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Chapitre 7
Diagnostic microbiologique d'une infection virale de surface oculaire

S. Burrel, D. Boutolleau

Introduction
La surface oculaire est la partie de l'œil au contact de l'extérieur, englobant le bord libre des paupières, la conjonctive, la cornée et les glandes lacrymales. Les infections de la surface oculaire peuvent se présenter sous la forme de conjonctivites, de kératites et de blépharites. Tandis que les kératites sont assorties d'un mauvais pronostic visuel (conséquences fonctionnelles potentiellement irréversibles), les conjonctivites et les blépharites, prépondérantes sur le plan épidémiologique, sont généralement associées à des manifestations cliniques moins sévères. Ces infections peuvent être virales, bactériennes, plus rarement fongiques ou parasitaires. Les virus les plus fréquemment incriminés dans les pathologies sévères de la surface oculaire sont dominés par la famille des Herpesviridae et les adénovirus (voir chapitre 2 ) [1 , 2]. Ils regroupent un vaste ensemble de virus mais, en pratique, ce sont principalement le virus herpes simplex 1 (HSV-1) et le virus de la varicelle et du zona (VZV) qui sont responsables des pathologies oculaires. Le diagnostic des atteintes oculaires est souvent clinique, puisque les signes cliniques sont souvent très évocateurs et la sévérité incite fréquemment à la mise en route d'un traitement en urgence sans attendre une preuve étiologique. Cependant, une confirmation virologique est toujours souhaitable, car elle peut impacter la prise en charge à long terme. La mise en évidence du génome viral sur prélèvement oculaire a largement supplanté les autres techniques diagnostiques [3-4-5].
Dans ce chapitre seront abordés les types de prélèvements ainsi que les méthodes de diagnostic et de suivi virologiques appliquées dans le contexte des atteintes oculaires virales.
Les types de prélèvements pour la réalisation du diagnostic virologique
Les étapes précédant l'analyse virologique proprement dite sont essentielles pour la réussite du diagnostic. Elles consistent à définir précisément la nature de l'échantillon biologique à étudier, le moyen et le moment les plus favorables pour le prélèvement. La qualité de l'échantillon doit être préservée par des conditions de transport et de stockage appropriées. L'identification de l'échantillon, la nature de l'examen demandé et les renseignements cliniques accompagnant la demande sont indispensables et doivent être parfaitement explicites [3 , 4]. En ce qui concerne le moment de recueil de l'échantillon, la règle est celle d'un prélèvement précoce dès le début des signes cliniques et la suspicion d'une étiologie virale et, a fortiori, avant la prise d'antiviraux (un prélèvement sous antiviraux reste néanmoins intéressant si une résistance est suspectée). Conservation et transport doivent préserver la qualité du prélèvement en vue du diagnostic et de la sécurité des manipulateurs et de la collectivité. On utilise des emballages protecteurs adaptés à la dangerosité présumée du virus suspecté [3 , 4].
La règle générale est le transport immédiat au laboratoire. Si ce n'est pas possible, les échantillons en attente doivent être conservés et transportés de façon différée selon des modalités qui dépendent de l'examen et des virus recherchés. Les prélèvements destinés à la recherche d'anticorps, d'antigènes extracellulaires, d'acide désoxyribonucléique (ADN) viral, qui sont des éléments robustes, peuvent être conservés à +4 °C pendant plusieurs jours et transportés à température ambiante. En revanche, les prélèvements destinés à la recherche de virus infectieux par culture (surtout s'il s'agit de virus enveloppés), d'antigènes intracellulaires, d'acide ribonucléique (ARN) viral, qui sont beaucoup plus fragiles, ne tolèrent pas de tels délais, et doivent être transportés rapidement et en respectant la chaîne du froid (+4 °C).
L'identification de l'échantillon et la nature de la demande doivent être très précises, car un diagnostic biologique efficace repose sur une collaboration étroite entre le clinicien et le biologiste. Ces renseignements sont absolument indispensables pour définir le degré d'urgence, situer le moment du prélèvement dans l'histoire clinique, tenir compte d'un contexte particulier (immunodépression, grossesse, traitement antiviral, vaccination, contexte épidémique), choisir la technique la mieux adaptée à la demande, interpréter les résultats et proposer d'autres examens.
Les écouvillonnages de conjonctive ou de cornée et le grattage cornéen restent les types de prélèvement les plus employés pour un recueil optimal pour l'analyse par biologie moléculaire pour le diagnostic virologique (tableau 7-1
Tableau 7-1
Types de prélèvements biologiques pour le diagnostic virologique des infections oculaires virales de surface.
Infections oculaires virales de surface Prélèvement à visée diagnostique
Blépharite
  • - Écouvillonnage de lésions
  • - Biopsie si tumeur palpébrale
Conjonctivite
  • - Écouvillonnage de la conjonctive
  • - Prélèvement de larmes (par exemple bandelette de Schirmer)
Kératite superficielle
  • - Écouvillonnage/grattage de la cornée
  • - Prélèvement de larmes (par exemple bandelette de Schirmer)
Kératite stromale
  • - Prélevement de larmes (par exemple bandelette de Schirmer), mais sensibilité faible
  • - Biopsie cornéenne lamellaire
Kératite endothéliale
  • - Prélevement de larmes (par exemple bandelette de Schirmer), mais sensibilité faible
  • - Ponction d'humeur aqueuse en chambre antérieure
) [3-4-5]. Toutefois, ces prélèvements ne sont pas toujours adaptés à la présentation clinique et peuvent être délicats à réaliser sur des cornées fragilisées. Le prélèvement lacrymal à l'aide de bandelettes de Schirmer constitue une alternative intéressante, car simple et non invasive [ 6 , 7], mais sa sensibilité est moindre que les grattages cornéens [8]. Le recueil de larmes sur une bandelette placée dans le cul-de-sac conjonctival inférieur a montré de bonnes performances diagnostiques. Pour éviter la dessiccation, les écouvillons ou les grattages sont placés dans un milieu de transport qui recueille et protège les cellules ainsi que les particules virales. La bandelette de Schirmer doit être placée dans un tube sec, humidifiée à l'aide d'une goutte de sérum physiologique, puis adressée à un laboratoire de virologie spécialisé pour analyse [ 7].
Les méthodes diagnostiques virologiques et leur utilisation dans le contexte des infections oculaires virales de surface
Diagnostic direct ou indirect d'une infection virale : les grands principes
Il existe deux approches générales pour le diagnostic virologique : le diagnostic direct et le diagnostic indirect [ 3 , 4] (fig. 7-1
Fig. 7-1
Différentes approches diagnostiques des infections oculaires virales de surface.
Le diagnostic virologique des infections oculaires virales de surface repose sur deux types d'approches : le diagnostic direct Diagnostic virologique direct (isolement du virus ou détection d'un composant viral) et le diagnostic indirect Diagnostic virologique indirect (détection d'une réponse humorale spécifique contre les virus de type anticorps; communément appelée analyses de sérologies virales). La réaction immunitaire cellulaire ou inflammatoire générale peut également être étudiée pour compléter le diagnostic virologique. ELISA : enzyme-linked immunosorbent assay (réaction immunoenzymatique sur support solide); IFN : interféron.
). La première consiste en la détection de la particule virale ou de certains de ses composants dans les fluides biologiques ou les tissus. La seconde, encore appelée diagnostic sérologique ou sérodiagnostic, consiste en la détection dans le sérum, ou un autre fluide biologique, d'anticorps produits par l'organisme infecté et spécifiquement dirigés contre le virus en cause. Ces deux approches sont complémentaires, n'apportent pas les mêmes informations et ne doivent pas être systématiquement pratiquées ensemble, afin d'éviter les examens inadaptés ou redondants. Schématiquement, le diagnostic indirect est plus simple dans sa réalisation. De fait, le sérum est facile à obtenir et à conserver pendant quelques heures à température ambiante, quelques jours à +4 °C, plusieurs années à −20 °C. Les procédures de détection des anticorps, fondées principalement sur des techniques immunoenzymatiques, sont en général bien automatisées et étalonnées. Pour le diagnostic direct, les échantillons biologiques peuvent être de nature plus variée et exigent, d'une façon générale, plus de précautions que le sérum pour leur prélèvement, leur transport et leur conservation.
Méthodes permettant un diagnostic direct
Identification d'un virus par isolement de la souche en culture de cellules
Pour l'isolement viral en culture cellulaire, l'infectiosité des virus libres et la viabilité des cellules infectées présentes dans l'échantillon doivent être préservées [3 , 4 , 9]. De même, pour la recherche de composants viraux in situ dans un échantillon cellulaire, il faut préserver la structure et la morphologie des cellules présentes. La reconnaissance d'une infection virale oculaire active passe le plus souvent par des tests qualitatifs avec une réponse exprimée en termes de positivité, de négativité ou d'indétermination (par exemple présence d'inhibiteurs dans l'échantillon clinique perturbant l'analyse par biologie moléculaire).
L'isolement viral en culture cellulaire permet d'identifier le virus responsable de l'infection et d'obtenir la souche virale pour en étudier les caractéristiques, si nécessaire [3 , 4 , 9]. Après inoculation du prélèvement sur des cellules permissives, la multiplication virale se traduit par l'apparition d'un effet cytopathique (ECP), qui correspond à l'ensemble des modifications cellulaires caractéristiques observables en microscopie optique (fig. 7-2
Fig. 7-2
Effet cytopathique Effet cytopathique (ECP) des virus herpes simplex (HSV) en culture de cellules.
Les cellules épithéliales de rein de singe (Vero) sont permissives aux HSV. Initialement, les cellules sont adhérentes et apparaissent confluentes en nappe lorsqu'elles ne sont pas infectées (a). L'ECP des HSV, rapidement observable, est fait de cellules ballonisées et réfringentes (grossissement ×40) (b).
) [3]. Cependant, l'ECP peut être absent ou peu visible et certains virus ne se multiplient pas en culture cellulaire. L'isolement viral en culture cellulaire présente des avantages : preuve de la présence d'un virus réellement infectieux, possibilité de caractériser précisément une souche virale et de tester sa sensibilité aux antiviraux par des méthodes phénotypiques (voir plus loin le paragraphe « Suivi virologique…» ). Cependant, cette méthode a également des inconvénients : durée souvent longue, difficultés techniques incluant la cytotoxicité de certains prélèvements, contaminations bactériennes ou fongiques, risque infectieux lié à l'amplification du virus, sensibilité générale de la méthode plus faible en comparaison avec la biologie moléculaire et nécessité d'avoir à disposition un ensemble de cellules permissives selon les virus recherchés. Ces inconvénients expliquent que l'isolement viral en culture cellulaire est actuellement délaissé au profit des méthodes de diagnostic moléculaire.
Identification d'un virus par détection des acides nucléiques viraux
Le diagnostic virologique moléculaire consiste à détecter, voire à quantifier et caractériser, le génome viral (ADN ou ARN) dans les prélèvements biologiques. La technique la plus utilisée d'amplification génique est la polymerase chain reaction (PCR) qui permet, grâce une enzyme, d'amplifier in vitro, de façon cyclique et exponentielle, un fragment d'ADN cible. Si la cible est de l'ARN (génome viral ou transcrits viraux), une étape de transcription inverse (par une reverse transcriptase [RT]) est alors indispensable pour obtenir une matrice ADN simple brin complémentaire avant l'amplification (technique de transcription inverse-PCR [RT-PCR]). Dans les deux cas (PCR ou RT-PCR), une extraction préalable des acides nucléiques (ADN ou ARN, respectivement) est indispensable pour rendre les acides nucléiques viraux accessibles aux amorces et aux enzymes de l'amplification génique.
La PCR dite en « temps réel» permet la révélation des produits amplifiés (amplicons) au fur et à mesure de leur synthèse par hybridation à l'aide de sondes marquées par des fluorochromes. La PCR en temps réel est non seulement plus rapide, mais elle permet également, si une gamme de quantification est incluse, de quantifier les acides nucléiques viraux présents dans l'échantillon clinique initial. L'ajout d'un contrôle interne au prélèvement initial permet de limiter le risque de rendu de résultats faussement négatifs (par exemple présence d'inhibiteurs dans les prélèvements). La technique de PCR en temps réel peut donc être à la fois qualitative et quantitative, et affiche de remarquables performances : sensibilité, spécificité, reproductibilité, large gamme de linéarité du signal, rapidité d'obtention des résultats, prévention des contaminations par l'ADN amplifié du fait de l'absence d'ouverture du tube réactionnel après amplification.
Les méthodes de PCR multiplexe consistent en la détection du génome de plusieurs virus dans la même réaction à partir du même échantillon grâce à la combinaison de plusieurs couples d'amorces/sondes choisis en fonction des virus ciblés [3]. Ces analyses de biologie moléculaire dans le contexte des infections oculaires virales de surface permettent d'objectiver une infection aiguë. En pratique, cela consiste donc à réaliser une PCR de détection virale sur écouvillon (paupières, conjonctive, cornée), grattage de cornée ou bandelette de Schirmer.
Identification d'un virus par détection des antigènes viraux
Le principal moyen de détection des protéines virales consiste en la reconnaissance de leurs propriétés antigéniques par des anticorps de référence. La détection des antigènes viraux est robuste, rapide et, en règle générale, très spécifique, mais elle peut manquer de sensibilité. Les tests immunochomatographiques permettent de détecter rapidement des virus dans certains prélèvements biologiques (par exemple les virus influenza dans un prélèvement respiratoire ou les adénovirus dans les larmes). Toutefois, ces tests généralement peu sensibles sont à réserver aux prélèvements riches en antigènes viraux (comme en période aiguë de conjonctivite adénovirale – voir la discussion dans le chapitre 20 sur les conjonctivites virales) et ne sont pas utilisés dans le cadre des autres causes d'infections de la surface oculaire, ni d'ailleurs pour les infections virales intraoculaires.
Méthodes permettant un diagnostic indirect
La présence d'anticorps (immunoglobulines G [IgG] et IgM) signe le contact récent ou ancien avec le virus correspondant. Elle suffit, après sa mise en évidence sur un seul échantillon, à définir le statut immunitaire de l'individu vis-à-vis du virus correspondant [3]. Ces anticorps peuvent être détectés dans le sérum et dans d'autres liquides biologiques, dont l'humeur aqueuse et le vitré (voir chapitres 45 et 51), ou encore théoriquement les larmes, mais il n'y a pour l'instant pas d'application clinique pour cette dernière éventualité.
La détection d'anticorps antiviraux spécifiques ne suffit pas, dans de nombreux cas, pour déterminer l'ancienneté de l'infection et son rôle dans la maladie observée, par exemple dans le cadre des kératites herpétiques [10]. La quantification du titre des anticorps donne des informations supplémentaires, mais c'est la cinétique du titre des anticorps sur des sérums successifs qui permet le plus souvent de définir le profil de l'infection. La séroconversion est, en général, synonyme de primo-infection (c'est-à-dire l'apparition des IgG en parallèle de la disparition des IgM). Si la présence d'IgM est classiquement synonyme d'une primo-infection, les IgM peuvent réapparaître lors de réactivations dans de nombreuses infections chroniques. Les analyses de sérologie virale dans le contexte des infections oculaires virales permettent d'objectiver le statut immunitaire de l'individu; en revanche, affirmer une infection récente ou aiguë ou évolutive sur les seuls résultats d'un sérodiagnostic reste difficile voire impossible [3-4-5].
Suivi virologique de l'efficacité des thérapeutiques antivirales
Quand doit-on demander des analyses virologiques particulières au cours du suivi d'une infection virale de la surface oculaire?
Les antiviraux actuellement disponibles sur le marché français pour les maladies oculaires, qu'ils soient topiques ou systémiques, ne sont actifs que sur certains herpèsvirus (HSV-1, VZV et le cytomégalovirus [CMV]). La prise en charge thérapeutique des infections virales de la surface oculaire par le HSV-1 ou le VZV repose soit sur une application topique d'antiviraux (trifluridine, aciclovir ou ganciclovir), soit sur une prise systémique (aciclovir par voie intaveineuse de façon exceptionnelle, nettement plus souvent son promédicament oral, le valaciclovir, ou le famciclovir; voir chapitre 12 ). En cas d'échec de toutes ces mesures, le foscarnet peut aussi être proposé par voie intraveineuse [11 , 12]. Des agents régénérants de la cornée peuvent également compléter la prise en charge thérapeutique [13]. L'émergence d'une souche virale résistante aux traitements antiviraux antérieurs doit être suspectée en cas de récurrences trop fréquentes sous traitement préventif bien conduit, ou devant une résistance clinique d'une récente poussée à un traitement antiviral à doses habituellement efficaces [14-15-16].
Comment identifier une résistance au traitement antiviral?
Le diagnostic de la résistance des herpèsvirus aux antiviraux nécessite des techniques virologiques spécifiques et conditionne le choix des traitements antiviraux de seconde intention. Cette résistance est diagnostiquée grâce à la caractérisation du phénotype du virus si son isolement en culture cellulaire a été possible (tests phénotypiques), ou grâce à la mise en évidence, par analyse génétique, de mutations de résistance dans les gènes codant les enzymes virales qui sont les cibles des antiviraux (tests génotypiques) [16-17-18-19] (fig. 7-3
Fig. 7-3
Méthodes de diagnostic de la résistance des virus aux antiviraux.
a. Test phénotypique Antiviraux résistance aux tests phénotypiques . Les virus à tester ont été obtenus par isolement en culture cellulaire. La multiplication virale est mesurée en présence de différentes concentrations d'antiviral, par exemple dans les puits d'une plaque de culture (chaque concentration est testée plusieurs fois pour augmenter la précision). Les courbes de multiplication (courbes effet-dose) permettent de calculer les concentrations efficaces 50 % (CE50) pour chacun des virus. La résistance du virus 2 se traduit par une augmentation de sa CE50 par rapport au virus 1 (sensible). b. Test génotypique Antiviraux résistance aux tests génotypiques . Après extraction du génome viral directement à partir du prélèvement biologique, les gènes viraux d'intérêt (codant les protéines cibles des antiviraux) sont amplifiés et séquencés. L'identification des éventuelles mutations de résistance est effectuée par comparaison des séquences nucléotidiques obtenues à des séquences nucléotidiques de référence correspondant à des virus sensibles aux antiviraux.
).
  • Les tests phénotypiques (encore appelés antivirogrammes) permettent de mesurer in vitro la multiplication d'un virus exposé à différentes concentrations d'antiviral à l'aide de différentes techniques : lecture d'ECP, utilisation de colorants vitaux, quantification d'antigènes ou de génome du virus [3 , 15 , 17]. Ces tests phénotypiques se heurtent toutefois à plusieurs difficultés : nécessité de disposer de la souche virale du patient, absence de standardisation et long délai de rendu de résultat.
  • Les tests génotypiques présentent les avantages de pouvoir être réalisés directement à partir du prélèvement biologique, sans nécessité d'isoler le virus en culture de cellules, et de fournir le résultat dans un délai de quelques jours [ 3 , 15 , 17]. Toutefois, pour certains virus, toutes les mutations associées à la résistance aux antiviraux ne sont pas encore connues. La technique Sanger permet de déterminer la séquence de la population virale majoritaire présente dans un échantillon biologique, les variants viraux, représentant moins de 15 % à 20 % de la population virale totale, n'étant pas détectables par cette technologie. Grâce à l'innovation des techniques de séquençage haut débit (ou next-generation sequencing [NGS]), il est devenu possible d'accéder à ces populations virales minoritaires [1 , 20 , 21]. Le NGS permet en outre de ne plus limiter l'analyse de séquence à une région restreinte du génome (comme avec la technique Sanger), mais d'avoir accès à la séquence de l'ensemble du génome viral [ 1].
Conclusion
Le but de l'investigation en laboratoire de virologie est de confirmer ou d'infirmer le diagnostic clinique des infections oculaires virales. Cependant, les caractéristiques cliniques peuvent varier considérablement et aucune caractéristique clinique formelle ne peut être pathognomonique d'un agent viral particulier. Heureusement, les antiviraux disponibles dans les pathologies de la surface oculaire nous permettent de traiter de façon efficace presque toutes les infections d'origine herpétique. En raison de leurs extrêmes sensibilité et spécificité, les techniques moléculaires, en particulier la PCR, sont actuellement les tests les plus utilisés pour le diagnostic et le suivi des infections virales oculaires de surface sur un prélèvement cornéen ou sur des larmes. D'autres analyses virologiques sont également essentielles pour le suivi de ces infections, notamment dans le cadre de l'émergence de la résistance aux antiviraux que l'on peut diagnostiquer par séquençage. Ainsi, l'expertise du clinicien et du virologue ainsi que les techniques disponibles déterminent le succès avec un diagnostic virologique précis des infections virales oculaires de surface.
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