une inhibition de la transcription. Les principales protéines anti-inflammatoires produites en réponse à la stimulation par les GC sont les suivantes.
  • L'annexine 1 ou lipocortine 1 (codée par Anxa1 ), décrite initialement comme un inhibiteur de la phospholipase A2, inhibe l'expression et/ou l'activité d'autres enzymes inflammatoires comme l'oxyde nitrique synthase inductible (iNOS) dans les macrophages et la cyclo-oxygénase inductible (COX-2) dans la microglie activée. L'annexine 1 inhibe la migration des neutrophiles et des monocytes, et favorise l'apoptose des cellules inflammatoires en activant la caspase-3 [ 23]. Elle contribue aussi à l'élimination des cellules apoptotiques et favorise la restauration de la barrière hémato-encéphalique [24]. En inhibant la phospholipase A2, qui est une enzyme située en amont de la transformation des phospholipides en acide arachidonique, les voies des leucotriènes , des prostacyclines et des prostaglandines sont inhibées par les GC.
  • DUSP1 ( dual specificity phosphatase 1 ), également connue sous le nom protéine kinase (MAPK) phosphatase-1 (MKP-1), est également l'une des protéines majeures cortico-induites. Elle exerce ses effets par déphosphorylation des MAPK (ERK, p38 et la kinase c-Jun N-terminale kinase [JNK]) [25].
  • GILZ ( glucocorticoid-induced leucin zipper ), dont le gène a été cloné en 1997, est induite par les GC dans toutes les cellules du sang périphérique, y compris les lymphocytes T, les monocytes et les granulocytes, mais GILZ est également produite dans les cellules dendritiques, les microglies et des tissus périphériques. Elle est impliquée dans la régulation de l'apoptose des cellules T et interagit avec plusieurs facteurs de transcription et voies de signalisation cellulaire, dont NF-κB, l'hétérodimère c-Jun/c-Fos (appelé protéine activatrice 1 [AP-1]), Raf-1 et Ras [ 26].
Ces protéines régulent donc des grandes voies de signalisation activées au cours des processus inflammatoires et qui induisent la production des cytokines, chimiokines, protéases et des protéines impliquées dans la perméabilité.
Mécanisme génomique indirect
Le complexe GC-récepteur interagit avec d'autres facteurs de transcription, comme les facteurs nucléaires AP-1, NF-κB et Stat1 qui activent les gènes de l'inflammation. Historiquement, on pensait que de telles interactions protéine-protéine du GR expliquaient la majorité des effets répressifs du GC, mais des études portant sur l'ensemble du génome ont révélé que, dans de nombreux cas, le GR se lie plutôt à l'ADN adjacent aux facteurs de transcription susmentionnés et influence ainsi leur activité par des effets génomiques directs comme mentionné plus haut.
Troisième mécanisme
Le troisième mécanisme est lié à des effets non génomiques sur la traduction d'ARNm ou à des effets sur des récepteurs membranaires. Par conséquent, les activités anti-inflammatoires des GC peuvent nécessiter, ou non, la liaison du GR à l'ADN. Très récemment, des effets des GC sur les miARN ont été décrits, suggérant que les GC contribuent à une régulation très précise de l'expression de certains gènes et que ces régulations pourraient participer à leurs effets anti-inflammatoires. Les effets non génomiques sont observés à des doses très élevées et peuvent se manifester très rapidement, en quelques minutes. La puissance des différents GC relative à leurs effets anti-inflammatoires est différente selon que l'on considère les effets génomiques qui surviennent en plusieurs heures et à des doses plus faibles que les effets non génomiques observés très rapidement à de très fortes doses [ 27] (fig. 16-8
Fig. 16-8
Schéma représentant les différents mécanismes génomiques et non génomiques en fonction de la dose de glucocorticoïdes (GC). Ces effets ont été décrits lors de l'administration systémique.
Il n'est pas démontré que les mêmes mécanismes interviennent localement lorsque les GC sont administrés par voie intravitréenne par exemple.
).
Effets des glucocorticoïdes sur la signalisation cellulaire inflammatoire oculaire
Cellules immunitaires
Les GC exercent de puissants effets anti-inflammatoires et immunosuppresseurs qui se produisent en raison de la répression des gènes pro-inflammatoires et de l'activation des voies anti-inflammatoires dans les cellules immunitaires. Ils sont au centre d'un réseau de régulation qui bloque plusieurs voies inflammatoires. La majorité des activités des GC sont médiées par le GR exprimé de manière ubiquitaire. Le MR est aussi exprimé dans les cellules résidentes oculaires et dans les cellules inflammatoires, et les GC agissent donc sur les deux récepteurs en fonction de leur concentration. Les GC peuvent influencer la signalisation des récepteurs des cellules T, ou induire un réarrangement de leur cytosquelette via la phosphorylation des protéines de structures. Mais le principal mécanisme d'action des GR sur les cellules immunitaires est l'induction de la mort par apoptose des lymphocytes par l'induction de molécules pro-apoptotiques, telles que la protéine BH3 BIM, qui est activée [28], et la protéine anti-apoptotique BCL2, qui est down -régulée [29]. Ainsi, les fortes doses de méthylprenisolone (bolus de Solumédrol®) induisent une réduction de la population de cellules T, mais une préservation des lymphocytes B. Un deuxième mécanisme qui pourrait expliquer l'efficacité de la régulation de la réponse immunitaire par le GR est la promotion de la prolifération des lymphocytes T régulateurs (Treg) directement ou indirectement par l'activation des macrophages. Les macrophages ont le potentiel d'induire la fonction Treg pour maintenir l'homéostasie tissulaire, tandis que les Treg peuvent améliorer la capacité des macrophages d'engloutir les cellules apoptotiques, ce qui favorise la résolution de l'inflammation [30]. Les GC agissent sur les cellules T par l'intermédiaire de la protéine GILZ. Par exemple, GILZ s'associe au facteur nucléaire κB (NF-κB), à c-Fos et à c-Jun, et inhibe la transcription dépendante de NF-κB et d'AP-1. GILZ se lie également à Raf et Ras, inhibe l'activation des cibles en aval de Ras/Raf, y compris la protéine kinase 1 activée par des agents mitogènes (MAPK1). GILZ favorise également l'activité des cellules Treg en activant la signalisation du facteur de croissance transformant β (TGF-β). Au final, ces actions inhibent l'activation des cellules T et modulent la différenciation des cellules T helper (Th)-1, Th-2, Th-17, régulant ainsi les effets immunosuppresseurs des GC sur les cellules T (fig. 16-9
Fig. 16-9
Cyclo-oxygénase(s) Sites moléculaires et cellulaires de l'activité anti-inflammatoire des glucocorticoïdes (GC).
). Les macrophages/microglies sont les principales cellules qui régulent l'homéostasie anti-inflammatoire. Les GC régulent les différentes étapes de la biologie des macrophages, notamment la différenciation, la survie, la migration, l'activation et la polarisation [31] ainsi que le phénotype profibrotique [32]. Dans les monocytes/macrophages, les GC induisent DUSP1 qui régule négativement la production de médiateurs inflammatoires par activation de la voie JNK et contrôlent ainsi la réponse immunitaire innée [33]. Mais les GC peuvent aussi induire la production de molécules pro-inflammatoires dans les macrophages par l'activation du GR et activer la voie de l'inflammasome en augmentant l'expression de NRLP3 ( nucleotide-binding oligomerization domain-like receptor family, pyrin domain-containing 3) [34]. De façon intéressante, l'activation du GR ou du MR induit une polarisation différentielle pro- ou anti-inflammatoire des macrophages [ 35]. De nombreux travaux ont en effet montré que le blocage du MR inactive les macrophages et la microglie oculaire, et que l'activation du récepteur est pro-inflammatoire [36]. Comme déjà mentionné, l'un des puissants mécanismes anti-inflammatoires des GC sur les polynucléaires passe par la production de l'annexine 1 qui agit à tous les stades de l'activation, la migration et la mort de ces cellules [37]. Les GC agissent aussi sur l'activité des mastocytes [38] qui sont fortement impliqués dans les mécanismes d'inflammation oculaire [ 39 , 40], notamment par l'induction de la lipocortine 1.
Cellules oculaires résidentes
Les cellules oculaires résidentes sont les premières à produire des cytokines pro-inflammatoires et des chimiokines, en réponse à une agression locale ou systémique. Les cellules dendritiques, les macrophages résidents et les cellules microgliales, mais aussi les cellules de l'iris, du corps ciliaire et de l'épithélium pigmentaire, les cellules gliales de Müller et même les astrocytes produisent des cytokines et de la NO synthase inductible ainsi que des molécules de réponse rapide comme la pentraxine 3, la lipocaline 2 et des molécules impliquées dans la réponse immunitaire innée. Le rôle d'une hyperactivation de la voie du complément et celui de l'inflammasome dans les cellules de l'épithélium pigmentaire ont été mis en évidence ces dernières années dans la pathogénie de la DMLA. Les GC agissent aussi sur la réponse inflammatoire de ces cellules. Les cellules gliales de Müller ( retinal Müller glial [RMG] cells ) par exemple, sont désactivées par GILZ, qui réduit la gliose et la production d'IL-1, de TNF-α, d'ICAM et de MCP-1, et inhibe la down -régulation de l'AQP4 [41]. Les GC inhibent aussi la production de la galectine 1 via la production de DUSP-1 dans les cellules RMG [42]. Récemment, il a été démontré que la fluocinolone réduisait la production de CCL2, d'IL-6 et d'IL-8 dans une lignée de cellules gliales de Müller humaines par son activation du GR et réduisait l'activation des cellules microgliales [ 43]. Les GC peuvent aussi induire l'expression de NRLP3 et activer la voie de l'inflammasome dans les cellules microgliales [ 34 , 44]. Cela pourrait expliquer leur inefficacité dans l'inflammation associée à la DMLA. Dans les cellules de l'épithélium pigmentaire, la triamcinolone active la phagocytose des cellules mortes par un mécanisme dépendant de l'induction de MERT-K [45], et la fluocinolone réduit l'expression de TNF-α et de la caspase 5 [ 46]. Dans un modèle d'uvéite expérimentale, des doses intraoculaires de dexaméthasone et de triamcinolone, équivalentes sur les signes cliniques de l'inflammation oculaire, régulent des cytokines différentes et agissent de façon différente sur l'expression et la distribution des canaux aqueux et potassiques dans les cellules gliales, démontrant que des molécules différentes agissent par des mécanismes différents, même si cliniquement l'effet anti-inflammatoire semble identique [ 47].
Effets des glucocorticoïdes sur les barrières oculaires
Les GC agissent sur les barrières oculaires par plusieurs mécanismes.
Action sur les cellules endothéliales vasculaires
Les GC augmentent l'expression des protéines de jonction dans les cellules endothéliales vasculaires. La dexaméthasone augmente l'expression de la claudine 5 et de l'occludine dans des cellules microvasculaires du cerveau soumise à du TNF-α [48]. Les GC restaurent la résistance transendothéliale en augmentant le contenu en zonula occludens (ZO-1) dans un modèle de traumatisme cérébral. Cet effet est médié par l'activation du GR [49]. Les GC restaurent par ailleurs l'architecture et le cytosquelette des cellules endothéliales vasculaires par l'intermédiaire de l'expression de la lipocortine [ 50], et ils réduisent la production de métalloprotéases impliquées dans la rupture des barrières endothéliales comme MMP-2, MMP-3 et MMP-9 [48]. L'acétonide de triamcinolone réduit la perméabilité des cellules endothéliales choroïdiennes humaines induite par l'interféron γ [51], démontrant l'efficacité des GC sur la perméabilité induite par des médiateurs de l'inflammation.
Action sur les composants périvasculaires de la barrière hématorétinienne
Les cellules qui forment l'unité neuro-glio-vasculaire jouent un rôle essentiel sur la barrière hématorétinienne. Les GC activent un message entre les astrocytes, les péricytes et les cellules endothéliales par l'intermédiaire de la matrice extracellulaire et favorisent la production d'occludine, de claudine-5 et de ZO-1 dans un modèle cellulaire [52]. Par ailleurs, la dexaméthasone augmente l'expression de l'angiopoïétine 1, et diminue l'expression du VEGF dans les péricytes et les astrocytes cérébraux, mais pas dans les cellules endothéliales par un mécanisme transcriptionnel direct lié à l'activation du GR [53]. La lipocaline 2, produite rapidement par les astrocytes stimulés par des GC [54], restaure la distribution de l'occludine et de ZO-1 dans des cellules endothéliales microvasculaires cérébrales [55]. Mais la lipocaline 2 a aussi démontré des effets négatifs sur la perméabilité vasculaire cérébrale dans des modèles d'ischémie [ 56]. Enfin, la triamcinolone a démontré des effets bénéfiques sur la rupture de la barrière hématorétinienne dans un modèle de déplétion des cellules gliales de Müller en protégeant l'intégrité de ces cellules qui expriment le GR [57].
Réduction de la production de cytokines qui altèrent les jonctions et le cytosquelette des cellules endothéliales
Il s'agit d'un mécanisme indirect mais dominant dans l'effet des GC, puisque certains médiateurs, comme le TNF-α, l'histamine et d'autres neuropeptides, la NO synthase inductible ou l'interféron γ, capable d'induire directement l'ouverture des jonctions endothéliales, sont réprimés par les GC.
Stabilisation de la barrière hématorétinienne externe
Les GC, selon qu'ils activent soit le GR, soit le MR, peuvent avoir des effets différents sur les cellules de l'épithélium pigmentaire. L'activation du MR induit une altération de la barrière [58], alors que l'activation du GR exercerait des effets plutôt bénéfiques [59]. Dans un modèle de rupture de barrière induite par l'activation d'un stress oxydant, la triamcinolone réduit la rupture en réduisant le stress oxydant [60]. Mais cet effet est très lié au ratio GR/MR puisque, à l'inverse, l'hyperactivation du MR favorise le stress oxydant dans les cellules de l'épithélium pigmentaire [61]. Sur la barrière épithéliale cornéenne, bien que les GC exercent des effets anti-inflammatoires, ils inhibent la restauration de la barrière épithéliale par activation du MR [9].
Effets anti-œdémateux des glucocorticoïdes
Les GC sont largement utilisés pour leurs effets anti-œdémateux sur la rétine. Sur la cornée, les effets sont moins clairs et moins décrits. La réduction de l'inflammation induit une restauration de l'activité des cellules endothéliales et épithéliales, et la dexaméthasone stimule l'activité de la Na + /K + -ATPase dans les cellules cornéennes endothéliales de rongeur [62], mais l'activité anti-œdémateuse directe des GC sur la cornée reste à démontrer.
Sur la rétine et plus spécifiquement sur l'œdème maculaire (OM), les GC sont largement utilisés et très efficaces, pas seulement pour réduire les OM associés aux uvéites, mais aussi les OM secondaires à la rétinopathie diabétique, aux occlusions veineuses et au syndrome d'Irvine Gass.
Les GC agissent par plusieurs mécanismes.
Réduction de la production des cytokines et chimiokines pro-œdémateuses
Certains médiateurs de l'inflammation ont été particulièrement corrélés à l'augmentation de l'épaisseur maculaire [ 63], comme le TNF-α, l'IL-1β, IL-6, l'IL-8, ICAM-1, CCl2, angptl4, IGFBP3, SDF-1 et les membres de la famille du VEGF (VEGF-A et PGF-1). Les GC réduisent les taux intraoculaires de toutes les cytokines pro-inflammatoires, mais ils réduisent peu ou pas les concentrations tissulaires de VEGF et de PGF [ 64 , 65], ce qui n'exclut pas que l'activité du VEGF puisse être régulée localement au niveau de la barrière par les GC.
Désactivation des cellules inflammatoires et de l'adhésion des leucocytes
Les GC sont de puissants inhibiteurs de l'adhésion leucocytaire par activation du GR, favorisant la démargination des leucocytes, réduisant l'expression de CCR4 par l'intermédiaire de l'expression d'AP1. De plus, ils polarisent les macrophages en un phénotype anti-inflammatoire [66]. Ces effets sur les leucocytes contribuent au maintien des barrières hématorétinienne et hémato-aqueuse.
Action directe sur l'expression des flux hydro-ioniques dans les cellules gliales de Müller
Les cellules RMG expriment le GR et le MR. L'expression et la distribution des pompes à eau, les aquaporines 1 et 4, et des transporteurs ioniques potassiques tels que Kir4.1 sont sous la régulation des GC. La dexaméthasone et la triamcinolone agissent de façon différenciée sur l'expression et la localisation subcellulaire de ces transporteurs, selon leur liaison préférentielle au GR ou au MR [ 67 , 68]. Ces effets indiquent que les GC agissent directement sur le drainage de l'eau et des ions par les cellules gliales et les systèmes de drainage lymphatique [ 63]. Cela explique l'effet rapide et puissant des GC qui dépasse le rétablissement des barrières vasculaires.
Action sur les mastocytes
Les mastocytes sont abondants dans la conjonctive, le limbe et la choroïde. Leur dégranulation libère des monoamines vasodilatatrices comme l'histamine, mais aussi du TNF-α et des neuropeptides fortement vasodilatateurs et inducteurs de rupture de la barrière vasculaire et de l'épithélium pigmentaire. Les GC réduisent le nombre des mastocytes et inhibent leur dégranulation [69].
Effets angiostatiques des glucocorticoïdes
Les GC sont connus pour induire des effets vasculaires. Le test de McKenzie , fondé sur le blanchiment de la peau, a servi de base à la classification de la puissance des GC et de leur absorption cutanée [7]. Ce test utilise la quantification visuelle du blanchiment de la peau après 8 à 48 heures d'exposition à différents GC appliqués par voie topique. Bien que ce test soit largement utilisé, le mécanisme exact du blanchiment de la peau reste inexpliqué. Les effets des stéroïdes sur les vaisseaux en croissance ont été décrits initialement par Folkman et Ingber [70]. Ils ont montré que seule une faible dose de dexaméthasone (0,2 μg/μl) ou d'hydrocortisone (5-6 μg/ml) pouvait induire la régression et empêcher la croissance de néovaisseaux dans la membrane chorio-allantoïde. Des doses élevées, supérieures à 10 μg/ml, sont, en revanche, toxiques. Les expériences de Folkman avec des stéroïdes chimiquement modifiés ont démontré que l'effet vasculaire n'était pas lié à l'activité des corticoïdes sur leur récepteurs, mais à leur effet sur la membrane basale des vaisseaux en croissance. Il est donc possible que les GC exercent des effets angiostatiques par des mécanismes liés à la structure même des molécules plus qu'à des mécanismes spécifiques.
Dans de nombreux modèles oculaires d'angiogenèse et de pathologies humaines, la croissance des néovaisseaux s'inscrit dans un processus complexe de cicatrisation, où l'inflammation et l'angiogenèse sont étroitement liées. Par conséquent, les effets des GC résultent à la fois d'une forte activité anti-inflammatoire et d'un effet direct mais peu clair sur les vaisseaux. Selon les études et les types de GC et de vaisseaux, les GC sont soit angiostatiques, soit pro-angiogéniques sur les vaisseaux en croissance. Par exemple, l'activation du MR dans les néovaisseaux choroïdiens est plutôt pro-angiogénique [71] et les GC n'ont pas montré d'efficacité dans les néovaisseaux choroïdiens de la DMLA.
Certaines études suggèrent que les GC peuvent avoir des effets sur les vaisseaux quiescents. Les cellules endothéliales et les péricytes des veines de lapins traités par 4 mg/kg d'acétate de méthylprednisolone pendant 4 semaines montrent des altérations ultrastructurales [ 72], suggérant que les stéroïdes in vivo peuvent être toxiques pour le système vasculaire. Cette observation est en accord avec les ecchymoses cutanées superficielles connues après une corticothérapie à long terme. L'acétonide de triamcinolone a également induit une toxicité directe des cellules endothéliales rétiniennes in vitro et une altération de la choriocapillaire du rat in vivo [73]. Chez l'homme, à ce jour, ni les études, ni la pratique clinique n'ont montré d'effets toxiques directs des GC administrés à fortes doses dans le vitré, sur les vaisseaux de la rétine ou de la choroïde. Mais aucune étude spécifique n'a été conduite pour étudier cet effet.
À ce jour, les GC sont utilisés comme adjuvants du traitement par photothérapie dynamique ou par anti-VEGF afin de réduire les néovaisseaux choroïdiens de la DMLA, mais ils sont efficaces pour limiter les phénomènes exsudatifs des néovaisseaux inflammatoires des choroïdites ou dans le cadre de pathologies inflammatoires de la surface oculaire.
Voies d'administration et formes galéniques
Nous décrivons ici les formes commercialisées en France uniquement. Le tableau 16-2
Tableau 16-2
Formulations de glucocorticoïdes qui ont une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour une utilisation en ophtalmologie.
Dénomination commune internationaleNom de la spécialité pharmaceutiqueConcentration ou dosage
CorticoïdeMolécule associée
Corticoïde seulDexaméthasoneMaxidex® 0,1 % collyre 0,10 %
DexaméthasoneOzurdex® 700 μg implant intravitréen dégradable 700 μg
Dexaméthasone phosphate sodiqueDexafree® 1 mg/ml collyre en solution en récipient unidose 0,10 %
Dexaméthasone phosphate sodiqueDexocol® 1 mg/ml collyre en solution 0,10 %
FluorométholoneFlucon® collyre0,10 %
Hydrocortisone phosphate sodiqueSoftacort® 3,35 mg/ml collyre en solution en récipient unidose 0,335 %
Acétonide de fluocinoloneIluvien® Implant intravitréen non dégradable190 μg
Corticoïde + aminoside DexaméthasoneTobramycineTobradex® collyre en suspension0,10 %
DexaméthasoneTobramycineTodexal® 3 mg/1 mg par ml collyre en suspension 0,10 %
Dexaméthasone phosphate sodiqueFramycétine sulfateFrakidex® collyre0,10 %
Dexaméthasone phosphate sodiqueFramycétine sulfateFrakidex® pommade ophtalmique0,10 %
Dexaméthasone phosphate sodiqueNéomycine sulfateChibro Cadron® collyre en solution0,10 %
Acétonide de triamcinoloneNéomycine sulfateCidermex® pommade ophtalmique0,03 %
Corticoïde + deux antibiotiques DexaméthasoneNéomycine sulfate + polymyxine B sulfate Maxidrol® collyre0,10 %
DexaméthasoneNéomycine sulfate + polymyxine B sulfate Maxidrol® pommade ophtalmique0,10 %
Corticoïde + tétracycline DexaméthasoneOxytétracyclineSterdex® pommade ophtalmique0,267 mg/capsule molle
détaille les formulations qui ont une AMM pour une utilisation en ophtalmologie.
De nombreuses formulations comprennent une association de GC et d'antibiotique.
D'autres préparations injectables sont utilisées en pratique courante, hors AMM, pour des injections péri-oculaires et intraoculaires. En particulier, l'acétonide de triamcinolone (40 mg/ml) (Kenacort®) est une suspension de cristaux de taille non calibrée dans un excipient alcoolique (alcool benzylique). Les études expérimentales n'ont pas montré de toxicité oculaire des excipients aux concentrations contenues dans le Kenacort®. En revanche, les concentrations intrarétiniennes de triamcinolone au contact des cristaux peuvent être très élevées et exposer le patient à un risque de toxicité [ 74]. Cette préparation n'est pas approuvée pour les injections péri- ou intraoculaires. La durée d'action de la suspension d'acétonide de triamcinolone est d'environ 4 à 6 mois et résulte de la dissolution très lente , in situ , des cristaux. Dans le compartiment vitréen, la pharmacocinétique est peu prédictible et dépend de la taille des cristaux. Plusieurs formulations, adaptées à l'utilisation ophtalmologique, ont été développées et sont commercialisées dans différents pays. Les études ont montré que plus la taille des cristaux est calibrée et réduite, moins la durée d'action est longue.
Les injections sous-ténoniennes sont également réalisées hors AMM. Elles exposent à un risque faible de fonte et de nécrose sclérale, parfois compliquées de surinfections [75]. Ce risque pourrait être accru chez des patients présentant des maladies auto-immunes.
Le phosphate sodique de dexaméthasone (4 mg/ml) injectable est utilisé en injection sous-conjonctivale, également hors AMM. La pénétration intraoculaire dans les segments antérieur et postérieur est accrue par rapport à des instillations fréquentes, mais le passage systémique doit être pris en compte lorsqu'on s'adresse à des patients à risque (diabète, immunodépression, par exemple) et chez l'enfant (voir chapitre 2 ).
Effets indésirables des glucocorticoïdes
Effets indésirables des glucocorticoïdes administrés par voies extraoculaires
Les GC induisent un nombre considérable d'effets indésirables, dont certains peuvent conduire à une morbidité, voire à une mortalité (fig. 16-10
Fig. 16-10
Effets indésirables généraux des glucocorticoïdes.
Source : Cyrille Martinet.
). Dans tous les domaines de la médecine, il est recommandé de réduire les doses et la durée de la corticothérapie systémique. Des études récentes ont montré que 90 % des patients traités par corticothérapie pour une durée de 60 jours, ou plus, présentent des effets indésirables, même à des doses faibles (< 7,5 mg/jour). Les principaux effets, par ordre de fréquence, sont le risque d'ulcère gastroduodénal, le risque infectieux, les risques psychiatriques, puis métaboliques et cardiovasculaires. Mais d'autres effets sont observés tels que l'atrophie cutanée, l'ostéonécrose aseptique de la tête fémorale, l'ostéoporose, l'hirsutisme et le syndrome de Cushing.
Les effets oculaires sont fréquents, en particulier la survenue d'une cataracte dans 10 à 35 % des cas selon les études, même à des doses faibles (< 5 mg/jour) [ 76]. Le glaucome cortisonique résulte non seulement des traitements oculaires locaux, mais aussi des traitements systémiques. L'hypertonie est observée dans 5 à 10 % des cas avec une augmentation de la pression intraoculaire de 1,4 mmHg par 10 mg/jour d'équivalent en prednisone. De même, la durée du traitement influe sur le risque qui devient important après 10 mois de traitement continu. Mais l'hypertonie oculaire survient le plus volontiers chez des sujets qui ont une prédisposition génétique, et elle peut survenir plusieurs années après l'arrêt du traitement ce qui suggère que des mécanismes épigénétiques puissent intervenir. Les voies cutanée et nasale pourraient induire plus de glaucome que la voie orale, mais les études rapportent des fréquences très variables dans la mesure où la surveillance oculaire n'est pas systématique [77].
La cataracte sous-capsulaire postérieure est une complication fréquente quelle que soit la voie d'administration, systémique, nasale, laryngée ou cutanée. L'incidence augmente avec la durée et la dose de traitement. Elle est survenue dans 15 % des cas après 4 ans de traitement par prednisone à une dose inférieure à 10 mg par jour, et son incidence a augmenté à 30 % quand la dose était de 10 à 15 mg/jour et a atteint 80 % quand la dose dépassait 15 mg/jour. Chez des enfants traités pour syndrome néphrotique pendant environ 5 ans, la fréquence de cataracte a été de 20 %, et dépend de la durée du traitement et de la posologie de GC [78]. Alors qu'il est rare que les adultes présentent des cataractes avant la première année de traitement, celles-ci peuvent apparaître plus tôt chez les enfants. D'autres effets généraux sont classiquement décrits, en particulier le déséquilibre d'un diabète, l'hypertension artérielle et les risques infectieux, notamment chez des patients diabétiques.
Il est important de retenir que les voies péri-oculaires ne sont pas des voies locales et que le passage systémique important expose les patients à des complications générales qu'il convient de connaître et de dépister.
Choriorétinopathie séreuse centrale (CRSC)
La CRSC est favorisée et aggravée par les GC administrés par voie générale et locorégionale, mais pas par les injections intraoculaires de GC [ 79 , 80]. Le risque est plus important pour les formes orales, nasales, articulaires et cutanées [81-82-83-84-85-86-87-88-89-90]. Des formes sévères et bilatérales sont observées chez des patients greffés sous corticoïdes. La CRSC peut apparaître dans les 1 à 4 semaines qui suivent le début du traitement, mais est parfois retardée, ce qui suggère sur les GC puissent agir par des mécanismes épigénétiques. La survenue de CRSC est rare, mais environ 30 % des cas de CRSC ont des antécédents de corticothérapie. Le lien mécanistique entre les GC et la CRSC reste mal compris et pourrait faire intervenir une activation pathogénique de la voie minéralocorticoïde oculaire [ 91]. Cette hypothèse a conduit à proposer la prise d'antagoniste des MR dans le traitement de la CRSC, mais cette indication reste débattue. En cas de CRSC chronique, associée à une épithéliopathie diffuse, la prise de GC doit être évitée. Si elle est indispensable, il faut réaliser un suivi rapproché et traiter toute région active. L'arrêt de la corticothérapie est recommandé si une CRSC a été déclenchée par la prise de GC.
Effets indésirables des glucocorticoïdes administrés par voie oculaire
Les GC administrés par voie topique, péri-oculaire ou intraoculaire induisent des effets indésirables de fréquences variables qui dépendent du médicament, de la dose et de la voie d'administration. Le passage systémique des GC instillés doit être considéré quand la fréquence d'instillation est importante, en particulier chez l'enfant chez lequel une suppression de l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien a été rapportée après un traitement de GC instillés après chirurgie d'une cataracte congénitale [ 92]. Ce freinage de l'axe peut durer plus de 6 mois chez l'enfant et avoir des conséquences sur sa croissance.
Quelle que soit la voie d'administration oculaire, qu'il s'agisse de l'instillation de collyres, d'injections péri-oculaires ou intraoculaires, les GC induisent des effets oculaires.
Les risques de cataracte et d'hypertonie des collyres instillés dépendent de la structure de la molécule et de sa pénétration intraoculaire.
Hypertonie oculaire
Une hypertonie oculaire est, le plus souvent, observée dans les 2 à 8 semaines après le début du traitement topique et régresse généralement en 1 à 3 semaines après l'arrêt du traitement. Un glaucome à angle ouvert sous-jacent favorise une augmentation plus importante de la pression intraoculaire. L'hypertonie cortisonique serait associée à des facteurs de prédisposition génétique et/ou épigénétique. Sur une population de volontaires sains qui ont reçu une instillation de GC, trois groupes ont pu être distingués. Le premier groupe a présenté une légère mais rapide augmentation de la pression intraoculaire de 1,6 mmHg qui est restée stable pendant les 4 semaines d'observation. Les deuxième et troisième groupes ont présenté une augmentation constante de la pression qui a atteint 10 mmHg dans le deuxième groupe et a dépassé 16 mmHg à 4 semaines dans le troisième groupe. Par ailleurs, l'antécédent familial de glaucome chronique à angle ouvert est un facteur de prédisposition pour une hypertonie cortico-induite supérieure à 5 mmHg. D'autres facteurs de prédisposition incluent l'âge et la myopie supérieure à 5 D [ 93]. Le risque de glaucome dépend aussi du type de GC. Il est plus élevé pour la dexaméthasone 0,1 % et l'acétate de prednisolone (plus de 50 % des cas à 6 semaines) que pour la fluométholone (33 %) [ 76]. Le mécanisme de l'hypertonie est associé à une modification de la matrice extracellulaire produite par les cellules trabéculaires qui expriment les récepteurs aux GC [ 94 , 95], ainsi qu'à une réduction des mécanismes d'autophagie [ 96]. Les modifications du trabéculum seraient GR-dépendantes [97].
Cataractes
L'instillation de GC induit des cataractes sous-capsulaires chez l'adulte et chez l'enfant. En général, les patients se plaignent d'éblouissements et de photophobie, mais rarement d'une baisse importante de l'acuité visuelle. L'arrêt du traitement ralentit la progression de la cataracte, mais elle n'est jamais réversible. Les mécanismes de la cataracte cortico-induite sont mal compris, mais il est admis qu'elle est plus fréquente, aux États-Unis, dans la population hispanique et en cas de diabète.
Infections
Les GC exposent au risque de réactivation d'infection par HSV et augmentent la gravité des kératites herpétiques. Ils favorisent également les infections fongiques, parasitaires et bactériennes. L'utilisation de GC pour réduire les signes inflammatoires et limiter les processus cicatriciels secondaires à des infections doit être encadrée par des traitements anti-infectieux efficaces. Des cas de rétinite virale ou fongique ont été rapportés après injection péri-oculaire ou intraoculaire de GC.
Retard de cicatrisation épithéliale
Les GC systémiques et locaux peuvent retarder la cicatrisation des lésions épithéliales par un mécanisme lié à l'activation du MR, dont les antagonistes suppriment les effets néfastes des GC sur la cicatrisation épithéliale [ 9].
Inflammation oculaire
Une uvéite paradoxale avec des signes cliniques d'uvéite antérieure a été décrite après instillation de dexaméthasone ou d'acétate de prednisolone, plus fréquemment chez des patients mélanodermes [98 , 99]. Ces effets pro-inflammatoires des GC ont été décrits dans d'autres tissus, associés à une suractivation de la voie minéralocorticoïde qui est pro-inflammatoire au niveau des cellules immunitaires et dans les tissus oculaires, activant en particulier l'inflammasome.
Toxicité rétinienne
La toxicité rétinienne des différents GC a été largement débattue lors de l'emploi par voie intravitréenne de différentes formulations d'acétonide de triamcinolone (n'ayant d'AMM que pour une injection intra-articulaire). Les GC étant de puissants anti-inflammatoires, ils peuvent masquer in vivo leur toxicité. Plusieurs études ont démontré que les GC exercent in vitro une réduction de la viabilité des cellules de l'épithélium pigmentaire et gliales rétiniennes humaines de Müller, avec une plus grande sensibilité de ces cellules gliales par rapport aux cellules de l'épithélium pigmentaire. Les formes cristallines sont toxiques en raison de la déstabilisation des membranes plasmiques, mais le médicament lui-même, en solution (solubilisé dans de l'alcool benzylique à 1 %), reste toxique à des doses qui dépendent principalement de la lipophilie de la forme chimique; plus la forme est lipophile, plus elle est toxique et induit une mort cellulaire par paraptose [ 74], une forme de mort cellulaire programmée indépendante de la cascade, caractérisée par une vacuolisation cytoplasmique et décrite dans les maladies neurodégénératives [100]. Des expériences réalisées sur des cellules primaires de l'épithélium pigmentaire ont montré que la triamcinolone réduisait l'expression basale de la COX-2 et du VEGF [101], qui est nécessaire au maintien de la choriocapillaire. Les conséquences cliniques de ces observations pourraient apparaître sur le long terme après des années d'exposition de la rétine aux GC. La libération contrôlée de faibles doses de GC à partir d'implants intraoculaires pourrait réduire les risques de toxicité rétinienne à long terme [ 102 , 103]. Les GC peuvent être administrés par des voies péri-oculaires ou intravitréenne avec des formulations qui n'ont pas d'AMM pour ces voies d'administration (acétonide de triamcinolone ou phosphate disodique de dexaméthasone). Des études comparatives montrent que la voie intraoculaire est plus efficace que les voies péri-oculaires pour réduire l'OM inflammatoire, mais qu'elle ne réduit ni la fréquence, ni la sévérité des effets indésirables oculaires [ 104]. De plus, ces voies exposent à des effets indésirables généraux du fait du passage systémique.
Indications des glucocorticoïdes
Les GC sont fréquemment utilisés pour traiter les pathologies de la surface oculaire, en postopératoire des chirurgies intraoculaires, de la cornée et des tissus péri-oculaires, dans le traitement des pathologies inflammatoires intraoculaires et des OM.
Nous ne détaillerons pas les indications qui sont multiples dans tous les domaines de l'ophtalmologie. Les GC sont efficaces sur tous les signes de l'inflammation des tissus oculaires et sur les OM inflammatoires et a priori non inflammatoires. En fonction des étiologies, il est indispensable de prescrire un agent anti-infectieux adapté.
Dans certaines pathologies inflammatoires spécifiques, les GC ne sont cependant pas efficaces, par exemple dans les OM associés aux néovaisseaux choroïdiens de la DMLA, bien qu'ils puissent être prescrits en adjuvants d'autres traitements comme la photothérapie dynamique. Dans certaines pathologies, en particulier celles qui touchent la choroïde, la rétine et le nerf optique, les GC sont utilisés à forte dose sans que des études randomisées n'aient démontré leur intérêt par rapport à une observation simple. Leur prescription et les voies d'administration retenues sont également souvent une « question d'école» et ne reposent pas sur une médecine fondée sur des preuves. Il convient alors de peser le bénéfice/risque de ces traitements. Les effets bénéfiques peuvent conduire les patients à des automédications qu'il faut prévenir au risque de voir survenir des complications au long cours.
Contre-indications et précautions d'emploi
Anamnèse
Une anamnèse détaillée est nécessaire avant toute instauration d'une corticothérapie. Sur le plan oculaire, il faut rechercher un glaucome, une hypertonie cortisonique antérieure, des antécédents familiaux de glaucome, d'infection herpétique, et un diabète méconnu. Le glaucome contrôlé ne contre-indique pas la corticothérapie mais une surveillance accrue et un ajustement thérapeutique sont nécessaires.
Sur le plan général, avant d'instaurer une corticothérapie per os, il faut rechercher des antécédents psychiatriques et leurs traitements, un ulcère gastrique, une insuffisance rénale, des antécédents cardiovasculaires, un diabète, une hypertension et de l'ostéoporose. La recherche de tuberculose par la réalisation d'un Quantiféron® est recommandée. Il est conseillé de se rapprocher du médecin généraliste ou de l'interniste pour être accompagné dans la prescription en cas de doute. En cas de diabète, si une corticothérapie par voie générale est requise, il est préférable de se mettre en rapport avec le généraliste ou le diabétologue, car une déstabilisation de l'équilibre glycémique doit être anticipée. Chez l'enfant, il est préférable de se référer au pédiatre.
Dès la première semaine de corticothérapie générale, une suppression de l'axe hypothalamo-hypophysaire et une suppression de la production d'hormones surrénaliennes peuvent survenir, exposant à des risques vitaux en cas de stress, traumatisme ou chirurgie, qui nécessiteraient une supplémentation cortisonique.
Des interactions médicamenteuses doivent être recherchées. Certains médicaments accélèrent le métabolisme des corticoïdes; c'est le cas des inducteurs enzymatiques (rifampicine, carbamazépine, phénytoïne, phénobarbital). Les GC peuvent également modifier l'activité des anticoagulants.
Précautions d'emploi
Corticothérapie générale
Avant d'introduire une corticothérapie systémique, il est recommandé d'effectuer un bilan infectieux (tuberculose par exemple). Pour un traitement à long terme, il est impératif de rechercher les doses efficaces les plus faibles. Le traitement doit également être accompagné de mesures préventives visant à limiter certains effets indésirables : régime pauvre en sel, en sucre rapide et riche en protéines, activité physique, apport de calcium-vitamine D voire de bisphosphonates dans certains cas, traitement anti-ulcéreux. Le médicament glucocorticoïde est administré en une seule prise quotidienne le matin au réveil, au moment du pic nycthéméral de sécrétion afin de permettre le maintien d'une stimulation hypothalamo-hypophysaire et de minimiser les effets de la corticothérapie sur le sommeil. L'arrêt d'un traitement de plus de 2 semaines doit être progressif pour permettre une relance étalée de la sécrétion physiologique de la corticosurrénale mise au repos et pour éviter la survenue d'une insuffisance surrénale aiguë. L'administration de fortes doses de méthylprednisolone par voie intraveineuse se fera toujours en milieu hospitalier en vue de surveiller les effets du traitement (risque de poussée hypertensive en particulier). En cas d'infection, sur terrain immunodéprimé, le traitement ne doit pas être interrompu, mais plutôt renforcé, l'épisode représentant une agression devant laquelle l'organisme ne dispose pas du fonctionnement corticosurrénal physiologique. Il est important de vérifier les antécédents de glaucome et de mesurer la pression intraoculaire. Un examen complet à la recherche d'une cataracte et d'un glaucome doit être programmé régulièrement. En cas de CRSC, si la corticothérapie est vitale, une surveillance accrue sera réalisée et un traitement par laser ou photothérapie dynamique (PDT) sera réalisé.
Corticothérapie locale
Il convient de vérifier les antécédents infectieux (herpès), la tension intraoculaire et les antécédents personnels et familiaux de glaucome. Il faut associer un traitement hypnotisant et réaliser un champ visuel si besoin, et surveiller la pression intraoculaire à 8 jours, puis chaque mois et plus si besoin. Des anti-infectieux adaptés sont associés s'il existe des signes d'infection oculaire. Une décroissance progressive des doses de collyre est recommandée pour éviter des effets rebonds.
Conclusion
Pour optimiser l'utilisation des corticoïdes dans les maladies oculaires, réduire leurs effets indésirables et identifier le médicament le plus adapté pour soulager des symptômes et des signes spécifiques, il est nécessaire de mieux comprendre le mécanisme d'action de ces médicaments. À ce jour, un nombre réduit de glucocorticoïdes (GC) synthétiques sont couramment utilisés soit par voie topique, soit par injection oculaire. Ils sont choisis principalement en raison de leur biodisponibilité pour l'instillation locale, ou selon une classification de puissance déduite d'autres domaines de la médecine et d'autres organes. La puissance des GC est spécifique du tissu exposé peut ne pas être strictement liée aux affinités de la liaison aux récepteurs et à la quantité de récepteurs aux glucocorticoïdes [ 105], mais dépend également de cofacteurs et de down -régulations [106]. Une nouvelle classification des différents GC selon leurs effets oculaires spécifiques, bénéfiques et indésirables permettrait une utilisation optimisée de ces médicaments aux multiples effets thérapeutiques.
16.3. Implants intraoculaires de corticoïdes

A. RezkallahL. Kodjikian

Introduction
L'œdème maculaire est classiquement défini comme étant un épaississement maculaire dont la cause est une rupture des barrières hématorétiniennes (BHR), notamment l'interne. La rupture des BHR peut survenir dans différentes pathologies : diabète, inflammation, occlusions veineuses. La chronicisation de l'œdème maculaire entraîne progressivement une altération du tissu rétinien définitive et une baisse d'acuité visuelle possiblement irréversible, représentant ainsi un important enjeu thérapeutique. Les corticoïdes par voie intravitréenne sont essentiellement indiqués dans le traitement de certains œdèmes maculaires. Différents potentiels mécanismes d'action sont mis en jeu, notamment les effets anti-inflammatoires (inhibition des prostaglandines et des leucotriènes, inhibition du NF-κB, restauration de la concentration des molécules anti-inflammatoires, désactivation des cellules microgliales), les effets anti-angiogéniques, la stabilisation des jonctions serrées et la diminution de l'œdème des cellules de Müller.
Implant de dexaméthasone
Formulation et composition
Un implant contient 700 μg de dexaméthasone (fig. 16-11
Fig. 16-11
Structure de la dexaméthasone.
) et est composé d'une matrice biodégradable avec mélange de polymères d'acide polylactique et polyglycolique dont la dégradation en dioxyde de carbone et en eau va libérer progressivement la molécule active.
D'une longueur de 6 mm et d'un diamètre de 0,46 mm, il est injecté dans le vitré à la pars plana grâce à un dispositif d'injection à usage unique doté d'une aiguille creuse 22 G (fig. 16-12
Fig. 16-12
Injecteur Ozurdex® 22 G et implant de dexaméthasone.
).
La dexaméthasone présente une action anti-inflammatoire 30 fois plus importante que celle de l'hydrocortisone, et 5 à 6 fois plus importante que celle de la triamcinolone. La dexaméthasone est aussi plus hydrophile que la triamcinolone, ce qui permet d'obtenir des concentrations intravitréennes de produit actif plus élevées. La demi-vie de base de la dexaméthasone est de 5 heures 30. L'adjonction d'un polymère rallonge cette dernière et permet une action et une rémanence de la dexaméthasone sur 6 mois.
Libération
Chez le singe, il a été mis en évidence par Chang-Lin et al. que les taux intravitréens et intrarétiniens de dexaméthasone suivaient une évolution biphasique [107]. Cette évolution correspond à la fragmentation du dispositif :
  • à 2 mois de l'injection : pic de concentration atteint dans la rétine et le vitré;
  • entre 2 et 3 mois : diminution rapide de la concentration de dexaméthasone;
  • après 3 mois : atteinte du plateau qui se maintient pendant 6 mois.
Dans une autre étude chez le lapin, la même équipe a également démontré que les concentrations intravitréennes et intrarétiniennes n'étaient pas modifiées par le statut vitrectomisé ou non vitrectomisé de l'œil dans lequel se faisait l'injection [108]. Une étude clinique chez l'homme a mis en évidence l'absence de différence de profil d'efficacité et de sécurité concernant les œdèmes maculaires diabétiques entre les yeux vitrectomisés et non vitrectomisés [109]. Le profil d'efficacité ne semble pas non plus différé chez l'homme avant et après vitrectomie [ 110]. Aucune diffusion systémique de dexaméthasone n'a été mise en évidence après injection intravitréenne d'Ozurdex® [ 108].
Indications
Selon les résumés des caractéristiques du produit (RCP), l'implant de dexaméthasone est indiqué dans le traitement des patients adultes présentant :
  • une baisse d'acuité visuelle due à un œdème maculaire diabétique (OMD), chez des patients pseudophakes, ou pour lesquels un autre traitement est contre-indiqué ou pas assez efficace. Un arbre décisionnel a été publié récemment pour l'OMD [111];
  • un œdème maculaire secondaire à une occlusion veineuse rétinienne;
  • une inflammation du segment postérieur de l'œil de type uvéite non infectieuse.
Effets indésirables
Hypertonie oculaire
La principale crainte lors de l'injection intravitréenne d'un implant de dexaméthasone est la survenue d'une hypertonie intraoculaire. Les hypothèses physiopathologiques proposées pour l'hypertonie oculaire cortico-induite comprennent le dysfonctionnement du réseau trabéculaire dû à l'augmentation du dépôt de la matrice extracellulaire, l'inhibition de la phagocytose, l'altération du cytosquelette du filtre trabéculaire et l'augmentation des molécules d'adhésion cellulaire. Dans l'étude GENEVA [112], les niveaux de pression intraoculaire (PIO) ont atteint un pic à la fin du 2 e mois et se sont normalisés au 6 e mois; 24 % des patients ont nécessité l'introduction d'un traitement hypotonisant. Dans l'étude MEAD [ 113], un tiers des patients ont présenté une élévation de la PIO (≥ 25 mmHg) pendant toute la durée de l'étude. Comme dans le cas de GENEVA, cette élévation de la PIO s'est résorbée dans les 6 mois. Dans l'étude de tolérance SAFODEX-2 [ 114], l'incidence de l'hypertonie oculaire (définie cette fois par une augmentation de la PIO > 25 mmHg et/ou de 10 points) dans les yeux injectés était de 32,6 %. L'incidence de l'hypertonie oculaire était statistiquement plus élevée chez les patients atteints d'occlusions veineuses rétiniennes et d'uvéite par rapport à ceux atteints d'OMD. Un traitement hypotonisant a été introduit dans plus d'un tiers des yeux (36,8 %). Le jeune âge, le sexe masculin, l'uvéite, les occlusions veineuses rétiniennes et un glaucome préexistant traité par au minimum une bithérapie plutôt que par une monothérapie et une longueur axiale supérieure à 25 mm sont apparus comme des facteurs de risque d'hypertonie secondaire aux injections intravitréennes d'implants de dexaméthasone. Il n'existait cependant aucun effet cumulatif dans le temps avec le nombre d'injections [111].
Cataracte
Un autre effet indésirable connu est la survenue d'une cataracte. Avec un suivi court, l'étude GENEVA n'a pas constaté de progression significative de la formation de la cataracte [112]. Dans l'étude MEAD, 67,9 %, 64,1 % et 20,4 % des patients ont présenté une cataracte invalidante dans les groupes de 0,7 mg, 0,35 mg et 0,5 mg respectivement. Le taux de chirurgie de la cataracte au cours de l'étude était de 59,2 %, 52,3 % et 7,2 % respectivement. La majorité des cataractes étaient visuellement significatives au cours de la première année.
Autres complications
Aucune différence significative dans la survenue d'une hémorragie vitréenne n'a été retrouvée dans l'étude GENEVA. La vitesse d'insertion de l'implant dans la cavité vitréenne d'un œil vitrectomisé peut être à l'origine d'une majoration d'un risque d'hémorragie intravitréenne [115]. Aucune étude n'a trouvé une différence significative dans les déchirures ou les décollements de la rétine avec l'injection intravitréenne d'implant de dexaméthasone [116]. Khurana et al. ont étudié 15 patients avec 18 épisodes de migration de chambre antérieure de l'implant de dexaméthasone [117]. L'aphakie et la rupture capsulaire postérieure sont des contre-indications à l'usage de l'implant de dexaméthasone.
Implant d'acétonide de fluocinolone (FAc)
Formulation et composition
L'acétonide de fluocinolone (FAc) (fig. 16-13
Fig. 16-13
Structure de l'acétonide de fluocinolone.
) est un implant intravitréen non biodégradable à libération prolongée jusque 3 ans. Les excipients sont l'alcool polyvinylique, le tube en polyimide et l'adhésif siliconé. Contenant 0,19 mg de principe actif, il relargue environ 0,2 μg de produit par jour [ 118]. Il mesure 3,5 mm de longueur et 0,37 mm de diamètre.
Son injection se fait au travers de la pars plana grâce à un injecteur 25 G (fig. 16-14
Fig. 16-14
Injecteur Iluvien® 25 G, visualisation de l'implant.
).
Libération
La pharmacocinétique et la pharmacodynamie de l'implant chez l'homme ont été décrites dans l'étude FAMOUS [119]. Celle-ci montrait que le pic de concentration de FAc apparaissait au bout de 7 jours chez la majorité des patients, puis amorçait une décroissance au cours des six premiers mois. Les concentrations restaient stables entre les mois 12 et 36. Aucune diffusion systémique de fluocinolone n'a été mise en évidence après injection intravitréenne. Le profil de libération est moins abrupt que celui de la dexaméthasone, avec des taux aqueux moyens de FAc dans les yeux humains de 2,2 ng/ml à 1 mois, 1,8 ng/ml à 3 mois et de 0,5 à 1,2 ng/ml entre 6 et 36 mois [ 119].
Le temps de retraitement s'explique par cette pharmacocinétique fondée sur une solubilité dans l'eau 50 % plus faible du FAc, lui permettant cet allongement de demi-vie dans le vitré [120]. L'efficacité de cet implant à libération prolongée a été démontrée dans les études pivotales Fluocinolone Acetonide for Diabetic Macular Edema (FAME) A et B [121].
Indications
L'autorisation de mise sur le marché (AMM) en France avait été accordée dès juillet 2012 dans la baisse d'acuité visuelle associée à l'OMD chronique lorsque la réponse aux traitements disponibles est jugée insuffisante. Un algorithme décisionnel a été publié récemment pour l'OMD [122]. Le remboursement du produit est intervenu à partir de mars 2019. Une extension d'AMM a été attribuée en France en mai 2019 dans l'indication de la prévention de la rechute de l'uvéite non infectieuse récidivante affectant le segment postérieur de l'œil. Le remboursement en France a été obtenu en 2022. Le FAc est également utilisé depuis plus récemment dans le traitement des œdèmes maculaires cystoïdes associés aux uvéites.
Effets indésirables
L'une des craintes de l'utilisation de cet implant est la survenue d'événements indésirables de type hypertension intraoculaire. La sélection appropriée des patients peut permettre d'atténuer une partie de ce risque, car les données suggèrent que la survenue d'événements antérieurs liés à la PIO (indépendamment du fait qu'un patient ait déjà reçu un implant de corticoïdes ou non) peut être un bon prédicteur d'événements ultérieurs d'augmentation de PIO avec un implant corticoïde [ 123]. Les patients qui ne présentent pas d'augmentation significative de la PIO lors d'une injection antérieure de corticoïdes ont une valeur prédictive positive de 80 % que la PIO maximale observée ne dépasse pas 25 mmHg avec le FAc [124]. La valeur prédictive négative est également conservée dans le cas d'une injection multiple par rapport à un seul implant de dexaméthasone antérieur. Même si la PIO augmente, elle est généralement gérable avec des médicaments topiques et/ou une intervention chirurgicale [ 123].
L'incidence de cataracte chez les patients phakes a été d'environ 82 % dans le groupe traité par Iluvien® et de 50 % dans le groupe recevant le traitement sham ; 80 % des patients phakes traités par Iluvien® ont dû bénéficier d'une chirurgie de la cataracte après 3 ans contre 27 % des patients recevant le traitement sham ; chez la plupart des patients, la chirurgie a été nécessaire au bout de 21 mois [ 125].
Implant de dexaméthasone sans polymère
Les transporteurs de traitements fondés sur le principe des polymères sont très souvent utilisés pour assurer la libération prolongée d'un principe actif. Ces systèmes ont fréquemment une capacité limitée en substance active, une cinétique de libération imparfaite et/ou peuvent être à l'origine d'effets indésirables inflammatoires. La recherche sur des dispositifs permettant une libération progressive sans usage de polymère est en phase préclinique [126] et nous laisse entrevoir des résultats intéressants. Un des exemples est un dimère de dexaméthasone synthétisé en utilisant un lieur, le triéthylène gycol (TEG), et deux molécules de dexaméthasone, Dex-TEG-Dex [ 126] (fig. 16-15
Fig. 16-15
Structure du dimère de dexaméthasone : triéthylène gycol (TEG) et deux molécules de dexaméthasone (Dex-TEG-Dex).
).
Évaluation de l'activité anti-inflammatoire d'un implant de dimères de dexaméthasone dans un modèle d'uvéite chez le rat
L'effet du Dex-TEG-Dex a été évalué sur un modèle rongeur d'uvéite induite par le lipopolysaccharide (LPS). Un implant de Dex-TEG-Dex a été injecté dans l'espace intravitréen de l'œil du rat à l'aide d'une aiguille de 23 G suivi, 24 heures plus tard, d'une injection intravitréenne de LPS pour induire une inflammation. Une absence d'infiltrat cellulaire et une moindre épaisseur rétinienne tomographique ont été retrouvées par rapport aux témoins non traités par le Dex-TEG-Dex. Ainsi, ces résultats suggèrent la capacité d'un implant Dex-TEG-Dex de libérer des niveaux efficaces de substance active in vivo pour lutter contre une inflammation.
Pharmacocinétique des implants de dimères de dexaméthasone dans l'œil du lapin
La quantification de dexaméthasone après injection intravitréenne d'implants de Dex-TEG-Dex a été mesurée dans le vitré, la rétine et l'humeur aqueuse. Une libération lente et régulière de dexaméthasone a été observée dans l'humeur vitrée et la rétine jusqu'à 14 mois, et peu ou pas de dexaméthasone a été mesurée dans l'humeur aqueuse. Ces résultats, potentiellement intéressants, laissent espérer un risque moindre d'hypertonie oculaire après injection intravitréenne de corticoïdes.
Pharmacodynamie des implants de dimères de dexaméthasone dans l'œil du lapin
L'efficacité des implants Dex-TEG-Dex dans l'œil du lapin a été comparée à celle des implants de l'implant intravitréen Ozurdex®. Dans le modèle de lapin utilisé, l'Ozurdex® était inefficace et indiscernable du contrôle négatif à 10 semaines. Les implants Dex-TEG-Dex restaient, quant à eux, efficaces au-delà de 6 mois et perdaient leur efficacité entre 9 et 12 mois.
La technologie de dimères de médicaments semble être intéressante; néanmoins, des études de phase III restent nécessaires pour émettre la moindre conclusion aussi bien en termes de profil d'efficacité que de sécurité.
Conclusion
Les implants intraoculaires de corticoïdes occupent une place princeps dans l'arsenal thérapeutique des œdèmes maculaires, du fait de leur efficacité fonctionnelle et anatomique en l'absence de tout effet indésirable systémique. Présentant des mécanismes d'action et de profil de libération prolongée différents, il semblerait que les deux dispositifs ayant actuellement l'AMM en France puissent être complémentaires dans la prise en charge des pathologies rétiniennes, l'Ozurdex® étant un traitement curatif sur le court terme, l'Iluvien® étant plutôt un traitement préventif sur le moyen ou long terme.
La crainte principale de l'utilisation de ces implants demeure la survenue d'une hypertonie oculaire. La sélection appropriée des patients peut permettre sinon d'éliminer, du moins d'atténuer grandement ce risque, qui est en pratique rare, prévisible et assez facilement gérable à l'aide de thérapeutiques hypotonisantes locales. Les études précliniques sur des modèles de dispensation de corticoïdes sans polymère permettent d'effleurer l'espoir d'une réduction pertinente du risque de survenue d'hypertonie oculaire.
16.4. Anti-inflammatoires non stéroïdiens (voie topique)

F. ChastM. Zola

Introduction
Les anti-inflammatoires figurent parmi les médicaments les plus prescrits depuis la découverte des effets thérapeutiques des glucocorticoïdes dans la seconde moitié du XX e siècle [127]. Ils ont depuis été largement utilisés dans presque tous les domaines de la médecine ainsi qu'en ophtalmologie, bien que d'importants effets secondaires contrebalancent leur efficacité et limitent leur utilisation. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) constituent un groupe hétérogène de molécules ayant en commun l'absence d'un noyau stérol dérivé du cholestérol, et un spectre d'effets secondaires différent de celui des anti-inflammatoires stéroïdiens. Des données ont montré que plus de 30 millions de personnes dans le monde se font prescrire des AINS [128]. Ces médicaments possèdent des propriétés anti-inflammatoires, analgésiques et antipyrétiques, et inhibent l'activité de la cyclo-oxygénase (COX), empêchant la formation de prostaglandines (PG) et de thromboxane (TX).
Même si les corticoïdes représentent le premier choix pour le traitement des manifestations inflammatoires oculaires, ils présentent un important potentiel d'événements indésirables, parmi lesquels figure l'élévation de la pression intraoculaire (PIO). C'est la raison pour laquelle seules des indications ciblées judicieuses justifient leur prescription. Les AINS offrent certains avantages par rapport aux stéroïdes pour la réduction de l'inflammation, mais aussi certains inconvénients. Nous n'évoquons dans ce chapitre que les AINS topiques, l'utilisation des AINS par voie systémique étant présentée dans le chapitre 17 .
Les AINS par voie topique peuvent être une option pour minimiser le syndrome inflammatoire lors d'une chirurgie de la chambre antérieure et aucun AINS utilisé par voie topique ne semble responsable d'une augmentation de la PIO. Ainsi, les AINS locaux peuvent constituer des alternatives efficaces sans risque, en particulier chez les patients atteints de glaucome ou à risque de présenter une hypertonie oculaire.
Cyclo-oxygénases, prostaglandines et AINS
Pour comprendre le mécanisme d'action des AINS, il est important d'explorer les voies de l'inflammation. La réponse inflammatoire implique la production de prostaglandines (PG), médiateurs de l'activité inflammatoire omniprésents dans l'organisme. Les PG sont également les médiateurs d'autres types de réponses cellulaires et tissulaires qui mettent en jeu les plaquettes sanguines, les mastocytes, l'endothélium vasculaire, la rénine, etc. En raison de ce contexte physiologique, les PG sont produites sur le lieu de leur action, en fonction de la situation tissulaire, ce qui peut expliquer leur demi-vie courte. Dans l'œil, l'inflammation entraîne une dilatation vasculaire, une rupture de la barrière hématorétinienne, une douleur, un myosis et un œdème, processus médiés par les PG.
Les deux isoformes des cyclo-oxygénases, COX-1 et COX-2, sont les deux principales cibles pharmacologiques des AINS [129]. Ces deux isoformes se trouvent principalement dans le réticulum endoplasmique et sont composées d'un peu plus de 600 acides aminés (Mr = 71 kDa). Elles ont une activité catalytique ayant à la fois des fonctions cyclo-oxygénase et peroxydase. Les AINS empêchent l'accès de l'acide arachidonique (AA), le substrat de la COX. Les principaux prostanoïdes « physiologiques» sont les PG, les thromboxanes (TX), les leucotriènes (LTE) et les lipoxines (LX). Alors que les glucocorticoïdes inhibent à la fois la formation de PG et de leucotriènes en empêchant l'activation de la phospholipase A2 et la formation d'AA, les AINS agissent uniquement sur l'inhibition de la COX.
Les deux COX n'ont pas les mêmes rôles et fonctions physiologiques :
  • la COX-1 est exprimée de manière constitutive dans la plupart des cellules et produit des prostanoïdes à des fins d'homéostasie : protection de la muqueuse gastrique, régulation de la sécrétion d'acide au niveau de l'estomac, protection de la fonction rénale;
  • la COX-2, induite par des cytokines inflammatoires, des mitogènes, des endotoxines et des promoteurs de tumeurs, ne produit de prostanoïdes qu'au cours de l'inflammation. La production de la COX-2 est principalement liée aux cellules immunitaires, leucocytes, macrophages, ainsi qu'aux fibroblastes, aux chondrocytes, aux cellules endothéliales dès lors que le tissu est concerné par un phénomène inflammatoire.
Il est désormais de plus en plus clair que la COX-2 est également exprimée de manière constitutive dans un certain nombre de tissus, notamment le cerveau, l'intestin, les poumons, le thymus et les reins, dans lesquels elle produit des prostanoïdes, même en l'absence de manifestation inflammatoire. Chimiquement, les prostanoïdes sont des molécules lipidiques bioactives, médiateurs pro-inflammatoires, via des récepteurs couplés aux protéines G de haute affinité. Ils sont dérivés de l'AA, un acide gras ω-6 à 20 carbones (fig. 16-16
Fig. 16-16
Interactions AINS-COX-prostanoïdes.
La biosynthèse des prostanoïdes est médiée par les isoenzymes COX-1 et COX-2 à partir de l'acide arachidonique. L'acide arachidonique est produit à partir des phospholipides de la membrane cellulaire sous l'action de la phospholipase A2. Outre la formation de prostaglandine (PG) et de thromboxane (TX) par les isoformes de COX de manière spécifique aux cellules et aux tissus, les leucotriènes (LTE) constituent d'autres médiateurs de la réaction inflammatoire et sont produits par la 5-lipoxygénase (5-LO). Chaque prostanoïde interagit avec son récepteur spécifique. La filiation des prostanoïdes est détaillée dans la figure 16-17 .
Source : Cyrille Martinet.
).
Comme l'AA est hautement réactif et sensible à l'oxydation, on ne le trouve pas librement dans les cellules; il est stocké dans les phospholipides membranaires principalement sous forme de phosphatidyl-choline, phosphatidyl-éthanolamine et phosphatidyl-inositol. Les phospholipases 2 (PLA2) libèrent l'AA à partir des phospholipides membranaires. Par la suite, l'AA libre est d'abord oxydé en PGG2 par l'activité cyclo-oxygénase, suivie d'une peroxydation pour former la PGH2 (précurseur des prostanoïdes pro-inflammatoires) (fig. 16-17
Fig. 16-17
Les prostaglandines synthases spécifiques des familles tissulaires (PGE synthase, PGD synthase, PGF synthase, prostacycline synthase, thromboxane synthase) catalysent la conversion de PGH2 en médiateurs bioactifs tels que les prostaglandines PGD2, PGE2, PGF2α, PGI2 et thromboxane A2 (TXA2). Prostaglandine(s)
Ces métabolites initient la signalisation par une liaison à des récepteurs de prostanoïdes spécifiques liés aux protéines G pour produire une gamme variée d'effets physiologiques. Cependant, toutes les prostaglandines sont produites à partir d'un précurseur commun, l'acide arachidonique, mais leur quantité et leur type dans chaque cellule ou tissu dépendent des niveaux d'expression de COX-1/COX-2 et des synthases.
Source : Kaur B, Singh P. Inflammation : Biochemistry, cellular targets, anti-inflammatory agents and challenges with special emphasis on cyclooxygenase-2. Bioorg Chem 2022; 121 : 105663.
).
Le précurseur de la prostaglandine de série 2, PGH2, donne naissance à un certain nombre de prostanoïdes, tels que PGE2, PGF2α, PGI2, PGD2 et thromboxane A2 (TXA2), par isomérisation tissu-spécifique afin de produire les divers prostanoïdes exerçant un large éventail d'effets biologiques lors de l'interaction avec des récepteurs spécifiques couplés aux protéines G. Le rôle de ces prostanoïdes est donc spécifique du tissu et détermine les conséquences physiopathologiques de leur production d'une manière dépendante de l'environnement tissulaire où ils agissent.
Alors que PGD2, PGE2 et PGI2 sont de puissants vasodilatateurs au niveau du système cardiovasculaire, TxA2 provoque une vasoconstriction dans le même système. TxA2 joue également un rôle important dans l'agrégation plaquettaire, tandis que PGI2 affiche des propriétés anticoagulantes. Au niveau des voies respiratoires, TxA2 et PGF2α agissent comme des bronchoconstricteurs, tandis que PGI2 et PGE2 sont des bronchodilatateurs. PGE2, PGF2α et PGI2 protègent également la muqueuse gastrique. De plus, PGE2 et PGI2 favorisent le flux sanguin rénal et la diurèse en cas d'insuffisance rénale. En ce qui concerne la réponse inflammatoire, PGE2 semble être la prostaglandine la plus importante [ 130].
Rationnel de l'utilisation d'AINS dans la chirurgie de la cataracte
Comme les autres types de chirurgie, la chirurgie de la cataracte induit une réponse inflammatoire postchirurgicale. Or, une inflammation incontrôlée peut entraîner des effets indésirables sévères, tels qu'une synéchie postérieure, une uvéite, un œdème maculaire et un glaucome secondaire. La prise en charge de l'inflammation est donc un élément clé de la qualité de la chirurgie de la cataracte.
Actuellement, deux groupes de médicaments sont disponibles pour contrôler l'inflammation oculaire : les corticoïdes et les AINS. La prévention de la formation de prostaglandines réduit le processus inflammatoire. L'œdème maculaire cystoïde pseudophake (également appelé syndrome d'Irvine Gass) est un gonflement de la fovéa dû à une accumulation de liquide survenant quelques semaines à quelques mois après la chirurgie de la cataracte. C'est la cause la plus fréquente de perte d'acuité visuelle après une chirurgie de la cataracte. Sa prévalence varie d'une étude à l'autre. Mais, en utilisant l'angiographie à la fluorescéine, une prévalence pouvant aller jusqu'à 20 % a été rapportée alors que seulement 2 % avaient bénéficié d'un diagnostic d'œdème maculaire postchirurgical. Habituellement, en effet, l'œdème est infraclinique et spontanément résolutif, mais chez quelques patients, il peut devenir chronique, entraînant une perte visuelle permanente. La cause de l'œdème serait liée à une augmentation de la perméabilité vasculaire induite par les médiateurs inflammatoires que sont les prostaglandines. Cette hypothèse est corroborée par le fait qu'un risque accru d'œdème a été retrouvé chez les patients utilisant des analogues de la prostaglandine pour contrôler leur glaucome. La prévalence est d'autant plus élevée que les patients présentent une inflammation postopératoire élevée. Le risque d'œdème postopératoire est multiplié par trois chez les patients ayant des antécédents d'uvéite, lorsque l'intervention s'est soldée par une lésion iatrogène de l'iris, ou en cas d'antécédents d'occlusion veineuse rétinienne [131]. Globalement, le risque est minoré par l'utilisation d'un collyre d'AINS [132].
AINS et prostaglandines au niveau oculaire
Les premières indications des AINS par voie topique sont la prophylaxie et le traitement de l'œdème maculaire cystoïde (OMC) ainsi que la gestion de la douleur et de l'inflammation après une chirurgie de la cataracte. Il apparaît que l'administration d'indométacine par voie topique permet d'obtenir des concentrations intraoculaires d'indométacine supérieures à celles qui sont obtenues après administration par voie systémique, ce qui offre une option thérapeutique performante pour le traitement de l'OMC. On peut également utiliser l'indométacine en prophylaxie de l'OMC. Les AINS topiques offrent des propriétés analgésiques, anti-inflammatoires et antipyrétiques comme application principale, bien que d'autres attributs et applications existent.
Les interactions médicaments observées avec les AINS par voie systémique ne s'appliquent pas aux AINS topiques en raison des quantités très inférieures qui atteignent la circulation générale. En ce qui concerne les AINS topiques, il existe peu de contre-indications. Mais il a été constaté que les patients prenant de l'indométacine par voie orale avaient un échappement du contrôle de la PIO lors de l'utilisation de la brimonidine . Cette interaction entre l'indométacine par voie orale et la brimonidine topique mérite d'être connue. La perte d'efficacité de la brimonidine (–14 %; P = 0,004 pour la brimonidine seule contre –11 %; P = 0,3 avec l'indométacine) est significative, alors que la réduction de la PIO avec le latanoprost n'est pas modifiée par l'indométacine (–25 %; P < 0,0001 pour le latanoprost seul contre –30 %; P < 0,0001 avec l'indométacine). Le débit sanguin oculaire pulsatile augmente de 40 % avec le latanoprost, mais reste inchangé avec la brimonidine; plus spécifiquement, la microcirculation rétinienne médiane périphérique augmente de 23 % avec le latanoprost. La baisse d'efficacité de la brimonidine lors d'un traitement par l'indométacine peut être cliniquement significative [133].
AINS commercialisés en France pour la voie ophtalmique
Principales indications
Les AINS administrés par voie ophtalmique se présentent sous forme de collyres. II existe un consensus concernant la prescription d'un AINS dans le traitement postopératoire de la cataracte afin de lutter contre la réponse inflammatoire induite par la chirurgie et d'éviter l'OMC potentiel. Les indications de leur AMM dans les douleurs et les inflammations postopératoires en ophtalmologie sont validées par les autorités de santé (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé [ANSM], Haute autorité de santé [HAS]), notamment après une intervention pour cataracte (tableau 16-3
Tableau 16-3
AINS commercialisés en France pour la voie ophtalmique .
DCI (date d'introduction en France)Spécialité pharmaceutiqueIndications – posologie
Bromfénac (2012)Yellox®
0,9 mg/ml collyre sol
Chirurgie de la cataracte : 1 goutte dans l'œil ou les yeux malade(s) 2 fois par jour. Début du traitement le lendemain de la chirurgie de la cataracte et se poursuit pendant 2 semaines
Diclofénac (2007)Voltarenophta®
0,1 % (0,3 mg/0,3 ml) collyre unidose
Arrêt de commercialisation en mars 2022
Inhibition du myosis au cours de la chirurgie de la cataracte :
– préopératoire : jusqu'à 5 fois une goutte dans les 3 heures précédant l'intervention
Prévention des manifestations inflammatoires liées aux interventions chirurgicales de la cataracte et du segment antérieur de l'œil :
– préopératoire : jusqu'à 5 fois une goutte dans les 3 heures précédant l'intervention
– postopératoire : 3 fois 1 goutte dès la fin de l'intervention, puis 3 à 5 fois 1 goutte par jour. Durée maximale de traitement 4 semaines
Traitement des manifestations douloureuses oculaires liées à la kératectomie photoréfractive au cours des 24 premières heures postopératoires :
– préopératoire : 2 gouttes dans l'heure précédant l'opération
– postopératoire : 2 gouttes dans l'heure suivant l'opération, puis 4 gouttes dans les 24 heures suivant l'opération
Voltarenophtabak® 1 mg/ml collyre sol
Flurbiprofène (2000)Ocufen®
0,12 mg/0,4 ml
collyre unidose
Après traitement chirurgical de la cataracte : 1 goutte toutes les 4 heures (6 fois par jour) pendant 2 semaines, jusqu'à 5 semaines pour la prévention de l'œdème maculaire cystoïde
Après trabéculoplastie au laser : 1 goutte toutes les 4 heures (soit 6 fois par jour) pendant 1 semaine
Inhibition du myosis peropératoire : 1 goutte toutes les 30 minutes, 2 heures avant l'opération
Indométacine (1997)Indocollyre®
0,1 % collyre sol
Inhibition du myosis peropératoire : 4 gouttes la veille de l'intervention, 4 gouttes dans les 3 heures qui précèdent l'intervention
Prévention des manifestations inflammatoires liées aux interventions chirurgicales de la cataracte et du segment antérieur de l'œil : 1 goutte, 4 à 6 fois par jour jusqu'à complète disparition de la symptomatologie en débutant le traitement 24 heures avant l'intervention
Traitement des manifestations douloureuses oculaires liées à la kératectomie photoréfractive au cours des premiers jours postopératoires : 1 goutte, 4 fois par jour, au cours des premiers jours postopératoires
Indocollyre®
0,1 % collyre sol en récipient unidose
Kétorolac (1999)Acular®
Kétorolac® trométamol 5 mg/ml collyre sol (5 %)
1 ou 2 gouttes dans l'œil atteint toutes les 6 à 8 heures pendant 21 jours, en commençant les instillations 24 heures avant l'intervention
Patients âgés : aucune différence en termes de sécurité et d'efficacité n'a été observée entre les patients âgés et les patients plus jeunes
Gentamicine + indométacine (2002) Indobiotic® collyre unidoseTraitement local anti-inflammatoire et antibactérien vis-à-vis des germes sensibles à la gentamicine, après chirurgie de la cataracte. Une goutte, 4 fois par jour
).
Les premières indications des AINS topiques étaient le maintien de la dilatation pupillaire pendant l'opération de la cataracte. Des utilisations hors AMM ont été rapidement découvertes et signalées, avec, parmi celles-ci, le traitement de l'OMC. En matière de lutte contre l'inflammation observée en cas de syndrome de l'œil sec, le flurbiprofène s'est cependant avéré moins utile que des suppléments lacrymaux seuls ou en association avec des corticoïdes topiques.
Le diclofénac sodique 0,1 %, un des AINS topiques ophtalmiques les plus utilisés en France, connaît un éventail d'applications thérapeutiques comme la gestion de l'inflammation, de la douleur et de la photophobie en période postopératoire de la chirurgie réfractive (kératectomie photoréfractive et laser-assisted in situ keratomileusis [LASIK]). Le collyre de diclofénac est un traitement de l'inflammation dans la phase postopératoire de la chirurgie de la cataracte avec des résultats mitigés, mais un intérêt potentiel comme agent prophylactique de la colonisation des lentilles de contact en inhibant l'adhésion de Staphylococcus epidermidis au polymère de la lentille souple. Il a également été démontré que le collyre de diclofénac était supérieur à la dexaméthasone ou au kétorolac pour la gestion de la douleur postchirurgicale de la chirurgie du strabisme.
Les AINS topiques ont démontré leur efficacité dans plusieurs situations cliniques. Ces propriétés peuvent inclure une activité synergique avec des stéroïdes corticaux topiques après chirurgie de la cataracte. L'amélioration de la douleur, de l'inflammation et la résolution de l'OMC après une chirurgie de la cataracte ont été démontrées. Un effet similaire sur l'atténuation de la douleur post-kératectomie photoréfractive a également été montré. Le kétorolac a été spécifiquement suggéré pour application concomitante avec la ciclosporine A pour le traitement initial de la sécheresse oculaire chronique.
Aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) a approuvé la mise sur le marché du kétorolac , avec comme indication la modulation de la douleur et de l'inflammation postopératoire en chirurgie réfractive. Le kétorolac, cependant, a une application dans une variété de troubles oculaires inflammatoires, y compris l'allergie saisonnière, la conjonctivite, la conjonctivite papillaire géante, les abrasions cornéennes, etc. Bien que le potentiel théorique de retard de cicatrisation des plaies existe avec les AINS, la FDA considère que ce risque ne constitue pas un obstacle à l'administration topique de kétorolac (0,4 %) chez des patients présentant de petites lésions cornéennes.
Au total, les AINS topiques sont des médicaments pouvant être utilisés à titre préventif ou curatif pour minimiser les phénomènes inflammatoires dans la chirurgie du segment antérieur : cataracte, chirurgie réfractive, chirurgie du glaucome, etc.
Effets indésirables
Les brûlures et les picotements sont les effets indésirables les plus fréquents.
Un événement très sévère peut survenir avec les collyres d'AINS : la kératolyse (fonte de la cornée) associée à un petit nombre de cas chez des patients à haut risque après chirurgie ophtalmique. Cet effet indésirable est de nature à compromettre le pronostic fonctionnel. Cette fonte cornéenne est une affection au cours de laquelle l'épithélium cornéen disparaît avec un amincissement progressif du stroma cornéen pouvant entraîner une perforation cornéenne avec perte de vision. Cet événement indésirable grave avait été, dans un premier temps, mis en doute par les fabricants qui avaient avancé le rôle de l'excipient d'une spécialité générique. Mais sa réalité est aujourd'hui démontrée [ 134].
La kératolyse peut être induite par divers AINS oculaires et notamment par le diclofénac. Elle survient généralement chez les patients dont la cornée a déjà été opérée, ou qui sont diabétiques ou atteints d'une maladie auto-immune. Sa véritable incidence, probablement faible, reste inconnue. La dose d'AINS (3 à 6 gouttes par jour), les médicaments associés (stéroïdes, anesthésiques locaux, etc.) et la durée du traitement (de 5 jours à 10 mois dans la littérature) sont probablement des facteurs déterminants. Le stade épithélial – marqué par une perte progressive de l'épithélium cornéen, une baisse de la concentration tissulaire en prostaglandines, une infiltration leucocytaire et une desquamation facilitée par les métalloprotéinases matricielles – est suivi du stade stromal, caractérisé par la dégradation du collagène stromal. La prise de conscience de cet effet indésirable inquiétant, de ses facteurs de risque et de la nécessité d'une action rapide une fois diagnostiquée – et d'abord, urgemment, l'arrêt des AINS – permet d'atténuer le risque de perforation complète [134].
Une élucidation des explications pharmacodynamiques possibles des lésions cornéennes induites par les AINS comprend le rôle de l'hypoxie épithéliale, qui non seulement semble provoquer la production de prostaglandines, mais peut également jouer un rôle clé dans l'orchestration d'une nouvelle réponse inflammatoire sans rapport avec la formation de ces médiateurs pro-inflammatoires. L'utilisation d'AINS dans des conditions d'hypoxie cornéenne peut donc non seulement entraîner une réponse thérapeutique décevante, mais aussi une exacerbation inflammatoire paradoxale. D'autres mécanismes potentiels incluent la relation entre les AINS et les métalloprotéinases de la matrice cornéenne et la toxicité directe d'excipients cytotoxiques : tensioactifs, additifs et conservateurs présents dans les préparations ophtalmiques d'AINS.
Depuis la fin des années 1990, la prise de conscience de cette toxicité inquiétante, de ses facteurs de risque et de la nécessité d'une prise en charge rapide une fois le diagnostic réalisé, y compris l'arrêt des AINS, devrait en atténuer le risque [135]. La véritable incidence, vraisemblablement faible, de la kératolyse reste inconnue. La dose d'AINS et la durée du traitement peuvent jouer un rôle, mais les données sont actuellement imprécises.
Quelle efficacité?
AINS seuls versus corticoïdes seuls
La question imparfaitement résolue est la justification (ou non) de la prescription concomitante d'AINS et de corticoïde [ 136]. Les AINS systémiques et les stéroïdes systémiques sont le pilier du traitement de la sclérite aiguë et se sont révélés efficaces dans de nombreuses études. La littérature souligne l'intérêt du traitement par AINS, par corticoïdes, parfois par l'association des deux [137].
Une importante revue Cochrane a permis d'évaluer la place des AINS dans le traitement de l'inflammation et de la douleur dans la chirurgie de la cataracte non compliquée [138]. Il n'y a aucune preuve de différence chez les patients recevant un AINS par rapport aux participants recevant un corticoïde. Aucune des études effectuées ne permet d'affirmer une meilleure prévention de l'OMC une semaine après l'opération. Sur la base de quatre essais cliniques randomisés rapportant un œdème à un mois, peu d'éléments militent en faveur d'une meilleures prise en charge avec un AINS seul par rapport au traitement par corticoïde seul. Les auteurs de cette méta-analyse concluent que les preuves sont, à ce jour, insuffisantes pour éclairer la pratique du traitement de l'inflammation postopératoire après une phacoémulsification sans complication. Il peut cependant y avoir une certaine réduction du risque d'OMC dans le groupe AINS seuls et dans le groupe association AINS et corticoïdes.
AINS plus corticoïdes versus corticoïdes seuls
Aucune étude n'est concluante. Un traitement postopératoire avec AINS seul, en combinaison avec un AINS et un corticoïde, ou avec un corticoïde seul n'offre pas de certitude d'efficacité inférieure ou supérieure. En revanche, l'OMC est moins probable chez les participants recevant un AINS plus un corticoïde par rapport à ceux recevant un corticoïde seul. Les quelques événements indésirables signalés étaient dus à la phacoémulsification plutôt qu'aux collyres administrés. C'est ce qui a été démontré dans une étude portant sur le traitement de la prévention de l'OMC par corticoïde (dexaméthasone) + antibiotique (nétilmicine) avec addition, ou non, de bromfénac 0,9 %, népafénac 0,1 %, indométacine 0,5 %, ou diclofénac 0,1 % [139] . Trois des quatre AINS, bromfénac, nepafénac et indométacine, ont permis de réduire l'œdème, mais pas le diclofénac.
Diclofénac versus indométacine dans la prévention de l'œdème maculaire cystoïde après chirurgie de la cataracte
Il existe un consensus au sujet de la prescription d'un AINS dans le traitement postopératoire de la cataracte afin de lutter contre la réponse inflammatoire induite par la chirurgie et d'éviter l'OMC. Un essai contrôlé réalisé chez des patients présentant une cataracte sans facteur de risque associé général (diabète, maladie inflammatoire) ou oculaire (glaucome, uvéite, anomalie rétinienne) a permis d'évaluer le diclofénac 0,1 % et l'indométacine 0,1 % administrés pendant un mois. Aucun œdème n'a été relevé dans chacun des groupes. L'épaisseur fovéale n'est pas significativement modifiée. Au total, les deux AINS sont également efficaces. Il n'est pas possible d'établir une hiérarchie entre eux.
Conclusion
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont largement prescrits et utilisés pour leur efficacité dans le traitement de l'inflammation, leurs effets analgésiques et antipyrétiques. Ils représentent une catégorie hétérogène, mais agissent par l'inhibition des enzymes COX. Leur utilisation en ophtalmologie permet de surmonter la formation de cataracte, l'élévation de la pression intraoculaire et la recrudescence des infections virales associées à l'utilisation des glucocorticoïdes. Le risque d'effets indésirables cornéens graves et d'éventuelles toxicités systémiques doit être pris en considération lors du traitement et du suivi du patient.
16.5. Modulateurs de la réponse immune

Immunosuppresseurs
P. Duraffour, K. Dessaix
Introduction
Les pathologies auto-immunes ou inflammatoires sont une source importante de séquelles visuelles. Elles peuvent toucher le globe lui-même, mais également les annexes orbitaires, le nerf optique, la surface oculaire, ou encore les vaisseaux les vascularisant. Ces pathologies représentent un panel de situations cliniques très diverses, si l'on considère la nature des atteintes ophtalmologiques qui peuvent survenir, mais également la diversité des contextes étiologiques dans lesquels elles peuvent survenir. Dans ce contexte, le rôle de l'ophtalmologiste est de déterminer la gravité de l'atteinte ophtalmologique, et de déterminer si elle est accessible à un traitement local, ou si, au contraire, elle justifie un traitement systémique [140 , 141].
Le recours à des traitements systémiques (corticothérapie, immunosuppresseurs, biothérapies, immunomodulateurs) n'est donc pas exceptionnel en ophtalmologie. Il s'agit de traitements présentant des effets indésirables importants. Leur prescription nécessite une bonne évaluation des comorbidités du patient pour pouvoir choisir la meilleure option thérapeutique. Cette analyse nécessite des compétences spécifiques, mais également un temps dédié, et dépasse donc le cadre d'une consultation d'ophtalmologie.
Dans ce domaine, les prises en charge doivent être multidisciplinaires, et associer l'ophtalmologiste aux internistes, aux pédiatres, aux rhumatologues, aux neurologues, ou à d'autres spécialistes, pour optimiser la recherche étiologique, évaluer l'existence d'atteintes extra-ophtalmologiques et améliorer la prise en charge thérapeutique [ 142].
L'objectif de ce chapitre n'est pas de rendre l'ophtalmologiste autonome dans la prescription des traitements immunosuppresseurs. Il vise au contraire à montrer l'étendue et la complexité de ce domaine thérapeutique, afin d'enrichir le dialogue entre l'ophtalmologiste et les médecins des spécialités auxquelles il fera appel.
La rédaction de ce chapitre est en partie transversale. Le recueil exhaustif des informations concernant un traitement en particulier requiert donc la lecture de tous les chapitres.
Immunosuppresseurs et biothérapies : considérations générales
Immunosuppression : effets recherchés et effets indésirables
Effets recherchés : réduction de l'activité inflammatoire et épargne cortisonique
Les immunosuppresseurs et les biothérapies sont des médicaments qui interagissent avec le système immunitaire, en entravant son activation soit par des mécanismes relativement ubiquitaires (par exemple en entravant les multiplications cellulaires), soit par des mécanismes plus précis (par exemple en ciblant une cytokine en particulier). L'effet recherché est la réduction de l'activité du système immunitaire lorsque son dysfonctionnement est à l'origine d'une pathologie auto-immune ou auto-inflammatoire. L'efficacité de ces traitements peut être déterminée par la capacité du traitement de réduire l'activité inflammatoire de la maladie (traitement d'une crise, prévention des crises). Elle est également souvent déterminée en association avec la corticothérapie, par la capacité du traitement de permettre de réduire les doses de corticoïdes nécessaires à l'obtention d'une accalmie inflammatoire.
Effets indésirables : majoration du risque d'infection et du risque néoplasique
Le risque d'infection et le risque néoplasique sont parmi les principaux risques redoutés chez les patients traités par immunosuppresseurs et/ou par biothérapies. La probabilité de survenue et la gravité de ces événements sont aujourd'hui encore difficiles à définir. Les risques encourus sont dépendants du terrain, et peuvent donc fortement varier selon l'indication : oncologique, prévention du rejet après transplantation d'organe, pathologie auto-immune systémique, pathologie oculaire isolée. Les risques encourus dépendent également des associations thérapeutiques, et augmentent si le patient est traité par plusieurs immunosuppresseurs et/ou une corticothérapie systémique. Le caractère tardif de ces effets secondaires rend plus difficile leur connaissance et les essais cliniques ne sont que peu adaptés à leur évaluation. Enfin, les indications ophtalmologiques sont multiples, et le nombre d'essais contrôlés et prospectifs dans ces contextes est faible. Au total, il est difficile de définir avec précision les risques encourus dans le contexte particulier des indications ophtalmologiques.
Risque infectieux
La prescription d'un traitement immunosuppresseur est contre-indiquée chez les patients présentant une pathologie infectieuse non contrôlée.
Infections bactériennes
Le risque de réactivation tuberculeuse est élevé et bien connu chez les patients traités par anti-TNF-α. Ce risque est, par précaution, considéré comme élevé pour les biothérapies arrivées plus récemment sur le marché; il reste cependant aujourd'hui mal connu. Le risque d'infection bactérienne regroupe aussi celui de survenue d'infections plus courantes : infections cutanées staphylococciques, infections dentaires, infections des voies aériennes supérieures, mais aussi infections respiratoires basses qui peuvent être sévères. Un bilan odontologique sera réalisé avant l'introduction d'un traitement immunosuppresseur afin d'identifier des foyers infectieux dentaires à traiter.
Infections virales
Les réactivations virales herpétiques et zostériennes surviennent fréquemment chez les patients immunodéprimés. Leur gravité permet de déterminer si une levée de l'immunodépression est nécessaire ou non. Après une phase de traitement curatif, un traitement de prévention secondaire par valaciclovir est prescrit tant que persiste l'immunodépression. La survenue d'une maladie à cytomégalovirus (CMV) est un marqueur d'immunodépression profonde qui doit faire alléger l'immunodépression. Le risque de réactivation des virus des hépatites B et C doit être évalué avant le traitement. La leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP) est une infection cérébrale très rare, provoquée par le virus JC (John Cunningham), et dont le pronostic est particulièrement sévère. L'immunodépression est un facteur de risque d'infection grave au Sars-Cov2. Chez les patients immunodéprimés non répondeurs à la vaccination, une prophylaxie primaire par anticorps monoclonaux est également proposée.
Infections parasitaires et fongiques
La survenue d'une pneumocystose marque une immunodépression profonde et impose l'allègement de l'immunodépression. La prévention primaire de la pneumocystose n'est pas systématique, et ne repose pas sur un consensus établi. Elle est parfois proposée chez les patients traités par cyclophosphamide ou par rituximab, d'autant plus que ces traitements sont prescrits dans un contexte de vascularites nécrosantes systémiques, ou qu'il existe un taux de lymphocytes CD4 inférieur à 300/mm 3 [ 143]. L'immunodépression est un facteur de risque de survenue de candidoses cutanéomuqueuses.
Vaccinations
Les vaccinations complémentaires nécessaires seront réalisées idéalement avant l'instauration du traitement immunosuppresseur, afin de permettre d'obtenir une meilleure réponse vaccinale. Les vaccinations complémentaires cibleront notamment : pneumocoque, grippe, Sars-Cov2, hépatite B. Les vaccins vivants sont contre-indiqués chez tous les patients recevant un immunosuppresseur et/ou une biothérapie et/ou une corticothérapie à une dose supérieure à 10 mg/j d'équivalent prednisone ou sous forme de bolus. Après l'arrêt des traitements, le délai minimal à respecter pour vacciner est de 3 mois (6 mois pour le rituximab) [143].
Risque néoplasique
L'existence d'une pathologie cancéreuse est une contre-indication à l'administration d'un traitement immunosuppresseur. Une étude rétrospective a montré des résultats plutôt rassurants concernant le risque néoplasique chez les patients recevant un immunosuppresseur pour un motif ophtalmologique [144-145-146]. Chez les patientes traitées par immunosuppresseurs, une surveillance gynécologique annuelle doit être réalisée (frottis cervical utérin et dépistage du human papillomavirus ) pour pouvoir dépister une néoplasie cervicale utérine. Une consultation de dermatologie doit être réalisée tous les ans pour dépister une néoplasie cutanée, et ce d'autant plus que le patient reçoit un traitement par anti-TNF-α. Une photoprotection est nécessaire chez les patients traités par immunosuppresseurs. Chez les patients traités par azathioprine, le risque important de survenue de néoplasie, notamment de myélodysplasie, augmente avec la dose cumulée. Si un traitement par azathioprine est poursuivi plusieurs années, il est souhaitable, à partir de cinq années de traitement, d'envisager une alternative thérapeutique pour réduire ce risque. L'augmentation du risque de carcinome urothélial chez les patients exposés au cyclophosphamide nécessite une surveillance annuelle. Le patient doit notamment être informé de la nécessité de consulter rapidement en cas d'apparition d'une hématurie macroscopique. Le respect des précautions d'usage du cyclophosphamide peut permettre de réduire ce risque. Enfin, l'arrêt du tabac est nécessaire chez les patients fumeurs qui requièrent un traitement immunosuppresseur ou une biothérapie [ 143].
Présentation des différentes classes de médicaments et de leur pharmacodynamie
Le tableau 16-4
Tableau 16-4
Classes thérapeutiques d'immunosuppresseurs et de biothérapies .
Sous-classeDCI (Nom commercial)Type de molécule
ImmunosuppresseurAntimétaboliteMéthotrexate
(Méthotrexate®, Ledertrexate®, Nordimet®, Metoject®, Novatrex®, Imeth®)
Analogue de l'acide folique
Azathioprine (Imurel®)Dérivé de la 6-mercaptopurine
Mycophénolate Mofétil (Cellcept®)Inhibiteur sélectif de l'inosine monophosphate déshydrogénase
Agent alkylantCyclophosphamide (Endoxan®)Oxazophosphorine (moutardes azotées)
Anti-calcineurineCiclosporine (Neoral®, Sandimmun®)Peptide inhibant la calcineurine par liaison à la cyclophiline
Tacrolimus (Prograf®, Advagraf®, Envarsus®, Modigraf®, Adoport®)Peptide inhibant la calcineurine par liaison à l'immunophiline
BiothérapieAnti-TNF-alphaAdalimumab
(Humira®, Amgevita®, Imraldi®, Idacio®, Hyrimoz®, Hulio®, Solymbic®)
Anticorps monoclonal anti-TNF-alpha humain (sous-type IgG1)
Infliximab (Remicade®, Flixabi®, Inflectra®, Remsisma®)Anticorps monoclonal anti-TNF-alpha chimérique (murin-humain – sous type IgG1)
Golimumab (Simponi®)Anticorps monoclonal anti-TNF-alpha humain (sous-type IgG1/k)
Certolizumab (Cimzia®)Fragment Fab d'anticorps humanisé conjugué à deux chaînes de polyéthylène glycol
Étanercept (Enbrel®, Benepali®, Erelzi®)Protéine de fusion récepteur soluble du TNF-IgG1
Anti-CD20Rituximab (Mabthera®, Truxima®, Rixathon®)Anticorps monoclonal chimérique (murin/humain – sous type IgG1)
Anti-IL-17Secukinumab (Cosentyx®)Anticorps monoclonal humain (sous-type IgG1/k)
Ixekizumab (Taltz®)Anticorps monoclonal humanisé (sous-type IgG4)
Anti-IL-6Tocilizumab (Roactemra®)Anticorps monoclonal humanisé (sous-type IgG1)
Sarilumab (Kevzara®)Anticorps monoclonal humain (sous-type IgG1)
Anti-IL-1Anakinra (Kineret®)Antagoniste du récepteur de l'interleukine 1 humaine
Canakinumab (Ilaris®)Anticorps monoclonal humain (sous-type IgG1/k)
présente une classification des médicaments étudiés dans ce chapitre, ainsi que leur nature biochimique et leurs principales cibles d'action.
Le méthotrexate présente une structure chimique proche de la vitamine B9. L'azathioprine et l'acide mycophénolique présentent des structures chimiques proches de précurseurs nucléosidiques. Le cyclophosphamide est une moutarde azotée, capable de réaliser l'alkylation des guanines. La ciclosporine et le tacrolimus sont des peptides cycliques composés d'acides aminés, capables d'inhiber la calcineurine.
La plupart des biothérapies ont des structures proches de celles d'un anticorps monoclonal de type immunoglobuline G (IgG). Cette structure biochimique est à l'origine de leur mode d'action, mais également de certains effets secondaires. La partie variable portée par le fragment Fab est la région de fixation de l'anticorps avec sa cible, et permet une action ciblant une molécule précise; on parle de « thérapies ciblées». Le fragment Fc permet la mise en action du système immunitaire au niveau de la cible : cytotoxicité dépendant du complément, cytotoxicité dépendant des anticorps, mort cellulaire par apoptose. Les anticorps monoclonaux (notamment de classe IgG) peuvent passer la barrière placentaire en fin de grossesse. Les phénomènes d'immunisation et les réactions d'hypersensibilité peuvent également survenir, mais moins fréquemment pour des anticorps humanisés ou humains que pour des anticorps chimériques [147].
Caractéristiques pharmacocinétiques
Le tableau 16-5
Tableau 16-5
Caractéristiques pharmacocinétiques des différents immunosuppresseurs et des différentes biothérapies.
DCIDemi-vie plasmatiqueModalités principales d'élimination et/ou de transformation
Immunosuppresseurs
Méthotrexate3-4 heures Élimination principalement par voie urinaire
Bilan préthérapeutique : créatininémie
30 < CLcr < 59 ml/min : réduire de moitié la posologie
CLcr < 30 ml/min : traitement contre-indiqué
Azathioprine1-2 heures Élimination du médicament reposant principalement sur l'inactivation par la xanthine oxydase et par la thiopurine méthyltransférase (TPMT)
Déficit en TPMT héréditaire (génétique) ou secondaire à des médicaments (olsalazine, mésalazine, sulfasalazine) : contre-indication
Étude du polymorphisme génétique de la TPMT recommandée dans le bilan préthérapeutique
Association avec les inhibiteurs de la xanthine oxydase (allopurinol, febuxostat) formellement contre-indiquée. Prises à distance des ingestions de produits laitiers
Employer les posologies minimales (1 mg/kg/jour) chez l'insuffisant rénal et chez l'insuffisant hépatique
Mycophénolate Mofétil18 heures Métabolisation du MPA en MPAG par glucuronylation. Reconversion du MPAG en MPA via le cycle entéro-hépatique
N.B. : Élimination principalement par voie urinaire sous forme de MPAG
Interactions médicamenteuses modifiant la pharmacocinétique au niveau du cycle entéro-hépatique : cholestyramine, ciclosporine A, antibiotiques
CLcr < 25 ml/min : ne pas dépasser 2 g par jour
Cyclophosphamide4-8 heures Activation par hydroxylation hépatique
N.B. : Élimination essentiellement urinaire, sous forme de multiples métabolites, dont l'acroléine (molécule responsable de la toxicité vésicale)
Interactions médicamenteuses possibles nombreuses
Infection urinaire aiguë, cystite hémorragique préexistante, obstruction des voies urinaires : contre-indication. Surveillance de l'ECBU avant et pendant traitement
Administration d'Uromitexan® pour les fortes doses. Hydratation avant et pendant la perfusion. Mictions régulières pendant et après la perfusion
Ciclosporine7-11 heures Métabolisme hépatique par CYP3A4. Métabolisme influencé par la glycoprotéine P
Élimination principalement biliaire
Interactions médicamenteuses avec les inducteurs et inhibiteurs du CYP3A4 et/ou de la glycoprotéine P
Réduction de posologie possiblement nécessaire chez les patients insuffisants hépatiques
Tacrolimus43 heures Métabolisme hépatique par CYP3A4. Métabolisme influencé par la glycoprotéine P
Élimination principalement biliaire
Interactions médicamenteuses avec les inducteurs et inhibiteurs du CYP3A4 et/ou de la glycoprotéine P
Réduction de posologie possiblement nécessaire chez les patients insuffisants hépatiques
Biothérapies
Adalimumab14 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Infliximab10 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être souvent majoré par immunisation
Golimumab14 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Certolizumab14 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Étanercept3 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme globalement peu influencé par l'immunisation
Rituximab21 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
N.B. : Élimination médiée par la cible
Secukinumab27 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Ixekizumab13 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Tocilizumab8-14 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Sarilumab8-10 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Anakinra4-6 heures Modalités d'élimination mal connues. Clairance plasmatique réduite chez les patients insuffisants rénaux
CLcr < 30 ml/minute : réduire la fréquence d'injection (injecter un jour sur deux)
Canakinumab26 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
présente un résumé des principales caractéristiques pharmacocinétiques des différentes molécules étudiées dans ce chapitre.
Considérations vis-à-vis de la grossesse et de l'allaitement (tableau 16-6 )
Le Centre de référence sur les agents tératogènes (CRAT) étudie les risques induits par les médicaments, vaccins, toxiques et radiations sur la grossesse et l'allaitement. Ce paragraphe s'appuie sur les renseignements proposés par le site internet du CRAT.
La capacité d'un médicament d'induire des malformations fœtales est plus ou moins bien établie selon les médicaments, notamment selon leur ancienneté d'utilisation. En ce qui concerne les immunosuppresseurs et biothérapies, le risque d'infection chez la mère et/ou chez l'enfant est un risque supplémentaire encouru par les patients qui reçoivent ces traitements. La prescription d'un traitement immunosuppresseur et/ou d'une biothérapie au cours de la grossesse doit privilégier, dans la mesure du possible, un traitement pour lequel il existe des données nombreuses et rassurantes vis-à-vis du risque malformatif [148]. L'utilisation de certains médicaments étant rare dans le contexte de la grossesse, les données disponibles restent encore peu nombreuses, notamment pour les biothérapies les plus récentes [ 148].
Un dosage de β-HCG doit être réalisé avant d'introduire un traitement tératogène chez une femme en âge de procréer.
La tératogénicité par altération de la spermatogenèse chez un patient de sexe masculin nécessite par principe de précaution la recommandation d'une contraception chez les patients masculins qui reçoivent ces traitements. Lorsqu'un patient de sexe masculin se voit administrer un traitement pouvant être tératogène par altération de la spermatogenèse, un délai de 3 mois (correspondant à un cycle de spermatogenèse) est recommandé entre l'arrêt du traitement et la conception. Le délai recommandé entre l'arrêt du traitement et la conception est parfois plus long (12 mois pour le cyclophosphamide par exemple), mais le plus souvent sans données fiables permettant de l'argumenter. Un médicament tératogène le sera également souvent pour d'autres espèces animales. Afin de protéger au mieux l'environnement, les médicaments non utilisés, périmés ou non, doivent être rapportés au pharmacien, pour orienter ces déchets vers une filière de tri sélectif adaptée.
La barrière placentaire évolue au cours de la grossesse. En fin de grossesse, les IgG sont capables de traverser cette barrière, et d'induire des effets secondaires sur le fœtus, voire sur le nouveau-né. Parmi les anti-TNF-α, le certolizumab est remarquable par la suppression du fragment Fc dans sa structure, qui réduit ainsi son passage placentaire.
Réactions d'hypersensibilité
La survenue de réactions d'hypersensibilité est possible avec tous les médicaments évoqués dans ce chapitre, ainsi qu'avec leurs excipients. Celles-ci peuvent parfois être graves et mener au décès. Les traitements ayant déjà entraîné une réaction d'hypersensibilité ne doivent pas être réadministrés.
Le rituximab peut être à l'origine de réactions d'hypersensibilité immédiate graves, qui se manifestent le plus souvent sous la forme d'un bronchospasme. Celles-ci surviennent habituellement quelques minutes après la perfusion (soit plus tôt que les réactions secondaires au syndrome de relargage cytokinique). Le rituximab est contre-indiqué chez les patients présentant une hypersensibilité au rituximab ou aux protéines d'origine murine. Afin de réduire ce risque, la perfusion intraveineuse sera lente, injectée sur plusieurs heures, et avec une prémédication par antihistaminiques, solumédrol et paracétamol. L'apparition de signes d'hypersensibilité (dyspnée, bronchospasme, hypoxie) nécessite l'arrêt immédiat de la perfusion. L'adrénaline doit être immédiatement disponible si nécessaire. L'administration du rituximab doit être réalisée en milieu hospitalier.
La pneumopathie interstitielle immuno-allergique est un effet indésirable rare mais grave du méthotrexate, et qui impose son arrêt immédiat. Des hépatites immunoallergiques peuvent également survenir chez les patients exposés au méthotrexate, à l'azathioprine ou au mycophénolate mofétil. Des pancréatites immuno-allergiques peuvent survenir chez les patients exposés à l'azathioprine.
Les toxidermies comprennent des réactions d'hypersensibilité graves, mais qui restent très rares lors de l'administration d'un traitement immunosuppresseur.
Spécificités des immunosuppresseurs
Antimétabolites et agents alkylants
Les antimétabolites et agents alkylants agissent en perturbant la synthèse des acides nucléiques. L'altération de l'hématopoïèse et le risque de survenue de cytopénies peuvent survenir avec chacun de ces médicaments. Des effets secondaires digestifs (vomissements, altérations du transit) sont également fréquents lors de la prise de ces traitements.
Antimétabolites
Méthotrexate
Analogue structural de l'acide folique
Le méthotrexate fait partie de la famille des antimétabolites, et plus précisément des antifoliques. Le méthotrexate est un analogue structural de l'acide folique qui agit en bloquant la dihydrofolate réductase et, ainsi, la synthèse de la thymidine et donc de l'ADN durant la phase S des mitoses cellulaires. Il agit par ailleurs, même à faible dose, comme un anti-inflammatoire dont le mécanisme supposé est une accumulation d'adénosine qui se lie aux récepteurs A2 inhibant l'activité des polynucléaires. Le méthotrexate peut être prescrit dans le cadre de son autorisation de mise sur le marché (AMM) dans la polyarthrite rhumatoïde sévère et active chez l'adulte, dans les formes polyarticulaires de l'arthrite juvénile idiopathique sévère [149], dans des formes modérées à sévères de psoriasis, dans des formes sévères de rhumatisme psoriasique chez l'adulte, et dans des formes légères à modérées de la maladie de Crohn chez les patients adultes réfractaires ou intolérants aux thiopurines. Le méthotrexate est également prescrit hors AMM, dans la maladie de Behçet [150], dans la sarcoïdose, dans les formes non sévères de vascularites nécrosantes systémiques [143], dans la maladie de Horton à visée d'épargne cortisonique [ 151], et dans les uvéites chroniques non infectieuses atteignant le segment postérieur [152]. Le méthotrexate est également souvent proposé aux patients présentant des sclérites idiopathiques [141]. Dans les indications ophtalmologiques, le méthotrexate est prescrit à la posologie de 0,3 mg/kg par semaine, per os, ou bien par voie sous-cutanée en cas de mauvaise tolérance digestive ou de mauvaise absorption. Il faut compter un minimum de 4 à 6 semaines à pleine dose pour juger des premiers résultats sur la maladie. La toxicité digestive du méthotrexate est fréquente, à type de nausées, de douleurs abdominales ou, plus rarement, de diarrhées ou de vomissements. La toxicité muqueuse est davantage liée à la dose administrée, notamment en cas d'oubli de la supplémentation associée par acide folique, et peut se manifester par une stomatite et/ou une mucite, responsables d'œsophagite ou de diarrhées. Outre la macrocytose, sans conséquence clinique, la toxicité hématologique du méthotrexate est beaucoup moins fréquente que la toxicité hépatique. Les pancytopénies sont rares (1 %), mais parfois graves, pouvant mener au décès. Les dyscrasies sanguines préexistantes sont une contre-indication. La numération formule sanguine et des plaquettes est réalisée avant introduction du traitement, puis surveillée mensuellement durant les trois premiers mois, puis toutes les 4 à 12 semaines. L'association du méthotrexate et du sulfaméthoxazole-triméthoprime augmente les risques de toxicité hématologique; cette association est donc fortement déconseillée. Une supplémentation systématique en acide folique, à la dose de 10 mg/semaine, 48 heures après la prise du méthotrexate, est nécessaire pour en réduire la toxicité potentielle, en particulier muqueuse et hépatique.
Troubles sévères de la fonction hépatique
Une augmentation des transaminases est fréquente et le plus souvent transitoire. Elle peut survenir en début de traitement, selon un mécanisme immuno-allergique, mais aussi tardivement. Un traitement prolongé, l'âge, les comorbidités hépatiques (alcool, diabète, obésité, hépatites virales) sont des facteurs de risque de survenue des anomalies biologiques hépatiques. La prise du méthotrexate est contre-indiquée chez les patients présentant des troubles sévères de la fonction hépatique, chez les patients alcooliques. La réalisation des sérologies des hépatites B et C, ainsi que le bilan hépatique sont nécessaires dans le bilan préthérapeutique. Une surveillance régulière des transaminases est indispensable et une réduction de posologie voire un arrêt du traitement sont nécessaires en cas d'anomalies biologiques persistantes. L'évolution vers la fibrose ou la cirrhose est rare.
Azathioprine
Promédicament de la 6-mercaptopurine
L'azathioprine est un immunosuppresseur de la famille des antimétabolites. C'est un promédicament de la 6-mercaptopurine, qui est elle-même convertie dans le secteur intracellulaire en 6-thioguanine nucléotides (qui s'incorpore à l'ADN, provoquant des cassures et des blocages en phase G2) et en 6-méthyl-mercaptopurine nucléotides (qui inhibe la synthèse des purines). L'azathioprine bloque ainsi la réplication de l'ADN et de l'ARN, et donc la prolifération des lymphocytes T activés et B activés. L'azathioprine dispose d'une AMM dans la prévention du rejet du greffon chez les patients transplantés d'organes, dans les maladies dysimmunitaires (lupus systémique, polyarthrite rhumatoïde, hépatite auto-immune, purpura thrombopénique idiopathique, anémie hémolytique auto-immune, dermatomyosite, polymyosite, vascularites systémiques, pemphigus) et dans le traitement des maladies inflammatoires chroniques intestinales. L'azathioprine est utilisée hors AMM dans la prise en charge de la maladie de Behçet [ 150] et des uvéites chroniques non infectieuses atteignant le segment postérieur de l'œil [ 152]. L'azathioprine est administrée par voie orale à la dose de 2 mg/kg/jour en 1, 2 ou 3 prises quotidiennes, sans dépasser 150 mg/j. Cette dose peut être augmentée à 3 mg/kg/j par le prescripteur s'il le juge utile, mais sans dépasser 150 mg/j.
Métabolisme dépendant de la thiopurine méthyl transférase (TPMT) et de la xanthine oxydase conditionnant le risque hématologique
La xanthine oxydase transforme la 6-mercaptopurine en un métabolite inactif. L'inhibition de la xanthine oxydase, en particulier par des médicaments comme l'allopurinol ou le febuxostat, entraîne un risque d'accumulation et donc de myélosuppression accrue. La prescription concomitante d'un traitement hypo-uricémiant par l'allopurinol ou le febuxostat est contre-indiquée. À l'inverse, l'azathioprine doit être prise à distance de produits laitiers qui contiennent de la xanthine oxydase, pour éviter une réduction de la biodisponibilité du médicament. La TPMT transforme la 6-mercaptopurine en un métabolite inactif. Un déficit en TPMT, héréditaire ou lié à la prise de certains médicaments (olsalazine, mésalazine ou sulfasalazine), entraîne un risque d'accumulation et donc de myélosuppression accrue. Dans la population caucasienne, on estime autour de 10 % le pourcentage de sujets ayant une activité enzymatique basse, et à 0,6 % le pourcentage de sujets ayant une activité enzymatique indétectable. Le dépistage des sujets ayant un déficit génétique en TPMT, par phénotypage ou génotypage de la TPMT, est recommandé avant le début du traitement, afin d'identifier les sujets à très haut risque de toxicité hématologique [150]. Cette évaluation ne dispense pas d'une surveillance biologique stricte, qui est indispensable à la prescription de l'azathioprine.
Effets secondaires digestifs
Il est conseillé de réaliser les prises d'azathioprine au cours du repas pour en améliorer la tolérance digestive. Une cholestase et une altération de la fonction hépatique ont été rapportées avec l'azathioprine; elles sont généralement réversibles avec l'arrêt du traitement. Des atteintes hépatiques et/ou pancréatiques graves peuvent également survenir. Au total, la surveillance biologique comprendra l'hémogramme, la créatininémie et les transaminases, à réaliser avant introduction du traitement, puis toutes les semaines pendant les deux premiers mois, puis tous les 1 à 3 mois tant que le patient est traité.
Mycophénolate mofétil
Ester de l'acide mycophénolique
Le mycophénolate mofétil est un immunosuppresseur de la famille des antimétabolites. C'est un ester de l'acide mycophénolique (MPA), inhibiteur sélectif, non compétitif et réversible de l'inosine monophosphate déshydrogénase, enzyme clé de la synthèse de novo des nucléotides à guanine. Il est métabolisé par la glucuronyl transférase en glucuronide phénolique du MPA (MPAG). Le MPAG peut être régénéré en MPA par le cycle entéro-hépatique. L'administration par voie orale de mycophénolate mofétil radiomarqué permet de montrer que 93 % de la dose administré est éliminée dans les urines, principalement sous la forme de MPAG. Il inhibe la synthèse des purines. Il agit principalement en inhibant la prolifération des lymphocytes T et B activés. Il a également des propriétés anti-inflammatoires, liées à une inhibition de la glycosylation des molécules d'adhérence leucocytaires et endothéliales. Le mycophénolate mofétil dispose d'une AMM pour la prévention des rejets d'organe. Il est également utilisé dans le traitement de la néphropathie lupique, des vascularites nécrosantes systémiques [ 143]. En ophtalmologie, il est utilisé hors AMM pour la prise en charge des uvéites chroniques non infectieuses atteignant le segment postérieur [152], dans la choriorétinopathie de birdshot [ 140] et dans les sclérites idiopathiques [141]. Le mycophénolate mofétil s'administre par voie orale à la posologie de 2 g par jour, en 2 prises, avec la possibilité d'augmenter la dose à 3 g par jour en cas de réponse incomplète.
Interactions médicamenteuses
Au cours d'un traitement par mycophénolate mofétil, des interactions peuvent survenir avec d'autres médicaments qui peuvent influencer sa pharmacocinétique (voir tableau 16-5
Tableau 16-5
Caractéristiques pharmacocinétiques des différents immunosuppresseurs et des différentes biothérapies.
DCIDemi-vie plasmatiqueModalités principales d'élimination et/ou de transformation
Immunosuppresseurs
Méthotrexate3-4 heures Élimination principalement par voie urinaire
Bilan préthérapeutique : créatininémie
30 < CLcr < 59 ml/min : réduire de moitié la posologie
CLcr < 30 ml/min : traitement contre-indiqué
Azathioprine1-2 heures Élimination du médicament reposant principalement sur l'inactivation par la xanthine oxydase et par la thiopurine méthyltransférase (TPMT)
Déficit en TPMT héréditaire (génétique) ou secondaire à des médicaments (olsalazine, mésalazine, sulfasalazine) : contre-indication
Étude du polymorphisme génétique de la TPMT recommandée dans le bilan préthérapeutique
Association avec les inhibiteurs de la xanthine oxydase (allopurinol, febuxostat) formellement contre-indiquée. Prises à distance des ingestions de produits laitiers
Employer les posologies minimales (1 mg/kg/jour) chez l'insuffisant rénal et chez l'insuffisant hépatique
Mycophénolate Mofétil18 heures Métabolisation du MPA en MPAG par glucuronylation. Reconversion du MPAG en MPA via le cycle entéro-hépatique
N.B. : Élimination principalement par voie urinaire sous forme de MPAG
Interactions médicamenteuses modifiant la pharmacocinétique au niveau du cycle entéro-hépatique : cholestyramine, ciclosporine A, antibiotiques
CLcr < 25 ml/min : ne pas dépasser 2 g par jour
Cyclophosphamide4-8 heures Activation par hydroxylation hépatique
N.B. : Élimination essentiellement urinaire, sous forme de multiples métabolites, dont l'acroléine (molécule responsable de la toxicité vésicale)
Interactions médicamenteuses possibles nombreuses
Infection urinaire aiguë, cystite hémorragique préexistante, obstruction des voies urinaires : contre-indication. Surveillance de l'ECBU avant et pendant traitement
Administration d'Uromitexan® pour les fortes doses. Hydratation avant et pendant la perfusion. Mictions régulières pendant et après la perfusion
Ciclosporine7-11 heures Métabolisme hépatique par CYP3A4. Métabolisme influencé par la glycoprotéine P
Élimination principalement biliaire
Interactions médicamenteuses avec les inducteurs et inhibiteurs du CYP3A4 et/ou de la glycoprotéine P
Réduction de posologie possiblement nécessaire chez les patients insuffisants hépatiques
Tacrolimus43 heures Métabolisme hépatique par CYP3A4. Métabolisme influencé par la glycoprotéine P
Élimination principalement biliaire
Interactions médicamenteuses avec les inducteurs et inhibiteurs du CYP3A4 et/ou de la glycoprotéine P
Réduction de posologie possiblement nécessaire chez les patients insuffisants hépatiques
Biothérapies
Adalimumab14 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Infliximab10 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être souvent majoré par immunisation
Golimumab14 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Certolizumab14 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Étanercept3 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme globalement peu influencé par l'immunisation
Rituximab21 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
N.B. : Élimination médiée par la cible
Secukinumab27 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Ixekizumab13 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Tocilizumab8-14 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Sarilumab8-10 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
Anakinra4-6 heures Modalités d'élimination mal connues. Clairance plasmatique réduite chez les patients insuffisants rénaux
CLcr < 30 ml/minute : réduire la fréquence d'injection (injecter un jour sur deux)
Canakinumab26 jours Catabolisme par captation cellulaire. (Endocytose et dégradation lysosomale dans les cellules endothéliales.) Catabolisme pouvant être majoré par immunisation
). Il est possible de réaliser des dosages d'acide mycophénolique, en mesurant son taux sanguin à plusieurs instants après administration orale (mesure de l'aire sous la courbe). En pratique, ce dosage peut être proposé en cas de réponse clinique insuffisante, pour s'assurer de l'absorption adéquate du traitement et avant une augmentation éventuelle de la dose de mycophénolate mofétil. Le mycophénolate mofétil peut également perturber la pharmacocinétique d'autres médicaments. On suspecte que le MPAG puisse entrer en compétition avec l'aciclovir au niveau de la sécrétion tubulaire, menant ainsi à une augmentation des concentrations plasmatiques d'acyclovir en cas de co-prescription. On suspecte qu'un même mécanisme puisse également concerner la sécrétion tubulaire du ganciclovir.
Atteinte hématologique
Des cas d'érythroblastopénie sont décrits. Leuconeutropénie, lymphopénie et thrombopénie peuvent aussi survenir. La réduction des posologies du traitement peut permettre de corriger les anomalies hématologiques lorsqu'elles surviennent. Selon leur gravité, une réduction des doses ou un arrêt du traitement doit être discuté. Une surveillance de l'hémogramme, de la créatininémie, et des transaminases est nécessaire avant introduction du traitement, puis hebdomadaire au cours des deux premiers mois de traitement, puis mensuelle au cours de la prise du traitement.
Effets secondaires digestifs
Les effets secondaires digestifs à type de diarrhées, parfois accompagnées de nausées et/ou de vomissements, sont fréquents avec le mycophénolate mofétil. Afin d'améliorer la tolérance digestive, la posologie peut être réduite à l'introduction du traitement, puis augmentée progressivement sur quelques semaines, jusqu'à atteindre la dose souhaitée. Des cas d'hépatite médicamenteuse ont été décrits mais restent rares.
Agents alkylants : cyclophosphamide
Agent alkylant, moutarde azotée
Le cyclophosphamide est un agent alkylant appartenant à la famille des moutardes azotées. Sa voie métabolique principale est réalisée dans le foie par les cytochromes P450 (CYP2A6, 2B6, 2C9, 2C19, 3A4). Le cyclophosphamide est d'abord hydroxylé en 4-hydroxycyclophosphamide, et en son tautomère, l'aldo-cyclophosphamide, dont une partie sera transformée en acroléine (molécule responsable de la toxicité vésicale) et en moutarde phosphoramide (agent alkylant responsable de l'effet anticancéreux). Beaucoup de médicaments sont susceptibles d'augmenter ou de réduire le métabolisme hépatique du cyclophosphamide. Le risque d'interaction médicamenteuse doit être recherché, et la surveillance de l'efficacité et de la tolérance du cyclophosphamide doit être étroite en cas de co-administration avec des substances et médicaments à risque. Le cyclophosphamide agit par interaction directe sur l'ADN et bloque le cycle cellulaire en phase G2, aboutissant à la destruction des cellules en phase mitotique. Le cyclophosphamide agit sur les lymphocytes B et sur les lymphocytes T (en particulier T CD8 +) [ 141]. À forte dose, le cyclophosphamide dispose d'une AMM pour la prise en charge de certains cancers, et pour le conditionnement des allo- et autogreffes médullaires. À faible dose, le cyclophosphamide dispose d'une AMM pour le traitement de le polyarthrite rhumatoïde, de la granulomatose avec polyangéite, de formes sévères de lupus systémique, et de néphropathies auto-immunes corticorésistantes. Le cyclophosphamide peut être utilisé hors AMM pour la prise en charge de la maladie de Behçet grave [ 141]. En ophtalmologie, le cyclophosphamide peut être utilisé hors AMM pour le traitement d'affections inflammatoires menaçant la vision à court terme en cas d'échec d'autres thérapeutiques [140] : kératite ulcérante périphérique avec menace perforative, sclérite nécrosante, ophtalmie sympathique, maladie de Vogt-Koyanagi-Harada insuffisamment contrôlée. Son utilisation a également été proposée par certaines équipes pour la prise en charge des choroïdites serpigineuses. Dans les pathologies systémiques et ophtalmiques, le cyclophosphamide est utilisé principalement par voie IV, sous forme de bolus, à des doses de 0,6 g/m 2 /jour à 0,7 g/m 2 /jour. Chez le patient insuffisant rénal sévère et chez les patients âgés, la posologie est réduite. Dans le traitement des vascularites nécrosantes systémiques, on réalise habituellement une série de 6 bolus. Les trois premiers bolus sont effectués à 2 semaines d'intervalle et les trois derniers à 3 semaines d'intervalle [ 143]. La préparation des solutions injectables de cyclophosphamide doit obligatoirement être réalisée par un personnel spécialisé et entraîné, équipé de matériel de protection. Le cyclophosphamide ne doit pas être manipulé par des femmes enceintes ou qui allaitent. La préparation doit se dérouler dans un local de préparation réservé à cet usage. En cas d'extravasation, l'administration du traitement doit être interrompue immédiatement.
Toxicité vésicale de l'acroléine
La toxicité vésicale est en lien avec l'élimination urinaire de l'acroléine. À la phase aiguë, elle se traduit par une cystite hémorragique (dysurie, hématurie, parfois hémorragie grave). Des ulcérations, nécroses et fibroses vésicales peuvent également survenir, tout comme des cancers vésicaux. Pour en limiter le risque, une hydratation préalable et pendant la perfusion est indispensable, ainsi que la consigne de vider régulièrement sa vessie pendant la perfusion. Enfin, si la dose de cyclophosphamide est supérieure à 600 mg/m 2 , on administre un protecteur vésical (uromitexan) pendant et après la perfusion. Une infection urinaire, une obstruction des voies urinaires, une toxicité urothéliale (due à une chimiothérapie ou à une radiothérapie), une cystite hémorragique préexistante sont des contre-indications au cyclophosphamide. Un examen cytobactériologique des urines (ECBU) doit être réalisé avant l'administration du traitement et au cours du traitement.
Risque d'infertilité
Avant de débuter le traitement, les sujets en âge de procréer doivent être informés du risque d'infertilité. Chez l'homme, une cryopréservation de sperme avant traitement doit être systématiquement proposée. Chez la femme, la préservation de la fertilité est plus compliquée. Les techniques de cryopréservation ovarienne ne sont pas encore parfaitement au point et la congélation d'ovocytes ou d'embryon nécessite un conditionnement hormonal qui impose un délai rarement autorisé par l'activité de la maladie sous-jacente.
Atteinte hématologique
Le cyclophosphamide peut induire des cytopénies, notamment une leuconeutropénie, mais également une thrombopénie et une anémie. L'administration de cyclophosphamide est contre-indiquée en cas d'aplasie ou d'insuffisance médullaire, de leucopénie inférieure à 2500 cellules/mm 3 ou de thrombopénie inférieure à 50000 cellules/mm 3 . Il est donc nécessaire de vérifier l'hémogramme avant chaque perfusion, et également entre le 8 e et le 14 e jour suivant le bolus de cyclophosphamide, date à laquelle le nadir de la réduction du nombre de leucocytes ou de thrombocytes est habituellement atteint. À long terme, cette toxicité médullaire peut entraîner une myélodysplasie, voire une leucémie ou un lymphome.
Effets secondaires digestifs
L'administration de cyclophosphamide peut être à l'origine de nausées, de vomissements et de mucites.
Anticalcineurines (ciclosporine, tacrolimus)
Inhibition de la calcineurine
La calcineurine est une enzyme impliquée dans la translocation nucléaire du facteur nucléaire des lymphocytes T activés (NF-AT), facteur de transcription essentiel de l'interleukine 2 (IL-2). Les anticalcineurines, représentés par la ciclosporine et le tacrolimus, agissent donc principalement en inhibant la production d'IL-2 et donc l'activation des lymphocytes T. La ciclosporine inhibe la calcineurine après s'être complexée avec la cyclophiline, alors que le tacrolimus inhibe la calcineurine après s'être complexée à l'immunophiline (également appelée FKBP12). Le tacrolimus est un inhibiteur de la calcineurine 10 à 100 fois plus puissant que la ciclosporine. La ciclosporine dispose d'une AMM dans de multiples indications : greffes d'organes solides, greffes de moelle osseuse, syndromes néphrotiques corticodépendants et corticorésistants dus à des glomérulopathies primitives – telles que des lésions glomérulaires minimes, des hyalinoses segmentaires et focales ou une glomérulonéphrite membraneuse –, formes actives et sévères de polyarthrite rhumatoïde, formes sévères de psoriasis pour lesquelles le traitement conventionnel est en échec, dermatite atopique sévère nécessitant un traitement systémique. En ophtalmologie, la ciclosporine dispose d'une AMM pour le traitement des uvéites intermédiaires et postérieures non infectieuses menaçant la vision en cas d'échec du traitement conventionnel. Elle dispose également d'une AMM pour le traitement de l'uvéite de Behçet [150] avec accès inflammatoires répétés impliquant la rétine chez des patients ne présentant pas de manifestations neurologiques. La ciclosporine a aussi longtemps été prescrite hors AMM pour le traitement de la choriorétinopathie de birdshot [ 140]. Le tacrolimus dispose d'une AMM dans la prévention du rejet du greffon chez les transplantés hépatiques, rénaux ou cardiaques. Il est régulièrement prescrit en dehors de son AMM pour la prise en charge de pathologies pour lesquelles la ciclosporine dispose d'une AMM. Il est souvent préféré à la ciclosporine, son efficacité étant souvent considérée comme équivalente, et sa tolérance meilleure [ 153]. Ces deux médicaments sont administrés par voie orale. Dans les indications ophtalmologiques, la posologie de la ciclosporine est habituellement de 5 mg/kg par jour par voie orale, répartie en deux prises. Après avoir obtenu un bon contrôle de l'inflammation, la dose de ciclosporine peut être progressivement réduite, en recherchant la posologie minimale efficace.
Substrats de la glycoprotéine P et du CYP3A4
Les anticalcineurines sont des substrats de la glycoprotéine P et du CYP3A4. La glycoprotéine P est une protéine membranaire d'efflux localisée au pôle apical des entérocytes, des hépatocytes, et des cellules épithéliales du tubule contourné proximal. Elle est codée par le gène MDR1 ( multidrug resistance protein ), et limite la biodisponibilité orale de ses substrats. Le cytochrome P4503A4 (CYP3A4) métabolise les anticalcineurines en métabolites dont l'activité immunosuppressive est globalement plus faible. L'élimination des anticalcineurines se fait principalement par voie biliaire. Au total, de nombreux médicaments sont susceptibles de diminuer les taux d'anticalcineurine (barbituriques, carbamazépine, oxcarbazépine, phénytoïne, nafcilline, sulfadimidine intraveineuse, probucol, orlistat, millepertuis, ticlodipine, sulfinpyrazone, terbinafine, bosentan, rifampicine, octréotide) ou de les augmenter (nicardipine, métoclopramide, contraceptifs oraux, méthylprednisone à forte doses, allopurinol, acide cholique et dérivés, inhibiteurs de protéase, imatinib, colchicine, néfazodone, macrolides, antifongiques azolés, vérapamil, télaprévir, amiodarone, danazol, diltiazem, pamplemousse). Les anticalcineurines sont par ailleurs eux-mêmes des inhibiteurs de la glycoprotéine P et du CYP3A4. Ils peuvent donc eux-mêmes être à l'origine d'interactions médicamenteuses avec les médicaments substrats de la glycoprotéine P et du CYP3A4 (digoxine, colchicine, statines, étoposide, aliskiren, dabigatran étexilate). Les anticalcineurines présentent une marge thérapeutique étroite, et des dosages des concentrations plasmatiques résiduelles doivent être régulièrement réalisés pour adapter leur posologie. Enfin, d'autres interactions médicamenteuses peuvent survenir par des mécanismes différents.
Néphrotoxicité
Les anticalcineurines sont fréquemment néphrotoxiques. Cette néphrotoxicité peut se manifester par l'apparition d'une insuffisance rénale ou par des perturbations ioniques (hyperkaliémie, hypomagnésémie et hyperuricémie), secondaires à une dysfonction tubulaire. La créatininémie doit être évaluée avant l'introduction du traitement et étroitement surveillée en cours de traitement. L'apparition d'une néphrotoxicité impose une réduction rapide des posologies. Les patients présentant une insuffisance rénale ne doivent pas recevoir d'anticalcineurine (à l'exception des patients traités par anticalcineurine pour la prise en charge d'un syndrome néphrotique ou pour la prévention du rejet après transplantation rénale).
Hypertension artérielle
L'hypertension artérielle est un effet indésirable fréquent chez les patients traités par anticalcineurine. La pression artérielle doit être évaluée avant l'introduction du traitement, et surveillée régulièrement pendant la prise du traitement. L'arrêt du traitement par anticalcineurine est nécessaire si l'hypertension artérielle ne peut pas être contrôlée par un traitement adéquat.
Syndrome métabolique
Les anticalcineurines sont susceptibles d'induire fréquemment un syndrome métabolique, qu'il s'agisse d'un diabète secondaire et/ou d'une hyperlipidémie. L'évaluation de la glycémie à jeun et des anomalies lipidiques avant traitement et en cours de traitement est nécessaire. Le tacrolimus est réputé plus diabétogène que la ciclosporine.
Hirsutisme, hyperplasie gingivale et autres effets secondaires
L'hirsutisme et l'hyperplasie gingivale sont des effets secondaires fréquents sous ciclosporine, mais rares ou inexistants sous tacrolimus. Des perturbations du bilan hépatique (cytolyse, cholestase) peuvent survenir au cours d'un traitement par anticalcineurine, et doivent être dépistées par une surveillance biologique régulière. Ces anomalies peuvent diminuer après la réduction des posologies, mais pourront nécessiter un arrêt du traitement. Le tacrolimus peut être dans de rares cas à l'origine de complications cardiaques; coronaropathie, troubles du rythme, hypertrophie ventriculaire. Ces complications surviennent le plus souvent dans un contexte de surdosage du tacrolimus. Une surveillance cardiologique étroite sera réalisée chez des patients présentant une cardiopathie qui requièrent un traitement par tacrolimus.
Spécificités des biothérapies
Anti-TNF-α
Anticorps monoclonaux versus récepteur soluble du TNF-α
Le tumor necrosis factor alpha (TNF-α) est une cytokine pro-inflammatoire de la réponse immunitaire innée. Il est produit par les cellules (et notamment les macrophages) sous forme soluble, mais également sous forme membranaire. Le TNF-α soluble se lie principalement au TNFR1. Le TNF-α membranaire se lie principalement au TNFR2. La voie du TNFR2 est suspectée jouer un rôle prépondérant dans la défense anti-infectieuse et dans la formation du granulome inflammatoire [ 147]. L'étanercept est un dimère d'une protéine de fusion obtenue en fusionnant une partie du fragment Fc de l'IgG1 humaine (les parties CH2 et CH3, mais pas la région CH1) et le domaine de liaison extracellulaire du TNFR2 (TNFR2/p75). En pratique, l'étanercept fixe le TNF-α soluble et ne se fixe presque pas au TNF-α membranaire. L'étanercept est associé à un risque infectieux, notamment un risque de tuberculose, moindre. Il se révèle toutefois moins efficace dans la sarcoïdose, dans la maladie de Crohn, dans la granulomatose avec polyangéite et dans les uvéites [147 , 154]. Au contraire, les anticorps monoclonaux anti-TNF-α ciblent le TNF-α soluble, mais également le TNF-α membranaire. Par l'intermédiaire du fragment Fc, ils induisent une cytotoxicité dépendante des anticorps, une cytotoxicité dépendante du complément, voire parfois une apoptose des cellules exprimant le TNF-α membranaire. L'infliximab est un anticorps chimérique dont les régions variables sont d'origine murine et dont le fragment Fc est humain. L'adalimumab et le golimumab sont des anticorps entièrement humains. Le certolizumab pegol associe le Fab d'un anticorps monoclonal humanisé à deux chaînes de polyéthylène glycol, sans fragment Fc. Les anticorps monoclonaux sont associés à un risque infectieux, notamment un risque de tuberculose, supérieur. Les anticorps monoclonaux se révèlent par ailleurs plus efficaces dans la sarcoïdose, dans la maladie de Crohn, dans la granulomatose avec polyangéite et dans les uvéites.
Indications thérapeutiques
Les anticorps monoclonaux disposent d'une AMM dans : la polyarthrite rhumatoïde, la maladie de Crohn, la rectocolite hémorragique, la spondylarthrite ankylosante, le rhumatisme psoriasique, le psoriasis, l'arthrite juvénile idiopathique, l'hidrosadénite suppurée et le traitement des uvéites intermédiaires, postérieures et les panuvéites non infectieuses en échec de la corticothérapie. Ils sont parfois prescrits hors AMM dans la maladie de Behçet [ 150], dans la sarcoïdose, dans la maladie de Still et dans l'amylose AA. L'infliximab est parfois proposé hors AMM pour certains cas de vascularites nécrosantes réfractaires aux autres traitements conventionnels [143]. L'étanercept dispose d'une AMM dans : l'arthrite juvénile idiopathique [149], la polyarthrite rhumatoïde, le rhumatisme psoriasique, la spondylarthrite ankylosante, la spondylarthrite axiale non radiographique et le psoriasis en plaques. Les traitements anti-TNF-α sont administrés par injection sous-cutanée, à l'exception de l'infliximab, qui est administré par voie intraveineuse. Lorsque l'observance thérapeutique est incertaine, le choix de l'infliximab permet de la vérifier, puisque les perfusions sont réalisées en secteur hospitalier.
Effets secondaires
Les anti-TNF-α ont été associés à de rares cas de névrites optiques ou d'atteintes démyélinisantes centrales (sclérose en plaques) ou périphériques (syndrome de Guillain-Barré). L'apparition de symptômes évocateurs de maladie démyélinisante centrale ou périphérique nécessite l'interruption du traitement par anti-TNF-α. Les anti-TNF-α sont contre-indiqués en cas d'antécédent personnel de pathologie démyélinisante centrale ou périphérique. Des réactions paradoxales ont été décrites, c'est-à-dire la survenue ou l'aggravation d'une pathologie qui devrait habituellement être améliorée par les anti-TNF-α; psoriasis, uvéite, maladie de Crohn. L'apparition d'auto-anticorps (anticorps antinucléaires, anti-ADN de type IgM) est assez fréquente, mais le plus souvent isolée, sans conséquences cliniques. Des cas d'aggravation d'insuffisance cardiaque ont été décrits chez des patients traités par anti-TNF-α. L'insuffisance cardiaque modérée à sévère est une contre-indication aux traitements par anti-TNF-α. L'immunisation contre le traitement peut survenir avec n'importe quel anticorps monoclonal anti-TNF-α, mais survient plus fréquemment avec l'infliximab, probablement du fait de la nature chimérique de cet anticorps. Une immunisation contre le traitement peut aussi se produire contre d'autres anticorps monoclonaux anti-TNF-α. Cette complication peut être suspectée en cas d'inefficacité thérapeutique, et peut être confirmée par la mise en évidence des anticorps dirigés contre l'anti-TNF-α. Le dosage des taux sériques résiduels d'anti-TNF-α est alors bas. La co-prescription d'un immunosuppresseur peut réduire le risque de survenue d'une immunisation; le méthotrexate est fréquemment prescrit en association dans ce but.
Rituximab
Mécanismes d'action
Le rituximab se lie spécifiquement à l'antigène transmembranaire CD20, exprimé par les lymphocytes pré-B et B matures. Le CD20 est absent des cellules pro-B et des plasmocytes normaux. Le fragment Fab du rituximab se lie à l'antigène CD20 des lymphocytes B et le fragment Fc peut générer des fonctions d'effecteurs immunitaires qui entraînent la lyse de ces lymphocytes par plusieurs mécanismes : une cytotoxicité dépendante du complément (CDC), une cytotoxicité cellulaire dépendante des anticorps (ADCC) et une mort cellulaire par apoptose. Le rituximab induit ainsi une déplétion lymphocytaire B profonde qui dure 6 à 12 mois. Les deux schémas classiquement utilisés en traitement d'induction dans les maladies auto-immunes sont : soit 1 perfusion hebdomadaire de 375 mg/m 2 pendant 4 semaines, soit 2 perfusions de 1 g réalisées à 15 jours d'intervalle. Ces cures peuvent être renouvelées tous les 6 à 12 mois. En cours de traitement, le taux de lymphocytes CD19 + est mesuré, afin de s'assurer de la bonne déplétion B. La majeure partie des patients (70 à 80 %) vont présenter une déplétion en lymphocytes B au cours du traitement; une proportion plus faible de patients présentera une diminution des taux sériques d'immunoglobulines.
Indications thérapeutiques
Le rituximab dispose d'une AMM pour la prise en charge des lymphome non hodgkiniens, de la leucémie lymphoïde chronique, de la polyarthrite rhumatoïde, de la granulomatose avec polyangéite, de la polyangéite microscopique et du pemphigus vulgaris. Le rituximab est également prescrit hors AMM dans d'autres contextes : neuromyélite optique de Devic [ 155], syndrome de Susac, pemphigoïde oculaire cicatricielle, certaines formes de myasthénie [156], de myopathies inflammatoires (syndrome des anti-synthétases, dermatomyosite juvénile, polymyosite), d'autres maladies auto-immunes, lupus systémique, syndrome de Gougerot-Sjögren, syndrome de Goodpasture, neuropathies avec anti-MAG, syndrome hyper IgG4, vascularite hypocomplémentémique.
Réaction liée à la perfusion, syndrome de relargage cytokinique et syndrome de lyse tumorale
Une réaction liée à la perfusion survient fréquemment (chez 23 % des patients traités par rituximab pour une polyarthrite rhumatoïde), en raison de la libération de cytokines lors de la lyse des lymphocytes B. Elle survient habituellement lors de la première perfusion. Cette réaction générale débute généralement entre 30 et 120 minutes après le début de la perfusion (soit plus tardivement que les réactions d'hypersensibilité). Les symptômes associent fièvre, frissons, céphalées et hypotension transitoire. Cette réaction est plus fréquente que les réactions d'hypersensibilité. Pour la prévenir, les traitements hypotenseurs doivent être stoppés 12 heures avant la perfusion. Le faible débit de perfusion et la prémédication associant méthylprednisone et antihistaminique permettent de réduire leur fréquence et leur intensité, en plus de réduire le risque de réaction d'hypersensibilité. La survenue d'une réaction liée à la perfusion nécessite le ralentissement voire l'arrêt de la perfusion. Le risque de réaction liée à la perfusion est plus important lorsque le rituximab est utilisé pour le traitement d'hémopathies (d'autant plus si la masse tumorale est élevée), avec à ce moment le risque de survenue d'un syndrome de lyse tumorale.
Hypogammaglobulinémie
Un petit nombre de cas d'hypogammaglobulinémie a été observé chez des patients traités par rituximab, dans certains cas sévères et nécessitant un traitement de substitution à long terme par immunoglobulines. La surveillance de l'électrophorèse des protides sériques doit être réalisée au cours du suivi. Les conséquences à long terme de la déplétion en lymphocytes B chez les enfants n'est pas connue.
Insuffisance cardiaque
L'administration de rituximab peut rendre symptomatiques des atteintes cardiaques infracliniques; apparition d'angor, de troubles du rythme cardiaque, d'insuffisance cardiaque. Chez les patients présentant des comorbidités cardiaques, le débit de perfusion doit être lent, et la surveillance clinique doit être accrue lors de l'administration du traitement. Les patients insuffisants cardiaques sévères ou présentant une maladie cardiaque non contrôlée ne doivent pas recevoir de traitement par rituximab.
Neutropénies et thrombopénies
Une neutropénie peut survenir, y compris tardivement après le début du traitement. L'hémogramme doit être réalisé avant chaque perfusion et pendant le traitement, jusqu'à 6 mois après le traitement. La prudence est recommandée chez les patients neutropéniques et thrombopéniques.
Anticorps anti-IL17
Mécanismes d'action
Le sécukinumab et l'ixékizumab se lient de façon sélective à l'IL-17A, une cytokine pro-inflammatoire, et la neutralisent. Ils permettent de réduire la fixation de l'IL-17A à son récepteur. Le récepteur à l'IL-17A est exprimé à la surface de diverses cellules, dont les kératinocytes. Le sécukinumab et l'ixékizumab réduisent ainsi la libération de cytokines pro-inflammatoires, de chémokines et de médiateurs des lésions tissulaires.
Indications thérapeutiques
Le sécukinumab et l'ixékizumab disposent d'une AMM dans la prise en charge du psoriasis, du rhumatisme psoriasique et de la spondylarthrite axiale.
Effets secondaires
Des neutropénies peu sévères ont été observées, mais sans critères de sévérité. Des exacerbations de la maladie de Crohn ont été décrites chez certains patients traités. Les patients traités par anti-IL-17 et qui ont une maladie de Crohn doivent donc être étroitement surveillés.
Anticorps anti-IL-6
Mécanismes d'action
Le tocilizumab et le sarilumab se lient aux récepteurs solubles et membranaires de l'IL-6. Ce signal implique la glycoprotéine 130 (gp130), protéine ubiquitaire du signal de transduction, et STAT-3 ( signal transducer and activator of transcription-3 ). L'IL-6 est produite à faible dose par de nombreuses cellules. L'interleukine est produite en quantités excessives dans de nombreuses maladies inflammatoires.
Indications thérapeutiques
Le tocilizumab et le sarilumab disposent d'une AMM comme traitement de deuxième ligne dans la polyarthrite rhumatoïde. Le tocilizumab est indiqué dans le traitement du syndrome de relargage de cytokines sévère induit par les traitements par lymphocytes T à récepteur antigénique chimérique. Il dispose également d'une AMM pour le traitement de l'infection par le Sars-Cov2 (Covid-19). Il dispose encore d'une AMM comme traitement de deuxième ligne dans les formes systémiques et polyarticulaires d'arthrite juvénile idiopathique [149]. Il a aussi une AMM dans l'artérite à cellules géantes, dans l'objectif d'une réduction d'exposition à la corticothérapie [151]. Le tocilizumab est aussi utilisé hors AMM dans la prise en charge de l'orbitopathie dysthyroïdienne et pour la prévention des rechutes dans la neuromyélite optique, en cas d'échec au traitement de première intention [ 155].
Effets secondaires
Des neutropénies et thrombopénies sont décrites, justifiant la réalisation d'un hémogramme avant l'introduction et pendant le traitement. Les patients présentant moins de 2000 polynucléaires neutrophiles par mm 3 et/ou moins de 50000 plaquettes par mm 3 ne doivent pas recevoir de tocilizumab. Des hypercholestérolémies avec augmentation du LDL-cholestérol sont fréquentes et justifient la surveillance du bilan lipidique. Une cytolyse hépatique peut rarement survenir, mais justifie une surveillance régulière du bilan hépatique. Les patients traités par tocilizumab présentent un risque accru de perforations digestives. Ce risque devra être considéré d'autant plus que le patient est âgé et/ou exposé aux anti-inflammatoires non stéroïdiens ou aux corticoïdes.
Anti-IL-1
Mécanismes d'action
L'anakinra est une protéine produite par la technique de l'ADN recombinant sur cellules d' Escherichia coli . Il s'agit d'une protéine très proche d'une protéine humaine : l'IL-1RA ( interleukine 1 receptor antagonist ). L'IL-1RA se lie habituellement à l'IL-1R ( interleukin 1 receptor ) à la surface des cellules, et empêche la liaison de l'IL-1 à ce récepteur. L'anakinra possède une séquence peptidique qui diffère de celle de l'IL-1RA par la présence d'une méthionine à son extrémité N-terminale. La protéine étant produite par E. coli , elle n'est pas glycosylée comme l'est l'IL-1RA dans les cellules humaines. L'anakinra, en se liant au IL-1R, réduit l'activité biologique de l'IL-1α et de l'IL-1β. Le cankinumab se lie avec une haute affinité à l'IL-1β, et empêche ainsi son interaction avec l'IL-1R. L'IL-1 est présente dans le plasma et le liquide synovial des patients souffrant de polyarthrite rhumatoïde. L'activation de l'inflammasome entraîne une maturation protéolytique et la sécrétion d'IL-1β qui présente un large spectre d'effets, notamment une inflammation systémique. L'IL-1β est un des principaux médiateurs en jeu dans la maladie de Still de l'adulte et dans l'arthrite juvénile idiopathique systémique.
Indications thérapeutiques
L'anakinra et le canakinumab disposent d'une AMM dans les syndromes de fièvres périodiques, dans les syndromes périodiques associés à la cryopyrine (syndrome de Muckle-Wells [MWS], maladie systémique inflammatoire à début néonatal [NOMID], syndrome chronique infantile neurologique, cutané et articulaire [CINCA], syndrome familial auto-inflammatoire au froid [FCAS]), dans la fièvre méditerranéenne familiale (FMF), dans la maladie de Still de l'adulte et l'arthrite juvénile idiopathique systémique [149]. L'anakinra dispose d'une AMM dans la polyarthrite rhumatoïde. Le canakinumab dispose d'une AMM dans le syndrome périodique associé au récepteur du facteur de nécrose tumorale (TRAPS), dans le syndrome hyperimmunoglobulinémie D (HIDS)/déficit en mévalonate kinase (MKD) et dans l'arthrite goutteuse.
Effets secondaires
Des neutropénies sont rapportées avec l'anakinra et justifient la réalisation d'un hémogramme avant l'introduction du traitement et au cours de la prise du traitement. L'anakinra ne doit pas être administrée chez des patients présentant moins de 1500 polynucléaires neutrophiles par mm 3 . Les réactions au point d'injection sont fréquentes. Pour les réduire, il est recommandé de réchauffer le produit à température ambiante avant l'injection, d'injecter lentement et de varier les sites d'injection.
Immunomodulateurs
Ces médicaments peuvent parfois être utilisés en ophtalmologie. Ils présentent notamment l'intérêt d'un risque infectieux ou néoplasique très faible voire inexistant en comparaison aux immunosuppresseurs et aux biothérapies.
Interférons α et β
L'interféron β-1a dispose d'une AMM dans la prise en charge de la sclérose en plaques, et peut permettre d'obtenir une réduction de l'activité inflammatoire en cas d'uvéite associée à une sclérose en plaques [ 157].
L'interféron α-2a est parfois prescrit hors AMM dans la prise en charge de la maladie de Behçet, et notamment en cas d'uvéite associée [ 150].
Les principaux effets indésirables sont le syndrome pseudogrippal et des troubles psychiatriques. On peut également citer la rétinopathie à l'interféron caractérisée par la présence d'hémorragies rétiniennes et de nodules cotonneux.
Dapsone
La dapsone est un antibiotique de la famille des sulfones utilisé dans le traitement de la lèpre. Il dispose également d'une action inhibitrice sur les polynucléaires neutrophiles. La dapsone dispose aussi d'une AMM dans la polychondrite atrophiante, les dermatoses bulleuses et les dermatoses neutrophiliques. L'efficacité de la dapsone sur des sclérites survenant dans ces contextes a été décrite. La dapsone est également utilisée dans la prise en charge de la pemphigoïde oculaire cicatricielle [ 158].
Le principal effet indésirable à craindre est la méthémoglobinémie qui favorise la survenue d'hémolyse, notamment sur des terrains à risque tel le déficit en G6PD, qui est une contre-indication au traitement par dapsone.
Immunoglobulines intraveineuses
Les immunoglobulines disposent d'une AMM comme traitement substitutif pour traiter un déficit de l'immunité humorale, mais aussi comme traitement immunomodulateur dans plusieurs indications. Elles ont également une AMM dans le traitement de la rétinochoroïdite de birdshot [142]. Il s'agit cependant d'un traitement rarement prescrit dans cette indication. Les immunoglobulines intraveineuses sont parfois prescrites pour la prise en charge de la rétinopathie associée au cancer, de poussées de myasthénies [156], ou des névrites optiques sévères [155].
Les réactions d'hypersensibilité sont rares, mais surviennent plus fréquemment chez les patients présentant un déficit en IgA. Des complications thrombo-emboliques artérielles ou veineuses peuvent survenir, probablement en lien avec l'élévation relative de la viscosité sanguine. L'hypertension artérielle est fréquente au décours du traitement. Les perfusions d'immunoglobuline sont lentes, habituellement réalisées sur 1 à 2 jours, voire plus, sur 4 à 5 jours, chez les patients âgés ou présentant des comorbidités cardiaques, ou rénales.
Les immunoglobulines sont produites à partir de plasma de donneurs humains. Elles peuvent contenir des anticorps dirigés contre les groupes sanguins et être à l'origine d'hémolyse.
Plasmaphérèse
La plasmaphérèse est parfois utilisée pour la prise en charge des névrites optiques sévères survenant dans un contexte de neuromyélite optique et résistant aux bolus de Solumédrol® [155]. Elle est également parfois proposée pour le traitement des rétinopathies paranéoplasiques, et des crises myasthéniques graves [156]. On peut distinguer aujourd'hui deux grands types de plasmaphérèse : la plasmaphérèse non fractionnée, au cours de laquelle le plasma du patient est enlevé et remplacé soit par du plasma frais congelé, soit par une solution d'albumine à 5 %; la plasmaphérèse fractionnée, qui a pour objectif le retrait d'une molécule en particulier du plasma du patient, et permet au patient de se voir restituer son plasma purifié de cette molécule.
Atteintes ophtalmologiques secondaires aux immunomodulateurs, immunosuppresseurs et biothérapies
Les immunomodulateurs peuvent être à l'origine d'effets secondaires ophtalmologiques : la rétinopathie induite par l'interféron a été évoquée précédemment, mais la maculopathie aux antipaludéens de synthèse mérite également d'être citée ici.
Les traitements immunosuppresseurs peuvent être à l'origine d'effets indésirables oculaires en favorisant la survenue d'infections opportunistes : la rétinite à CMV, la toxoplasmose oculaire, la tuberculose oculaire, les rétinites à VZV, à HSV, et les endophtalmies endogènes bactériennes et fongiques.
Les biothérapies, notamment les traitements anti-TNF-α, sont connues pour pouvoir entraîner des réactions paradoxales qui peuvent concerner l'ophtalmologiste : uvéites, névrites optiques.
Les biothérapies utilisées en oncologie sont également à l'origine d'effets indésirables qui méritent d'être connus par l'ophtalmologiste : les kératites et uvéites induites par l'erlotinib (inhibiteur du facteur de croissance épidermique humain [HER1 = EGFR]), les uvéites survenant au cours d'immunothérapies associant anti-PD1 (nivolumab, pembrolizumab) et anti-CTLA4 (ipilimumab), les décollements séreux rétiniens et uvéites survenant au cours d'immunothérapies associant anti-BRAF (encorafénib, dabrafénib) et anti-MEK (binimétinib, tramétinib), les occlusions veineuses rétiniennes secondaires au ponatinib, ou encore la kératopathie induite par le belantamab mafodotin.
Formes ophtalmiques d'immunosuppresseurs – ciclosporine, tacrolimus
F. Chast, S. Charles-Weber, M.-L. Brandely-Piat
Introduction
Les immunosuppresseurs sont utilisés principalement dans les maladies auto-immunes et la prévention des rejets de greffes d'organe ou de tissu. En ophtalmologie, en dehors de leurs indications par voie systémique, par exemple dans les uvéites, la ciclosporine et le tacrolimus ont été proposés sous forme topique, dans diverses manifestations cliniques touchant le segment antérieur et la conjonctive. La ciclosporine a été étudiée [ 159], puis utilisée par voie systémique depuis le début des années 1980, et par voie topique, tant pour le traitement de maladies auto-immunes [ 160] que pour la prévention du rejet de greffe de cornée [161], notamment sous la forme de préparations hospitalières [162] de concentrations variables, de 0,05 % à 2 %. Depuis 2003, diverses spécialités commerciales ont été mises sur le marché.
D'utilisation plus récente [ 163], le tacrolimus a été proposé dans les mêmes indications que la ciclosporine [164]. Il est présenté sous la forme de collyres ou de pommades ophtalmiques [165] de concentrations allant de 0,003 % à 0,3 %. Compte tenu du risque d'événements indésirables liés à l'administration systémique d'un immunosuppresseur, l'emploi de collyres de ciclosporine ou de tacrolimus est justifié dans certaines situations, d'autant qu'un traitement par voie orale de ciclosporine ne permet pas d'obtenir des concentrations élevées dans les tissus de l'œil. En revanche, après traitement local par un collyre huileux de ciclosporine ou de tacrolimus, on retrouve des concentrations de ciclosporine significatives dans l'humeur aqueuse et même le vitré.
Médicaments utilisés : ciclosporine et tacrolimus
La ciclosporine (également dénommée cyclosporine ou CsA) (fig. 16-18
Fig. 16-18
Structure de la ciclosporine.
) est un immunosuppresseur dont l'utilisation remonte au début des années 1980, tant pour la transplantation d'organes que dans le traitement de certaines maladies auto-immunes. Initialement isolée d'un échantillon de sol prélevé en Norvège, la ciclosporine A (forme principale) est un peptide cyclique de 11 acides aminés, synthétisé par un champignon microscopique, Tolypocladium inflatum .
Le tacrolimus (également dénommé FK-506) (fig. 16-19
Fig. 16-19
Structure du tacrolimus.
) est un immunosuppresseur, isolé en 1984 dans un échantillon de terre au Japon. Ses propriétés ont été mises en évidence en 1987. C'est un macrolide à fonction lactone biosynthétisé par une bactérie, Streptomyces tsukubaensis . Comme la ciclosporine, c'est un inhibiteur de la calcineurine.
Mécanisme d'action
La ciclosporine et le tacrolimus, après administration oculaire, sont passivement absorbés par les lymphocytes T.
L'activation du lymphocyte T par un antigène nécessite la reconnaissance de l'antigène, ce qui provoque une cascade de réactions, aboutissant à l'augmentation du calcium intracellulaire et à l'activation de la calcineurine. La calcineurine activée déphosphoryle le NF-AT (facteur nucléaire des cellules T activées, indispensable à la transcription du gène de l'interleukine 2 [IL-2]), ce qui lui permet de pénétrer dans le noyau du lymphocyte T. L'IL-2 synthétisée et libérée induit à son tour la prolifération de lymphocytes T et la production de cytokines.
Ciclosporine et tacrolimus, une fois distribués, pénètrent dans le cytoplasme lymphocytaire et se lient à une immunophiline, protéine spécifique, la cyclophiline pour la ciclosporine, et le FKBP12 pour le tacrolimus. Le complexe formé (ciclosporine/cyclophiline et tacrolimus/FKBP12) inhibe l'activité phosphatase de la calcineurine, puis le signal de transduction des lymphocytes T.
Au final, le blocage de la libération de cytokines pro-inflammatoires et des lymphocytes T réduit la réaction immune, mais aussi le processus allergique. Les deux médicaments immunosuppresseurs inhibent la libération de l'histamine par les mastocytes et les basophiles en réduisant la production d'IL-5, d'IL-2, d'IL-3, d'IL-4, de TNF-α, d'interféron γ, etc., ce qui réduit le recrutement des éosinophiles et leurs effets sur la conjonctive et la cornée.
Diverses études ont montré que l'administration locale de ciclosporine, même faiblement concentrée (0,05 %), permettait, au bout de quelques mois, d'obtenir une diminution de la population des lymphocytes activés dans la conjonctive et de la concentration de divers marqueurs d'activation immunitaire comme l'IL-6 [ 166].
De plus, un effet cellulaire est observé : la densité des cellules caliciformes conjonctivales est significativement plus élevée après un traitement par la ciclosporine chez les patients atteints de kératoconjonctivite sèche ou chez les patients atteint d'un syndrome de Gougerot-Sjögren primaire ou secondaire [ 167].
Indications thérapeutiques en ophtalmologie
Préparations de ciclosporine
  • À forte concentration (2 %), le collyre de ciclosporine est indiqué dans la prévention du rejet lors d'une kératoplastie à haut risque de rejet. De nombreuses pharmacies hospitalières proposent cette préparation [168]. Dans le cas de Ciclograft®, l'autorisation d'accès compassionnel dans les greffes de cornée est soumise à diverses situations à risque : présence de néovascularisation cornéenne et synéchies antérieures, antécédents d'échec ou de rejet d'une greffe préalable, large diamètre du greffon, greffe excentrée, chirurgies du segment antérieur, situation susceptible d'être génératrice d'inflammation prolongée, antécédents de kératite herpétique, pathologies de la surface oculaire/terrain dysimmunitaire et atopie, et âge inférieur à 12 ans.
  • À des concentrations moins élevées (ciclosporine à 0,05 %, 0,1 %, 0,2 %, 0,4 %, 0,5 et 1 %) : diverses préparations hospitalières ou commerciales visent à améliorer les symptômes liés à des pathologies de la surface oculaire et de la glande lacrymale chez les patients atteints de divers types de sécheresse oculaire [ 169], en particulier dans le syndrome de Gougerot-Sjögren [170].
  • Le collyre de ciclosporine à diverses concentrations allant de 0,05 à 2 % est également indiqué dans :
    • le traitement de la kératoconjonctivite vernale (KCV). En effet, les corticoïdes topiques, souvent nécessaires pour contrôler les symptômes et les signes de KCV sévère, peuvent entraîner, à terme, de graves complications oculaires. C'est la raison pour laquelle on peut recourir aux préparations topiques de ciclosporine avec lesquelles on obtient une réponse rapide (moins de 1 mois), avec une bonne tolérance pour la plupart des patients et sans effets indésirables significatifs [ 171];
    • le traitement de certains dysfonctionnements des glandes de Meibomius (ciclosporine 0,05 %).
Préparations de tacrolimus
Les collyres ou pommades ophtalmiques de tacrolimus [ 172] sont indiqués dans le traitement de :
  • la conjonctivite ou kératoconjonctivite sévère due à une sécheresse oculaire dans le cadre d'une GVHD oculaire [ 173], avec résistance aux traitements non pharmacologiques (bouchons méatiques), résistance aux substituts lacrymaux ou résistance à la ciclosporine en collyre;
  • la conjonctivite ou de la kératoconjonctivite sèche sévère due à un syndrome de Gougerot-Sjögren, avec résistance aux traitements nonpharmacologiques (bouchons méatiques), résistance aux substituts lacrymaux, résistance à la vitamine A (pommade ophtalmique), résistance à la ciclosporine en collyre [174].
Les autres indications sont :
  • la KCV avec résistance à la ciclosporine, et ou corticodépendance [175];
  • la kératoconjonctivite atopique [ 176];
  • le pemphigoïde oculaire cicatriciel [ 177].
Préparations disposant d'AMM en France
Deux spécialités pharmaceutiques commercialisées en France disposent d'une AMM [178]. Ces deux collyres, présentés sous la forme d'une émulsion, sont deux spécialités strictement identiques en termes de composition (ciclosporine 0,1 %) et d'excipients (triglycérides à chaîne moyenne, chlorure de cétalkonium, glycérol, tyloxapol, poloxamère 188, hydroxyde de sodium, eau pour préparations injectables). Il s'agit d'Ikervis® 1 mg/ml et de Verkazia® 1 mg/ml.
Seules, leurs indications sont différentes (tableau 16-7
Tableau 16-7
Préparations disposant de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) en France.
SpécialitéIndication de l'AMMPosologieEfficacité
Ikervis® 1 mg/ml Kératite sévère chez des patients adultes présentant une sécheresse oculaire qui ne s'améliore pas malgré l'instillation de substituts lacrymaux 1 goutte dans l'œil ou les 2 yeux, une fois par jour au coucher. La réponse doit être réévaluée au moins tous les 6 mois Faible efficacité, voire efficacité non significative par rapport à la réponse obtenue avec le seul excipient
Verkazia® 1 mg/ml, Kératoconjonctivite vernale sévère chez les enfants à partir de 4 ans et les adolescents 1 goutte dans l'œil ou les 2 yeux, 4 fois par jour (matin, midi, après-midi et soir) pendant la saison de la kératoconjonctivite vernale cortico-induite. La dose peut être maintenue après la saison à la même dose ou à dose réduite L'efficacité est modérée (entre 20 et 30 % d'amélioration)
).
Préparations disposant d'un accès compassionnel en France
Deux autres spécialités pharmaceutiques de ciclosporine, non commercialisées en France, disposent d'une autorisation d'accès compassionnel :
  • ciclosporine 0,05 %, Restasis® [179], émulsion de ciclosporine dans un véhicule de glycérine, huile de ricin, polysorbate 80, carmoner 1342. (Le véhicule est commercialisé séparément, aux États-Unis, sous le nom de Refresh Endura®.) C'est un collyre sans conservateur;
  • ciclosporine 2 %, Ciclograft® [180], émulsion de ciclosporine dans un triglycéride à chaîne moyenne. C'est un collyre sans conservateur (tableau 16-8
    Tableau 16-8
    Préparations disposant d'un accès compassionnel en France.
    Spécialité Indication de l'AMM américaine Posologie Efficacité
    Restasis® 0,5 mg/ml
    (0,05 %)
    Kératite sévère chez des patients adultes présentant une sécheresse oculaire qui ne s'améliore pas malgré l'instillation de substituts lacrymaux 1 goutte dans l'œil ou les 2 yeux, 2 fois par jour. La réponse doit être réévaluée au moins tous les 6 mois Faible efficacité, 15 à 30 % d'amélioration (5 % pour le seul excipient) pour le test de Schirmer [181]. L'évaluation clinique évoque une amélioration de 35 % [182]
    Ciclograft® 20 mg/ml (2 %) Prévention du rejet de greffe de cornée chez les patients à risque de rejet en association (simultanée ou non) avec les corticoïdes, dans les situations à risque en cas de difficulté d'accès aux alternatives disponibles ou adaptées 1 goutte dans l'œil greffé, 2 à 3 fois par jour, après un traitement d'attaque pouvant aller jusqu'à 6 gouttes par jour On obtient une survie du greffon de 80 à 90 % au 10 e mois contre 35 à 60 % sur des séries historiques présentant les mêmes facteurs de risque
    ).
Une spécialité pharmaceutique de tacrolimus 0,1 %, Talymus®, sous la forme d'un collyre, non commercialisée en France, dispose d'une autorisation d'accès compassionnel. Le collyre contient un conservateur, le chlorure de benzalkonium (tableau 16-9
Tableau 16-9
Tacrolimus.
SpécialitéIndication de l'AMM américainePosologieEfficacité
Talymus® 1 mg/ml
(0,1 %)
Conjonctivite ou kératoconjonctivite sévère due à une sécheresse oculaire dans le cadre d'une GVHD oculaire
Conjonctivite ou kératoconjonctivite sèche sévère due au syndrome de Gougerot-Sjögren
Kératoconjonctivite vernale
1 goutte dans chaque œil, 2 fois par jour L'amélioration clinique des patients est jugée sur deux saisons avec un suivi de 24 mois
Le taux de rémission au 6 e mois est de 80 à 95 %
).
Préparations hospitalières
Ciclosporine
Des préparations hospitalières à 0,5 mg/ml (0,05 %), 1 mg/ml (0,1 %), 2 mg/ml (0,2 %), 5 mg/ml (0,5 %), 10 mg/ml (1 %) et 20 mg/ml (20 %) sont disponibles auprès de quatre pharmacies hospitalières (Cochin-Hôtel-Dieu, Quinze-Vingts, CHU de Clermont-Ferrand, CHU de Toulouse). Ces préparations sont soit des solutions huileuses, soit des émulsions.
Tacrolimus
Une préparation hospitalière de tacrolimus 0,2 mg/ml est disponible auprès de la pharmacie hospitalière du CHU de Clermont-Ferrand.
Effets indésirables
Après instillation oculaire, la ciclosporine passe dans le sang dans des proportions très inférieures aux concentrations potentiellement actives ou toxiques, puisque les concentrations sont inférieures pour la quasi-totalité des patients, à la limite de la détection analytique. Les effets indésirables sont locaux. Les plus fréquents sont la douleur (environ 20 %), l'irritation (15 à 20 %), l'hyperhémie (environ 5 %), l'augmentation du larmoiement (environ 5 %) et l'érythème palpébral (1 à 5 %), le plus souvent transitoires et survenant lors de l'instillation.
Dans notre expérience à l'Hôtel-Dieu, la tolérance locale du collyre de ciclosporine a été évaluée auprès de 388 patients âgés de 1 à 90 ans (53 % d'hommes et 47 % de femmes). La majorité des patients (63 %) ne présentent aucun effet indésirable. Sur les 37 % restants, plus de la majorité des patients déclarent un effet indésirable de type brûlure (58 %) ou douleur (15 %), démangeaisons (13 %) et divers autres effets (15 %) : rougeurs, picotements, inflammation des paupières, larmoiements, troubles de la vision. Pour 46 % des patients, l'effet indésirable est immédiat. Pour 54 % des patients, il persiste après l'instillation en moyenne pendant une heure (médiane : 15 minutes). De plus, pour 58 % des patients, l'effet indésirable a persisté après le premier mois de traitement [183].
Après instillation oculaire, le tacrolimus présente les mêmes inconvénients locaux que la ciclosporine. Il passe dans le sang dans des proportions très inférieures aux concentrations potentiellement actives ou toxiques (0,1 à 0,2 ng/ml), soit 100 fois moins que les concentrations résiduelles cibles dans le cadre de l'immunosuppression des transplantations d'organes. Les effets indésirables majeurs sont une sensation oculaire anormale (brûlure, sensation de corps étranger) chez 40 à 50 % des patients, une irritation oculaire chez 20 à 30 % des patients et une augmentation du larmoiement chez 10 à 20 % des patients.
Évaluations cliniques
Greffe de cornée
La première étude menée à l'Hôtel-Dieu (1987) a porté sur 24 patients (25 yeux) présentant un risque de rejet cornéen élevé. Ces patients ont été traités par une association de collyres de ciclosporine à 2 % et de dexaméthasone à 1 %, 48 heures avant l'intervention et en postopératoire. Un groupe témoin de 25 patients présentant les mêmes risques élevés de rejet traités uniquement par corticoïdes topiques a été suivi en parallèle. Un an après l'intervention, la proportion de rejet de greffe de cornée chez les patients traités par ciclosporine à 2 % était de 12 % contre 65 % chez des patients non traités [184].
Dans une étude rétrospective japonaise, le collyre de ciclosporine à 2 % (1 goutte 4 fois par jour) en traitement adjuvant aux corticoïdes locaux postopératoires a permis d'obtenir, 60 mois après la greffe, la survie du greffon sans rejet dans 80 % des cas dans le groupe traité et 68 % dans le groupe témoin. Dans le groupe « haut risque de rejet», la survie des greffons sans rejet est de 70 % pour le groupe ciclosporine 2 % et 45 % dans le groupe témoin, différence significative dans les deux cas [ 185].
Un essai clinique randomisé, contrôlé contre placebo d'une formulation « hydroalcoolique» de ciclosporine à 2 % dans la prévention des risques de rejets n'a pas montré de différence significative de fréquence des rejets par rapport au groupe témoin (18 %) [ 186].
Dans les pathologies inflammatoires de l'œil, les résultats obtenus au moyen de ces collyres sont inconstants [187]. Dans le syndrome de l'œil sec, une étude croisée de 6 semaines a comparé la ciclosporine sous forme de pommade ophtalmique à 1 % avec un placebo et rapporté une amélioration de la surface oculaire, des symptômes et du test de Schirmer dans le groupe traité avec la ciclosporine [188].
Quand on compare tacrolimus et ciclosporine sur une période moyenne de suivi de 48,1 ± 7,9 mois, les taux d'épisodes de rejet et de rejet irréversible sont respectivement de 14,0 % et 6,0 % dans le groupe tacrolimus et de 37,5 % et 7,1 % dans le groupe ciclosporine. Le taux de survie du greffon semble significativement plus élevé dans le groupe tacrolimus (81,6 % ± 5,3 %, 71,1 % ± 6,3 %) par rapport à celui du groupe ciclosporine (71,1 % ± 6,3 %, 57,5 % ± 7,5 %) à 3 et 5 ans après la chirurgie (P = 0,006). Le score de risque préopératoire ≥ 3 (P = 0,016) et le rejet immunitaire endothélial (P = 0,033) étaient des facteurs de risque associés à la survie du greffon [ 189].
Sécheresse oculaire
L'utilisation de la ciclosporine permet d'éviter un traitement prolongé par corticoïdes locaux.
Les émulsions ophtalmiques de ciclosporine à 0,05 %, 0,1 %, 0,2 % et 0,4 % ont été étudiées dans le cadre d'une utilisation 2 fois par jour pendant 12 semaines en cas de sécheresse oculaire modérée à sévère; toutes les concentrations ont permis d'obtenir des améliorations de la coloration au rose Bengale, comme des symptômes de kératite ponctuée superficielle [190].
Bien que controversée, une relation dose-réponse a été établie dans la plupart des études, la préparation à 0,1 % permettant d'obtenir des résultats objectifs et subjectifs plus constants que ceux obtenus avec la solution à 0,05 %.
La comparaison entre des émulsions de ciclosporine à 0,05 % et 0,1 % et de l'excipient seul, en cas de sécheresse oculaire modérée à sévère, chez les patients avec ou sans syndrome de Gougerot-Sjögren, a montré, au bout de 6 mois, que la ciclosporine était un facteur d'amélioration des résultats tant sur le plan clinique que pour le test de Schirmer. L'émulsion à 0,05 % a permis d'obtenir une amélioration significativement plus importante que l'excipient seul sur les paramètres subjectifs comme la vision floue et le besoin d'utiliser, en parallèle, des collyres lubrifiants [191].
Kératoconjonctivite vernale
Si la ciclosporine en collyre 2 % est un traitement inconstamment efficace de la KCV corticodépendante, elle permet cependant la réduction partielle ou complète des corticoïdes dans la majorité des cas [ 192] et, globalement, les deux médicaments sont « épargneurs» de corticoïdes dans la prise en charge des enfants atteints de KCV réfractaire [193].
Une étude comparative portant sur 59 patients a permis de souligner les meilleures performances du tacrolimus 0,03 % sur les rougeurs, les brûlures, la photophobie et la sensation de corps étranger par rapport à la ciclosporine au cours de la première semaine (p < 0,05). Le groupe tacrolimus montre une réduction statistiquement significative des sensations de brûlure et de corps étranger à la 4 e semaine, et des rougeurs et sensation de brûlure à la 12 e semaine. En revanche, la ciclosporine est plus efficace que le tacrolimus pour l'hypertrophie papillaire conjonctivale tarsienne à la 1 re semaine et à la 12 e semaine, pour les kératites ponctuées et les papilles géantes à la 1 re semaine (p = 0,029 et 0,037, respectivement). Un échec a été observé chez 6 patients (19,35 %) du groupe ciclosporine et chez 5 patients (17,85 %) du groupe tacrolimus. Aucun effet secondaire grave n'a été détecté dans aucun groupe. Au total, on note une diminution plus importante des symptômes et signes inflammatoires ainsi qu'une meilleure observance pour la pommade ophtalmique au tacrolimus 0,03 % qu'avec le collyre de ciclosporine 2 %.
Mise en forme pharmaceutique adaptée
Les propriétés physicochimiques de la ciclosporine et du tacrolimus guident les conditions de mise en forme pharmaceutique de ces deux molécules (tableau 16-10
Tableau 16-10
Propriétés physicochimiques de la ciclosporine et du tacrolimus.
CiclosporineTacrolimus
NaturePeptide cyclique de 11 acides aminés Macrolide lactonique
Poids moléculaire1202,6804,0
Formule moléculaireC62H111N11O 12C44H69NO 12
Solubilité dans l'eau27 μg/ml (très peu soluble) 0,018 μg/ml (insoluble)
Solubilité dans les solvants organiquesTrès soluble dans le méthanol, l'acétone et l'éther éthylique, soluble dans le chloroforme Soluble dans le méthanol, l'éthanol, l'acétone, l'acétate d'éthyle et l'éther éthylique
).
Une des difficultés de l'administration topique de la ciclosporine, comme du tacrolimus repose sur leur insolubilité dans les liquides aqueux, eau, solutions d'électrolytes : NaCl, BSS®, etc. Il faut donc utiliser soit une solution huileuse (huile de ricin ou huile d'olive par exemple), soit une présentation innovante comme des émulsions stabilisées, des micelles, une encapsulation, etc. Il est également possible de présenter ces immunosuppresseurs sous forme de pommade ophtalmique.
Solutions huileuses et solvants apolaires
La ciclosporine est habituellement solubilisée (0,1 à 2 %) dans de l'huile de ricin ou de l'huile de miglyol stériles. C'est également possible pour une préparation huileuse de tacrolimus (0,06 %) [ 194]. Il est possible d'utiliser de l'huile d'olive, par exemple pour le tacrolimus (0,03 %) [ 195]. Des solvants apolaires non huileux ont été utilisés comme le perfluorobutylpentane (F4H5) pour préparer un collyre de tacrolimus à 0,03 % [196].
Cyclodextrines
Comme pour tout principe actif insoluble en milieu aqueux, l'emploi de cyclodextrines est séduisant. L'hydroxypropyl-β-cyclodextrine (à 40 % dans du Liquifilm®, lubrifiant oculaire) a permis de préparer une solution de tacrolimus à 0,02 % [197].
Liposomes
Les liposomes, essentiellement constitués de phospholipides, sont un choix séduisant pour l'administration de ces médicaments dont la formulation est difficile. Ce sont des vésicules sphériques avec un noyau hydrophile et des bicouches lipidiques, qui augmentent la solubilité des médicaments. Les liposomes cationiques peuvent se conjuguer à des protéoglycanes sulfatés chargés négativement dans la membrane cellulaire, empêchant ainsi une clairance rapide. L'emploi d'un phospholipide cationique pour préparer les liposomes, tel que le (2,3-dioléoyloxy-propyl)-triméthylammonium (DOTAP), a permis de mettre au point une préparation prometteuse de tacrolimus en termes de temps de résidence et de biocompatibilité [198].
Le tacrolimus peut charger des proniosomes contenant du poloxamère 188 et de la lécithine comme tensioactifs, du cholestérol comme stabilisant, et une quantité minimale d'éthanol et des traces d'eau. Avant utilisation, la préparation est reconstituée en niosomes (le niosome est un liposome à base de surfactant non ionique, formé principalement par l'incorporation de surfactant non ionique et de cholestérol comme excipient) [199].
Nanocapsules
Des nanocapsules chargées en tacrolimus ont montré des propriétés prometteuses, dans un cadre expérimental [200].
Émulsions
Formulations de ciclosporine
Les formulations de ciclosporine sont indiquées dans le tableau 16-11
Tableau 16-11
Formulations de ciclosporine.
Émulsion
  • Huile anionique dans l'eau, 0,05 % (Restasis®)
  • Émulsion cationique 0,1 %, 1 mg/ml (Ikervis®)
  • Dispersion de polyaphrons (MC2-03)
  • Microémulsion (MiDROPS®)
Formulation nanomicellaire aqueuseOTX-101 0,09 % (CEQUA™), solution nanomicellaire aqueuse
Micelles aqueusesMicelles polymères mélangées avec du poloxamère et un dérivé hydrosoluble de vitamine E
Micelles lyophiliséesNanotransporteur polymère chargé de ciclosporine lyophilisée
Solution non aqueuseAlcanes semi-fluorés (CyclASol®)
[201].
Formulations de tacrolimus
On peut préparer une solution de tacrolimus dans le macrogol 35 glycérol-ricinoléate (Kolliphor EL®) [ 202], antérieurement connu le nom de Cremophor®, qui est un surfactant non ionique permettant de stabiliser les émulsions de substances apolaires dans l'eau.
Conclusion
L'utilisation des formes locales d'immunosuppresseurs, ciclosporine et tacrolimus, a fait progresser la qualité de la prise en charge de maladies immunologiques de la surface oculaire, en particulier les maladies auto-immunes et immuno-allergiques, mais aussi le pronostic des greffes de cornées, en particulier en situation de risque de rejet. La problématique de la mise en forme galénique de ces médicaments est partiellement résolue.
16.6. Anti-allergiques

F. Chast

L'œil est la cible fréquente de diverses réactions allergiques, reflétant un ensemble de manifestations immunitaires qui peuvent se présenter sur un éventail très large de symptômes. La conjonctive est le tissu le plus souvent impliqué dans l'allergie oculaire, mais les paupières et la cornée peuvent également être touchées. La prise en charge pharmacologique de ces allergies vise à soulager les signes et les symptômes de l'allergie. Ses bases reposent sur les mécanismes physiopathologiques de l'allergie [203].
L'œil est la cible fréquente de diverses réactions allergiques, reflétant un ensemble de manifestations immunitaires qui peuvent se présenter sur un éventail très large de symptômes. La conjonctive est le tissu le plus souvent impliqué dans l'allergie oculaire, mais les paupières et la cornée peuvent également être touchées. La prise en charge pharmacologique de ces allergies vise à soulager les signes et les symptômes de l'allergie. Ses bases reposent sur les mécanismes physiopathologiques de l'allergie [203].
Immunologie des phénomènes allergiques
Le système immunitaire offre divers mécanismes de défense à l'égard d'antigènes ou de substances reconnues comme étrangères par l'organisme. Les allergènes (par exemple les pollens, poussières, acariens, poils d'animaux, etc.) sont des antigènes qui peuvent déclencher une réaction allergique chez un individu prédisposé ou atopique. Lorsque le système immunitaire rencontre un antigène pour la première fois, une réponse-mémoire est constituée, habituellement sans manifestation clinique, ou « à bas bruit». À la suite de cette réponse-mémoire, les réexpositions ultérieures à l'antigène entraînent une réponse immunitaire rapide et parfois intense [204].
Une réponse immunitaire normale consiste, pour l'organisme, à éliminer l'antigène, avec une réaction inflammatoire de faible intensité. En revanche, l'hypersensibilité ou les réactions allergiques constituent une traduction inappropriée (exagérée) de la réponse immunitaire et entraînent des lésions tissulaires. Depuis plusieurs décennies, on dispose d'une classification en cinq niveaux [205].
Deux types de réponses d'hypersensibilité, les réponses de types I et IV (selon la classification de Gell et Coombs, tableau 16-12
Tableau 16-12
Classification de Gell et Coombs (1963) des phénomènes d'hypersensibilité.
TypeCauseConséquence
Hypersensibilité de type I (immédiate) Dégranulation des mastocytes induite par des anticorps IgE spécifiques Libération de médiateurs vasoactifs
Hypersensibilité de type II Reconnaissance d'antigènes à la surface de cellules ou de composants tissulaires de l'organisme par des anticorps Cytolyse par ADCC (IgG) ou activation du complément (IgM ou IgG)
Hypersensibilité de type III (semi-retardée) Dépôt de complexes antigènes-anticorps (IgM ou IgG) produits en grande quantité et qui ne peuvent pas être éliminés par les macrophages ou d'autres cellules de système réticulo-endothélial Activation du complément et de l'inflammation
Hypersensibilité de type IV (retardée) Sécrétion de cytokines par les cellules de type Th1 (lymphocytes T auxiliaires) Recrutement et activation des macrophages
Hypersensibilité de type V (stimulante) Liaison d'un anticorps à un récepteur de la cellule, ainsi activée de manière non contrôlée
), jouent un rôle important dans les manifestations allergiques oculaires.
L'allergie oculaire liée à une hypersensibilité de type I, médiée par les immunoglobulines E (IgE), est le cas le plus fréquent des conjonctivites allergiques aiguës et chroniques [206]. La mise en évidence de l'allergène fait appel à des tests cutanés ( prick-tests ) dont la pratique est facile et indolore, et dont la sensibilité est satisfaisante. L'allergie oculaire peut aussi relever d'un mécanisme de type IV, c'est-à-dire d'un mécanisme à médiation cellulaire, comme l'allergie de contact, par exemple après l'application de différents topiques [207].
Réponse d'hypersensibilité de type I – à médiation humorale
Dans une réaction d'hypersensibilité de type I , ou humorale, l'allergène active le lymphocyte B. L'IgE produite par la cellule B se fixe à la surface des mastocytes et des basophiles, en les sensibilisant (fig. 16-20
Fig. 16-20
Séquence des événements impliquant l'activation des mastocytes et la libération des médiateurs avec les sites activité pharmacologique.
).
Dès lors, la membrane cellulaire devient plus perméable aux ions calcium (Ca ++), entraînant l'entrée de Ca ++ dans la cellule, ce qui déclenche l'activité de la phospholipase A2 dans le mastocyte, entraînant la dégranulation mastocytaire et la libération des médiateurs pro-inflammatoires contenus dans les granules. Cette cascade déclenche également la rupture de la membrane phospholipidique. L'acide arachidonique de la membrane est converti, d'une part, via la voie de la cyclo-oxygénase, en prostaglandines, prostacycline et thromboxane A, et d'autre part, via la voie de la lipoxygénase, en leucotriènes. Les médiateurs de l'hypersensibilité de type I sont : l'histamine, la sérotonine, le facteur chimiotactique des éosinophiles, le facteur chimiotactique des neutrophiles, les protéases, les leucotriènes, les prostaglandines, la bradykinine, la tryptase et diverses cytokines : le facteur d'activation plaquettaire, le facteur de nécrose tumorale (TNF). Plus spécifiquement, au niveau des mastocytes, les cytokines synthétisées et libérées comprennent diverses interleukines : IL-4, IL-5, IL-6, IL-8 et IL-13. Les éosinophiles et les neutrophiles entrent dans cette cascade d'événements, et on observe, sur le plan tissulaire : inflammation, sécrétion de mucus, contraction des fibres lisses, vasodilatation, augmentation de la perméabilité capillaire et démangeaisons.
Les réactions d'hypersensibilité de type I surviennent généralement dans les minutes (parfois jusqu'à 2 ou 3 heures) qui suivent l'exposition à un antigène chez des sujets sensibilisés et se résorbent en 30 à 60 minutes, parfois en plusieurs heures. Cette étape peut être suivie d'une phase tardive plus sévère et plus longue. Quand elle se développe, la phase tardive intervient 4 à 6 heures après la première réponse et peut durer jusqu'à 2 jours (fig. 16-21
Fig. 16-21
Classification physiopathologique des hypersensibilités oculaires [208].
).
Réponse d'hypersensibilité de type IV – à médiation cellulaire
Lors d'une réponse immunitaire de type IV ou à médiation cellulaire, la réaction d'hypersensibilité implique une population lymphocytaire T, avec un début allant de 12 à 72 heures après le contact. Dans ce cas, les cellules présentatrices de l'antigène (cellules de Langerhans) présentent l'antigène à la cellule T, qui est ainsi « activée». La sensibilisation prend 1 à 2 semaines après la première exposition à l'antigène. Lors de la réexposition, des cytokines, interleukines et interférons, sont libérées. Les cytokines activent les macrophages, entraînant une réaction cytotoxique à travers des activités phagocytaires enzymatiques accrues. La réponse d'hypersensibilité retardée débute rarement avant 24 heures et culmine à 48-72 heures.
Aspects cliniques des allergies oculaires
Les différentes formes d'allergies oculaires
De nombreuses classifications des allergies oculaires ont été proposées, mais le plus souvent on utilise un classement binaire des troubles d'hypersensibilité de la surface oculaire en :
  • allergie oculaire;
  • hypersensibilité non allergique.
L'allergie oculaire est un processus pathologique médié, ou non, par les IgE. Il comprend :
  • la conjonctivite allergique saisonnière (CAS);
  • la conjonctivite allergique perannuelle (CAP);
  • la conjonctivite papillaire géante (CPG) des porteurs de lentilles;
  • la kératoconjonctivite vernale (KCV);
  • la kératoconjonctivite atopique (KCA);
  • la blépharoconjonctivite de contact (BCC).
La CAS et la CAP représentent la grande majorité des allergies oculaires (95 % à 98 %). La KCA et la KCV ne représentent qu'environ 2 % des allergies oculaires. La KCV, qui représente 0,1 % à 0,5 % des allergies oculaires dans les pays développés, est plus répandue dans les pays subtropicaux (environ 4 % chez les enfants africains). KCV et KCA impliquent des mécanismes à la fois IgE-médiés et non IgE-médiés.
La KCV et la KCA sont deux situations dont la sévérité peut compromettre la fonction visuelle. C'est la raison pour laquelle l'enquête allergologique et la prévention vis-à-vis de l'exposition ultérieure à l'allergène responsable constituent des priorités en matière de prise en charge thérapeutique.
Évitement et éviction
L'évitement consiste à éviter la rencontre du sujet allergique avec l'allergène auquel il est sensible (on évite les risques liés à la forêt, au jardin, à une literie contaminée, à des animaux domestiques, etc.). L'éviction consiste à extraire le patient du milieu « à risque» dans lequel il risque une réaction allergique. L'éviction de l'allergène est possible dans certains cas. C'est souvent vrai lorsque l'allergène est alimentaire (trophallergène) ou médicamenteux, ou lorsqu'il s'agit d'une allergie aux poils d'animaux. C'est plus difficile quand il s'agit d'une allergie aux acariens, et plus généralement quand il s'agit de pneumallergènes (pollen, graminées, acariens, etc.). L'éviction est impossible lorsque l'allergène est non ou mal identifié [ 209].
Les difficultés du diagnostic
Les allergies conjonctivales, surtout dans leurs formes les plus chroniques, font appel à des mécanismes complexes qui dépassent largement le seul cadre des mastocytes et des IgE [210]. Le film lacrymal, les paupières, l'environnement, notamment iatrogène, interagissent et font intervenir des acteurs cellulaires multiples. Il est indispensable de bien comprendre ces interactions, de mieux identifier les mécanismes associés et d'écarter des pathologies voisines qui peuvent aisément être prises pour des allergies. Les syndromes secs peuvent ainsi se confondre avec des conjonctivites allergiques chroniques, ou la conjonctivite allergique saisonnière. Les conservateurs des collyres peuvent enfin créer à la longue des inflammations locales difficiles à différencier de l'allergie initiale [ 211].
Options de traitement pour les allergies oculaires
En général, le traitement des allergies oculaires repose sur la sévérité et les caractéristiques des symptômes de la réaction allergique. Une approche thérapeutique pragmatique, « par étapes», est habituellement préconisée, avec une adaptation du traitement en fonction de la gravité des symptômes et de la réponse obtenue par les premières mesures thérapeutiques. Lorsque c'est possible, la règle consiste à éviter, pour le patient, tout contact avec les allergènes environnementaux tels que les pollens, poussières, animaux, etc. La prévention n'est, malheureusement, pas toujours envisageable et l'évitement, bien que règle de base, n'est, malheureusement, pas toujours aisé à entreprendre. En revanche, en cas d'exposition, un lavage fréquent de l'œil au moyen d'une solution de lavage (sans conservateur) ou en utilisant des lingettes ophtalmiques permet de minimiser la durée de l'exposition à l'allergène.
Comme l'irrigation de la surface oculaire facilite l'élimination des allergènes, les solutions salines et les larmes artificielles aident à atteindre l'un des principes fondamentaux de la gestion des allergies en minimisant l'exposition de la surface oculaire aux allergènes [212]. De plus, certains types de larmes artificielles procurent un soulagement grâce à la lubrification de la surface oculaire via une combinaison de solution saline avec un agent mouillant et visqueux [213]. Si les substituts lacrymaux ne soulagent pas suffisamment, des préparations de plus haute viscosité ou des substituts lacrymaux à libération prolongée, utilisés la nuit, offrent une option plus durable, assurant une lubrification de la surface oculaire pendant le sommeil. Une douche avant la nuit permet également de débarrasser le cuir chevelu des allergènes susceptibles de contaminer les tissus oculaires pendant le sommeil.
Toutefois, ces options thérapeutiques préventives ne traitent pas la réponse allergique sous-jacente et ne modifient pas l'activité des médiateurs de l'inflammation (tableau 16-13
Tableau 16-13
Options de traitement pharmacologique dans la conjonctivite allergique saisonnière, et effets secondaires associés.
Classe thérapeutiqueMécanisme d'actionEffets indésirablesExemples
Agents de lubrification de la surface oculaire (y compris les larmes artificielles) Dilution des antigènes, élimination des antigènes de la surface oculaire, aucune efficacité directe sur les médiateurs allergiques Utilisation chronique pouvant être associée à des effets indésirables en raison des effets des conservateurs. soulagement temporaire, insuffisant pour les formes modérées et sévères Dérivés cellulosiques : carboxyméthylcellulose, hydroxypropylméthylcellulose dextran 70; gélatine; polyols; alcool polyvinylique; povidone
Décongestionnants topiquesVasoconstriction via la stimulation des récepteurs α-adrénergiques, réduction des rougeurs et des œdèmes En cas d'utilisation prolongée ou d'arrêt brutal, risque de conjonctivite médicamenteuse, réactions folliculaires toxiques, dermatite de contact, rebond des symptômes. Contre-indication dans le glaucome à angle fermé en raison de l'effet mydriatique Émédastine, lévocabastine, cyclopentamine, éphédrine, phényléphrine, tétrahydrozoline, naphazoline
Antihistaminiques systémiquesAgonistes inverses des récepteurs de l'histamine
Blocage de l'histamine endogène
Réduction des signes et symptômes oculaires induits par l'histamine, en particulier les démangeaisons
Sécheresse oculaire, sédation, effets secondaires systémiques possibles, y compris la cardiotoxicité Prométhazine, diphénhydramine, hydroxyzine, alimémazine, cétirizine, loratadine, chlorphéniramine
Antihistaminiques topiquesSemblables aux antihistaminiques systémiques, mais leurs effets restent localisés Irritation locale, sensibilité accrue, allergie aggravée, effets secondaires graves avec les médicaments les plus anciens Lévocabastine,azélastine, kétotifène, olopatadine, épinastine
Stabilisateurs de mastocytesPréviennent la dégranulation des mastocytes et la libération des médiateurs inflammatoires Diminuent les rougeurs, l'hyperhémie, les démangeaisons et les irritations Peu de problèmes de tolérance en dépit des picotements et des brûlures lors de l'instillation; fonctionnent mieux s'ils sont débutés avant l'apparition des symptômes Cromoglycate, lodoxamide, pémirolast, kétotifène, nédocromil
Antihistaminiques + décongestionnants Association de deux niveaux d'action pharmacologique : réduction des démangeaisons, des rougeurs et des œdèmes Possible conjonctivite induite, soulagement des symptômes retardé, sédation ou excitabilité, étourdissements ou troubles de la coordination. L'effet peut ne durer que quelques heures; effet mydriatique Naphazoline, phéniramine
Antihistaminiques + antidégranulants mastocytaires Association de deux niveaux d'action pharmacologique : soulagement des rougeurs, de l'hyperhémie, des démangeaisons et des irritations Picotement, sensation de brûlure, maux de tête, symptômes du rhume
Soulagement des symptômes retardés, sédation, excitabilité, étourdissements ou troubles de la coordination; l'effet peut ne durer que quelques heures
Olopatadine, kétotifène, azélastine, épinastine
Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)Blocage de la cyclo-oxygénase et de la production de prostaglandines, réduction des démangeaisons Inconfort à l'instillation, picotements et brûluresKétorolac, diclofénac
CorticoïdesEffets anti-inflammatoires généraux, atténuation de l'activité des cellules inflammatoires, réduction de la plupart des signes et symptômes oculaires Augmentation de la pression intraoculaire, glaucome, formation de cataracte, retard de cicatrisation Lotéprednol, prednisolone, fluorométholone
) (voir chapitre 20 ).
Parmi les options de traitement, on peut envisager, outre les substituts lacrymaux : Unlabelled Box Les substituts lacrymaux, les anti-inflammatoires corticoïdes, les AINS, les immunosuppresseurs constituent des classes thérapeutiques qui font l'objet de présentations par ailleurs sous la forme de chapitres spécifiques.
  • les décongestionnants topiques;
  • les antihistaminiques topiques et oraux;
  • les antidégranulants et stabilisants de la membrane des mastocytes;
  • les anti-inflammatoires corticoïdes;
  • les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS);
  • les immunosuppresseurs (inhibiteurs de la calcineurine);
  • les allergènes thérapeutiques (immunothérapie allergénique).
Les substituts lacrymaux, les anti-inflammatoires corticoïdes, les AINS, les immunosuppresseurs constituent des classes thérapeutiques qui font l'objet de présentations par ailleurs sous la forme de chapitres spécifiques.
Décongestionnants
Les agonistes adrénergiques synthétique, phényléphrine, naphazoline, sont disponibles comme décongestionnants oculaires [ 214]. En Amérique du Nord, l'oxymétazoline et la tétrahydrozoline sont également commercialisées [215]. L'objectif thérapeutique consiste, après application topique sur l'œil, à obtenir une constriction des vaisseaux sanguins qui permet une diminution de l'hyperhémie conjonctivale et de l'œdème. Cette action se produit à partir de concentrations de médicaments qui, en majorité, ne provoquent pas de dilatation pupillaire, même si, parfois, surtout en cas de lésion cornéenne facilitant le passage du médicament dans la chambre antérieure, une dilatation de la pupille peut être observée. Ces médicaments n'ayant qu'un intérêt symptomatique, puisqu'ils n'ont pas d'effet sur la réponse immunitaire conjonctivale à l'antigène, de nombreux ophtalmologistes sont, à juste titre, réservés à l'égard de leur prescription.
Pharmacologie
La phényléphrine Phényléphrine (fig. 16-22
Fig. 16-22
Structure de la phényléphrine.
) est le plus ancien des médicaments disponibles. C'est un agoniste adrénergique qui diffère chimiquement de l'adrénaline (fig. 16-23
Fig. 16-23
Structure de l'adrénaline Adrénaline .
) par l'absence d'un des deux groupes hydroxyles sur le cycle aromatique. Aux concentrations utilisées pour la décongestion oculaire, la phényléphrine provoque une vasoconstriction par stimulation directe des récepteurs α-adrénergiques au niveau des vaisseaux de la conjonctive. À long terme, la phényléphrine peut provoquer un rebond de la congestion conjonctivale et entraîner une conjonctivite médicamenteuse [216], effet redouté qui explique une part des réserves d'un grand nombre de prescripteurs [ 217].
La naphazoline Naphazoline (fig. 16-24
Fig. 16-24
Structure de la naphazoline.
), l'oxymétazoline et la tétrahydrozoline diffèrent structurellement des autres agonistes adrénergiques par le remplacement du cycle aromatique par un cycle insaturé. En général, ces agents présentent une activité supérieure au niveau du récepteur α-adrénergique [ 218].
Après application topique sur l'œil, la naphazoline induit une vasoconstriction marquée, et semble présenter un avantage clinique sur la phényléphrine, car elle induit moins fréquemment d'effet « rebond» [ 219]. Ces dérivés sont chimiquement compatibles avec une grande variété d'autres médicaments et peuvent être associés à d'autres collyres : antihistaminiques, corticoïdes, etc.
Il faut signaler qu'un médicament utilisé dans le traitement du glaucome est proposé aux États-Unis comme décongestionnant : la brimonidine (Alphagan® 0,2 %). Au lieu de l'utiliser à cette concentration, certaines équipes proposent son emploi après dilution au 1/8 e , soit 0,025 % [220].
Formes topiques contenant de la phényléphrine :
  • Mydriasert® (phényléphrine 5,4 mg + tropicamide 0,28 mg), insert ophtalmique;
  • Néosynéphrine® 2,5 % (flacon ou récipient unidose), 5 % (flacon), 10 % (flacon ou récipient unidose).
Collyre contenant de la naphazoline :
  • Collyre bleu laiter® : hydroxyde de méthylthioninium (bleu de méthylène) 0,020 g + nitrate de naphazoline 0,050 g pour 100 ml
Utilisations cliniques
Les effets cliniques de la phényléphrine et de la naphazoline permettent de diminuer l'érythème induit par l'histamine, et, à des concentrations relativement faibles, d'obtenir un « blanchiment» de la conjonctive. Il est difficile d'affirmer qu'une préparation soit plus efficace qu'une autre. L'évaluation des effets de la naphazoline à la lampe à fente confirme la constriction des vaisseaux conjonctivaux, sans effet sur les vaisseaux plus profonds. Mais on note qu'une augmentation de la taille de la pupille se produit dans plus de moitié des yeux, et, dans 15 à 20 % des cas, on observe une augmentation de la PIO de 3 à 7 mmHg. En revanche, la naphazoline est peu efficace sur les démangeaisons (elle n'a pas d'effet anti-allergique). On administre les collyres décongestionnants 2 à 4 fois par jour, la règle devant être « aussi peu fréquemment que possible» [ 221].
Effets indésirables
Outre la dilatation pupillaire, on peut signaler, parmi les effets indésirables : une vision floue, des érosions de l'épithélium cornéen [222] et la congestion « de rebond». Après instillation, des picotements transitoires peuvent survenir avec toutes les préparations décongestionnantes. En raison de l'emploi de préparations relativement peu concentrées, mais suffisamment pour obtenir une décongestion oculaire, les effets secondaires systémiques sont rarement observés.
Quelques contre-indications doivent être soulignées. Ces médicaments sont des agonistes adrénergiques; ils peuvent affecter potentiellement tous les tissus cibles innervés par le système nerveux sympathique; on note une augmentation de la fréquence cardiaque (10 %) et une augmentation de la tension artérielle (+15 mmHg) [223]. La prudence s'impose donc chez les patients atteints de maladies cardiovasculaires, d'hyperthyroïdie et de diabète. L'utilisation de ces agents est contre-indiquée chez les patients présentant un glaucome à angle fermé. L'application de phényléphrine ou de naphazoline sur une cornée lésée (malade ou traumatisée) peut entraîner une absorption suffisante pour provoquer une réponse hypertensive systémique.
Antihistaminiques
Pharmacologie
Les antihistaminiques H 1 inhibent les effets physiologiques ou pharmacologiques de l'histamine et soulagent les signes et symptômes associés à la libération d'histamine au niveau de ce type de récepteurs. Ils limitent la dilatation vasculaire, réduisent la perméabilité capillaire induite par l'histamine, minimisent les démangeaisons et les douleurs associées, et soulagent les réactions urticariennes et la congestion des muqueuses. Si la dilatation et l'œdème se sont déjà produits, l'administration des antihistaminiques empêche que l'action de l'histamine ne se prolonge, mais on ne note généralement pas de réduction importante des manifestations cliniques déjà installées. La libération d'histamine peut entraîner une gamme de manifestations physiopathologiques, allant d'un choc anaphylactique avec ou sans œdème de Quincke, potentiellement mortel, à des présentations relativement bénignes de rhinite, de démangeaisons, de larmoiement et d'hyperhémie conjonctivale. Le résultat clinique peut aussi se traduire par une bronchoconstriction, une hypotension, de la tachycardie et des troubles du rythme cardiaque, des éternuements, des maux de tête, de l'urticaire, etc.
Bien que les antihistaminiques puissent soulager les manifestations du choc anaphylactique et de l'œdème de Quincke, leur début d'activité antihistaminique H 1 est lent.
L'effet pharmacologique des antihistaminiques H 1 repose sur leur interaction avec les récepteurs H 1 . De plus, d'autres récepteurs peuvent être affectés, des effets anti-inflammatoires peuvent se manifester, et la libération des médiateurs des mastocytes et des basophiles est freinée. Leur bonne tolérance et leur efficacité, y compris dans le traitement des allergies oculaires, en font le pilier de l'arsenal thérapeutique des manifestations allergiques [225].
Les manifestions majeures du « choc» (stade 4) doivent être traitées par l'administration d'adrénaline injectable 1 mg avec titration ultérieure en fonction de la réponse et de la perfusion intraveineuse de soluté de remplissage [224]. Les antihistaminiques ne sont utiles qu'en complément car ils évitent la survenue de symptômes ultérieurs, mais ils ne sont actifs que tardivement.
Histamine et récepteurs de l'histamine
Les antihistaminiques qui s'opposent aux effets de l'histamine lors de la dégranulation mastocytaire sont un des éléments majeurs de la réponse thérapeutique à l'allergie. L'histamine est, en effet, le principal médiateur impliqué dans les réactions allergiques de type I. Elle est libérée des mastocytes et des globules blancs basophiles. L'histamine est synthétisée et stockée dans presque tous les tissus, avec des concentrations particulièrement élevées dans les poumons, la peau, l'estomac, le duodénum et la muqueuse nasale. L'histamine provoque la contraction des muscles lisses, une augmentation de la perméabilité vasculaire et une vasodilatation (fig. 16-25
Fig. 16-25
Bases pharmacologiques de l'action des antihistaminiques H1 et de leurs effets indésirables.
a. Effets bénéfiques des antihistaminiques H1. b. Effets indésirables potentiels de la première génération d'antihistaminiques H1.
DAG : 1,2-diacylglycérol; GTP : guanosine triphosphate; I Kr : courant potassique rectifiant entrant; I Na : courant sodique rectifiant entrant; IP3 : inositol 1, 4, 5-triphosphate; PIB : guanosine diphosphate; PIP2 : phosphatidylinositol 4,5-diphosphate; PKCβ : protéine kinase Cβ; PLCβ : phospholipase Cβ; RE : réticulum endoplasmique.
Source : Cyrille Martinet.
).
  • Effets recherchés : les antihistaminiques H1 agissent en interférant avec l'action de l'histamine au niveau des récepteurs H 1 : neurones sensitifs et petits vaisseaux sanguins. Ils régulent également l'inflammation allergique indirectement par le facteur nucléaire κB (NF-κB) et par les canaux calciques.
  • Effets indésirables potentiels : les antihistaminiques de première génération traversent la barrière hémato-encéphalique et occupent les récepteurs H 1 du système nerveux central où la saturation des récepteurs est corrélée à une altération des fonctions centrales avec notamment une sédation. Ces médicaments peuvent également être à l'origine d'effets indésirables (récepteurs muscariniques et sérotoninergiques).
Les effets physiologiques et pathologiques de l'histamine ont été décrits en 1910-1911. Les antihistaminiques H 1 ont été introduits en clinique dans les années 1940, avec la phenbenzamine (Antergan®) en 1942 par la société Rhône-Poulenc, et la diphénhydramine (Nautamine®, Bénadryl®) en 1946. Dans les années 1970, des neurones contenant de l'histamine ont été identifiés dans le système nerveux central (SNC) et les antihistaminiques H 1 de deuxième génération, moins sédatifs, ont été introduits en clinique. Le clonage et la caractérisation des récepteurs de l'histamine humaine ont été rapportés pour le récepteur H 1 en 1993. Entre-temps, on avait découvert la pluralité des récepteurs histaminergiques, en particulier les récepteurs H 2 , en 1972, et leur implication spécifique dans la sécrétion acide gastrique [226]. On dénombre, à ce jour, quatre types de récepteurs histaminergiques, ce qui est capital pour comprendre le rôle important de l'histamine dans le système de l'immunorégulation et dans les phénomènes d'inflammation allergique aiguë et chronique. Les récepteurs H 1 et H 2 sont les récepteurs les mieux connus et leurs antagonistes pharmacologiques ont été explorés et mis sur le marché depuis plus de 80 ans pour les récepteurs H 1 et une cinquantaine d'années pour les récepteurs H 2 . Ces deux récepteurs sont impliqués dans la réaction allergique, et ce d'autant qu'ils sont présents dans de nombreux tissus (fig. 16-26
Fig. 16-26
Sous-types de récepteur de l'histamine au niveau des tissus neuronaux et vasculaires.
Les récepteurs H1 activés sont associés au tissu neuronal et entraînent principalement des démangeaisons. Les récepteurs H 2 sont associés au tissu vasculaire et leur activation se traduit principalement par des rougeurs.
Source : Cyrille Martinet; d'après Abelson MB, Schaefer K. Conjunctivitis of allergic origin : immunologic mechanisms and current approaches to therapy. Surv Ophtalmol 1993; 38 : 115-32.
, tableau 16-14
Tableau 16-14
Distribution tissulaire des récepteurs de l'histamine.
H 1H 2
Muscles lisses des bronchesCellules pariétales gastriques
CœurVaisseaux sanguins
Système nerveux centralMastocytes
Œil (vaisseaux sanguins)Globules blancs
Membranes des muqueuses
). Lorsqu'ils sont stimulés, les récepteurs H 1 provoquent une vasodilatation, une augmentation de la perméabilité vasculaire, des démangeaisons et une contraction des fibres lisses musculaires du tractus gastro-intestinal et des bronches. Quant aux récepteurs H 2 , ils provoquent une vasodilatation, des démangeaisons, des sécrétions muqueuses et une augmentation de la sécrétion gastrique. Au niveau de l'œil, la libération d'histamine produit diverses manifestations allergiques : stimulation du nerf conjonctival qui se traduit par des démangeaisons, pleurs, chémosis, œdème conjonctival et œdème palpébral, dilatation de la vascularisation de la conjonctive (œil rouge). Dans les études chez l'animal, l'histamine administrée par voie topique ou injectée produit une hyperhémie et un œdème de l'uvée et de la conjonctive, une augmentation de la PIO, une légère constriction pupillaire et, dans certains cas, la dégradation de la barrière hémato-aqueuse.
Principes généraux d'utilisation
Les antihistaminiques agissent grâce au blocage des récepteurs de l'histamine permettant d'interrompre les effets inflammatoires de l'histamine endogène et d'éviter ou de soulager les signes et symptômes de la conjonctivite associée à l'histamine. De plus, certains antihistaminiques topiques peuvent avoir des effets anti-inflammatoires généraux qui se produisent en raison de la prévention de la phase tardive de la réaction allergique. La plupart des antihistaminiques utilisés dans le traitement des allergies sont des agonistes inverses du sous-type de récepteur H 1 , bien que certains agents puissent avoir une affinité pour d'autres sous-types. Les antihistaminiques systémiques peuvent être utilisés pour contrôler les symptômes de rhinite-conjonctivite, mais ces agents peuvent n'avoir qu'une efficacité partielle pour les symptômes oculaires [ 227]. De plus, l'utilisation d'antihistaminiques systémiques peut potentiellement entraîner des effets secondaires, notamment la sédation, l'assèchement oculaire et un risque de cardiotoxicité (troubles du rythme). Par conséquent, les antihistaminiques systémiques ne sont pas toujours recommandés.
Comme alternative aux antihistaminiques systémiques, plusieurs formulations d'antihistaminiques topiques sont disponibles; ils offrent, grâce à une administration locale, un surcroît de concentration dans les tissus oculaires, ce qui est de nature à renforcer l'efficacité du médicament au niveau du site de l'inflammation allergique et à procurer un soulagement plus rapide de la conjonctivite. Le revers de la médaille est la possible stimulation des récepteurs muscariniques, entraînant potentiellement des effets indésirables tels qu'une paralysie des muscles ciliaires, une mydriase, une photophobie et un glaucome à angle fermé, tout en exacerbant la sécheresse oculaire; en outre, on observe assez fréquemment une irritation cornéenne et des réactions d'hypersensibilité, avec aggravation des réactions allergiques.
Formes orales
Pharmacologie
Les antihistaminiques H 1 de première génération sont parfois dénommés « antihistaminiques sédatifs» et, pour cette raison, les antihistaminiques de deuxième génération, moins sédatifs, font partie des médicaments les plus fréquemment utilisés par voie orale pour le traitement des allergies oculaires. Le tableau 16-15
Tableau 16-15
Formes orales d'antihistaminiques susceptibles d'être utilisées en ophtalmologie.
Première génération
AlimémazineComprimé5 mg Théralène®
Sirop0,5 mg/ml
Sol. buvable1 goutte = 1 mg
Sol. injectable25 mg/5 ml
BilastineComprimé10 mg, 20 mg Bilaska®, Inorial®
Sol. buvable2,5 mg/ml
BromphéniramineGélule12 mg Dimegan®
CyproheptadineComprimé4 mg Periactine®
DexchlorphéniramineComprimé2 mg Polaramine®
Sol. injectable5 mg/ml
HydroxyzineComprimé25 mg Atarax®, Hydroxyzine®
Solution buvable2 mg/ml
KétotifèneSol. buvable0,2 mg/ml Zaditen®
Comprimé1 mg
Comprimé LP2 mg
MéquitazineComprimé5 mg Primalan®
Sirop0,5 mg/ml
1 mesure = 1,25 mg
MizolastineComprimé LP 10 mg Mizollen®
ProméthazineComprimé25 mg Phénergan®
Sirop1 mg/ml
Deuxième génération
FexofénadineComprimé120 mg, 180 mg Fexofénadine®, Telfast®
CétirizineComprimé10 mg Humex Cetirizine®, Virlix®, Zyrtec®
Sol. buvable2,5 mg/ml
10 gouttes = 5 mg
Cétirizine®, Zyrtec®
LévocétirizineComprimé5 mg Xyzall®
ÉbastineComprimé10 mg Ébastine®, Kestin®
LoratadineComprimé10 mg Clarityne®, Loratadine®
Sirop1 mg/ml
1 mesure = 5 mg
DesloratadineComprimé5 mg Aerius®, Dasselta®, Desloratadine®
Sol. buvable0,5 mg/ml
1 mesure = 2,5 et 5 mg
répertorie les antihistaminiques oraux couramment utilisés. La pénétration de la barrière hémato-encéphalique est liée à la lipophilie des médicaments et à leur faible poids moléculaire. Les antihistaminiques de deuxième génération sont moins liposolubles que les antihistaminiques de première génération et leur administration entraîne, majoritairement, une moindre sédation, d'autant que, dans le cerveau, les antihistaminiques de deuxième génération sont moins fortement liés aux récepteurs H 1 , aux récepteurs cholinergiques et α-adrénergiques. Il en résulte que les effets indésirables décrits avec les anti-H 1 de première génération (dépression du SNC, bouche sèche, vision floue et tachycardie) sont moins susceptibles de se produire. L'industrie pharmaceutique a, par ailleurs, privilégié des médicaments permettant une prise unique par jour, et ce en mettant à profit une pharmacocinétique d'élimination plus lente [228]. Même s'ils sont présentés comme innovants, certains médicaments ne sont que les métabolites d'autres médicaments :
  • la desloratadine (Aerius®) est un métabolite de la loratadine (Clarityne®), cette dernière étant rapidement et extensivement absorbée, puis métabolisée lors d'un premier passage hépatique par les CYP3A4 et CYP2D6 en desloratadine, métabolite pharmacologiquement actif et en grande partie responsable de l'effet clinique;
  • la fexofénadine (Telfast®) est le métabolite actif de la terfénadine (Teldane®) qui a été retirée du marché en 1997 en raison de ses effets cardiotoxiques [ 229], effets non retrouvés chez son métabolite;
  • la cétirizine (Zyrtec®), présentée comme un antihistaminique de deuxième génération, est, en réalité, un métabolite de l'hydroxyzine (Atarax®), brevetée en 1959, elle-même issue de la cyclizine, mise sur le marché en 1949.
Les antihistaminiques sont disponibles sous forme de sirops, de comprimés ou de capsules, et plusieurs d'entre eux sont disponibles sous forme à libération prolongée ou retardée. Certains autres peuvent être injectés.
Utilisations cliniques
Les antihistaminiques oraux permettent d'obtenir un soulagement des symptômes : congestion orbitaire, démangeaisons conjonctivales, larmoiement, ce qui ne serait pas possible avec le seul emploi d'une forme « locale». Ils sont efficacement utilisés chez les patients présentant un œdème palpébral modéré à sévère (œdème de Quincke) et un chémosis. L'administration topique offre une alternative permettant un soulagement rapide, mais leur efficacité est incomplète, ce qui justifie l'emploi d'une forme systémique. Les antihistaminiques qui ne sont que légèrement sédatifs conviennent à une utilisation diurne. Les autres doivent faire l'objet d'une information aux patients susceptibles de conduire ou d'avoir des activités professionnelles nécessitant une vigilance intacte. D'une manière générale, il convient de les éviter, d'autant qu'outre la sédation, ils présentent des effets anticholinergiques. Leur administration au coucher et l'ajustement de la posologie peuvent aider à minimiser leurs effets secondaires. La fexofénadine, la loratadine, la desloratadine et la cétirizine sont des antihistaminiques de deuxième génération, réputés moins sédatifs aux doses thérapeutiques et faiblement cholinergiques. Leur demi-vie relativement longue permet une administration le plus souvent, unique dans la journée. La fexofénadine (fig. 16-27
Fig. 16-27
Structure de la fexofénadine.
Énantiomère S de la fexofénadine (en haut) et R-fexofénadine (en bas).
) a remplacé la terfénadine, premier antihistaminique non sédatif, mais retiré du marché en raison d'effets cardiovasculaires potentiellement mortels (arythmies ventriculaires à type de torsades de pointes). C'est le métabolite actif de la terfénadine, et son efficacité clinique est comparable. Elle est bien absorbée après administration orale, et le pic des concentrations sériques intervient à 2,5 heures. La fexofénadine est excrétée dans la bile et l'urine, et on peut observer une accumulation en cas d'insuffisance rénale. La fexofénadine est un bon médicament de première intention pour les patients modérément symptomatiques. Au cours des études cliniques, il n'a pas été mis en évidence d'effets cardiotoxiques, même à des doses supérieures aux doses préconisées. Aucune différence significative de l'intervalle QT n'a été observée chez les patients présentant une rhinite allergique saisonnière et prenant de la fexofénadine jusqu'à 240 mg, 2 fois par jour pendant 2 semaines ou 240 mg 1 fois par jour pendant 1 an, par rapport à ceux qui prenaient un placebo. Lorsqu'un patient ne répond pas à un antihistaminique, un autre médicament de cette famille thérapeutique peut être essayé. La loratadine (fig. 16-28,
Fig. 16-28
Structure de la loratadine (Clarityne®).
fig. 16-29
Fig. 16-29
Structure de la desloratadine (Aerius®), ou désacétyl-loratadine : métabolite de la loratadine.
) est bien absorbée après administration orale, ce qui permet d'obtenir des concentrations plasmatiques maximales en environ 90 minutes. Un soulagement cliniquement significatif des symptômes est généralement obtenu dans les 2 à 4 heures qui suivent la première dose. L'excrétion de la loratadine se produit presque également par l'urine et les matières fécales. Ce double mécanisme de sécrétion fournit une mesure de sécurité chez les patients atteints d'une maladie du foie ou des reins, mais il faut faire preuve de prudence dans les deux groupes. Aussi, des torsades de pointes peuvent survenir lors de l'utilisation simultanée de la loratadine et de médicaments « facilitateurs» de ce trouble du rythme comme l'amiodarone. La cétirizine (fig. 16-30
Fig. 16-30
Structure de la cétirizine (Zyrtec®) : énantiomères R- (haut) et S- (bas) : chaîne latérale éthoxyéthanol.
) est un métabolite actif de l'hydroxyzine (fig. 16-31
Fig. 16-31
Structure de l'hydroxyzine (Atarax®) : chaîne latérale éthoxyacétique.
), antihistaminique de première génération dérivé de la pipérazine. La cétirizine est rapidement absorbée, atteignant un pic plasmatique en 1 heure. L'élimination se fait principalement par le rein, après une part de métabolisme hépatique. La cétirizine est le plus puissant des antihistaminiques de deuxième génération. En termes de puissance intrinsèque, on admet le « classement» suivant : cétirizine > fexofénadine > loratadine. Des ajustements posologiques peuvent être nécessaires pour les enfants et les personnes âgées ou ayant une insuffisance rénale ou hépatique (demi-vie augmentée).
Effets secondaires et interactions
Les effets des antihistaminiques de première génération sur les récepteurs muscariniques, α-adrénergiques et sérotoninergiques peuvent entraîner : mydriase, bouche et yeux secs, rétention urinaire, constipation, étourdissements et maux de tête.
Effets indésirables systémiques
Les effets indésirables systémiques associés à l'administration des antihistaminiques de première génération comprennent : des palpitations, le dessèchement des sécrétions laryngées et bronchiques, des troubles du transit gastro-intestinal, une rétention urinaire, de l'anorexie, des nausées, des vomissements, etc. Mais ce sont les effets « centraux» qui dominent la pharmacovigilance : quand l'effet sur la neurotransmission cérébrale de l'histamine est interrompu, divers effets peuvent survenir : sédation accrue, diminution des fonctions cognitives et des capacités psychomotrices [230]. La sédation et la diminution des réflexes sont les effets secondaires les plus fréquents des antihistaminiques oraux de première génération. C'est une des raisons pour lesquelles il faut s'abstenir de consommer de l'alcool (ou d'autres dépresseurs du SNC). En outre, les antihistaminiques H 1 de première génération additionnent leurs effets avec les médicaments anticholinergiques, les agonistes adrénergiques, les phénothiazines, etc. La prise des médicaments au moment des repas permet de minimiser plusieurs de ces effets. Un ajustement de la dose ou un changement de médicament peut également diminuer ou éliminer ces effets (fig. 16-32
Fig. 16-32
Mécanismes physiopathologiques des effets indésirables des antihistaminiques en lien avec des interactions entre le système histaminergique et les autres neuromédiateurs et canaux ioniques.
D'après Simons [231].
).
Effets secondaires oculaires
Les effets secondaires oculaires concernent principalement les propriétés anticholinergiques des antihistaminiques H 1 : diminution de la sécrétion des larmes; mydriase avec possibilité de glaucome aigu à angle fermé. Une utilisation prolongée peut entraîner une diminution de l'accommodation mais, habituellement, les effets indésirables s'amenuisent avec le temps. Paradoxalement, des réactions allergiques aux antihistaminiques H 1 peuvent survenir lors d'une administration par voie orale, mais sont beaucoup plus fréquentes après administration topique. Les signes et symptômes observés sont voisins des allergies oculaires. Lorsqu'ils sont utilisés aux doses recommandées, les antihistaminiques sont des médicaments sûrs. Bien que la sédation soit moins susceptible de se produire avec les antihistaminiques de deuxième génération, la cétirizine est 3,5 fois plus susceptible de provoquer une sédation que la fexofénadine, la loratadine et la desloratadine, touchant jusqu'à 10 % des personnes traitées. La biodisponibilité des antihistaminiques de deuxième génération (cétirizine, fexofénadine et loratadine) peut être affectée par divers aliments et d'autres médicaments. L'absorption est également retardée lors de la prise d'antiacides et de jus de pamplemousse.
Contre-indications
Les antihistaminiques H 1 sont contre-indiqués en cas de réactions d'hypersensibilité connues. Lors de la grossesse, les présentations orales sont contre-indiquées au cours des trois premiers mois (risque malformatif), au troisième trimestre (sédation du fœtus) et en cas d'allaitement. Les antihistaminiques de deuxième génération sont généralement bien tolérés. La consommation d'alcool doit être évitée pendant un traitement antihistaminique (sédation). La prescription de benzodiazépines ou d'antalgiques opioïdes doit être assortie d'une grande prudence en raison des effets sédatifs cumulés. Les antihistaminiques présentant d'importants effets anticholinergiques doivent être évités chez les patients souffrant de troubles gastro-intestinaux, de maladie ulcéreuse, d'hypertrophie prostatique et chez les patients à risque de glaucome à angle fermé. L'utilisation des antihistaminiques en pédiatrie est encadrée par les AMM qui diversifient (peut-être exagérément) les limites d'âges auxquelles la prescription est possible (tableau 16-16
Tableau 16-16
Âge limite d'utilisation des antihistaminiques (voie orale) chez les enfants (selon le RCP des spécialités correspondantes).
AntihistaminiqueÂge limite d'utilisation
BilastineÀ éviter chez l'enfant de moins de 3 ans
BromphéniramineÀ éviter chez l'enfant de moins de 13 ans
CétirizineÀ éviter chez l'enfant de moins de 6 ans
CyproheptadineÀ éviter chez l'enfant de moins de 7 ans
DesloratadineÀ éviter chez l'enfant de moins de 12 ans
DexchlorphéniramineÀ éviter chez l'enfant de moins de 7 ans
FexofénadineÀ éviter chez l'enfant de moins de 13 ans
HydroxyzineÀ partir de 30 mois
LoratadineÀ éviter chez l'enfant de moins de 7 ans
MéquitazineÀ éviter chez l'enfant de moins de 3 ans
).
Formes ophtalmiques
Les antihistaminiques actuellement disponibles pour les applications ophtalmiques topiques sont indiqués dans le tableau 16-17
Tableau 16-17
Formes ophtalmiques de médicaments antihistaminiques.
Lévocabastine0,5 mg/ml Antihistaminique H 1Allergiflash® 0,05 %, Levofree®
Azélastine0,5 mg/ml Antihistaminique H 1Allergodil®
Kétotifène0,25 mg/ml Antihistaminique H1 et inhibiteur de la dégranulation des mastocytes Ketazed®, Monoketo®, Zagrapa®, Zalerg®, Zalergonium®
Olopatadine1 mg/ml Antihistaminique H 1Opatanol®
Épinastine0,5 mg/ml Antihistaminique H 1Purivist®
. L'utilisation comprend les antihistaminiques de première génération et de deuxième génération.
Lévocabastine
La lévocabastine (Allergiflash®) est un dérivé de la cyclohexylpipérazine. C'est un antihistaminique non sédatif à action prolongée et puissant avec un début d'action rapide. Les effets de la lévocabastine sont médiés par l'inhibition sélective des récepteurs H 1 de l'histamine périphérique, avec peu d'activité anticholinergique, dopaminergique et sérotoninergique. Structurellement différente des autres antihistaminiques, la lévocabastine a une puissance antihistaminique supérieure à celle des autres antagonistes de l'histamine H 1 et présente des propriétés anti-adrénergiques à fortes doses. Son action est rapide et prolongée. Après instillation oculaire, elle soulage rapidement et pendant plusieurs heures les symptômes de la conjonctivite allergique (prurit, érythème, larmoiement, œdème palpébral, chémosis).
Épinastine
L'épinastine (Purivist®) est un antagoniste direct des récepteurs à l'histamine H 1 à action locale. Son affinité pour le récepteur à l'histamine H 1 est élevée, et son affinité pour les récepteurs à l'histamine H 2 est 400 fois plus faible. L'épinastine possède également une affinité pour les récepteurs adrénergiques α 1 et α 2 et les récepteurs sérotoninergiques 5-HT 2 . Son affinité pour les récepteurs cholinergiques et dopaminergiques et pour divers autres sites récepteurs est faible. L'épinastine 0,05 % est un antihistaminique doté de propriétés anti-inflammatoires liées à son action sur la libération de TNF-α et TNF-β, d'IL-5, d'IL-8 et d'IL-10. Le rôle spécifique de l'affinité pour chacun des récepteurs de l'histamine H 1 , H 2 et H 3 n'est pas clair. Dans un modèle animal de fuite vasculaire induite par l'histamine, l'épinastine, l'azélastine et le kétotifène ont eu une durée d'effet plus courte que l'olopatadine [ 232]. On l'utilise chez l'enfant à partir de 12 ans sur une durée maximale de 8 semaines.
Azélastine
L'azélastine (Allergodil®) est un antihistaminique de deuxième génération dont l'efficacité a été démontrée dans la conjonctivite allergique de l'enfant avec un taux de réponse de 74 %, significativement plus élevé que celui du groupe placebo (39 %), et comparable à celui d'un groupe lévocabastine. L'azélastine a la capacité d'inhiber la libération d'histamine par les mastocytes et d'empêcher l'activation des cellules inflammatoires, et il est aussi probable que son efficacité anti-allergique soit en partie le résultat d'une régulation négative de l'expression d'ICAM-1 au cours des phases précoce et tardive de la réponse allergique oculaire, conduisant probablement à une réduction de l'adhésion des cellules inflammatoires aux cellules épithéliales. L'azélastine peut être utilisée chez les enfants de 3 ans et plus (4 ans aux États-Unis). Dans la conjonctivite allergique saisonnière, on l'administre 2 fois à 4 fois par jour. En cas de conjonctivite chronique, on l'administre 2 fois à 4 fois par jour pendant au maximum 6 semaines. Parmi les effets indésirables, on note un goût amer dans la bouche.
Kétotifène
Le kétotifène (Ketazed®, etc.) est un benzocycloheptathiophène qui présente des propriétés antihistaminiques (récepteurs H 1) et inhibitrices de la formation des leucotriènes [ 233]. Ces propriétés permettent au kétotifène de présenter des propriétés allergiques prononcées qui entraînent une amélioration modérée à marquée des symptômes chez la majorité des patients atteints de conjonctivite allergique [ 234]. Le kétotifène se distingue du cromoglicate de sodium et du nédocromil par un effet additionnel comme stabilisateur de la membrane des mastocytes [235]. Toutefois, des réactions allergiques au kétotifène, comme des picotements, des écoulements, des douleurs oculaires et une photophobie, peuvent survenir (moins de 5 % des patients). Les effets indésirables les plus fréquents dans les essais cliniques à long terme sont la sédation (selon les études, 5 % à 23 % des sujets) et la prise de poids [236]. Chez les jeunes enfants (âge moyen : 16 mois), des doses efficaces de kétotifène ont produit des effets indésirables similaires à ceux observés chez les adultes, y compris la bouche sèche (28 %) et parfois une augmentation de l'appétit [237]. Une évaluation de la surveillance post-commercialisation du kétotifène au Royaume-Uni a toutefois montré que le pourcentage d'effets indésirables signalés chez les enfants était plutôt inférieur à celui des adultes, la sédation ne survenant que chez 6 % d'entre eux au début du traitement, contre 14 % chez les adultes.
Olopatadine
L'olopatadine (Opatanol®) à 0,01 % possède une activité antihistaminique et des effets stabilisateurs de la membrane des mastocytes. L'olopatadine est environ 10 fois plus puissante comme inhibiteur de la sécrétion de cytokines que l'antazoline et la phéniramine, y compris à l'égard de la libération du TNF-α par les mastocytes de la conjonctive humaine [ 238]. L'olapatadine s'est avérée significativement plus efficace que le placebo pour soulager les démangeaisons et les rougeurs [ 239]. Dans une étude comparative avec le kétotifène, l'olopatadine a été légèrement plus efficace [240].
Émédastine
L'émédastine est un antagoniste puissant des récepteurs H 1 de l'histamine. L'affinité de l'émédastine pour les récepteurs histaminiques (H 1 , H 2 et H 3) montre une sélectivité 10000 fois supérieure pour les récepteurs H 1 . In vivo, l'administration oculaire d'émédastine permet d'obtenir une inhibition « concentration-dépendante» de la perméabilité vasculaire conjonctivale après stimulation par l'histamine. L'émédastine n'a pas d'effets sur les récepteurs adrénergiques, dopaminergiques et sérotoninergiques. Ce médicament n'est pas commercialisé en France.
Effets secondaires
• Avec la lévocabastine, les patients ont décrit une douleur oculaire, une vision floue, et une réaction au site d'administration incluant une sensation de brûlure et des picotements; l'irritation oculaire est rarement accompagnée d'un œdème des paupières. Quelques très rares cas de calcification cornéenne ont été signalés en association avec l'utilisation de gouttes contenant des phosphates chez certains patients atteints de cornées gravement endommagées. • Avec l'azélastine, on note une sensation de brûlure légère et transitoire à l'instillation, une sensation de goût amer, une modification du goût et, très rarement, des sensations d'hypersensibilité. • Avec le kétotifène, on note fréquemment une irritation ou une douleur oculaire, une kératite ponctuée, une érosion ponctuée de l'épithélium cornéen; moins fréquemment, une vision trouble (pendant l'instillation), de la sécheresse oculaire, une irritation des paupières, une conjonctivite, une photophobie et, parfois, même une hémorragie conjonctivale. • Avec l'olopatadine, les effets indésirables les plus fréquemment rapportés sont : maux de tête, dysgueusie, douleur oculaire, irritation oculaire, sécheresse oculaire, sensation anormale dans les yeux, sécheresse nasale et fatigue [241]. Comme avec la lévocabastine, quelques cas rares de calcification cornéenne ont été signalés en association avec l'utilisation de gouttes contenant des phosphates chez certains patients atteints de cornées gravement endommagées [242]. • Avec l'épinastine, on note, parmi les effets indésirables les plus fréquents : une sensation de brûlure, une irritation oculaire [243].
En raison de la présence de chlorure de benzalkonium dans certains de ces collyres et du terrain « sensible» de nombreux patients auxquels ces médicaments s'adressent, on doit rester vigilant à l'égard du risque d'eczéma de contact ou d'irritation.
Contre-indications
Il n'y a pas d'autre contre-indication aux antihistaminiques topiques que la sensibilité à l'un des composants (tableau 16-18
Tableau 16-18
Âge limite d'utilisation des antihistaminiques (collyres) chez les enfants (selon le RCP des spécialités correspondantes).
AntihistaminiqueÂge limite d'utilisation
AzélastineÀ éviter chez l'enfant de moins de 4 ans
ÉpinastineLes données de sécurité n'ont été établies que chez les enfants de plus de 12 ans
LévocabastineAucune limite d'utilisation chez l'enfant
KétotifèneLes données de sécurité n'ont pas été établies chez les enfants de moins de 3 ans
OlopatadineLes données de sécurité n'ont pas été établies chez les enfants de moins de 3 ans
Peut être utilisée chez les enfants de 3 ans et plus
). Parce que les propriétés anticholinergiques des antihistaminiques peuvent produire un certain degré de mydriase, ces médicaments pourraient potentiellement produire un glaucome à angle fermé chez les patients présentant un terrain à risque. Les antihistaminiques topiques sont donc contre-indiqués chez ces patients.
Antidégranulants et stabilisants de la membrane des mastocytes
Les réponses immunitaires de type I sont inhibées par les antidégranulants et stabilisants de la membrane des mastocytes. Ceux-ci jouent un rôle important, à la fois historiquement et actuellement, dans le traitement de diverses maladies oculaires allergiques. Ce groupe comprend le cromoglicate de sodium, le nédocromil et l'acide spaglumique ou acide N-acétyl aspartyl glutamique (tableau 16-19
Tableau 16-19
Formes ophtalmiques de médicaments antidégranulants commercialisés en France.
Cromoglicate de sodium2 g/100 ml Antidégranulant et stabilisant de la membrane mastocytaireAllergocomod®, Cromoptic®, Cromabak®, Cromofree®, Cromoglycate®, Multicrom®, Ophtacalm®, Opticron®
Nédocromil2 g/100 ml Anti-allergique et anti-inflammatoire
Prévention de la libération de médiateurs de l'inflammation
Tilavist®
Acide N-acétyl aspartyl glutamique (acide spaglumique) 19,6 mg/0,4 ml Inhibiteur de la dégranulation des mastocytesNaabak®, Naaxia®
). Aux États-Unis, on dispose également de lodoxamide et pémirolast.
Pharmacologie
Ces médicaments inhibent la dégranulation des mastocytes et évitent donc la libération de médiateurs de l'allergie, en empêchant l'influx de calcium à travers les membranes mastocytaires. Les preuves indiquent, cependant, que les stabilisants de la membrane mastocytaire peuvent également agir via d'autres mécanismes à travers l'inhibition de l'activation d'autres types de cellules : neutrophiles, monocytes et éosinophiles.
Cromoglicate de sodium
Le cromoglicate de sodium inhibe la dégranulation des mastocytes, mais on ne dispose d'aucune preuve de son activité antihistaminique ou anti-inflammatoire. Son absorption systémique est faible.
Nédocromil
Le nédocromil (comme le pémirolast, non commercialisé en France) a été développé à la suite de recherches de médicaments pour le traitement de l'asthme. Son activité a été étudiée in vitro pour diverses cellules inflammatoires : mastocytes, éosinophiles et leucocytes polynucléaires. Il semble être plus puissant que le cromoglicate de sodium comme inhibiteur de la libération de médiateurs mastocytaires. Des études pharmacocinétiques indiquent que la pénétration intracellulaire du nédocromil est lente et sa clairance oculaire est relativement rapide. Le nédocromil diffère des autres stabilisateurs de mastocytes en ce qu'il est efficace dans les 15 à 30 minutes.
Lodoxamide
Le lodoxamide, dont le mécanisme d'action est semblable à celui du cromoglicate de sodium, est 2500 fois plus puissant dans sa capacité d'inhiber la libération de médiateurs. En plus de son effet de stabilisation des mastocytes, l'amélioration clinique observée avec le médicament est également associée à l'inhibition migration des éosinophiles et diminution de la concentration des leucotriènes (LTB4 et LTC4) après exposition aux allergènes. Les stabilisateurs de mastocytes réduisent l'hyperhémie, les démangeaisons et les irritations, bien que leur efficacité dans les conjonctivites allergiques saisonnières varie selon les différents médicaments. Ils sont plus efficaces lorsqu'ils sont administrés avant le déclenchement de la réaction allergique et doivent donc plutôt être utilisés à titre préventif, bien que certaines améliorations des signes et symptômes puissent être observés si le traitement curatif est appliqué précocement. En pratique, leur AMM décrit comme indication : traitement symptomatique des affections ophtalmiques d'origine allergique; cela peut apparaître comme imparfaitement adapté aux propriétés thérapeutiques réelles de cette famille thérapeutique. Dans l'idéal, les stabilisateurs de mastocytes nécessitent une longue période de charge, au cours de laquelle ils doivent être appliqués régulièrement pendant plusieurs semaines pour un bénéfice optimal [244], mais ce dispositif n'est pas facile à appliquer et l'observance des patients est médiocre.
Utilisations cliniques
Les stabilisateurs de mastocytes peuvent être utilisés dans le traitement de tous les types de maladies oculaires allergiques, y compris la conjonctivite allergique, la conjonctivite perannuelle et la kératoconjonctivite vernale. L'efficacité du traitement peut varier légèrement de l'un à l'autre des différents stabilisateurs de mastocytes. Lorsqu'une réponse rapide est nécessaire, l'association avec des antihistaminiques peut s'avérer utile. Lorsque la présentation clinique est sévère, un traitement d'appoint associant les stéroïdes doit être envisagé. La posologie typique des stabilisateurs de mastocytes est une administration 4 fois par jour, avec une dose d'entretien de 2 fois par jour. Le nédocromil est l'exception, sa posologie étant de 2 fois par jour [245].
Cromoglicate de sodium
Le cromoglicate de sodium s'est révélé efficace dans le traitement des signes et symptômes de la conjonctivite allergique, la conjonctivite perannuelle et la kératoconjonctivite vernale [246]. Les patients peuvent obtenir un soulagement dans les 7 jours après le début du traitement [247]. En cas de conjonctivite perannuelle, on observe une réduction de la taille des papilles de la conjonctive tarsienne supérieure à la 3 e semaine de traitement.
Nédocromil
Le nédocromil sodique est efficace pour traiter la conjonctivite allergique et la conjonctivite perannuelle [248]. Dans la conjonctivite allergique, on observe une amélioration significative des démangeaisons et de l'hyperhémie conjonctivale par rapport au placebo. Dans le traitement de la conjonctivite perannuelle induite par les lentilles de contact, le médicament réduit les démangeaisons et l'écoulement muqueux. Le nédocromil diffère des autres stabilisateurs de mastocytes par une simplification du rythme des administrations : une dose 2 fois par jour.
Acide N-acétyl aspartyl glutamique sodique
L'acide N-acétyl aspartyl glutamique sodique (sel de sodium de l'acide spaglumique) inhibe la dégranulation des mastocytes de la muqueuse conjonctivale, bloque l'activation du complément, et inhibe la synthèse des leucotriènes (SRS-A) par les cellules sensibilisées. Cette molécule est d'autant plus utile que les mastocytes, les protéines du complément et les leucotriènes jouent un rôle important dans le déclenchement et le déroulement des réactions allergiques et, donc, la production des symptômes et signes inflammatoires oculaires. Deux médicaments disponibles aux États-Unis ne sont pas, à ce jour, accessibles en France :
  • le pémirolast est utilisé pour traiter les démangeaisons de la conjonctivite allergique. Un soulagement symptomatique peut survenir après quelques jours de traitement, mais généralement des semaines peuvent être nécessaires;
  • le lodoxamide a montré une efficacité dans le traitement ou la prévention de plusieurs types de conjonctivites allergiques, notamment la kératoconjonctivite vernale. Les complications cornéennes de l'allergie sont minimisées par le lodoxamide 0,1 % à raison de 4 administrations quotidiennes pendant 90 jours; les démangeaisons diminuent de manière significative. L'efficacité du lodoxamide à 0,1 % semble supérieure à celle du cromoglicate de sodium 4 %.
Effets indésirables
Les stabilisateurs de mastocytes sont des médicaments relativement sûrs. Leurs effets indésirables sont rares, mais peuvent inclure des picotements ou sensations de brûlure, avec des présentations moins courantes qui incluent une hyperhémie, des démangeaisons et un larmoiement. Il existe un faible potentiel d'effets indésirables systémiques, en raison de la faible absorption et des concentrations plasmatiques minimes des médicaments. Toutefois, des maux de tête sont régulièrement décrits, en particulier pour le nédocromil et le pémirolast.
Combinaisons de médicaments
Les stabilisateurs de mastocytes empêchent le mastocyte de dégranuler et donc la libération ultérieure des médiateurs. Cependant, une fois que les mastocytes ont déjà dégranulé, les stabilisateurs de mastocytes sont inefficaces contre la libération des médiateurs. Des associations d'antidégranulants mastocytaires et d'antihistaminiques fournissent à la fois un traitement à long terme et un soulagement plus rapide des symptômes.
Anti-inflammatoires non stéroïdiens
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) bloquent la cyclo-oxygénase, enzyme à l'origine de la production des prostaglandines à partir de l'acide arachidonique. En raison de ce mécanisme d'action, les AINS réduisent la sécrétion de mucus, l'infiltration cellulaire, l'érythème et le chémosis, ce qui entraîne un soulagement des démangeaisons oculaires, bien qu'une certaine amélioration de l'hyperhémie conjonctivale, de l'inflammation et de l'œdème puisse également être observée. Un AINS oculaire, le kétorolac trométamol (Acular® 0,5 %), actuellement commercialisé en France pour les suites inflammatoires de la chirurgie de la cataracte, a une indication aux États-Unis pour la prise en charge de l'inflammation d'origine allergique [249] (voir chapitre 16.4 ).
Corticoïdes
Les agents thérapeutiques les plus efficaces dans le traitement de la conjonctivite allergique saisonnière sont les corticoïdes, car ils prennent en compte l'ensemble des facettes de l'allergie [250].
À la suite de leur liaison aux récepteurs des glucocorticoïdes (GR), les corticoïdes modulent la synthèse des protéines par la régulation de leur transcription et en modifient l'activité (fig. 16-33,
Fig. 16-33
Structure de l'hydrocortisone. Hydrocortisone
fig. 16-34,
Fig. 16-34
Structure de la fluorométholone. Fluorométholone
fig. 16-35
Fig. 16-35
Structure du lotéprednol. Lotéprednol
et voir fig. 16-11
Fig. 16-11
Structure de la dexaméthasone.
). Les corticoïdes réduisent ainsi l'inflammation allergique en modifiant la circulation, la migration et le fonctionnement des cellules pro-inflammatoires. Dans la mesure où les corticoïdes topiques soulagent efficacement un large éventail de signes et de symptômes d'inflammation oculaire, ils sont considérés comme une option de traitement aigu efficace pour la conjonctivite allergique saisonnière. Les corticoïdes topiques ophtalmiques peuvent être prescrits à des doses plus faibles pour produire des concentrations locales de médicament égales ou supérieures avec des effets indésirables systémiques négligeables par rapport aux corticoïdes systémiques, bien qu'il existe un potentiel d'effets indésirables oculaires (augmentation de la PIO, induction ou exacerbation d'un glaucome, formation de cataracte, retard de cicatrisation et augmentation de la susceptibilité aux infections ou aux surinfections), ce qui explique la crainte de nombreux prescripteurs (voir chapitre 16.2 ). En raison de ces effets indésirables associés aux corticoïdes, la recherche pharmaceutique a tenté de développer de nouveaux corticoïdes utilisant la conception de médicament rétrométabolique, qui a permis l'administration de corticoïdes tout en limitant leurs effets indésirables (tableau 16-20
Tableau 16-20
Traitements corticoïdes actuels pour la conjonctivite allergique saisonnière.
DexaméthasoneDexafree®
Maxidex®
Traitement des états inflammatoires non infectieux du segment antérieur de l'œil
Conjonctivites allergiques
FluorométholoneFlucon®Affections allergiques conjonctivo-palpébrales
HydrocortisoneSoftacort®Traitement des pathologies conjonctivales modérées et non infectieuses d'origine allergique ou inflammatoire
Lotéprednol étabonateNon commercialisé en France
).
Alors que de nombreux médicaments ont été produits et sont en cours d'évaluation, un de ces corticoïdes, le gel ophtalmique d'étabonate de lotéprednol 0,5 % a été approuvé pour le traitement de la conjonctivite allergique saisonnière aux États-Unis (Lotemax®), mais pas en France. C'est un dérivé d'un métabolite actif de la prednisolone, l'acide cortiénique [49]. L'étabonate de lotéprednol est actif à l'égard des processus inflammatoires avant de subir une dégradation enzymatique par des estérases des tissus oculaires, ce qui entraîne une réduction des effets indésirables tels que l'élévation de la PIO, ou la formation de cataracte.
Montélukast
Le montélukast (Singulair®) est un antagoniste des récepteurs des leucotriènes. Les leucotriènes sont des médiateurs inflammatoires synthétisés à partir de l'acide arachidonique.
Les antagonistes des récepteurs des leucotriènes tels que le montélukast inhibent les actions pro-inflammatoires des cystéinyl-leucotriènes (LTC4, LTD4, LTE4), éicosanoïdes, exerçant un puissant effet inflammatoire, libérés par différents types de cellules, notamment les mastocytes et les éosinophiles. Ces médiateurs (« pro-asthmatiques») se lient aux récepteurs des cystéinyl-leucotriènes (CysLT). Les récepteurs cystéinés de type I (CysLT1) sont présents dans les voies aériennes respiratoires de l'homme, dans d'autres cellules pro-inflammatoires (éosinophiles et certaines cellules souches myéloïdes), mais aussi dans la cornée. Par analogie, on a estimé que les leucotriènes cystéinés pouvaient être considérés comme une cible d'action dans la pharmacologie des conjonctivites allergiques inflammatoires sévères. L'activation des récepteurs des cystéinyl-leucotriènes entraîne l'activation et le recrutement de cellules inflammatoires ainsi qu'une augmentation de la perméabilité vasculaire. En plus d'antagoniser les récepteurs des leucotriènes, il existe des preuves que le montélukast possède également d'autres propriétés anti-inflammatoires, notamment l'inhibition des enzymes 5-lipoxygénase, histone acétyltransférase et adénosine 3′,5′-monophosphate cyclique (AMPc) phosphodiestérase. Montélukast, actif par voie orale, se lie sélectivement au récepteur CysLT1 avec une grande affinité; il est indiqué pour le traitement de l'asthme et de la rhinite allergique saisonnière, mais n'a pas d'indication reconnue en ophtalmologie.
Immunosuppresseurs
La kératoconjonctivite vernale (KCV) est habituellement considérée comme une maladie d'origine allergique, bien que le rôle des allergènes en tant que facteurs de causalité ne soit pas clair. De nombreuses démonstrations expérimentales renforcent cependant l'idée selon laquelle de nombreux chaînons de la cascade de l'immunité jouent un rôle dans le déclenchement de la maladie : IgE, cytokines, chimiokines et cellules inflammatoires (lymphocytes T et B, mastocytes, basophiles, neutrophiles et éosinophiles). Si les cas bénins de KCV ont tendance à régresser sous l'effet de traitements non spécifiques, en revanche, les cas sévères sont généralement réfractaires et l'abstention thérapeutique pourrait se traduire par une dégradation du pronostic fonctionnel. Les corticoïdes topiques, souvent nécessaires pour contrôler les symptômes et les signes de KCV sévère, peuvent entraîner de graves complications oculaires. Les immunosuppresseurs désormais proposés dans cette indication comprennent des préparations oculaires topiques de ciclosporine et de tacrolimus [252].
Ciclosporine
La ciclosporine est présentée sous forme de préparations hospitalières allant de 0,1 % à 2 %. Il n'existe une spécialité pharmaceutique dotée d'une AMM en Europe : Verkazia® 1 mg/ml, collyre en émulsion. La ciclosporine (voir fig. 16-18
Fig. 16-18
Structure de la ciclosporine.
), après administration oculaire, est passivement absorbée par les lymphocytes T.
En se liant à la cyclophiline A, elle inactive la calcineurine et empêche la translocation du NF-AT dans le noyau, ce qui bloque la libération de cytokines pro-inflammatoires telles que l'IL-2 et, ainsi, l'activation des lymphocytes T.
Le blocage du NF-AT perturbe également le processus allergique. La ciclosporine inhibe la libération de l'histamine par les mastocytes et les basophiles en réduisant la production d'IL-5, et pourrait réduire le recrutement des éosinophiles ainsi que ses effets sur la conjonctive et la cornée. Il est également connu que la ciclosporine régule positivement la libération des cytokines anti-inflammatoires.
Tacrolimus
Le tacrolimus (Talymus® 1 mg/ml, collyre – suspension) est à prescrire en autorisation d'accès compassionnel. Le tacrolimus est un immunosuppresseur très puissant dont l'activité a été démontrée in vitro et in vivo.
Les effets du tacrolimus (voir fig. 16-19
Fig. 16-19
Structure du tacrolimus.
) semblent être induits par la liaison à une protéine cytosolique (FKBP12) responsable de l'accumulation intracellulaire du produit. De manière spécifique et compétitive, le complexe FKBP12-tacrolimus se lie à, et inhibe la calcineurine, conduisant à une inhibition calcium-dépendante du signal de transduction des lymphocytes T, en empêchant ainsi la transcription d'une partie des gènes des lymphokines.
Le tacrolimus inhibe notamment la formation des lymphocytes cytotoxiques qui sont principalement responsables du rejet du greffon. Le tacrolimus supprime l'activation des lymphocytes T et la prolifération T-dépendante des lymphocytes B, ainsi que la production de lymphokines (telles que les IL-2 et -3 et l'interféron γ) et l'expression du récepteur de l'IL-2.
L'emploi de la suspension ophtalmique de tacrolimus à 0,1 % permet de traiter les patients atteints de KVC sur une période de 24 mois : les scores cliniques enregistrés au 24 e mois (taux de rémission de 92 %) sont significativement améliorés par rapport à ceux enregistrés au 6 e mois (taux de rémission de 75 à 85 %). Les patients les plus âgés peuvent être plus facilement sevrés de leur traitement par corticoïdes. Néanmoins, l'efficacité et l'innocuité du traitement par tacrolimus des patients atteints de KCV et de KCA nécessitant un traitement prolongé ne sont pas encore entièrement comprises [253]. Il est proposé d'administrer de faibles doses de collyres pour prévenir les récidives, mais lors des poussées inflammatoires, il est recommandé d'administrer un corticoïde, parfois même par injection sous-conjonctivale.
Les effets indésirables de ces collyres sont essentiellement la douleur au moment de l'administration, qui s'estompe avec la durée du traitement (voir chapitre 16.5 ).
Anticorps monoclonaux
Lirentelimab
Les patients atteints de KCA chronique sévère, de KVC et de conjonctivite allergique perannuelle, et chez lesquels l'utilisation de corticoïdes topiques ou systémiques a été soldée par un échec pourraient bénéficier de perfusions plurimensuelles de lirentelimab [ 254]. Il s'agit d'un anticorps monoclonal dirigé qui cible la lectine 8 de type Ig liant l'acide sialique (Siglec-8) et qui a été étudié dans de multiples domaines pathologiques. Il a maintenant montré une activité clinique dans la gastrite à éosinophiles et/ou la duodénite à éosinophiles, la mastocytose systémique et de multiples formes d'urticaire chronique. Le Siglec-8 est un récepteur inhibiteur présent sur les éosinophiles et les mastocytes, avec une expression de faible niveau sur les basophiles. Les changements par rapport à l'inclusion pour l'éosinophilie, les changements dans les symptômes signalés par les patients (mesurés par le questionnaire quotidien sur les symptômes de la conjonctivite allergique, y compris les comorbidités atopiques), les changements dans les signes et symptômes oculaires signalés par les investigateurs (scores de symptômes oculaires), les changements dans la qualité de vie et la diminution des concentrations de cytokines lacrymales et de chimiokine ont été les principaux marqueurs pour l'intérêt de cet anticorps, pas encore commercialisé.
Omalizumab
L'omalizumab (Xolair®) est un anticorps anti-IgE chimérique monoclonal qui se lie au domaine Cε3 des IgE circulantes, ce qui entraîne des complexes immunitaires inactifs qui sont éliminés du plasma. Il peut réduire les IgE libres circulantes jusqu'à 99 %, supprimant ainsi l'activation des mastocytes et régulant à la baisse l'expression des récepteurs IgE FcεRI à la surface des basophiles et des mastocytes. Par conséquent, les réactions médiées par les IgE sont moins susceptibles de se produire. L'omalizumab pourrait être un traitement efficace pour les formes réfractaires de KVC. Il permet une réduction des symptômes et de l'inflammation cornéoconjonctivale. Son efficacité est cependant variable d'un patient à l'autre. Cette variabilité pourrait refléter la responsabilité incomplète des mécanismes médiés par les IgE dans la KCV, comme proposé dans la classification des maladies oculaires allergiques [ 255]. Bien que l'omalizumab ait été évalué favorablement dans diverses manifestations allergiques (asthme, urticaire) en ophtalmologie, les résultats sont incomplets et, pour tout dire, décevants.
Immunothérapie allergénique
L'immunothérapie allergénique (ITA) consiste en l'administration répétée d'allergènes à un individu allergique dans le but de modifier la réponse immunitaire à l'allergène, permettant ainsi une diminution durable des symptômes, un moindre recours aux médicaments symptomatiques et une amélioration de la qualité de vie en cas d'exposition à l'allergène dans la vie courante. L'ITA consiste en l'administration répétée de doses progressivement croissantes d'un extrait allergénique à un patient allergique, par voie sublinguale ou sous-cutanée, afin de réduire les symptômes résultant de son exposition à l'allergène causal. L'objectif de l'ITA est de réduire la sensibilité individuelle d'un patient à un allergène en modulant progressivement la réponse immunitaire de ce patient vis-à-vis de cet allergène, afin de modifier le cours naturel de la maladie allergique [256].
Les allergènes préparés pour un seul individu (APSI) sont des produits utilisés dans le cadre de l'ITA, et complètent les alternatives thérapeutiques que représentent les antigènes commercialisés tant pour la désensibilisation à l'allergie aux graminées qu'aux acariens.
Les autorités de santé reconnaissent, depuis 2016, la pratique de la désensibilisation au moyen d'allergènes individualisés (préparés pour un seul individu, APSI) au regard « de leur place dans la stratégie thérapeutique, des alternatives disponibles (par exemple Grazax® et Oralair®), de leur efficacité et des effets indésirables éventuels, de la gravité des allergies concernées et de l'intérêt pour la santé publique».
Grazax® est un extrait allergénique de pollen de graminée de Fléole des prés (Phleum pratense), utilisé chez l'adulte et l'enfant (à partir de 5 ans) pour le traitement de la rhinite et de la conjonctivite allergique provoquée par les pollens de graminées. Cet allergène est présenté en comprimés à unités de qualité standardisée (SQ-T). La première prise de lyophilisat oral doit être réalisée sous surveillance médicale pendant environ 20 à 30 minutes afin d'évaluer et de traiter les éventuels effets indésirables d'apparition immédiate. Des cas de réactions anaphylactiques graves ont été rapportés, soulignant l'importance de débuter le traitement sous surveillance médicale. Dans certains cas, la réaction anaphylactique grave s'est produite lors des prises ultérieures. Parmi les autres effets indésirables, on note : irritation oculaire, douleur auriculaire, érythème pharyngé et vésicules de la muqueuse buccale. Un effet statistiquement significatif a été démontré sur les symptômes de rhinoconjonctivite : de l'ordre de 20 à 30 % d'amélioration.
Oralair® est un allergène administrable par voie sublinguale pour lutter contre les allergies aux graminées (Dactyle aggloméré, Fléole des prés, Flouve odorante, Ivraie vivace, Pâturin des prés), chez les adultes et les enfants de plus de 5 ans. Pour obtenir l'effet recherché dans le traitement de la rhinite et de la conjonctivite allergiques aux pollens de graminées, au cours de la saison des pollens de graminées, il est recommandé de débuter le traitement au moins 4 mois avant la date prévue du début de la saison des pollens de graminées et de le poursuivre toute la saison.
Il existe une autre spécialité, Acarizax®, destinée à lutter contre l'allergie aux acariens, mais son AMM ne reconnaît que les indications ORL (rhinite) et pneumologiques (asthme).
Conclusion
Une grande part des allergies oculaires est représentée par la conjonctivite allergique saisonnière qui touche une part significative de la population. L'inconfort causé par les signes et les symptômes affecte la qualité de vie des patients. Les traitements non pharmacologiques visent à minimiser l'exposition à l'antigène sur la surface oculaire, tandis que les traitements pharmacologiques tels que les antihistaminiques, les antidégranulants des mastocytes ou les anti-inflammatoires ciblent les médiateurs préformés (phase précoce) ou les médiateurs nouvellement formés (phase tardive) de la réponse allergique. Les corticoïdes affectent de multiples facettes de la réponse allergique et sont donc considérés comme les agents pharmacologiques les plus efficaces dans le traitement de la conjonctivite allergique saisonnière. En revanche, dans la kératoconjonctivite vernale ou la kératoconjonctivite atopique, le recours aux agents immunosuppresseurs ne peut pas être exclu. Cependant, en raison d'effets secondaires importants, la plupart des lignes directrices recommandent de limiter l'utilisation des corticoïdes et des immunosuppresseurs aux conjonctivites les plus sévères, non contrôlées par les autres traitements. L'augmentation du risque pollinique en raison du changement climatique en cours et prévisible au cours des prochaines années pourrait entraîner une augmentation concomitante des allergies oculaires. C'est pourquoi les allergies oculaires peuvent se chroniciser et persister chez un grand nombre de patients, nécessitant des traitements sur des périodes prolongées. L'éviction du malade par rapport au risque allergénique est souvent la meilleure approche pour limiter le recours aux traitements pharmacologiques.
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Les références peuvent être consultées en ligne à l’adresse suivante : http://www.em-consulte.com/e-complement/477020 .
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