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Chapitre 21
Kératites bactériennes

T. Bourcier, N. Bouheraoua

Introduction
Une kératite bactérienne (KB) se caractérise par la survenue d'un infiltrat cornéen sous-jacent à un ulcère épithélial au niveau duquel une ou plusieurs bactérie(s) est (sont) identifiée(s) par analyse microbiologique et/ou guérissant sous traitement antibiotique adapté. Une publication récente estime à 2 millions le nombre de cas annuels de kératites infectieuses non virales (kératites microbiennes) survenant dans le monde [ 1], avec d'importantes variations géographiques dépendant du niveau économique et des structures médicales de chaque région. Parmi les kératites microbiennes, les étiologies bactériennes sont largement majoritaires dans les pays d'Europe et d'Amérique du Nord [ 2]. Les KB peuvent évoluer de façon aiguë ou chronique, survenir à tout âge et ne se développent qu'exceptionnellement sur une cornée normale. Ces infections requièrent une prise en charge standardisée afin d'éviter tout retard diagnostique et thérapeutique susceptible d'assombrir le pronostic visuel.
Organismes pathogènes
Un grand nombre de bactéries aérobies et anaérobies peuvent provoquer une infection de la cornée (tableau 21-1
Tableau 21-1
Principales bactéries isolées dans les kératites *.
BactériesAérobiesAnaérobies
Cocci à Gram positifStaphylococcus
– aureus
– epidermidis et autres coagulase négative
Micrococcus
Streptococcus
– pneumoniae
– autres streptocoques oraux
Enterococcus
Peptococcus
Peptostreptococcus
Cocci à Gram négatifBranhamella
Neisseria
– gonorrheae
– meningitidis
autres
Veillonella
Bacilles à Gram positifBacillus
Corynebacterium
Listeria
Propionibacterium
Actinomyces
Clostridium
Bacilles à Gram négatifPseudomonas
– aeruginosa
non aeruginosa
Stenotrophomonas
Burckholderia
Enterobacteriaceae
– Klebsiella
– Enterobacter
– Serratia
– Proteus
– Escherichia
– Citrobacter
Acinetobacter
Alcaligenes
Azotobacter
Haemophilus
Fusobacterium
Bacteroides
Capnocytophaga
Bacille à Gram positif ramifiéNocardia
Coccobacille à Gram négatifMoraxella
Bacille acido-alcoolo-résistantMycobacterium
*Quatre groupes prédominent très largement puisqu'ils sont à l'origine de 90 % des cas de kératites bactériennes (KB) : les staphylocoques, les streptocoques, les Pseudomonas et d'autres bacilles à Gram négatif. Les bactéries capables de pénétrer un épithélium intact et de provoquer une KB sont les suivantes : Neisseria gonorrhoeae, Listeria monocytogenes, Haemophilus aegyptius, Corynebacterium diphteria.
). La plupart des germes isolés proviennent de la flore conjonctivale, palpébrale, cutanée, nasale (majoritairement à Gram positif), orale ou digestive (majoritairement à Gram négatif) [3]. Les infections post-traumatiques ou postopératoires peuvent être dues à des bactéries d'origine endogène ou exogène, provenant d'un corps étranger ou de l'environnement.
Certaines bactéries telles que Pseudomonas aeruginosa , Staphylococcus aureus , Streptococcus pneumoniae et Neisseria gonorrhoeae sont particulièrement virulentes et peuvent conduire, en l'absence de traitement adapté, à la perforation cornéenne en quelques heures. D'autres, comme les Nocardia , Moraxella , mycobactéries atypiques ou les streptocoques oraux, évoluent de façon subaiguë ou chronique. Enfin, certains commensaux de la conjonctive ou des paupières ( Staphylococcus epidermidis , Corynebacterium sp., Propionibacterium sp.) peuvent devenir des agents pathogènes opportunistes lorsque la surface oculaire est altérée.
Dans la plupart des pays industrialisés, la tendance actuelle est à l'augmentation du pourcentage des bactéries à Gram positif qui sont isolées dans 47 % à 89 % des cas de KB [4-5-6-7-8-9-10-11-12-13]. Cependant, les bactéries à Gram négatif sont relativement fréquentes parmi les abcès sous lentilles de contact pris en charge en milieu hospitalier (de 30 % à 60 % des cas) et sous des climats chauds [ 14]. Les KB peuvent être polybactériennes (2 % à 43 % des cas) [4 , 6 , 15] et parfois être associées à d'autres agents pathogènes, tels que des amibes ou des champignons, notamment chez les patients porteurs de lentilles de contact ou ceux ayant subi un traumatisme cornéen végétal ou tellurique.
Pathogénie
Pour qu'une bactérie puisse se développer dans la cornée, il est nécessaire qu'un ou plusieurs des systèmes de défense de la surface oculaire soient altérés.
Les paupières constituent une barrière de protection contre les agressions de la conjonctive ou de la cornée par des micro-organismes exogènes [ 3]. Le clignement normal répartit le film lacrymal sur la surface oculaire avant que celui-ci ne soit évacué par le système de drainage lacrymonasal, entraînant d'éventuels micro-organismes. En outre, les bactéries constituant la flore conjonctivale et palpébrale normale aident à prévenir l'implantation et la croissance de bactéries pathogènes exogènes.
Le film lacrymal comporte de nombreuses protéines (immunoglobulines A sécrétoires, lipocaline, lactoferrine, bêta-lysine, bêta-défensines, orosomucoïde, mucines, surfactant, complément) et enzymes (lysozyme, lactoperoxydase, phospholipase A2, céruloplasmine) qui, en inhibant l'adhésivité et la prolifération des bactéries, ont des propriétés antibactériennes. Le tissu conjonctival lymphoïde ( conjunctiva-associated lymphoid tissue [CALT]) contribue également au système de défense.
Un épithélium cornéen intact est une barrière infranchissable pour la plupart des bactéries. Les bactéries adhèrent à la surface épithéliale lésée au niveau des récepteurs aux glycoprotéines, mais aussi à la lame basale et au stroma dénudé par l'intermédiaire d'adhésines non filamenteuses ou de pili. L'attachement peut se faire également de façon non spécifique par le glycocalyx bactérien. Les bactéries se multiplient dans l'épithélium avant de pénétrer le stroma cornéen grâce aux toxines et aux enzymes protéolytiques qu'elles sécrètent. L'augmentation de la population bactérienne est majeure dans les 48 premières heures. La production de biofilm favorise l'agrégation et la prolifération bactérienne lors de la phase initiale de l'infection. En l'absence de traitement, les bactéries progressent jusqu'au stroma profond en élargissant l'ulcère. Les bactéries vivantes sont plus volontiers retrouvées sur les berges et dans le fond de l'ulcère. Les bactéries à Gram négatif sont souvent plus virulentes que celles à Gram positif, pneumocoque mis à part, et sont responsables de lésions tissulaires plus importantes.
L'invasion bactérienne induit en effet une réponse inflammatoire de l'hôte à la fois cellulaire (macrophages, polynucléaires neutrophiles) et humorale. La libération de nombreux facteurs pro-inflammatoires provoque une vasodilatation et une perméabilisation des vaisseaux conjonctivaux et limbiques suivies d'une extravasation des cellules inflammatoires vers la cornée et les larmes [16]. Cette réaction inflammatoire débute dès les premières heures de l'inoculation bactérienne. Elle peut être délétère en soi en provoquant une fonte stromale et une nécrose tissulaire.
Facteurs de risque
Le port de lentilles de contact Lentilles de contact kératite bactérienne incipal facteur de risque (40 % à 50 % des cas) [4 , 14], notamment dans les pays développés ( encadré 21-1). Le risque est majoré en cas de pathologie de surface oculaire sous-jacente, de mésusage et/ou d'absence de surveillance médicale [17]. Les traumatismes, la chirurgie cornéenne, les pathologies chroniques de surface oculaire, l'utilisation des corticoïdes topiques ainsi que l'immunodépression systémique constituent les autres facteurs de risque habituellement identifiés [1].
Une infection aiguë dont le point de départ est adjacent à la cornée peut s'y propager : conjonctivites à gonocoque, Chlamydia , Haemophilus ou pneumocoque, mais aussi sclérites, endophtalmies bactériennes.
Port de lentilles de contact
  • Tous types de lentilles, de matériaux et mode de port (y compris les lentilles jetables journalières) ont été impliqués
  • Les lentilles souples sont néanmoins plus souvent en cause que les rigides
  • Les principales conduites à risque sont le port continu, nocturne ou prolongé, une mauvaise hygiène d'entretien des lentilles ou du boîtier, une mauvaise hygiène des mains, des échanges de lentilles entre individus, le port en piscine ou sous la douche, le contact avec l'eau du robinet, le non-respect des délais de renouvellement des lentilles et produits d'entretien ainsi que le mélange de produit frais et ancien ( topping off )
Pathologies chroniques de surface oculaire
  • Œdème de cornée chronique (dystrophie bulleuse du pseudophake, de l'aphake, dystrophie de Fuchs)
  • Érosions cornéennes récidivantes (post-traumatiques ou dans le cadre de dystrophies épithéliales ou stromales antérieures)
  • Kératite sèche sévère par déficit aqueux (syndrome de Gougerot-Sjögren primitif ou secondaire, maladie du greffon contre l'hôte) ou lipidique (dysfonction des glandes de Meibomius)
  • Kératite allergique sévère (kératoconjonctivite vernale, kératoconjonctivite atopique)
  • Kératite herpétique, kératite zostérienne
  • Kératite neurotrophique
  • Kératite immunitaire
  • Kératite d'exposition (paralysie faciale, exophtalmie, chirurgie ou traumatisme palpébral)
  • Blépharite aiguë ou chronique avec complications cornéennes
  • Entropion, ectropion, trichiasis
  • Imperméabilité et/ou infection des voies lacrymales (canaliculite, dacryocystite)
  • Pathologies fibrosantes (pemphigoïde, Lyell, Stevens-Johnson, trachome)
  • Brûlures chimiques, thermiques
  • Insuffisance en cellules souches limbiques
  • Instillation chronique de collyres créant les conditions d'une immunodépression locale (corticoïdes), de résistances bactériennes (antibiotiques), ou d'une kératite toxique (AINS, conservateurs)
Traumatismes
  • Sans ou avec corps étrangers cornéens
Chirurgies
  • Chirurgies cornéennes réfractives
  • Greffes de cornées
  • Cross-linkings cornéens
  • Chirurgies de la cataracte
  • Chirurgies palpébrales
  • Sutures cornéennes rompues ou distendues
Immunodépression systémique
  • Infection au VIH
  • Diabète
  • Malnutrition
  • Déficit en vitamine A
  • Dermatite atopique
  • Alcoolisme chronique
  • Maladies immunitaires
  • Corticothérapie et autres traitements immunosuppresseurs
  • Cancers
  • Coma, ventilation assistée
  • Toxicomanie
  • Portage de bactéries résistantes
Diagnostic clinique
L'interrogatoire permet de cerner les éventuels facteurs de risque à l'origine de l'infection et retrouve des symptômes de kératite d'intensités variables : œil rouge douloureux accompagné de larmoiement, photophobie, blépharospasme. Leur apparition est souvent brutale, parfois plus progressive sur un œil dont la surface oculaire est déjà pathologique, ou en cas d'infection par des bactéries peu virulentes. La baisse d'acuité visuelle est variable en fonction de la localisation des lésions cornéennes (infiltrat, œdème) par rapport à l'axe visuel, d'une éventuelle inflammation intraoculaire associée, de la présence de sécrétions et/ou d'un larmoiement réflexe. Le degré d'urgence dépend de l'intensité et de la rapidité d'installation et d'évolution des symptômes.
L'examen du visage vise à rechercher une pathologie dermatologique, une exophtalmie, une anomalie conjonctivale ou des voies lacrymales, des cils, de la statique ou de la cinétique palpébrale. L'examen des mains recherche un défaut d'hygiène, des arguments en faveur d'une infection unguéale ou cutanée active, d'une polyarthrite ou d'une sclérodermie.
L'examen biomicroscopique montre les signes d'une infection cornéenne active : œdème palpébral, hyperhémie conjonctivale, chémosis, cercle périkératique, ulcère épithélial positif à la fluorescéine, infiltrat stromal (suppuratif, nécrotique, cristallin ou duveteux), localisé (abcès) ou diffus (kératite), sécrétions. La localisation, la couleur, la densité, les dimensions, la forme, la régularité des bords, la profondeur de l'infiltrat (ou des infiltrats) sont à noter, de même que l'existence de zones de fonte, de nécrose, d'amincissement stromal, d'œdème périlésionnel, de néovaisseaux, d'une atteinte endothéliale (plis, précipités, plaque), d'une réaction inflammatoire de la chambre antérieure (effet Tyndall, hypopion, fibrine) et d'une éventuelle atteinte vitréenne. L'identification du processus est parfois plus difficile en cas d'infection survenant sur une cornée pathologique siège d'une inflammation chronique, en cas de traitement anti-infectieux préalable ou de kératite toxique.
L'examen de la cornée adjacente à la zone infectée, des bords palpébraux, des cils, des glandes de Meibomius, de la conjonctive, de la sclère, du limbe, du film lacrymal, des points lacrymaux au niveau de l'œil infecté, mais aussi de l'œil controlatéral permet de repérer des pathologies de surface oculaire ou des corps étrangers associés à l'infection. Il est nécessaire de tester la sensibilité cornéenne si une kératite neurotrophique est suspectée. Tous ces signes sont consignés sur un schéma détaillé. La pression intraoculaire de l'œil atteint peut être élevée en raison d'une trabéculite, ou basse en cas de cyclite associée.
La sémiologie cornéenne, la rapidité d'évolution des lésions et la présence de facteurs de risque permettent parfois au clinicien d'évoquer un diagnostic microbiologique (fig. 21-1,
Fig. 21-1
Kératite à Staphylococcus aureus Kératite bactérienne à Staphylococcus aureus Staphylococcus aureus .
Facteur de risque : port de lentilles de contact. Abcès rond gris blanc de petites dimensions et à bords nets situé dans l'axe optique, hypopion réactionnel.
fig. 21-2,
Fig. 21-2
Kératite à Streptococcus pneumoniae Kératite bactérienne à Streptococcus pneumoniae Streptococcus pneumoniae .
Facteur de risque : traumatisme cornéen tellurique (caillou). Abcès suppuratif et nécrotique transfixiant et de grandes dimensions.
fig. 21-3,
Fig. 21-3
Kératite à Pseudomonas aeruginosa Kératite bactérienne à Pseudomonas aeruginosa Pseudomonas aeruginosa .
Facteur de risque : port de lentilles de contact. Vaste et profonde infiltration stromale centrale suppurative d'évolution rapide, œdème périlésionnel important, sécrétions purulentes.
fig. 21-4,
Fig. 21-4
Kératite à Moraxella spp Kératite bactérienne à Moraxella Moraxella .
Facteurs de risque : port de lentilles de contact, blépharite chronique, sécheresse oculaire. Infiltrat et œdème stromaux, hypopion réactionnel.
fig. 21-5,
Fig. 21-5
Kératite à Klebsiella pneumoniae Kératite bactérienne à Klebsiella pneumoniae Klebsiella pneumoniae .
Facteur de risque : port de lentilles de contact. Hypopion réactionnel, ulcération épithéliale, infiltration stromale, œdème, néovascularisation cornéenne périphérique.
fig. 21-6,
Fig. 21-6
Kératite à Mycobacterium abcessus Kératite bactérienne à Mycobacterium abcessus Mycobacterium abcessus .
Facteur de risque : traumatisme cornéen. Infiltrat duveteux, ulcère épithélial, évolution chronique.
fig. 21-7
Fig. 21-7
Kératite à Neisseria gonorrhoeae Kératite bactérienne à Neisseria gonorrhoeae Neisseria gonorrhoeae .
Facteur de risque : infection sexuellement transmissible. Perforation cornéenne supérieure.
), mais seul le grattage cornéen permet, en isolant la (les) bactérie(s) en cause, de porter un diagnostic de certitude.
L'examen clinique initial est capital pour déterminer les modalités de prise en charge du patient qui reposent sur la présence ou l'absence de critères de gravité au moment de l'évaluation initiale. Les critères de gravité peuvent être locaux ou généraux (tableau 21-2
Tableau 21-2
Critères de gravité d'une kératite bactérienne *.
Critères locauxCritères généraux
  • • Règle des « 1-2-3» : abcès ou kératite
  • - accompagné d'un effet Tyndall > 1+
  • - de diamètre > 2 mm
  • - situé à moins de 3 mm de l'axe optique
  • • Sclérite ou endophtalmie ou cellulite associée
  • • Atteinte du stroma postérieur, fonte stromale, perforation imminente ou avérée
  • • Aggravation malgré un traitement antibiotique empirique à large spectre, passage à la chronicité
  • • Infections bilatérales ou infiltrats multiples
  • • Kératite neurotrophique
  • • Kératoconjonctivite sèche sévère
  • • Patient monophtalme
  • • Enfant
  • • Immunodéprimé
  • • Mauvaise observance du traitement
  • • Opéré récent
*Ces critères peuvent être locaux ou généraux. On retiendra volontiers la règle des 1-2-3 : tout abcès de cornée s'accompagnant d'une réaction de chambre antérieure (> 1+ d'effet Tyndall) et/ou mesurant plus de 2 mm de diamètre et/ou situé à moins de 3 mm de l'axe optique sera considéré comme « grave». La plupart de ces critères correspondent également aux critères d'hospitalisation, de réalisation d'un grattage cornéen, et de traitement antibiotique renforcé.
). Ils correspondent aux critères communément admis de réalisation d'un examen microbiologique, de prescription de traitement anti-infectieux renforcé et de surveillance hospitalière.
Diagnostic microbiologique
La majorité des infections cornéennes non virales observées en Europe et Amérique du Nord sont de nature bactérienne. Ces infections guérissent sous traitement antibiotique empirique et ne nécessitent pas d'examen microbiologique lorsqu'elles ne comportent pas de critères de gravité, ni de signes atypiques.
Il est en revanche vivement conseillé de réaliser un examen microbiologique dans les circonstances suivantes :
  • kératite présumée bactérienne comportant des critères de gravité;
  • présence de signes atypiques ou de facteurs de risque faisant suspecter une kératite amibienne, une kératite fongique, une nécrose herpétique, une infection à Nocardia, Chlamydia, Neisseria, Microsporidia , mycobactérie atypique.
L'examen microbiologique permet ainsi d'identifier et de tester la sensibilité aux antibiotiques de la ou des bactéries responsables de l'infection (voir chapitre 6), et d'éliminer les diagnostics différentiels infectieux et non infectieux.
Le grattage cornéen est le prélèvement de référence. Il est contributif dans 50 % à 75 % des cas [18 , 19].
Les cultures effectuées à partir des lentilles ou des boîtiers peuvent s'avérer utiles lorsque l'agent pathogène n'est pas isolé par le grattage cornéen.
Le soulèvement du capot au bloc opératoire est nécessaire pour réaliser un prélèvement de l'interface en cas d'infection cornéenne post-LASIK.
La mise en culture d'un fil de suture cornéen infecté au moment de la prise en charge initiale peut être contributive.
Le frottis conjonctival n'a que peu d'intérêt diagnostique, sauf en cas de sécrétions importantes et de conjonctivite associée ( Neisseriae , Haemophilus , pneumocoque).
Sauf forte suspicion d'endophtalmie associée, la ponction de chambre antérieure est contre-indiquée, car l'hypopion est le plus souvent stérile et le geste ferait courir le risque d'une inoculation bactérienne dans la chambre antérieure.
Une biopsie de cornée peut être réalisée à l'aide d'un punch dermatologique de 2 à 3 mm de diamètre en cas d'infection profonde ne répondant pas au traitement anti-infectieux et non diagnostiquée par les grattages cornéens préalables, ou en cas de forte suspicion d'infection à mycobactéries atypiques, streptocoques oraux (kératite microcristalline) et autres pathogènes rares ou à croissance lente (champignons, Nocardia , Microsporidia ).
Le diagnostic microbiologique est parfois réalisé sur bouton cornéen, en cas de greffe à chaud, sur prélèvement vitréen en cas d'endophtalmie associée.
Imagerie cornéenne
L'examen de la cornée infectée par un microscope confocal in vivo (MCIV) est utile pour le diagnostic positif et le suivi évolutif des kératites amibiennes et à champignons filamenteux, mais ne permet pas d'identifier les bactéries dans le stroma cornéen.
La réalisation répétée de photographies de la cornée infectée à la lampe à fente est utile au suivi évolutif des lésions.
L'imagerie OCT de la cornée permet de quantifier la profondeur et le volume de l'infiltration stromale (zone hyper-réflective), l'épaisseur cornéenne résiduelle et l'éventuelle présence d'une plaque endothéliale (fig. 21-8
Fig. 21-8
OCT spectral domain cornéen OCT kératite bactérienne .
Abcès de cornée à Staphylococcus epidermidis, ulcère épithélial, œdème stromal hyperréflectif, amincissement stromal en regard de l'infiltrat (a). Abcès de cornée à Moraxella lacunata : amincissement stromal majeur (b).
).
Traitements médicaux
Une KB évoluant de façon aiguë constitue une urgence infectieuse. Le traitement a pour objectifs l'élimination de l'infection, la suppression de l'inflammation et de la douleur, l'obtention de la cicatrisation, la préservation de l'intégrité cornéenne et de la fonction visuelle.
Traitement antibiotique
Le traitement antibiotique par voie topique est débuté dès les prélèvements effectués. Il est adapté à la sévérité des lésions, à l'orientation clinique initiale et aux résultats de l'examen microbiologique direct (voir chapitre 10). L'hospitalisation en chambre seule est recommandée lorsqu'un ou plusieurs critères de gravité sont présents ou en cas de mauvaise compliance au traitement. Si le patient n'est pas hospitalisé, un suivi ambulatoire rapproché comprenant un examen ophtalmologique toutes les 24 à 48 heures est nécessaire.
Il n'existe pas de consensus national ou international concernant la nature des collyres antibiotiques à utiliser dans les KB, et le tableau 21-3
Tableau 21-3
Traitement des kératites bactériennes : exemples de protocoles antibiotiques *.
Kératites bactériennes menaçant la vision (critères de gravité locaux 1-2-3 présents) : associations de collyres renforcés (pharmacies hospitalières) dans le cadre d'une hospitalisation
  • • Ticarcilline (6,6 mg/ml) + gentamicine (15 mg/ml) + vancomycine (50 mg/ml)
  • • Ceftazidime (20 mg/ml) + vancomycine (50 mg/ml)
  • • Céfazoline (50 mg/ml) + tobramycine ou gentamicine (20 mg/ml)
  • • Céfazoline (50 mg/ml) + quinolone
  • • Kératites bactériennes ne menaçant pas immédiatement la vision (critères 1-2-3 absents) : associations de collyres d'officine.
  • • Suivi ambulatoire rapproché
  • • Quinolone ± aminoside
  • • Quinolone ± rifamycine
*Quel que soit l'antibiotique prescrit, renforcé ou non, une « dose de charge» (instillations répétées toutes les 5 à 10 minutes la première heure de traitement) permet d'obtenir rapidement des concentrations cornéennes satisfaisantes. Le respect d'un intervalle de 5 minutes entre chaque instillation de collyre est nécessaire. Les collyres sont ensuite prescrits à la posologie d'une goutte par heure pendant 48 heures. L'utilisation de pommades antibiotiques est à éviter à la phase aiguë de l'infection pour ne pas diminuer la pénétration des collyres. Néanmoins, cette forme galénique a pour avantage d'augmenter le temps de contact cornéen et est particulièrement utile chez l'enfant ou en application nocturne, une fois l'infection contrôlée.
donne quelques protocoles à titre indicatif [ 1 , 14 , 20-21-22]. L'irrigation de l'interface par des antibiotiques au moment de la réalisation des prélèvements microbiologiques est nécessaire en cas d'infection post-LASIK ou post-SMILE. Les kératites à mycobactéries atypiques requièrent une trithérapie antibiotique prolongée associant, selon les données de l'antibiogramme, aminoside, macrolide, fluoroquinolone collyres, et éventuellement un traitement par voie orale (azithromycine ou doxycycline) [23]. Les kératites à Nocardia sont sensibles à l'amikacine et à l'association triméthoprime-sulfaméthoxazole. Les kératites à Moraxella peuvent être traitées par fluoroquinolones et aminosides; toutefois, un traitement prolongé est souvent nécessaire [ 24].
Des injections sous-conjonctivales d'antibiotiques peuvent être utiles en cas d'atteinte avancée (sclérite, risque de perforation) ou de mauvaise compliance au traitement (voir chapitre 14 ).
Les antibiotiques systémiques sont utiles par voie orale ou intraveineuse en cas d'extension sclérale, intraoculaire ou intraorbitaire de l'infection, ou en cas d'infection à gonocoque ou Chlamydia .
Mesures adjuvantes
  • L'arrêt du port de lentilles de contact et celui d'éventuels corticoïdes topiques prescrits/utilisés avant la prise en charge sont à effectuer.
  • Le traitement simultané ou différé d'une pathologie chronique de surface oculaire et la prise en charge d'une immunodépression systémique associée sont à prévoir.
  • Le lavage quotidien du visage au savon ainsi que le lavage des mains avec une solution hydroalcoolique sont nécessaires avant l'instillation des collyres.
  • L'arrêt du tabac est conseillé.
  • Des lavages oculaires pluriquotidiens avec une solution de NaCl à 0,9 % permettent d'éliminer les sécrétions et les médiateurs inflammatoires présents à la surface oculaire.
  • Le débridement régulier de l'ulcère permet de diminuer la charge infectieuse, d'éliminer le matériel nécrotique et d'augmenter la pénétration des anti-infectieux.
  • D'autres collyres peuvent être administrés si nécessaire : traitement anti-amibien ou antifongique en cas de co-infection, collyre cycloplégique à visée antalgique (en l'absence de contre-indication, en association avec des antalgiques oraux) et de prévention des synéchies, collyre hypotonisant en cas d'hypertonie oculaire.
  • Des tétracyclines par voie orale peuvent être prescrites en cas de fonte stromale (effet anticollagénase).
  • Les corticoïdes peuvent être bénéfiques dans la prise en charge des KB. Ils permettent de limiter la réponse inflammatoire de l'hôte qui engendre la destruction du tissu cornéen et génèrent des cicatrices pénalisantes sur le plan visuel. Les inconvénients potentiels comportent : une recrudescence possible de l'infection, une immunodépression locale, des complications à type de fonte stromale (inhibition de la synthèse du collagène), de glaucome ou de cataracte. Au regard des études expérimentales et cliniques disponibles [25], la plupart des spécialistes de la cornée utilisent les corticoïdes topiques afin de limiter les séquelles associées à la KB [ 14 , 26- 27- 28]. Ceux-ci sont à débuter après quelques jours de traitement antibiotique et dans quatre circonstances bien définies : 1) contrôle clinique de l'infection bactérienne (signes et symptômes avec notamment début de réépithélialisation); 2) bactérie identifiée par grattage cornéen; 3) absence de facteurs de risque ou d'arguments microbiologiques en faveur d'une co-infection amibienne, fongique ou virale; 4) absence de fonte stromale ou de risque perforatif. Une surveillance stricte est alors nécessaire en raison du risque de réactivation infectieuse et de retard de cicatrisation épithéliale. Dans notre pratique, le traitement est débuté après 48 heures en cas de bactérie à Gram positif identifiée, entre 3 et 7 jours – selon le niveau de gravité – en cas de bactérie à Gram négatif. Une surveillance rapprochée est nécessaire au moment de leur introduction. Les corticoïdes sont en revanche contre-indiqués à la phase précoce des infections fongiques, amibiennes et nocardiennes. Ils sont déconseillés en cas d'infection à mycobactérie atypique.
L'information du patient concernant le ou les facteur(s) de risque en cause et le pronostic anatomique et visuel de l'infection, ainsi que son éducation à la compliance aux soins et aux méthodes de prévention d'une récidive sont essentielles.
Suivi et évolution
L'antibiothérapie initiale (nature des molécules, fréquence d'installation) est modifiée en fonction de l'évolution clinique (efficacité/tolérance), des résultats de l'examen microbiologique (direct/culture) et de l'antibiogramme. Il est souhaitable de conserver au moins deux antibiotiques actifs sur la bactérie identifiée. La fréquence d'instillation des antibiotiques est généralement diminuée après 48 heures en raison de leur mauvaise tolérance locale (douleurs à l'instillation) et de l'apparition de phénomènes de toxicité (kératite ponctuée, retard ou absence de cicatrisation épithéliale). Il n'existe pas de consensus sur la durée du traitement antibiotique; celle-ci est d'environ 2 semaines pour les KB peu sévères, 4 semaines voire plus pour les cas plus sévères.
La surveillance évolutive est fondée sur l'examen clinique de trois paramètres : infection, inflammation, cicatrisation cornéenne. En pratique, l'acuité visuelle, l'intensité des signes fonctionnels (douleurs), l'infiltrat (densité, limites, dimensions, profondeur), l'œdème, l'amincissement stromal éventuel, l'état de l'épithélium cornéen et le degré d'inflammation (cornéenne, conjonctivale, palpébrale et camérulaire) et la présence ou non de sécrétions sont à réévaluer de façon bi- ou triquotidienne pendant toute la durée d'hospitalisation du patient. Les photographies à la lampe à fente et l'imagerie OCT sont utiles au suivi.
En cas de sensibilité du germe au traitement, une amélioration doit survenir dans les 24 à 48 heures. On observe alors une réépithélialisation de la surface de l'infiltrat dont la densité, la profondeur et la surface diminuent, une régression de l'inflammation palpébrale, conjonctivale et de la chambre antérieure, des sécrétions ainsi que des signes fonctionnels. L'évolution dépend de la charge et de la virulence bactérienne, mais aussi des moyens de défense du patient. L'évolution est plus lente et le pronostic visuel plus mauvais pour les bactéries à Gram négatif, les pneumocoques et Staphylococcus aureus . Une tendance à l'aggravation des lésions cornéennes est même possible pendant les 48 premières heures, malgré un traitement antibiotique efficace, en cas d'infection à Pseudomona aeruginosa .
En l'absence d'amélioration (persistance, progression centrifuge et en profondeur de l'infiltration stromale, aggravation de l'ulcère épithélial, progression de l'amincissement cornéen, atteinte ou majoration de l'inflammation de chambre antérieure, persistance/augmentation des signes fonctionnels), les possibilités suivantes sont à envisager :
  • mauvaise compliance au traitement;
  • l'agent infectieux initial ou un autre agent responsable de co-infection (autre bactérie, virus, champignon, amibe) persiste malgré le traitement antibiotique. Une fenêtre thérapeutique de 12 à 24 heures est alors programmée et les prélèvements sont à nouveau effectués, avec si besoin de nouvelles colorations et un ensemencement de milieux spéciaux pour la recherche d'agents pathogènes non bactériens (amibe, champignon, virus) ou de bactéries atypiques (mycobactérie, Nocardia , Chlamydia selon contexte). Le traitement anti-infectieux est ensuite adapté en fonction des résultats des nouveaux prélèvements;
  • les collyres renforcés provoquent une toxicité locale qui entraîne un retard de cicatrisation cornéenne. Plusieurs solutions sont envisageables : réduire la posologie des collyres renforcés, les remplacer par des collyres d'officine (après vérification de l'antibiogramme), utiliser des collyres mouillants;
  • l'inflammation évolue pour son propre compte et est responsable de la persistance des signes. Le fond de l'ulcère est à débrider. L'introduction des collyres corticoïdes ou l'augmentation de leur fréquence d'instillation est alors souhaitable;
  • le facteur de risque prédisposant à la KB demeure non contrôlé.
Traitements chirurgicaux
Un geste chirurgical est parfois nécessaire en cas d'échec du traitement anti-infectieux à éradiquer l'agent ou les agents pathogène(s), ou si la vision est menacée ou réduite par l'infection aiguë (perforation cornéenne, extension intraoculaire de l'infection) ou bien par ses séquelles (perte de transparence, irrégularité de la surface cornéenne) [ 29 , 30]. Ces interventions sont à discuter au cas par cas (voir chapitre 34 ).
Quelques cas de fontes stromales septiques résistantes au traitement anti-infectieux ont été traités avec succès par cross-linking cornéen [ 31]. Cette procédure est cependant encore en cours d'évaluation [32].
Pronostic
Le pronostic général des KB s'améliore depuis quelques décennies grâce aux progrès thérapeutiques qui permettent un meilleur contrôle de l'infection et de l'inflammation. Il dépend :
  • du score de gravité initial (perte de vision, volume et localisation de l'infiltrat, état de la chambre antérieure);
  • de la virulence du pathogène en cause. Le pronostic visuel est plus mauvais pour les infections à bactéries à Gram négatif. Les infections polymicrobiennes bactéries/champignons sont de plus mauvais pronostic que les infections bactériennes pures;
  • de la précocité, de l'efficacité et de la tolérance du traitement;
  • de la réponse inflammatoire de l'hôte et de ses capacités de cicatrisation, volontiers altérées chez le patient âgé [ 33];
  • de la persistance ou non du (des) facteur(s) de risque impliqué(s) dans la survenue de l'infection;
  • de la qualité du suivi clinique.
Le port de lentilles de contact, pourtant facteur de risque principal des séries de KB sévères nécessitant l'hospitalisation, n'est pas à considérer comme un facteur de mauvais pronostic. En revanche, l'âge avancé, la présence d'antécédents d'immunodépression systémique ou d'une pathologie chronique de la surface oculaire le sont [33].
En pratique, 92 % à 98 % des kératites bactériennes prises en charge en milieu hospitalier évoluent vers la guérison sous traitement médical; 60 % à 85 % des patients recouvrent une acuité visuelle supérieure à l'acuité visuelle de prise en charge initiale; 35 % perdent entre 1 et 3 lignes de meilleure acuité visuelle corrigée, et 5 % perdent plus de 4 lignes [ 4 , 34]. Les mécanismes de perte de vision sont les suivants : opacification et/ou irrégularité et/ou néovascularisation cornéenne, cataracte secondaire ou glaucome secondaire. L'intégrité anatomique de l'œil peut être menacée par la survenue d'une perforation cornéenne, d'une endophtalmie, d'une cellulite orbitaire ou d'une phtyse. Ces pertes de vision plus ou moins importantes sont de façon non surprenante à l'origine d'une baisse de qualité de vie [35].
Les cas défavorables sont aujourd'hui relativement rares, estimés à moins de 2 %. Ils concernent surtout certaines infections à Staphylococcus aureus (notamment en cas de polyarthrite rhumatoïde ou de sécheresse oculaire sévère) , à Pseudomonas aeruginosa chez les porteurs de lentilles traités d'emblée par corticoïdes, ou certaines infections à Neisseria dans le cadre d'une infection sexuellement transmissible.
Conclusion
La majorité des kératites bactériennes (KB) sont résolutives sous traitement médical à condition de détecter l'infection précocement, d'effectuer un examen microbiologique lorsque cela est indiqué, et de traiter infection et inflammation de façon adaptée tout en contrôlant le(s) facteur(s) de risque associé(s) et en évitant la iatrogénie. L'éducation et l'information des patients porteurs de lentilles de contact tiennent une place essentielle dans la prévention des KB.
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